21 mars 2023
Cour d’appel de Pau
RG n°
22/02412
JP/CS
Numéro 23/1072
COUR D’APPEL DE PAU
2ème CH – Section 1
ARRET DU 21 mars 2023
Dossier : N° RG 22/02412 – N° Portalis DBVV-V-B7G-IJZR
Nature affaire :
Demande en paiement des loyers et charges et/ou tendant à la résiliation du bail et/ou à l’expulsion
Affaire :
S.A. ODALYS
S.A.S. ODALYS RESIDENCES
C/
[I] [U]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R E T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 21 mars 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 24 janvier 2023, devant :
Jeanne PELLEFIGUES, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame SAYOUS, Greffière présente à l’appel des causes,
Jeanne PELLEFIGUES, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Philippe DARRACQ et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente
Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller
Madame Joëlle GUIROY, Conseillère
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANTES :
S.A. ODALYS
[Adresse 3]
[Localité 4]
S.A.S. ODALYS RESIDENCES
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentées par Me Nicolas LACOMME de la SELARL LACOMME AVOCAT, avocat au barreau de DAX
Assistées de Me BABOIN, avocat au barreau de Montpellier
INTIMEE :
Madame [I] [U]
née le 04 Septembre 1986 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Aurélie VIAL de la SELARL VIAL AVOCATS, avocat au barreau de DAX
sur appel de la décision
en date du 02 AOUT 2022
rendue par le PRESIDENT DU TJ DE DAX
Par ordonnance de référé du 2 août 2022, la présidente du tribunal judiciaire de DAX a :
– Reçu l’intervention volontaire de la société ODALYS RESIDENCES;
– Prononcé la nullité de l’assignation délivrée le 27 juin 2022 délivrée à la SA ODALYS immatriculée au RCS sous le numéro B 411 780 463;
– Constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail commercial du 24 juin 2004;
– Ordonné, a défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la signification de la présente ordonnance, l’expulsion de la société ODALYS RESIDENCES, de ses biens et de tout occupants de son chef des lieux situés dans la résidence les ‘[Adresse 9] (40), bien n°144, et ce, avec le concours éventuel de la force publique ;
– Condamné la société ODALYS RESIDENCES à payer à titre provisionnel à Madame [U] au titre des loyers, indemnités d’occupation ou charges dus au du 13 septembre 2021 au 3 1 décembre 2021 et aux indemnités d’occupation dues depuis le 1er janvier 2022, soit deux trimestres a l779,21€ soit la somme totale de 4484,44€ au 30 juin 2022 à parfaire au jour de la libération effective des lieux matérialisée par la remise des clefs outre les taxes
et charges récupérables impayées;
– Débouté Madame [U] de sa demande de dommages et intérêts;
– Condamné la société ODALYS RESIDENCES à payer à Madame [U] la somme de 4232 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;
– Condamné la société ODALYS RESIDENCES aux dépens;
Par déclaration du 25 août 2022, la SA ODALYS et la SAS ODALYS RESIDENCES ont interjeté appel de la décision.
La SA ODALYS et la SAS ODALYS RESIDENCES concluent à :
JUGER l’appel recevable en la forme ;
– INFIRMER l’ordonnance rendue le 02 août 2022 par le Président du TJ de DAX en ce que le Juge des référés a :
‘ Prononcé la nullité de l’assignation délivrée le 27 juin 2022 à la SA ODALYS, immatriculée au RCS sous le numéro B 411 780 463 en constatant l’existence d’une irrégularité de fond non régularisable, mais a jugé à tort que par une lecture combinée des articles 66 et 329 du code de procédure civile que si l’intervenant volontaire prend des écritures au fond et se positionne en intervenant principal, la nullité de l’assignation ne résout pas le sort de l’intervention volontaire qui noue un lien d’instance entre le demandeur et l’intervenant, alors que la nullité de l’assignation devait tendre au débouté de l’intégralité des demandes, fins et conclusions de Madame [U] ;
‘ Jugé qu’il y a lieu, malgré la nullité de l’assignation, de statuer sur les demandes formulées par Madame [U] à l’encontre de la société ODALYS RESIDENCES ;
‘ Constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail commercial du 24 juin 2004 ;
‘ Ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la signification de la
présente ordonnance, l’expulsion de la société ODALYS RESIDENCES, de ses biens et de tout occupants de son chef des lieux situés dans la résidence les « Villas du Lac » à [Localité 7] (40), bien n°144, et ce, avec le concours éventuel de la force publique ;
‘ Condamné la société ODALYS RESIDENCES à payer à titre provisionnelle à Madame [U] au titre des loyers, indemnités d’occupation ou charges dus au 13 septembre 2021 au 31 décembre 2021 et aux indemnités d’occupation dues depuis le 1 er janvier 2022, soit deux trimestres à 1 779,21€, soit la somme totale de 4 484,44€ au 30 juin 2022 à parfaire au jour de la libération effective des lieux matérialisée par la remise des clefs outre les taxes et charges récupérables impayées ;
‘ Débouté la société ODALYS RESIDENCES de sa demande tendant à voir juger qu’il existe des contestations sérieuses quant à l’existence de l’obligation de la société ODALYS RESIDENCES de payer les arriérés de loyers afférents aux périodes allant du 14 mars au 1 er juin 2020 et du 31 octobre au 14 décembre 2020 (fermetures administratives de la Résidence) ;
‘ Débouté la société ODALYS RESIDENCES de sa demande tendant à voir juger que la
demande de Madame [U] n’est ni fondée, ni justifiée tenant les dispositions de l’article 9 du bail commercial liant les parties et le principe de bonne foi dans l’exécution du contrat;
‘ Débouté la société ODALYS RESIDENCES de sa demande tendant à voir juger que
l’appréciation de la validité d’un congé donné pour motif grave et légitime échappe à la
compétence du Juge des référés ;
‘ Débouté la société ODALYS RESIDENCES de sa demande tendant à voir dire qu’il n’y a lieu à référé sur les demandes de Madame [U] ;
‘ Débouté la société ODALYS RESIDENCES de sa demande tendant à voir condamner Madame [U] à payer à la société ODALYS RESIDENCES la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;
‘ Condamné la société ODALYS RESIDENCES à payer à Madame [U] la somme de 4 232€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
‘ Condamné la société ODALYS RESIDENCES aux dépens ;
‘ Débouté la société ODALYS RESIDENCES de ses demandes plus amples ou contraires;
ET, STATUANT A NOUVEAU :
I. IN LIMINE LITIS :
Vu les articles 117 et suivants du code de procédure civile ;
Vu les pièces produites au débat ;
– CONSTATER que Madame [U] a assigné la société ODALYS SA (RCS 411 780 463), société qui a cessé toute activité depuis le 31 mars 2006 et qui n’existe donc plus par suite d’une fusion-absorption ;
– JUGER que l’erreur substantielle sur l’identification de la société défenderesse, qui est ici
désignée comme ODALYS SA et sous son ancienne immatriculation au RCS, alors que celle-ci n’existe plus depuis 2006, constitue une irrégularité de fond ;
– JUGER qu’une irrégularité de fond au sens de l’article 117 du code de procédure civile, en raison de l’inexistence de la personne morale destinataire de l’assignation, implique la nullité de ladite assignation, sans possibilité de régularisation et ce, même en cas d’intervention à l’instance de la personne morale qui aurait dû être assignée ;
En conséquence,
– PRONONCER la nullité de l’assignation délivrée le 27 juin 2022 par Madame [I] [U] à l’encontre de la société ODALYS SA (RCS 411 780 463) par le ministère de SELARL CDJ SUD ;
– REJETER l’intégralité des demandes, fins et conclusions de Madame [I] [U];
II. SUR LE FOND : L’EXISTENCE DE CONTESTATIONS SERIEUSES ET L’ABSENCE DE TROUBLE MANIFESTEMENT ILLICITE
Vu les articles 835 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Vu l’article 484 du code de procédure civile ;
Vu les articles 1101, 1103 et 1104 du code civil ;
Vu l’article L 145-28 du code de commerce et l’article 1743 du code civil,
Vu les nombreuses jurisprudences citées ;
Vu les pièces produites au débat ;
A titre principal :
– CONSTATER que l’article 9 du bail commercial liant les parties stipule que le loyer est
suspendu en cas de force majeure interrompant l’activité du preneur, telle que l’entrave à la libre circulation de personnes et des biens ;
– JUGER qu’il existe des contestations sérieuses quant à l’existence de l’obligation de la société ODALYS RESIDENCES de payer les arriérés de loyers afférents à la période allant du 14 mars au 1er juin 2020 et du 31 octobre au 14 décembre 2020 (périodes de confinement ordonnées par le gouvernement et de fermeture de la Résidence) ;
– JUGER que la demande de Madame [U] n’est ni fondée, ni justifiée tenant l’argumentation juridique développée par la société ODALYS RESIDENCES ;
– JUGER que l’appréciation de la validité d’un congé donné pour motif grave et légitime échappe à la compétence du Juge des référés ;
– RAPPELER que le locataire commercial peut opposer à l’acquéreur de l’immeuble son droit au maintien dans les lieux jusqu’à complet paiement de l’indemnité d’éviction ;
– RAPPELER que le Juge des référés n’est jamais saisi du principal et n’a pas à se prononcer sur une question de fond, de sorte qu’il ne lui revient pas de condamner à des dommages et intérêts ;
En conséquence,
– DIRE n’y avoir lieu à référé sur les demandes de Madame [U] ;
A titre subsidiaire :
– ACCORDER des délais de paiement à la société ODALYS RESIDENCES pour s’acquitter de la dette locative liée aux franchises appliquées en raison de la crise sanitaire du COVID 19 ;
– SUSPENDRE les effets de la clause résolutoire du bail commercial liant les parties ;
III. EN TOUT ETAT DE CAUSE :
– JUGER que les sommes revendiquées par Madame [U] au titre des arriérés de loyers,
indemnités d’occupation ou charges dus au 31 décembre 2021 et des indemnités d’occupation dues entre le 1er janvier 2022 et le 30 juin 2022 ont d’ores et déjà fait l’objet de règlements, de sorte que la demande n’a pas d’objet ;
– DEBOUTER Madame [U] de l’intégralité de ses demandes, appel incident, fins et
conclusions ;
– CONDAMNER Madame [U] à payer à la société ODALYS RESIDENCES la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– CONDAMNER Madame [U] aux entiers dépens d’instance.
[I] [U], intimée conclut à :
Vu l’ordonnance de Madame le Président,
Vu l’ordonnance de référé du 2 août 2022 du Tribunal judiciaire de Dax,
Vu l’article 121 du CPC
Vu les articles 328 et s. du CPC
Vu les dispositions des articles 835 alinéa 1, 145 et 485 du Code de Procédure Civile,
Vu l’article L.145-41 du Code de Commerce,
Vu l’article 544 du Code Civil,
Vu l’article 835 du Code de Procédure Civile,
Vu les pièces éléments versées aux débats,
1. In limine litis,
– REFORMER l’ordonnance du 2 août 2022 en ce qu’elle a déclaré l’assignation du 27 juin 2022 nulle,
Et statuant à nouveau :
– Constater que la société ODALYS RESIDENCES est intervenue en lieu et place de la société ODALYS SA,
– Constater la régularisation de l’assignation,
A défaut,
– Confirmer que l’intervention volontaire de la société ODALYS RESIDENCE est recevable et bien fondée
– Confirmer l’ordonnance du 2 août 2022 en ce que le juge des référés s’est déclaré valablement saisi des demandes présentées par Madame [U] à l’encontre de la société ODALYS RESIDENCES, son intervention volontaire principale ayant créé un lien d’instance entre les deux parties.
2. Au fond,
– CONFIRMER l’ordonnance du 2 août 2022 rendue par le Juge des référés du Tribunal judiciaire en ce qu’il a :
– Déclaré recevables et bien fondées les demandes incidentes formulées contre la société ODALYS RESIDENCES
– Rejeté les contestations élevées par la société ODALYS RESIDENCES,
– Constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail conclu le 24 juin 2004,
– Ordonné l’expulsion de la société ODALYS RESIDENCES, et de tous les occupants de son chef du lot de copropriété 144 situé à [Adresse 8], au besoin avec le concours de la force publique,
– Ordonné la remise en état des lieux aux frais exclusifs de la SA ODALYS RESIDENCES,
Condamné la SA ODALYS RESIDENCES, par provision, au paiement de la somme de la somme de 926,02 € pour les loyers échus du 13.09.2021 au 31.12.2021 et aux indemnités d’occupation dues depuis le 1er janvier 2022, soit deux trimètres à 1779,21 € soit la somme totale de 4484,44 € au 30.06.2022 à parfaire au jour de la libération effective des lieux matérialisée par la remise des clefs, outre les taxes et charges récupérables impayées,
En conséquence,
– Rejeter la demande de la société ODALYS RESIDENCE de délai de grâce et de suspension des effets de la clause résolutoire,
En revanche,
– Réformer l’ordonnance du 2 août 2022 rendue par le Juge des référés du Tribunal judiciaire en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts de Madame [U] au titre ses préjudices de jouissance et moral, et rejeté sa demande d’intérêts à compter de la mise en demeure du 16 juin 2022, et de capitalisation
En conséquence et statuant à nouveau :
– Condamner la SA ODALYS RESIDENCES à verser la somme de 20.000 à titre de dommages et intérêts,
– Dire que ces sommes porteront intérêts à compter de la mise en demeure du 16 juin 2022, et ordonner la capitalisation de ceux-ci,
– Rejeter toutes prétentions contraires,
– Débouter la SA ODALYS RESIDENCES de ses demandes d’allocation d’une indemnité de procédure à hauteur de 4.000€,
– Condamner la SA ODALYS RESIDENCES à payer la somme de 320 € de frais de constat d’huissier,
– Condamner la SA ODALYS RESIDENCES verser à Madame [I] [U] la somme de 5.692,12 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel en sus des 4632 € alloués en première instance ;
– Condamner la SA ODALYS RESIDENCES aux entiers dépens du référé et de l’appel.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 14 décembre 2022.
SUR CE
La société ODALYS SA avait pour activité l’exploitation commerciale de résidences de tourisme et exploitait notamment une résidence de tourisme dénommée : « PORT D’ALBERT » à [Localité 7] dans les [Localité 6].
L’ensemble des lots de cette résidence appartient à des investisseurs privés qui les ont donnés à bail commercial à la société ODALYS.
La SARL MANOMA, propriétaire des lots 144 et 109 de cette résidence , les a donnés à bail commercial à la société ODALYS RESIDENCES le 29 juin 2004,pour une prise d’effet fixée au 1er janvier 2005, se terminant au 31 décembre 2013.
Le bail s’est prolongé tacitement à compter du 1er janvier 2014 pour une durée indéterminée.
Le 31 mars 2006, par le biais d’une première fusion-absorption, la société ODALYS SA disposant de la résidence de [Localité 7] comme établissement secondaire, a été absorbée et a cessé à compter de cette date toute activité.
Suite à diverses fusions-absorptions successives la résidence de [Localité 7] constitue désormais un établissement secondaire de la société ODALYS RESIDENCES.( RCS N° 487 696 080).
Le bail commercial s’est poursuivi avec la société ODALYS RESIDENCES depuis le 1er mai 2009.
La SARL MANOMA a décidé de vendre ses lots et a donné congé à la société ODALYS RESIDENCES, preneur à bail, le 29 juin 2021 pour le 31 décembre 2021 sans offre de renouvellement et en refusant de lui verser une indemnité d’éviction au motif d’arriéré locatif.
Concomitamment, elle a fait signifier un commandement de payer visant la clause résolutoire à cette même société se fondant sur cet arriéré locatif.
Par courrier recommandé du 19 juillet 2021, la société ODALYS RESIDENCES a contesté le commandement délivré en faisant valoir qu’une partie des charges réclamées avait été réglée et que les franchises de loyer appliquées en raison des deux périodes de confinement de l’année 2020 étaient légalement et contractuellement fondées et justifiées.
Elle sollicitait également paiement d’une indemnité d’éviction à hauteur de 5955,34 €.
Suivant acte notarié du 13 septembre 2021, [I] [U] a acquis l’appartement pris à bail par la société ODALYS RESIDENCES, auprès de la société MANOMA.
Autorisée par ordonnance du 23 juin 2022 du président du tribunal judiciaire de DAX, [I] [U] a fait assigner la SA ODALYS immatriculée au RCS sous le numéro B411780463 en référé d’heure à heure par acte du 2 juin 2022,en demandant que soit constatée l’acquisition de la clause résolutoire du bail conclu le 24 juin 2004 et que l’expulsion de la société ODALYS soit ordonnée ainsi que le paiement de l’arriéré locatif et de dommages intérêts.
Le juge des référés a rendu la décision dont appel après avoir reçu l’intervention volontaire de la société ODALYS RESIDENCES et a prononcé la nullité de l’assignation délivrée le 27 juin 2022 à la SA ODALYS en satisfaisant aux demandes de [I] [U] sur la résiliation du bail, sur l’arriéré locatif et les indemnités d’occupation et en rejetant sa demande de dommages-intérêts.
Sur la nullité de l’assignation délivrée le 27 juin 2022 à la SA ODALYS immatriculée sous le numéro B 411 780 463 au RCS d'[Localité 4] :
Aux termes de l’article 117 du code de procédure civile ,« Constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l’acte :
le défaut de capacité d’ester en justice ;
le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit d’une personne morale, soit d’une personne atteinte d’une incapacité d’exercice ;
le défaut de capacité de pouvoir d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice. »
L’assignation en référé litigieuse du 27 juin 2022 a été délivrée à la SAS ODALYS, immatriculée au RCS d'[Localité 4] BP411 780463, à la requête de [I] [U], aux fins d’ordonner l’expulsion de la société ODALYS et de tous les occupants de son chef du lot de copropriété 144 situé à [Adresse 8], et de la condamner au paiement d’un arriéré locatif et d’indemnités d’occupation.
La SA ODALYS, par conclusions développées à l’audience du 5 juillet 2022 devant le juge des référés, a demandé à ce qu’il soit donné acte à la société ODALYS RESIDENCES de son intervention volontaire, qu’il soit constaté que Madame [U] a assigné la société ODALYS SA qui a cessé toute activité depuis le 31 mars 2006 et qui n’existe donc plus par suite d’une fusion absorption et juger que l’erreur substantielle sur l’identification de la société défenderesse désignée comme ODALYS SA sous son ancienne immatriculation au RCS alors que celle-ci n’existe plus depuis 2006, constitue une irrégularité de fond au sens de l’article 117 du code de procédure civile impliquant la nullité de l’assignation qu’elle sollicite voir ordonner ; sur le fond elle fait valoir l’existence de contestation sérieuse quant aux modalités d’exécution du bail commercial et
l’obligation de la société ODALYS RESIDENCES de payer les arriérés de loyers afférents aux périodes de confinement, juger que la demande présentée à son encontre n’est ni fondée ni justifiée, que l’appréciation de la validité du congé donné pour motif grave et légitime échappe à la compétence du juge des référés et que le locataire commercial a droit au maintien dans les lieux jusqu’à complet paiement de l’indemnité d’éviction, dire n’ y avoir lieu à référé sur les demandes de Madame [U].
L’article 329 du code de procédure civile prévoit que l’intervention est principale lorsqu’elle élève une prétention au profit de celui qui la forme. Elle n’est recevable que si son auteur a le droit d’agir relativement à cette prétention.
Le sort de l’intervention n’est pas lié à celui de l’action principale lorsque l’intervenant se prévaut d’un droit propre distinct de celui invoqué par le demandeur.
En l’espèce, l’intervention volontaire de la société ODALYS RESIDENCES est recevable en raison de son intérêt à agir puisqu’elle est le preneur à bail commercial de l’appartement objet du litige, la SA ODALYS n’étant plus en activité depuis le 31 mars 2006.
L’assignation délivrée à une personne morale radiée du registre du commerce des sociétés est une irrégularité de fond qui ne peut être couverte par l’intervention volontaire de la personne morale qui aurait dû être assignée.
En conséquence l’ assignation délivrée le 27 juin 2022 à la société ODALYS SA est nulle.
Cependant, l’intervention volontaire de la société ODALYS RESIDENCES est recevable et il s’agit d’ une intervention principale puisque cette société élève une prétention à son profit.
La société ODALYS RESIDENCES qui est intervenante volontaire devient partie à l’instance et, nonobstant les irrégularités de fond entachant l’assignation, la juridiction est valablement saisie des demandes de [I] [U] et de la SAS ODALYS RESIDENCES appelante de l’ordonnance de référé ayant constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail commercial du 24 juin 2004 et ordonné l’expulsion de la SAS ODALYS RESIDENCES.
La demande présentée par [I] [U] de résiliation du bail commercial liant la société MANOMA son vendeur, à la société ODALYS RESIDENCES :
L’article 835 du code de procédure civile définit les pouvoirs de la juridiction qui peut prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, elle peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
En l’espèce la SARL MANOMA a donné à bail commercial plusieurs lots dont le lot 144 à la société ODALYS devenue ODALYS RESIDENCES, bail conclu le 29 juin 2004 et prolongé tacitement le 1er janvier 2014 pour une durée indéterminée.
La SARL MANOMA a donné congé à la Société ODALYS RESIDENCES le 29 juin 2021 pour le 31 décembre 2021 sans offre de renouvellement et en refusant le versement d’une indemnité d’éviction . Elle a également fait signifier un commandement de payer visant la clause résolutoire à cette société en se fondant sur arriéré locatif.
La société ODALYS RESIDENCES a contesté le commandement délivré par courrier recommandé du 19 juillet 2021.
Postérieurement à ces faits [I] [U] a acquis l’appartement pris à bail par la société
ODALYS RESIDENCES.
Sa demande d’expulsion se heurte à une contestation sérieuse portant sur la résolution du bail commercial, l’appréciation du motif sérieux pour refuser le renouvellement du bail et le paiement d’une indemnité d’éviction.
Il n’y a donc pas lieu à référé en l’absence de trouble manifestement illicite ou de nécessité de prévenir un dommage imminent alors que [I] [U] a acquis ce bien qui faisait l’objet d’un bail commercial en toute connaissance de cause.
La décision déférée sera donc infirmée en disant n’y avoir lieu à référé sur l’ensemble des demandes de [I] [U].
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme la décision déférée en ce qu’elle prononcé la nullité de l’assignation délivrée le 27 juin 2022 à la SA ODALYS immatriculée au RCS sous le numéro B 411 780 463, et en ce qu’elle a reçu l’intervention volontaire de la société ODALYS RESIDENCES,
L ‘infirme sur le surplus.
Dit avoir lieu à référé sur les demandes de [I] [U].
Condamne [I] [U] à payer à la société ODALYS RESIDENCES la somme de 1000 €sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Dit [I] [U] tenue aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Madame PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Catherine SAYOUS, greffier suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.
LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,