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20 avril 2017
Cour de cassation
Pourvoi n°
15-23.600
COMM.
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 20 avril 2017
Rejet
M. RÉMERY, conseiller doyen faisant fonction de président
Arrêt n° 533 F-D
Pourvoi n° N 15-23.600
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par M. [D] [S], domicilié [Adresse 1],
contre l’arrêt rendu le 17 juin 2015 par la cour d’appel de Riom (3e chambre civile et commerciale), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. [S] [Y] [P], domicilié [Adresse 2],
2°/ à M. [W] [D], domicilié [Adresse 3],
3°/ à la société Mandatum, société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], prise en la personne de M. [J] [Z], en qualité de liquidateur judiciaire de la société RL construction,
4°/ au procureur général près la cour d’appel de Riom, domicilié [Adresse 5],
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 21 février 2017, où étaient présents : M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vaissette, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller, M. Graveline, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Vaissette, conseiller, les observations de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de M. [S], de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de la société Mandatum, ès qualités, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Riom, 17 juin 2015), qu’après la mise en liquidation judiciaire de la société RL construction (la société), le 3 décembre 2010, le liquidateur a assigné en responsabilité pour insuffisance d’actif MM. [D] et [Y] [P], en leur qualité de dirigeant de droit, et M. [S], en tant que dirigeant de fait ; que ce dernier a également été assigné en prononcé de faillite personnelle ou d’interdiction de gérer ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. [S] fait grief à l’arrêt de le condamner à combler l’intégralité de l’insuffisance d’actif de la société et de prononcer à son encontre une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute personne morale, pour une durée de cinq ans alors, selon le moyen, que la qualité de dirigeant de fait au sens et pour l’application des dispositions de l’article L. 651-2 du code de commerce ne peut être déduite que de l’accomplissement, en toute indépendance, d’actes manifestant un pouvoir de gestion et de direction de l’entreprise ; qu’en l’espèce, pour retenir que M. [S] avait eu la qualité de gérant de fait de la société, légalement dirigée par M. [D] entre le 17 décembre 2007 et le 31 août 2010, la cour d’appel, par motifs propres et adoptés, a relevé que son épouse, alors dirigeante de droit de la société, lui avait donné tous pouvoirs « pour tout ce qui concerne la société (administratif, financier, clientèle et gestion du personnel » avec procuration sur les comptes bancaires ; qu’elle a également constaté qu’il résultait des témoignages du comptable de la société, du gérant de droit M. [D], d’un courrier du CIC du 1er février 2011 et des dires mêmes de M. [S], que ce dernier avait gardé mandat pour le fonctionnement du compte bancaire de la société, les premiers juges ayant également constaté qu’il aurait négocié avec des fournisseurs et des clients ; qu’enfin, la cour d’appel a estimé que si M. [S] contestait la sincérité des attestations versées aux débats par le liquidateur de la société, il n’apportait aucune explication satisfaisante sur l’enrichissement personnel objectif dont il avait bénéficié au détriment de la société qui avait fait réaliser des travaux pour son compte ; qu’en statuant de la sorte, aux termes de motifs impropres à caractériser l’accomplissement en toute indépendance d’actes concrets manifestant un pouvoir de gestion et de direction de la société, lequel ne pouvait être déduit de la seule existence de procurations sur les comptes et documents de la société, ni de l’enrichissement procuré par la société, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 651-2 du code de commerce ;
Mais attendu que l’arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que M. [S] avait procuration sur les comptes bancaires de la société de 1998 à décembre 2010, qu’il n’avait aucun lien de subordination avec le gérant de droit qui se trouvait sous son emprise totale, qu’il signait la plupart des marchés et les commandes, qu’il était l’interlocuteur privilégié des salariés, des clients, des banques et des assurances et que le site internet de la société indiquait son nom et son numéro de téléphone ainsi que la mention « depuis 1985, [Y] [D] et son équipe de douze personnes réalisent tous vos travaux de maçonnerie » ; qu’en déduisant de ces constatations et appréciations que M. [S] avait été le dirigeant de fait de la société, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. [S] fait grief à l’arrêt des condamnations prononcées à son encontre et du rejet de ses demandes tendant à voir juger que M. [D] avait commis des fautes de gestion ayant provoqué l’insuffisance d’actif de la société RL construction, et à la condamnation de M. [D] à combler l’insuffisance d’actif de cette société alors, selon le moyen, que tout dirigeant, de droit ou de fait, peut être condamné au comblement de l’insuffisance d’actif que sa faute de gestion a contribué à créer ; que pour mettre hors de cause M. [D], gérant de droit de la société RL constructions entre le 31 décembre 2007 et le 31 août 2010, la cour d’appel a retenu que ce dernier s’était « trouvé contraint par son statut d’associé minoritaire et son lourd endettement pour sa participation financière au capital de la société » et qu’il avait finalement donné sa démission après avoir établi un rapport de gérance relatant son impuissance face à M. [S], ce qui avait été aussitôt confirmé lors de l’assemblée générale du 1er septembre 2010 par le rejet de ses demandes de résolutions tendant à la désignation d’un expert pour vérifier le coût des travaux effectués pour le compte de ce dernier ainsi que la valeur locative des locaux exploités par la société RL construction ; qu’en statuant par de tels motifs, inaptes à décharger le gérant de droit de sa responsabilité dans la mauvaise gestion de la société, ni rechercher si M. [D] n’avait pas commis des fautes de gestion, attestées par la chute vertigineuse du chiffre d’affaires de la société RL constructions entre 2007 et 2010, puis pour avoir tardé à démissionner alors qu’il ne maîtrisait prétendument plus la direction de la société, la cour d’appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 651-2 du code de commerce ;