Location de matériel : 20 octobre 2016 Cour d’appel de Paris RG n° 14/19495

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Location de matériel : 20 octobre 2016 Cour d’appel de Paris RG n° 14/19495
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20 octobre 2016
Cour d’appel de Paris
RG n°
14/19495

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRET DU 20 OCTOBRE 2016

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 14/19495

Décision déférée à la Cour : arrêt de renvoi après cassation rendu le 8 juillet 2014 par la chambre commerciale de la Cour de Cassation sur pourvoi à l’encontre d’un arrêt rendu le 14 mars 2013 par la Cour d’Appel de PARIS pôle 5 chambre 6 ayant statué sur appel d’un jugement rendu le 17 Mars 2011 par le Tribunal de Commerce de PARIS – 6ème Chambre – RG n° 2000052193

DEMANDEUR À LA SAISINE

Monsieur [E] [K], exerçant sous le nom commercial BK PHOTO BK DIRECT

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 1] (Allemagne), de nationalité allemande

demeurant [Adresse 1]

[Adresse 2]

Représenté par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Assistée de Me Guillaume CHABASON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0062

DÉFENDERESSE À LA SAISINE

SA BNP PARIBAS

ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 4]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Assistée de Me Brigitte GUIZARD, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 23 Juin 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Louis DABOSVILLE, Président de Chambre, chargé du rapport

Monsieur Edouard LOOS, Président

Mme Fabienne SCHALLER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur Louis DABOSVILLE, Président, et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS ET PROCÉDURE

M. [K], qui exerce sous l’enseigne BK photo une activité d’importation, d’exportation, de vente et de location de matériel photographique et informatique dans le cadre de laquelle il reçoit et effectue des paiements sous forme de virements en dollars américains, est titulaire de deux comptes dans les livres de la société BNP-Paribas, l’un en euros et l’autre en dollars américains.

Le 25 juin 2007, M. [K] a demandé à la société BNP-Paribas d’opérer un virement en USD au profit de tiers. Le 27 juin, 102.303,01€ ont été débités de son compte en euros et la somme correspondante de 136.063,00 $ a été portée au crédit de son compte en dollars. Le virement demandé par M. [K] a alors été effectué depuis le compte USD, majoré de frais de transaction internationale.

De juin 2007 à mars 2008, en tout quatre opérations d’achat de dollars américains ont été effectuées depuis le compte en euros vers le compte en dollars, (les 28 juin 2007, 19 juillet 2007, 4 septembre 2007 et 28 mars 2008) pour un montant total de 1.164.717,91€.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 mars 2008, M. [K] a mis en demeure la société BNP-Paribas d’annuler les opérations et de créditer son compte en euros du montant correspondant.

Le 1er avril 2008, la BNP a soldé le compte en dollars avant de le clôturer.

Le 30 avril, le compte en euros a lui aussi été clôturé.

C’est dans ces conditions que, par assignation du 9 juillet 2008, M. [K] a demandé au Tribunal de Commerce de Paris de déclarer que les quatre opérations d’achat lui étaient inopposables et de condamner la société BNP-Paribas à titre principal à restituer la somme de 1.164.717,91€ majorée d’intérêts à compter de la mise en demeure du 28 mars 2008 ainsi qu’au remboursement des commissions prélevées et au paiement de dommages-intérêts, outre diverses demandes accessoires à titre subsidiaire.

Le Tribunal de Commerce de Paris, par jugement en date 17 mars 2011, a :

– Condamné la société BNP-Paribas à verser à M. [K] à titre de dommages et intérêts la somme de 100.000€,

– Débouté M. [K] de sa demande de remboursement des commissions prélevées

– Condamné la société BNP-Paribas à payer la somme de 10.000€ à M. [K] au titre de l’article 700 CPC.

– Débouté les parties de leurs autres demandes.

M. [K] a interjeté appel de ce jugement.

Par arrêt du 14 mars 2013, la cour d’appel de Paris a :

– infirmé le jugement déféré en ce qu’il avait condamné la société BNP-Paribas à payer à M. [K] à la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts et débouté M. [K] de sa demande en remboursement des commissions prélevées,

et, statuant à nouveau, a :

– Dit que la société BNP-Paribas a exécuté son obligation de restitution de la chose déposée dans l’état où elle se trouvait à la clôture du compte ;

– Condamné la société BNP-Paribas à payer à M. [K] la somme de 5.694,63€ au titre des frais et commissions perçues avec intérêts au taux légal à compter de cette décision.

– Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 CPC.

– Rejeté toute autre demande.

[K] a formé un pourvoi contre cette décision devant la Cour de cassation.

Par un arrêt du 8 juillet 2014 rendu au visa des articles 1134 et 1930 du Code civil la Cour de cassation, relevant l’insuffisance des motifs retenus par la cour d’appel, a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l’arrêt du 14 mars 2013 pour défaut de base légale.

Vu le renvoi des parties devant la cour d’appel de Paris autrement composée prononcé par la Cour de cassation,

Vu les dernières conclusions signifiées le 8 décembre 2015 par M. [K], appelant à la présente instance, par lesquelles il est demandé à la cour de :

– déclarer recevable et fondé l’appel interjeté par M. [E] [K] du jugement du Tribunal de Commerce de Paris en date du 17 mars 2011,

Y faisant droit,

– Infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions à l’exception de celles relatives à l’indemnité allouée à M. [E] [K] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

A titre principal :

– Dire et juger M. [E] [K] recevable et bien fondé en ses demandes ;

– Dire et juger que les opérations suivantes effectuées par la société BNP Paribas sur les comptes de M. [E] [K], soit :

* l’achat de 136.192,44 USD le 28 juin 2007, pour une valeur de 102.303,01 euros,

* l’achat de 50.750 USD le 19 juillet 2007, pour une valeur de 36.898,36 euros,

* l’achat de 363.937 USD le 4 septembre 2007, pour une valeur de 273.636,84 euros,

* l’achat de 1.000.000 USD le 28 mars 2008, pour une valeur de 751.879,70 euros,

lui sont inopposables ;

En conséquence,

– Condamner la société BNP Paribas à restituer et donc à payer à M. [E] [K] la somme de 1.164.717,91 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 28 mars 2008 ;

– Condamner la société BNP Paribas à fournir à M. [E] [K] le dernier relevé du compte courant en dollars américains à la date de clôture du compte, ceci dans les huit jours de la signification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

– Condamner la société BNP Paribas à fournir à M. [E] [K] des relevés de comptes courant en euros et en dollars américains à la date de clôture des comptes modifiés et comportant un solde tenant compte de la restitution ordonnée par la Cour, ceci dans les huit jours de la signification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

Subsidiairement, pour le cas où la Cour estimerait devoir tenir compte des opérations d’achats et de revente des dollars pour chiffrer le montant des euros à restituer à M. [K] :

– Condamner la société BNP Paribas à restituer et donc à payer à M. [E] [K] la somme de 170.188,03 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 28 mars 2008 ;

A titre plus subsidiaire :

– Condamner la société BNP Paribas à payer à M. [E] [K] la somme de 286.656,03 euros à titre de dommages-intérêts ;

En tout état de cause :

– Condamner la société BNP Paribas à payer à M. [E] [K] la somme de 5.694,63 euros au titre des frais indûment prélevés avec intérêts légaux à compter de l’arrêt à intervenir ;

– Condamner la société BNP Paribas à payer à M. [E] [K] la somme de 10.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

– Débouter BNP Paribas de l’ensemble de ses demandes ;

– Condamner la société BNP Paribas aux dépens d’appel qui seront directement recouvrés par Maître Frédérique ETEVENARD, avocat, par application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

***

Vu les dernières conclusions signifiées le 10 décembre 2015 par la société BNP-Paribas, par lesquelles il est demandé à la cour de :

– débouter Monsieur [E] [K] exerçant sous le nom commercial «BK PHOTO-BK DIRECT» de l’intégralité de son argumentation et de ses demandes, sur quelque fondement et montant que ce soit, et plus généralement de son appel ;

– confirmer le jugement du Tribunal de Commerce de Paris en date du 17 mars 2011 en ce qu’il a débouté Monsieur [K] de ses prétentions à obtenir le paiement de la somme de 1.164.717,91 € et au titre des frais dont il sollicite le remboursement ;

– l’infirmer pour le surplus en rejetant toute demande de condamnation de BNP Paribas au paiement de dommages-intérêts, pour quelque montant que ce soit ;

– condamner Monsieur [E] [K] à payer à BNP Paribas la somme de 10.000 € pour procédure abusive et celle de 8.000 € au titre de l’article 700 du CPC.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande en restitution de la somme de 1.164.717,91 euros

[K] soutient qu’il n’a jamais autorisé la société BNP-Paribas à réaliser l’achat de devises, et que dès lors les quatre opérations de d’achat de dollars effectuées de juin 2007 à mars 2008 lui sont inopposables et ce d’autant que, selon lui la convention d’ouverture de compte courant s’analyse en un contrat de dépôt et que, dès lors la BNP n’aurait dû se dessaisir des fonds déposés que sur ses instructions, ce dont elle n’apporte pas la preuve ; selon M. [K], au moment de l’achat de 1 million de dollars, le 28 mars 2008, son compte en euros aurait été insuffisamment provisionné pour pouvoir réaliser une telle opération, d’autant plus que le 27 novembre 2007 la société BNP-Paribas aurait résilié la ligne de crédit dont il bénéficiait dans ses livres, en sorte qu’il n’aurait de toute façon pas disposé des fonds nécessaires pour réaliser l’achat même s’il l’avait effectivement ordonné ;

M. [K] excipe sur ce point de la mauvaise foi dont aurait fait preuve la société BNP-Paribas dans ses conclusions, reposant sur des affirmations inexactes sur les faits en cause : elle affirmerait à tort qu’il bénéficiait d’une ligne de crédit, alors même qu’elle aurait résilié cette ligne par lettre du 27 novembre 200 ; que l’état du compte en euros avait permis l’achat de 1.000.000 dollars, soit plus de 750.000€ le 28 mars 2008, quand son solde était de l’ordre de 50.000€ ; il soutient que la banque l’aurait dans une lettre du 27 novembre 2007 informé de la mise en place de deux contrats « Flexiterm » de 500.000 dollars chacun, mais aurait pourtant acheté 1.000.000 dollars au titre du second le 1er avril 2008 ; qu’elle aurait inversé l’ordre des opérations d’achat de dollars du 1er avril 2008 dans les relevés qu’elle a apportés aux débats pour masquer le fait que le compte en euros était insuffisamment provisionné ;

M. [K] conteste avoir tacitement accepté les achats de dollars, arguant de ce qu’il aurait toujours adressé ses ordres de virement par écrit signé, ce que la société BNP-Paribas aurait elle-même exigé, et ce dont en l’espèce elle n’apporterait pas la preuve ;

Il estime que la réception de relevés de compte emporterait en tout état de cause tout au plus une présomption simple d’acceptation des opérations litigieuses, laquelle est en l’espèce renversée, comme le prouve un courriel en date du 7 novembre 2007 adressé à la banque dans lequel il protestait contre les achats opérés sur le compte en dollars et demandait leur annulation – ce dont la banque a accusé réception le 27 novembre ; M. [K] affirme avoir réitéré ces protestations à plusieurs reprises jusqu’à la mise en demeure du 28 mars 2008 ;

M.[K] déduit de l’arrêt de cassation qu’il a été considéré que c’est sans fondement que les juges du fond ont déduit que des télécopies produites par la BNP et portant sur des ordres de virement prouvaient qu’il avait donné son accord aux quatre opérations de débit sur son compte en euros en vue d’acheter des dollars ;

Il affirme que la mention manuscrite « attention utilisation du Flexiterm » en lieu et place des références du compte en euros aurait été ajoutée postérieurement par la BNP sans son accord et il invoque deux courriers en date du 28 août et 28 septembre 2007 dans lesquels la banque lui aurait proposé de conclure une convention « destinée à régir les opérations sur instruments financiers à terme » : par ces lettres la banque aurait cherché à régulariser a posteriori le recours au « Flexiterm » pour acheter les dollars, ce qui prouverait qu’elle était consciente d’agir sans l’accord de son client ;

M. [K] estime que la mention « Appeler la salle de marché » qu’il a apposée sur des opérations de virement ne sauraient prouver qu’il consentait par là à la conclusion de contrats « Flexiterm », qui portent sur des taux fixes ; a contrario, la mention ferait référence à une pratique de négociation des taux de change pratiqués sur des virements, incompatible avec l’objet du contrat ; il évoque une « lettre d’entrée en relation avec la salle des marchés » produite par la banque, laquelle aurait cherché à entretenir une confusion entre une relation avec la salle des marchés pour des virements ponctuels en devises étrangères et la convention cadre portant sur des opérations à taux fixe, et il fait valoir que cette lettre est en elle-même inexploitable, car non-signée ; qu’en outre elle signifierait que la banque exige que les instructions portant sur des achats de devise soient formulées de façon écrite, ce qui prouverait là encore qu’il n’a pas pu donner son accord tacite aux opérations ;

M. [K] indique que la banque ne produit aux débats aucune pièce nouvelle que celles qui ont été mentionnées dans l’arrêt de la Cour de Cassation du 8 juillet 2014, dans lequel la cour a indiqué que les motifs relevés par la première cour d’appel étaient « insuffisants à caractériser l’accord de M. [K] à ces opérations » ;

M. [K] s’estime dès lors fondé à réclamer la restitution des sommes engagées sans son accord, soit 1.164.717,91 euros découlant non pas à l’annulation des débits opérés depuis le compte en euros, mais en la restitution des sommes déposées en vertu du contrat de dépôt, en sorte que ces chiffres ne correspondraient pas en l’estimation d’un préjudice qui aurait pu être compensé, mais en l’exécution de son obligation de restitution de la chose par le dépositaire ; en conséquence il demande d’écarter les prétentions de société BNP-Paribas selon lesquelles rien ne saurait lui être restitué dès lors qu’il aurait déjà utilisé les sommes réclamées pour payer ses fournisseurs et que le reste aurait été crédité sur son compte en euros ;

Subsidiairement, M. [K] estime que s’il était tenu compte des sommes créditées sur son compte en euros au titre de la revente des dollars achetés lors des 4 opérations litigieuses, il conviendrait alors de prendre en compte le montant de la perte subie par l’évolution des cours respectifs de l’euro et du dollar entre les achats et les reventes opérés sans son accord : selon lui ce préjudice s’élève à 170 188,03 €, que la banque serait tenue de lui restituer ;

La BNP soulève à titre liminaire la contradiction fondamentale qui affecte selon elle l’argumentation de M. [K] qui demanderait dans un premier temps l’inopposabilité des quatre opérations d’achat de dollars qu’il conteste, puis se prévaudrait de la perte de chance de réaliser des gains sur la revente des dollars dont il n’aurait précisément jamais ordonné l’achat ; qu’il en découlerait des demandes successives qui sont radicalement incompatibles les unes avec les autres : qu’il est en effet contradictoire de contester avoir demandé l’ouverture d’un compte en dollars et demandé les quatre opérations de change, pour ensuite soutenir la perte de chance de réaliser des gains de change ; que ce type d’argumentation est contraire au principe selon lequel il n’est pas possible de soutenir successivement deux thèses contradictoires pour parvenir à ses fins, peu important, au regard de l’importance de la contradiction, que les deux demandes soient faites respectivement à titre principal et subsidiaire ;

La BNP soutient ensuite que le fondement juridique de la demande n’est pas précisé et que la réalité du débat est, non la notion de dépôt mais la question de savoir si M.[K] avait donné son accord aux quatre opérations d’achat de dollars, qu’il ne peut pas ensuite voir déclarées inopposables ; elle estime incohérente la position de M.[K], qui demande la restitution des sommes contestées alors même qu’il aurait utilisé une partie des dollars achetés ; elle juge « absurde » la position de M.[K] selon laquelle il n’aurait pas été au courant des opérations querellées alors qu’elles se sont échelonnées sur plusieurs mois, ou même de considérer qu’il n’était pas au courant de l’ouverture du compte en dollars ; elle relève que, eu égard au montant des opérations, M.[K] aurait réagi plus tôt s’il n’y avait pas donné son accord préalable ;

La BNP précise en outre qu’à la date du 28 mars 2008 M.[K] bénéficiait d’une ouverture de crédit, en sorte que son compte en euros était suffisamment provisionné pour procéder à l’achat de 1.000.000 dollars ; elle rappelle qu’en adhérant au contrat « BNP Net Evolution » M.[K] a accepté les conditions générales d’utilisation, aux termes desquelles les opérations figurant sur un relevé de comptes sont réputées acceptées faute de contestation dans le mois suivant leur réception ; que sur ce point la jurisprudence pose une présomption simple d’approbation des opérations affichées sur les relevés de compte, qui ne pourrait être renversée que par la preuve de leur contestation par le client durant le délai de prescription ;

La BNP soutient également que si la Cour de cassation a jugé que les motifs retenus par la cour d’appel dans son arrêt du 14 mars 2013 étaient insuffisants à caractériser l’accord de M.[K] aux opérations, pour autant d’autres éléments permettraient d’en établir la réalité ; elle insiste ainsi sur le fait que, en ayant utilisé les sommes conservées sur le compte en dollars, M.[K] admettrait par là avoir connu son existence et qu’il serait paradoxal qu’il conteste uniquement les opérations qui apparaissent au crédit du compte en dollars, et pas celles à son débit ; elle produit d’ailleurs deux ordres de virement depuis le compte en dollar signés par M.[K] ; elle argue de ce que le relevé d’opérations du compte en dollars révèle que l’ensemble des sommes détenues sur ce compte correspondraient à des débits du compte en euros, et que l’intégralité de ces sommes auraient été soit utilisées par M.[K] soit créditées sur son compte en euros, en sorte qu’il ne resterait rien à lui payer ;

Elle avance que M.[K] a à plusieurs reprises demandé l’accès à la « salle du marché », qu’il aurait obtenu, mais qu’il aurait refusé de se plier aux règles en vigueur, en effectuant contre l’accord de la banque plusieurs dépôts dont la BNP estime qu’ils seraient anormalement élevés pour provenir de son activité professionnelle ; ce refus de M.[K] de se plier aux règles l’aurait conduite à mettre un terme à leurs relations, bien que le système de change mis en place, initialement autorisé par elle, aurait été favorable à son client ;

Elle considère que M.[K] entend faire valoir des contradictions entre les courriers qu’elle lui a adressés et les relevés de compte, alors que les chiffres des différentes écritures qu’elle produit seraient parfaitement cohérents entre eux ;

Sur quoi,

Doit être écarté le moyen tiré de l’estoppel quant aux contradictions qui figureraient dans les conclusions de M.[K], et qui ne procèdent en réalité que du droit d’une partie de tirer successivement les conséquences d’un ou de faits qui seraient établi à l’encontre de ses moyens principaux ;

S’agissant du fondement juridique des demandes de M.[K], la BNP ne peut elle-même les dire non précisées tout en mentionnant ensuite qu’elles reposent à tort sur la notion de dépôt ;

C’est effectivement à bon droit que M.[K] revendique le principe de l’obligation par la banque de restituer la chose déposée dans l’état où elle se trouvait à la clôture du compte ;

Cette prétention repose sur l’annulation des quatre opérations d’achat de dollars américain dont M.[K] conteste avoir donné l’ordre ;

Il appartient en conséquence à la banque de justifier par tous moyens de la réalité de l’accord de son client portant sur les opérations effectivement réalisées ;

Il convient de rappeler que l’ordre de virement est habituellement analysé comme un mandat pour lequel aucune forme n’est imposée et qu’il peut ainsi être donné verbalement, par télécopie ou tout autre support ; que la preuve de cet ordre peut être rapporté par tout moyen, et qu’en cas de contestation par le client, la charge de la preuve de la régularité de l’ordre pèse sur le prestataire de service, soit le banquier ; que lorsqu’un utilisateur de services de paiement nie avoir autorisé une opération de paiement qui a été exécutée, ou affirme que l’opération de paiement n’a pas été exécutée correctement, il incombe à son prestataire de services de paiement de prouver que l’opération en question a été authentifiée, dûment enregistrée et comptabilisée et qu’elle n’a pas été affectée par une déficience technique ou autre ; que l’utilisation de l’instrument de paiement telle qu’enregistrée par le prestataire de services de paiement ne suffit pas nécessairement en tant que telle à prouver que l’opération a été autorisée par le payeur ou que celui-ci n’a pas satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en la matière ;

Par ailleurs, l’approbation donnée à un relevé de compte faisant mention d’un virement implique la reconnaissance par le client que le virement a été exécuté sur ses instructions ;

Il n’est en l’espèce pas justifié d’une telle approbation ;

La BNP se réfère du reste au contrat « BNP Net Evolution » dont M.[K] aurait accepté les conditions générales d’utilisation, mais la pièce n° 12 sur laquelle elle s’appuie ne comporte aucune précision sur une clause en fixant les modalités et les conditions générales de fonctionnement du compte ne sont elles-mêmes pas produites ;

En tout état de cause, la réception sans protestation ni réserve des relevés de compte fait présumer l’existence et l’exécution des opérations qu’ils indiquent, mais elle n’empêche pas le client, pendant le délai convenu ou, à défaut, pendant le délai de prescription, de reprocher à leur auteur l’irrégularité de ces opérations ;

La BNP entend justifier de prise en compte des ordres qui lui ont été donnés par le fait que, d’une part, le 25 juin 2007, M. [K] lui a adressé deux ordres de virement, l’un de 80.000 USD au profit de Digital Inc et l’autre de 56.063 USD au profit de la Société Union Camera à débiter de son compte en euros no, que, d’autre part, Mme [V], conseillère de clientèle, avait apposé sur chacun d’eux la mention « Attention utilisation de Flexiterm, voir avec [F] [S] (salle des marchés) », avait barré le numéro du compte en euros de BK Photo pour le remplacer par la mention « compte en devises » et avait viré la somme correspondante au crédit d’un compte en dollars ouvert au nom de BK Photo ;

Cependant, ce faisant, la banque ne répond pas à la question de l’utilisation des fonds en cause lors même qu’elle ne discute pas réellement dans ses écritures que les ordres passés ont été intégrés dans des opérations « Flexiterm » dont elle ne justifie pas que M.[K] ait accepté les conditions ; que la référence à l’apposition de sa signature au dessous de la mention « fax appeler la salle des marchés et le client(moi) !!!!!!! » n’est à cet égard pas de nature à établir cette acceptation ; les demandes d’accès de M.[K] à la salle des coffres ne valent pas plus preuve de l’adhésion de ce dernier aux conditions spécifiques du Flexiterm ;

Or il n’est pas discutable que pour l’ensemble des opérations en cause les ordres de virement initialement donnés ont abouti à des achats d’USD ; que M.[K] a lui-même protesté le 7 novembre 2007 contre cette interprétation de ses directives, ce à quoi la BNP a uniquement opposé l’ouverture d’un compte en dollars le 21 mars précédent et le fait que M.[K] n’a pas discuté et la mise en place de deux contrats Flexiterm ;

Force est de constater que cette argumentation ne permet pas de valider les opérations spécifiques effectuées sans l’aval concret de M.[K] ;

Il en est de même pour les deux autres opérations effectuées en septembre 2007 et mars 2008 pour lesquelles la BNP ne peut se prévaloir d’aucun ordre spécifique donné par M.[K] – l’achat de 1 000 000 USD étant en outre postérieur aux protestations du 7 novembre 2007 renouvelées par M.[K] le 28 mars 2008 ;

Il a été rappelé plus haut que ces opérations ne peuvent pas plus être validées par un accord implicite découlant de la réception sans protestation ni réserve des relevés de compte ; elles sont en conséquence inopposables à M.[K] ;

Le préjudice subi par M.[K] du fait de ces agissements ne relève pas de l’attribution de dommages et intérêts au titre d’une perte de chance de réaliser un bénéfice de change dès lors qu’est en cause une obligation pour la banque de restituer les sommes déposées en ses livres, peu important dans ce cas que le compte ait mouvementé ;

Cette restitution est indépendante de la prise en compte globale de l’ensemble des opérations effectuées éventuellement au bénéfice de M.[K] et dont le décompte pourrait compenser le montant des sommes qui lui ont été confiées, soit la somme de 1.164.717,91 € outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 28 mars 2008 ;

Le jugement est en conséquence infirmé ;

Il n’existe aucun motif de présumer que la BNP ne fournira pas à M.[K] l’ensemble des décomptes procédant de la clôture du compte et les demandes de ce dernier sur ce point sont en conséquence rejetées ;

Sur la demande en restitution des sommes prélevées par BNP Paribas au titre de frais bancaires

M.[K] se prévaut d’une lettre en date du 28 juin 2006 dans laquelle la BNP lui aurait confirmé son accord sur les taux de change applicables aux opérations opérées sur ses comptes ; selon lui, la banque n’a pas respecté ses engagements à cet égard ;

La BNP oppose qu’il est singulier que M.[K] n’ait soulevé qu’au bout de trois ans les irrégularités alléguées des frais bancaires ; que ces frais ont un caractère contractuel et lui sont dès lors opposables ; qu’elle avait contractuellement la possibilité de les modifier à tout moment ; que M.[K] lui-même serait incapable d’évaluer les sommes indues dès lors qu’il a revu ses demandes à la baisse en cours de procédure ;

À l’appui de son argumentation la BNP produit diverses conditions particulières du compte signées par M.[K], une lettre qu’elle lui a adressée en 2006 ainsi que deux conventions d’acceptation des paiements à distance qui justifieraient des tarifs appliqués ; elle mentionne une ristourne proposée en juin 2006 « sous réserve de l’accord direction » ; Selon le tableau qu’il verse à l’appui de ses prétentions, le montant dû par l’autre partie s’élève à 5694,63€ ;

La cour relève qu’il n’est pas allégué par M.[K] que les frais prélévés par la BNP sur des opérations qui lui sont déclarées inopposables ne peuvent être validés, le débat portant de part et d’autre sur l’application de l’accord de 2006 ;

M.[K] verse aux débats un nouveau tableau récapitulatif des frais discutés et force est de constater que, au delà d’une argumentation de principe, la banque n’en établit pas le caractère erroné ; elle n’y oppose du reste pas son propre décompte ; le décompte de M.[K] sera en conséquence retenu ;

Ni les circonstances du litige, ni les éléments de la procédure ne permettent de caractériser à l’encontre de M.[K] une faute de nature à faire dégénérer en abus le droit de se défendre en justice ; il n’est pas fait droit à la demande de dommages intérêts formée à ce titre ;

Aucune considération tirée de l’équité ne conduit à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

Dit que les opérations suivantes effectuées par la société BNP Paribas sur les comptes de M. [E] [K], soit :

– l’achat de 136.192,44 USD le 28 juin 2007, pour une valeur de 102.303,01 euros,

– l’achat de 50.750 USD le 19 juillet 2007, pour une valeur de 36.898,36 euros,

– l’achat de 363.937 USD le 4 septembre 2007, pour une valeur de 273.636,84 euros,

– l’achat de 1.000.000 USD le 28 mars 2008, pour une valeur de 751.879,70 euros,

lui sont inopposables ;

En conséquence,

Condamne la société BNP Paribas à restituer et donc à payer à M. [E] [K] la somme de 1.164.717,91 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 28 mars 2008 ;

Condamne la société BNP Paribas à payer à M. [E] [K] la somme de 5.694,63 euros au titre des frais prélevés avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne la société BNP Paribas aux dépens d’appel qui seront directement recouvrés par Maître Frédérique ETEVENARD, avocat, par application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Le GreffierLe Président

B.REITZERL. DABOSVILLE

 


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