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5 février 2013
Cour d’appel de Lyon
RG n°
12/02435
AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE
COLLÉGIALE
RG : 12/02435
SAS CARDEM
C/
[S]
SAS ADIA
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 9]
APPEL D’UNE DÉCISION DU :
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de SAINT-ETIENNE
du 20 Février 2012
RG : 20110133
COUR D’APPEL DE LYON
Sécurité sociale
ARRÊT DU 05 FEVRIER 2013
APPELANTE :
SAS CARDEM
[Adresse 13]
[Adresse 13]
[Adresse 13]
représentée par la SCP DENISE LATRAICHE-GUERIN HENRI BOVIER FREDERIC PIRA S (Me Frédéric PIRAS), avocats au barreau de LYON
INTIMÉS :
[Y] [S]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représenté par Me Elodie JUBAN, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/12270 du 10/05/2012 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LYON)
SAS ADIA
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par la SCP PLICHON – DE BUSSY PLICHON (Me Philippe PLICHON), avocats au barreau de PARIS substituée par Me FIESCHI, avocat au barreau de
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 9]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représenté par Mme [W], en vertu d’un pouvoir général
PARTIES CONVOQUÉES LE : 21 Juin 2012
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Décembre 2012
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Nicole BURKEL, Président de chambre
Marie-Claude REVOL, Conseiller
Michèle JAILLET, Conseiller
Assistées pendant les débats de Ouarda BELAHCENE, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 05 Février 2013 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
**************
FAITS ET PROCEDURE
Attendu que monsieur [S] a été victime d’un accident du travail le 28 juin 2006 alors qu’il avait été mis par la société Adia à disposition de la société Cardem ;
Que la société Adia a déclaré l’accident en précisant : « la victime a ramassé un élément béton alors que son pied était posé sur un rebord existant en terrasse. Au moment de lever l’élément, son pied a ripé et la victime s’est tordue la cheville’ et en mentionnant le nom d’un témoin, monsieur [O] [U] ;
Attendu que monsieur .[S] a été reconnu consolidé à la date du 29 novembre 2009 avec attribution d’un taux d’incapacité permanente de 8 % porté à 10 % suite à jugement du tribunal contentieux de l’incapacité du 7 décembre 2010 ;
Attendu que le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Étienne, par jugement du 20 février 2012 a:
– déclaré l’action de monsieur [S] recevable et bien fondée
– dit que l’accident du travail dont monsieur [S] a été victime le 28 juin 2006 est dû à la faute inexcusable de la société Cardem
– condamné la société Adia en sa qualité d’employeur de monsieur [S] aux obligations prévues aux articles L. 452-1 et suivants du code de la sécurité sociale
– fixé la majoration de la rente au maximum prévu par la loi
– dit que cette majoration sera payée par la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 9] qui en récupérera le montant par l’imposition sur l’employeur la société Adia d’une cotisation supplémentaire
– fixé à la somme de 2000 euros la provision dont la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 9] fera l’avance
– dit que la société Cardem est tenue de garantir la société Adia des conséquences financières de la faute inexcusable notamment quant aux surcoûts des cotisations accident du travail
– enjoint à la société Cardem de communiquer à la société Adia l’identité complète de sa compagnie d’assurances susceptible de prendre en charge l’accident de M. [S] du 28 juin 2006 ainsi que le numéro de contrat concerné
– avant dire droit sur la réparation des préjudices complémentaires de monsieur [S] ordonné une expertise médicale confiée au docteur [C] aux fins de:
*à partir des déclarations de la victime, au besoin de ses proches et de tout sachant, et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales, les modalités de traitement en précisant, le cas échéant, les durées exactes d’hospitalisation et pour chaque période d’hospitalisation le nom de l’établissement les services concernés et la nature des soins
*recueillir les doléances de la victime et au besoin de ses proches, l’interroger sur les conditions d’apparition des lésions, l’importance des douleurs la gêne fonctionnelle subie et leurs conséquences
*décrire au besoin un état antérieur en ne retenant que les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles
* procéder, en présence des médecins mandatés par les parties à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime
*à l’issue de cet examen, analyser dans un exposé précis et synthétique la réalité des lésions initiales, la réalité de l’état séquellaire, l’imputabilité directe et certaine des séquelles aux lésions initiales en précisant au besoin l’incidence d’un état antérieur
* déficit fonctionnel temporaire : indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été du fait de son déficit fonctionnel temporaire dans l’incapacité totale ou partielle de poursuivre ses activités personnelles habituelles, en cas d’incapacité partielle préciser le taux et la durée
* consolidation : fixer la date de consolidation et en l’absence de consolidation dire à quelle date il conviendra de revoir la victime, préciser lorsque cela est possible les dommages prévisibles pour l’évaluation d’une éventuelle provision
* assistance tierce personne : indiquer le cas échéant si l’assistance constante ou occasionnelle d’une tierce personne (étrangère ou non à la famille) est ou a été nécessaire pour effectuer les démarches et plus généralement les actes de la vie quotidienne
* dépenses de santé future: décrire les soins futurs et les aides techniques compensatoires au handicap de la victime (prothèses, appareillages spécifiques, véhicule) en précisant la fréquence de leur renouvellement
* frais de logement et/ou véhicule adaptés: donner son avis sur d’éventuels aménagements nécessaires pour permettre le cas échéant à la victime d’adapter son logement et/ou son véhicule à son handicap
*incidence professionnelle : indiquer notamment au vu des justificatifs produits si le déficit fonctionnel permanent entraîne d’autres répercussions sur son activité professionnelle actuelle ou future (obligations de formation pour un reclassement professionnel, pénibilité accrue de son activité dévalorisation sur le marché du travail etc.)
*préjudice scolaire universitaire ou de formation: si la victime est scolarisée ou en cours d’études, dire en raison des lésions consécutives au fait traumatique si elle a subi une perte d’année scolaire, universitaire, ou de formation l’obligeant le cas échéant à se réorienter ou à renoncer à certaines formations
* souffrances endurées : décrire les souffrances physiques et psychiques ou morales découlant des blessures subies avant consolidation les évaluer distinctement sur une échelle de 1 à 7
* préjudice esthétique temporaire et/ou définitif : donner un avis sur l’existence, la nature, l’importance du préjudice esthétique en distinguant éventuellement le préjudice temporaire du préjudice définitif les évaluer distinctement sur une échelle de 1 à 7
*préjudice sexuel : indiquer s’il existe ou existera un préjudice sexuel (perte ou diminution de la libido, impuissance ou frigidité, perte de fertilité)
* préjudice d’établissement : dire si la victime subie une perte d’espoir ou de chance de normalement réaliser un projet de vie familiale
*préjudice d’agrément : indiquer notamment au vu des justificatifs produits si la victime est empêchée en tout ou partie de se livrer à des activités spécifiques du sport ou de loisirs
*préjudice permanent exceptionnel: dire si la victime subie des préjudices permanents exceptionnels correspondant à des préjudices atypiques directement liés au handicap permanent
* dire si l’état de la victime est susceptible de modifications en aggravation
* établir un état récapitulatif de l’ensemble des postes énumérées dans la mission
– dit que les frais d’expertise seront avancés par la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 9] qu’elle recouvrera sur l’employeur
– condamné la société Adia à verser à monsieur [S] la somme de 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile
– déclaré le présent jugement commun à la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 9];
Attendu que la cour est régulièrement saisie d’un appel formé par la société Cardem;
Attendu que la société Cardem demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 7 décembre 2012, visées par le greffier le 11 décembre 2012 et soutenues oralement, au visa des articles L. 431-1 et suivants et L. 452-3 du code de la sécurité sociale de:
A titre principal
– dire et juger qu’elle a pris les mesures possibles pour préserver la sécurité de monsieur [S] en lui délivrant une formation à la sécurité adaptée et personnalisée, en l’encadrant par un chef d’équipe, en installant un périmètre de sécurité, en mettant à sa disposition des équipements de sécurité
– dire et juger qu’elle ne pouvait avoir conscience du danger auquel était exposé monsieur [S] toutes les mesures de sécurité ayant été mises en place
– dire et juger qu’elle n’a commis aucune faute inexcusable et rejeter toutes les demandes de monsieur [S]
– en conséquence, infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que l’accident dont monsieur [S] a été victime et du la faute inexcusable commise par elle
A titre subsidiaire
– infirmer le jugement en ce qu’il a ordonné une expertise médicale portant sur les préjudices listés à l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale et l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV dudit code
– dire et juger que la demande d’expertise ne pourra porter que sur les postes prévus à l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale et pour ceux non couverts par le livre IV du code à savoir le déficit fonctionnel temporaire, le préjudice d’établissement, les frais de logement et de véhicule adaptés, les préjudices scolaires, les préjudices permanents exceptionnels extra patrimoniaux et le préjudice sexuel
– infirmer le jugement en ce qu’il a accordé à monsieur [S] la somme de 2000 euros à titre de provision et rejeter toute demande de provision qui n’est ni justifiée ni fondée
– lui dire et juger inopposable le taux d’IPP de 10 % alloué à monsieur [S]
En tout état de cause
– condamner monsieur [S] à lui verser la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel;
Attendu que monsieur [S] demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 11 décembre 2012, visées par le greffier le 11 décembre 2012 et soutenues oralement, de:
– au visa des articles L. 452-1 et suivants du code de la sécurité sociale, confirmer le jugement en toutes ses dispositions
– en conséquence déclarer son recours recevable et bien fondé
– dire que l’accident du travail dont il a été victime le 28 juin 2006 est dû à la faute inexcusable de la société Cardem
– ordonner la majoration de la rente
– ordonner une expertise médicale le médecin désigné devant avoir pour mission d’évaluer les préjudices listés à l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale mais aussi l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV dudit code
– fixer à 2000 euros le montant de l’indemnité provisionnelle à lui verser
– dire que la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 9] lui versera directement les sommes qui lui sont dues
– condamner la société Adia et la société Cardem à lui payer la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et dit qu’il sera fait application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991
– déclarer l’arrêt commun à la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 9];
Attendu que la société Adia demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 3 décembre 2012, visées par le greffier le 11 décembre 2012 et soutenues oralement, de:
– réformer le jugement entrepris
– dire et juger monsieur [S] mal fondé en son action en faute inexcusable
– débouter monsieur [S] de l’ensemble de ses demandes
– subsidiairement débouter monsieur [S] de sa demande d’expertise élargie faute de justifier d’un dommage non couvert par le livre IV du code de la sécurité sociale
– dire et juger inopposable la majoration de la rente à son taux maximum liquidée sur la base d’un taux d’IPP de 10 %
– plus subsidiairement, confirmer le jugement entrepris
– condamner la société Cardem à la relever et garantir de toutes les condamnations mises à sa charge résultant de la reconnaissance de la faute inexcusable
– condamner la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 9] à faire l’avance de l’ensemble des indemnisations allouées à monsieur [S] notamment de la provision sollicitée et plus particulièrement des préjudices non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale
– donner injonction à la société Cardem de préciser l’identité complète la compagnie d’assurances couvrant l’accident du travail dont a été victime monsieur [S]
– donner injonction à la société Cardem de préciser le numéro de police d’assurance concernée
– prononcer les injonctions sous peine d’une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir
– plus subsidiairement encore, ordonner une mesure d’expertise pour permettre à la juridiction saisie de statuer sur les chefs de préjudices extra patrimoniaux visés à l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale au sens de la jurisprudence de la Cour de Cassation et ceux non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale
– condamner toute partie succombant à lui payer la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile;
Attendu que la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de [Localité 9] demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 9 novembre 2012, visées par le greffier le 11 décembre 2012 et soutenues oralement, de:
– lui donner acte de ce qu’elle n’entend pas formuler d’observations en ce qui concerne l’existence d’une faute inexcusable de l’employeur
– prendre acte en cas de reconnaissance de faute inexcusable, qu’elle:
* fera l’avance des sommes allouées à la victime au titre de l’indemnisation des préjudices y compris pour les sommes qui seraient attribuées en réparation des préjudices non visés à l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale
* fera observer que dès lors qu’un chef de préjudice est couvert par le livre IV du code de la sécurité sociale, il ne peut faire l’objet d’une indemnisation complémentaire par les juridictions et ce quel que soit le montant de la prise en charge par la caisse
* en tout état de cause, procédera au recouvrement de la majoration de la rente sur la base d’un taux 8 % initialement attribué opposable à la société Adia (sur la valeur du double de l’indemnité en capital correspondant à 8 %) ainsi que de l’intégralité des préjudices dont elle serait amenée à faire l’avance auprès de l’employeur;
Attendu que pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie en application de l’article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement;
MOTIFS DE LA DECISION:
Attendu que monsieur [S], né le [Date naissance 1] 1964, salarié de la société Adia, a été mis à disposition de la société Cardem, par contrat de mise à disposition à effet du 19 juin au 3 juillet 2006 pour occuper un poste de man’uvre sur le chantier de [Localité 12] ;
Qu’il est précisé au titre de :
– « tâches et risques du poste : démolition intérieure de bâtiments »
– « poste à risque (artL4142.2) : NC Surveillance médicale spéciale : non Poste soumis à intempérie non Equipements individuels de sécurité : Chaussures de sécurité Casque de sécurité Gants » ;
Attendu que monsieur [S] a été victime d’un accident du travail le 28 juin 2006 à 15 heures et transporté à l’hôpital de [5] à [Localité 11] par les pompiers ;
Qu’il expose que le chef de chantier lui a demandé de monter sur le toit de l’hôpital afin d’évacuer les débris d’une grande cheminée qu’un brise roche hydraulique (BRH) était en train de démolir’ (qui) pesaient entre 40 et 100 kgs’aidé par un de ses collègues également intérimaire, (avoir)dû soulever un débris à côté du BRH en fonctionnement qui amassait les uns sur les autres les décombres’perdu l’équilibre et son pied est resté coincé entre deux gros débris » et avoir dû attendre les secours pendant plus de deux heures;
Qu’il soutient avoir travaillé en hauteur sur un toit en pleine chaleur, sans périmètre de sécurité alors qu’il devait effectuer des travaux de démolition intérieure, n’avoir jamais exécuté des travaux de démolition, n’avoir pas les qualifications nécessaires pour travailler en hauteur en violation de l’article R4534-61 du code du travail, n’avoir bénéficié d’aucune formation aux règles de sécurité ;
Qu’il souligne l’absence d’encadrement sérieux et le nombre important d’intérimaires travaillant sur ce chantier;
Qu’il verse au soutien de ses affirmations les attestations non datées suivantes de :
– monsieur [M] qui précise que « les travaux à faire sur le toit n’avaient aucune sécurité ! les débris étaient directement jetés du toit à la benne sans aucun périmètre de sécurité autour ! aucune formation au BRH ni au marteau piqueur ! aucune formation sur les postures de sécurité et j’ai vu l’accidenté qui m’a dit qu’une brique pleine lui est tombée dessus. Par expérience, une brique de cette taille pèse bien 115 kilos aucune sécurité n’a été pris par l’établissement Cardem durant ce chantier car il n’est pas le seul à avoir fait un accident »
– monsieur [R] qui indique avoir travaillé avec monsieur [S] le 28 juin 2006 « sur le toit du bâtiment et il n’avait aucune sécurité ni barrière ni rien et on jetait les débris directement à la benne et que monsieur [S] s’est cassé le pied avec une grosse pièce qui pèse au moins 40 kg qu’il a essayé de la lever avec ses mains parce qu’il n’y avait pas des moyens et matériels suffisants pour travailler correctement sur le chantier et aussi que avant de faire ce grand chantier ( démolition d’un grand bâtiment) il n’y avait aucune formation au BRH, ni au marteau piqueur et de tout autre engin, on était presque 25 ouvriers et tout le monde se sentait en danger ‘et beaucoup de chaleur et sans sécurité »;
Qu’il produit également des contrats de mission le concernant durant juin 2006 où il a été toujours en charge de travaux de démolition intérieure ;
Attendu que la société Cardem soutient que monsieur [S] a été chargé, après que la souche de la cheminée a été démolie par un BRH de « mettre les gravas dans une benne », travail à effectuer sur une toiture terrasse équipée de barrières de protection ;
Qu’elle précise que monsieur [S] est défaillant dans l’administration de la preuve lui incombant , que le poste de man’uvre n’était pas à risque particulier et ne nécessitait pas de formation renforcée à la sécurité, qu’elle a formé monsieur [S] à la sécurité, que le chantier était suivi par du personnel d’encadrement : chef de chantier ‘ monsieur [T]- assisté d’un conducteur de travaux ‘ monsieur [E]- et qu’il existait un périmètre de sécurité et des équipements pour évacuer les gravats ;
Qu’elle conteste toute faute inexcusable commise par elle ;
Qu’elle verse aux débats :
– le contrat de mise à disposition de monsieur [S]
– la fiche d’évaluation concernant monsieur [S], datée du 21 août 2006, sur laquelle il est noté « assez bon élément, s’est blessé au pied en levant un bloc de béton », motivation, tri des matériaux au sol, respect des consignes de sécurité jugés peu satisfaisants et une compétence spécifique au marteau piqueur jugée satisfaisante
– le « pré-compte-rendu d’accident du travail » survenu le 28 juin à 15 heures, la victime étant évacuée à 15h30 par les pompiers, établi par le chef de chantier qui indique que monsieur [S], portant chaussures de sécurité, gants, casque, était occupé à un « enlèvement manuel de gravats béton en terrasse » et qu’il « a ramassé un élément béton, alors que son pied était posé sur un rebord existant en terrasse. Au moment de lever l’élément, son pied a ripé et la victime s’est tordue la cheville » et sur lequel il est noté « zone de chute de plain pied sol irrégulier »
– la déclaration d’accident du travail remplie par elle le 29 juin 2006 mentionnant le nom d’un témoin monsieur [O] [U]
– un plan des lieux sur lequel apparait en façade nord deux cheminées à découper et en façade sud, ouest et est une cheminée à découper, sans indication de hauteur des bâtiments, le bâtiment ne comportant qu’un étage
– un plan particulier de sécurité et de protection de la santé concernant le chantier de réhabilitation Parc Technologique site Metrotech [Localité 12] sur lequel figure le nom du responsable du chantier
– deux photographies
– des factures émises par la société Ad’Hoc au nom de Cardem, datées du 30 juin au 31 décembre 2006, concernant la location de matériel brise roche hydraulique, mini pelle, transporteur à gravats, nacelle, échafaudage
– le compte’rendu n°24 de réunion de chantier du 26 juin 2006
– le jugement du conseil de prud’hommes de Saint Etienne, rendu le 6 mai 2010, ayant débouté monsieur [M] de ses demandes formées à l’encontre de Cardem, tendant à voir juger dénué de cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave prononcé le 9 juillet 2008 et les conclusions déposées par elle
– des fiches de métier de manutention manuelle de charges et de préparation du gros ‘uvre et des travaux publics
– la photographie d’un engin présenté comme étant un brise roche électrique
– la convention collective du 8 octobre 1990 ;
Attendu que la société Adia produit régulièrement aux débats :
– un curriculum vitae au nom de monsieur [S]
– un historique des missions de travail temporaire accomplis par monsieur [S] en qualité de « man’uvre bâtiment » de novembre 2004 à juillet 2006
– un « reçu du livret des consignes de sécurité activité travaux publics » au nom de monsieur [S] daté du 16 juillet 2004 ;
Attendu que d’une part, monsieur [S], mis à disposition de la société Cardem, en qualité de man’uvre pour effectuer des travaux de démolition intérieure, missions déjà réalisées par lui, a été affecté, le 28 juin 2006, jour de survenue de son accident du travail, à la réalisation de travaux de manutention en extérieur, en terrasse ou toit, de gravats, provenant de la démolition d’une cheminée et aucunement de travaux de démolition au sens des articles R4534-60 du code du travail ;
Que ces seuls éléments objectifs sur lesquels les parties s’accordent ne peuvent suffire à caractériser que monsieur [S] a été affecté à un poste de travail présentant des risques particuliers pour sa santé et sécurité et nécessitant le recours à une formation renforcée au sens de l’article L4154-2 du code du travail ;
Que ni l’identification de la façade concernée par la démolition de la cheminée ni la hauteur de la terrasse sur laquelle devait intervenir monsieur [S] ni la hauteur de la cheminée en cours de démolition ou démolie ne sont connues ;
Que la manutention de gravats ne fait pas partie des travaux interdits aux intérimaires en application des articles L4154-1 et D4154-1 du code du travail ;
Que la présomption de faute inexcusable commise par l’employeur prévue à l’article L4154-3 ne peut recevoir application ;
Attendu que d’autre part, en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers ce dernier d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ;
Que le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ;
Qu’il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident survenu au salarié et il suffit qu’elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée alors même que d’autres fautes ont concouru au dommage;
Attendu que monsieur [S], à qui incombe la charge de la preuve de la faute inexcusable commise, produit deux attestations de collègues de travail ;
Que le fait que ces attestations ne soient pas datées ne peut suffire à les écarter des débats comme le demande la société Cardem ;
Que ces attestations manuscrites comportant la signature de leurs auteurs auxquelles sont jointes des photocopies de pièces d’identité de ces derniers offrent des garanties suffisantes pour être retenues par la cour ;
Attendu que si monsieur [M] soutient que monsieur [S] a reçu une brique pleine de 115 kilogrammes sur lui, monsieur [R] affirme que monsieur [S] s’est cassé le pied avec une grosse pièce qui pèse au moins 40 kg qu’il a essayé de lever avec ses mains ;
Que monsieur [S] précise quant à lui avoir perdu l’équilibre, le brise roche hydraulique étant en fonctionnement, et avoir eu son pied coincé entre deux gravats ;
Que le chef de chantier, dans le pré-compte-rendu d’accident, a noté que monsieur [S] a « ramassé un élément béton, alors que son pied était posé sur un rebord existant en terrasse. Au moment de lever l’élément, son pied a ripé et la victime s’est tordue la cheville » ;
Que les circonstances exactes de survenue de l’accident restent indéterminées alors même qu’il existe, selon les propres indications portées sur les déclarations d’accident du travail remplies par les sociétés Adia et Cardem, un témoin direct de l’accident dont le témoignage n’est pas produit aux débats et dont il n’est pas demandé à la cour de le recueillir;
Attendu que la localisation même de l’endroit où l’accident est survenu, la hauteur séparant le sol de la terrasse, le chef de chantier, ayant précisé que la zone de chute est « plain pied », ne sont pas identifiées ni identifiables ;
Que dès lors, il est difficile de pouvoir caractériser des manquements susceptibles d’avoir été commis par l’employeur concernant la réalisation d’un travail en hauteur;
Attendu que le seul fait que l’accident dont monsieur [S] a été victime soit survenu en extérieur, sans autre précision, et à une température élevée ne peut suffire à établir que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ;
Attendu que monsieur [S], défaillant dans l’administration de la preuve lui incombant, doit être débouté de sa demande de reconnaissance de faute inexcusable ;
Attendu que la procédure étant gratuite et sans frais, la demande relative aux dépens est dénuée d’objet ;
Attendu qu’aucune considération d’équité ne justifie l’application de l’article 700 du code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement par arrêt contradictoire
Reçoit l’appel
Infirme le jugement
Statuant à nouveau
Déboute monsieur [S] de sa demande de reconnaissance de faute inexcusable et des conséquences financières en résultant
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile
Dit la demande relative aux dépens dénuée d’objet.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Malika CHINOUNE Nicole BURKEL