Location de matériel : 22 avril 2022 Cour d’appel de Toulouse RG n° 20/03072

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Location de matériel : 22 avril 2022 Cour d’appel de Toulouse RG n° 20/03072
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22 avril 2022
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
20/03072

22/04/2022

ARRÊT N° 2022/272

N° RG 20/03072 – N° Portalis DBVI-V-B7E-NZXS

CP/KS

Décision déférée du 08 Octobre 2020 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( 18/01712)

J J GUICHARD

SECTION COMMERCE CH2

[N] [M] épouse [C]

C/

SAS DGSOG, venant aux droits de la SAS SOGECER GROUP

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT DEUX AVRIL DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

Madame [N] [M] épouse [C]

1 IMPASSE DES HAMEAUX

31470 SAINT LYS

Représentée par Me Yaële ATTALI, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE

SAS DGSOG, venant aux droits de la SAS SOGECER GROUP

7 chemin des Carnières

31170 TOURNEFEUILLE

Représentée par Me Thierry DEVILLE de la SARL ALIZE 360, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C. PARANT, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

S. BLUME, présidente

M. DARIES, conseillère

C. PARANT, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par S. BLUME, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [N] [M], épouse [C], a été embauchée le 15 avril 1991 par la SAS Sogecer, devenue Sogecer Group, en qualité de secrétaire dactylo suivant contrat de travail à durée indéterminée non écrit.

Par avenant à son contrat du 1er janvier 2009, Mme [C] a occupé les fonctions de secrétaire de direction.

Par jugement du 4 juillet 2017, le tribunal de commerce de Toulouse a ouvert une procédure de sauvegarde à l’égard de la société SAS Sogecer Equipement Routier, une des filiales de la société Sogecer Group.

Par jugement du 17 juillet 2018, un plan de sauvegarde de la société SAS Sogecer Equipement Routier a été arrêté et la SCP Cigliolo-Baron-[U], prise en la personne de M. [U], a été nommée commissaire à l’exécution du plan.

Après avoir été convoquée par courrier du 5 juillet 2018 à un entretien préalable au licenciement fixé au 16 juillet 2018, Mme [C] a été licenciée par courrier

du 27 juillet 2018 pour motif économique.

Le 16 juillet 2018, l’employeur a remis en main propre contre décharge à Mme [C] une lettre lui indiquant les motifs de la procédure de licenciement pour motif économique et contenant les informations relatives au contrat de sécurisation professionnelle qui lui a été proposé durant l’entretien.

Le 26 juillet 2018, Mme [C] a accepté ce contrat de sécurisation professionnelle, de sorte que son contrat de travail a été rompu le 6 août 2018, à l’issue du délai légal de réflexion de 21 jours.

Les 4 salariés de la société Sogecer Group ont fait l’objet d’une mesure de licenciement pour motif économique et ont accepté également le contrat de sécurisation professionnelle.

Le 9 août 2018, Mme [C] a adressé une lettre recommandée avec accusé de réception à son employeur en lui demandant la communication des critères d’ordre des licenciements.

L’employeur n’a pas répondu au courrier.

Mme [C] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse le 23 octobre 2018 pour contester son licenciement et demander le versement de diverses sommes.

Par jugement du 8 octobre 2020, le conseil de prud’hommes de Toulouse a :

-dit que la SAS DGSOG (venant aux droits de la société Sogecer Group) a respecté le formalisme de la lettre de licenciement pour motif économique de Madame [N] [C],

-dit qu’il ne peut pas être reproché à la SAS DGSOG (venant aux droits de la société Sogecer Group) d’irrégularité dans la procédure de licenciement économique,

-dit que Madame [N] [C] n’a pas fait l’objet de mesure de discrimination en raison de son âge lors de son licenciement pour motif économique,

-dit que le licenciement de Madame [N] [C] n’est pas entaché de nullité,

-dit que la SAS DGSOG (venant aux droits de la société Sogecer Group) a satisfait à son obligation de reclassement,

-dit que la SAS DGSOG (venant aux droits de la société Sogecer Group) avait des difficultés économiques,

-dit que le licenciement pour motif économique de Madame [N] [C] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

-dit que Mme [C] n’apporte aucun élément de fait permettant de justifier d’une réparation financière du fait de la non réponse de son employeur à son courrier du 9 août 2018 sur les critères d’ordre des licenciements,

-en conséquence,

-débouté Madame [N] [C] de l’intégralité de ses demandes,

-débouté la SAS DGSOG (venant aux droits de la société Sogecer Group) de sa demande de paiement de la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamné Madame [N] [C] aux entiers dépens de l’instance.

Par déclaration du 10 novembre 2020, Mme [C] a interjeté appel de ce jugement dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.

Par dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique

le 8 mars 2022, auxquelles il est expressément fait référence, Mme [N] [M] épouse [C] demande à la cour de :

-infirmer le jugement dont appel,

-statuant à nouveau,

-fixant la moyenne des salaires à 2 832,48 € (moyenne des 3 derniers mois),

-à titre principal :

*juger que le licenciement économique de Mme [C] est nul comme constituant une mesure discriminatoire en raison de l’âge et/ou en raison d’une fraude aux règles du transfert d’entreprise,

*condamner la société DGSOG, venant aux droits de la société Sogecer Group, à payer à Mme [C] des dommages et intérêts à hauteur de 102 000 € en réparation de son préjudice,

-à titre subsidiaire :

*juger que le licenciement économique de Mme [C] ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

*condamner en conséquence la société DGSOG, venant aux droits de la société Sogecer Group, à payer à Mme [C] la somme de 53 817,12 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice,

-en tout état de cause :

*condamner la société DGSOG, venant aux droits de la société Sogecer Group, à payer à Mme [C] les sommes de :

-5 668,98 € au titre de l’indemnité de préavis,

-566,90 € au titre des congés payés y afférents,

-2 832,48 € pour absence de réponse sur les critères d’ordre des licenciements dans les 10 jours,

-4 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

*condamner la société DGSOG, venant aux droits de la société Sogecer Group, aux entiers dépens.

Par dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique

le 24 mars 2022, auxquelles il est expressément fait référence, la SAS DGSOG, venant aux droits de la SAS Sogecer Group demande à la cour de :

-confirmer le jugement dont appel,

-dire et juger que :

*la société avait des difficultés économiques,

*compte tenu des cessions des fonds de commerce du groupe, et de la baisse du chiffre d’affaires généré pour la société, il a été nécessaire de supprimer l’ensemble des postes de l’entreprise,

*aucune possibilité de reclassement n’existait dans le groupe Sogecer malgré une recherche de la société Sogecer Group,

*le licenciement de Mme [C] est justifié par un motif économique,

*la procédure de licenciement a été scrupuleusement respectée et notamment l’obligation de reclassement et les critères d’ordre de licenciement,

*Mme [C] n’a fait l’objet d’aucune discrimination de la part de son employeur, lors de la procédure de licenciement,

*il n’existe aucune fraude au transfert d’entreprise,

*le licenciement de Mme [C] n’est donc pas nul,

*le licenciement n’est pas dénué de cause réelle et sérieuse,

*Mme [C] a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle et que le contrat de travail a donc été rompu d’un commun accord le 6 août 2018,

*elle ne peut pas réclamer le paiement d’une indemnité de préavis dans la mesure où elle ne l’a pas effectué et dans la mesure où celle ci a été payée directement à pôle emploi dans le cadre de la participation au financement du CSP,

*Mme [C] ne peut se prévaloir d’aucun préjudice,

-débouter en conséquence, Mme [C] de l’ensemble de ses demandes,

-condamner Mme [C] à lui payer une somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-la condamner aux entiers dépens.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 25 mars 2022.

MOTIFS

Sur l’irrégularité prétendue de la procédure de licenciement et sur la demande de dommages et intérêts pour défaut de réponse à la demande relative aux critères d’ordre des licenciements

Mme [C] soutient que la société Sogecer Group n’a pas respecté la procédure de licenciement : il lui a été remis en effet, lors de l’entretien préalable de licenciement du 16 juillet 2018, une lettre énonçant le motif économique qui vaut lettre de licenciement alors qu’il appartenait à la société Sogecer Group de respecter le délai de 7 jours ouvrables de l’article L. 1233-15 du code du travail. entre la tenue de l’entretien préalable de licenciement et la notification de la rupture.

La cour rappelle que l’employeur qui propose au salarié le bénéfice d’un contrat de sécurisation professionnelle doit lui adresser ou lui remettre avant son acceptation un écrit énonçant le motif économique du licenciement.

La lettre du 16 juillet 2018 remise à Mme [C] lors de l’entretien préalable de licenciement qui énonce les motifs de la rupture envisagée du contrat de travail lui a été remise en même temps que la proposition d’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle ; elle n’avait pas pour objet de notifier à Mme [C] son licenciement mais de l’informer du motif économique de la rupture, information nécessaire avant son éventuelle adhésion au contrat de sécurisation professionnelle.

La lettre de notification du licenciement a été adressée à Mme [C]

le 27 juillet 2018, soit plus de 7 jours après l’entretien préalable.

La cour estime, comme le conseil de prud’hommes, que la prétendue violation de l’article L.1233-15 du code du travail n’est pas constituée.

Mme [C] sollicite également des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’absence de réponse de l’employeur à sa demande du 9 août 2018 relative à l’ordre des licenciements.

Elle démontre qu’effectivement la société Sogecer Group n’a pas répondu à sa demande formée par application des articles L. 1233-17 et R. 1233-1 du code du travail.

Pour autant, les règles relatives à l’ordre des licenciements ne s’appliquent que si l’employeur doit opérer un choix parmi les salariés à licencier ; en l’espèce la société Sogecer Group a licencié tous ses salariés qui ont tous accepté le contrat de sécurisation professionnelle de sorte que Mme [C] est mal fondée à solliciter des dommages et intérêts en réparation de l’absence de réponse de son employeur à sa demande en l’absence de tout préjudice à ce titre.

Le jugement entrepris qui a rejeté sa demande sera confirmé de ce chef.

Sur la demande de nullité du licenciement pour discrimination en raison de l’âge

Mme [C] prétend qu’elle a été victime d’un licenciement discriminatoire en raison de son âge, soit 56 ans, et de son ancienneté, soit 27 ans, en faisant valoir qu’il n’est pas justifié que l’employeur ait choisi de supprimer son poste avant tout autre poste administratif du groupe Sogecer et ce, malgré ses compétences vantées dans tous ses entretiens d’évaluation ; elle expose qu’elle travaillait tant pour la société Sogecer Group, son employeur, que pour les 4 filiales du groupe, de sorte qu’elle estime discriminatoire le fait qu’elle ait été la seule licenciée parmi tous les salariés du groupe exerçant des fonctions administratives. Elle liste dans ses conclusions le nom de ces 6 autres salariées, toutes moins âgées et moins anciennes qu’elle.

Par application de l’article L.1132-1 du code du travail, aucune personne

ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage

ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié

ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l’article 1er de la loi du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L.3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

L’article L.1134 – 1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige relatif à l’application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l’article 1er de la loi

du 27 mai 2008 .

Au vu de ces éléments, il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination .

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles .

La cour constate que Mme [C] se prétend discriminée en raison de son âge et de son ancienneté par rapport à d’autres salariées administratives du groupe dont faisait partie son employeur.

Elle entend voir comparer sa situation à celle de salariées d’autres sociétés du groupe exerçant des fonctions administratives.

La cour considère que Mme [C] qui entend voir comparer sa situation avec celle de salariées n’appartenant pas à la même entreprise mais seulement au même groupe de sociétés et avec celle de salariées n’exerçant pas, comme elle, des fonctions de secrétaire de direction, ne présente pas d’éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, la société Sogecer Group ne pouvant être tenue de traiter la situation de Mme [C], sa salariée, comme celle des autres salariées administratives de son groupe, n’exerçant pas, au surplus les mêmes fonctions de secrétaire de direction.

Elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement nul pour discrimination en raison de son âge, par confirmation du jugement entrepris.

Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement nul en raison de la fraude au transfert d’entreprise

Mme [C] soutient encore que son employeur a commis une fraude

à l’article L. 1224-1 du code du travail en ne permettant pas que son contrat de travail soit transféré au sein de la société Malet, repreneur en juin 2018 des sociétés Sogecer Equipement Routier et Sogecer Location, alors qu’elle travaillait en grande majorité pour ces sociétés en sa qualité de secrétaire de direction de la société holding du groupe, la société Sogecer Group, comme elle l’établit par attestations. Elle ajoute que d’autres

salariées de la société Sogecer Group ont été reprises par la société Malet après la cession, notamment les deux comptables, Mmes [O] et [V]. La cour constatera la collusion frauduleuse entre la société Sogecer Group et la société Malet qui entraînera la nullité de son licenciement.

La société DGSOG s’y oppose en rappelant que Mme [C] ne faisait pas partie du personnel affecté aux fonds de commerce ou secteurs d’activité vendus à la société Malet en juin 2018 ; elle exerçait ses fonctions pour la société Sogecer Group, société holding du groupe, et son activité n’était nullement rattachée à un des fonds cédés à l’entreprise Malet ; elle pouvait, dans le cadre de l’objet social de la société holding, établir des courriers à l’en-tête des sociétés du groupe à la demande de son dirigeant. Elle ajoute que le travail administratif réalisé pour le compte des filiales était refacturé à la filiale par la société holding. Les deux comptables de la société Sogecer Group ont démissionné avant d’être embauchées par les sociétés Sogecer Equipement routier et Sogecer Génie Civil.

Il appartient à Mme [C] de rapporter la preuve de la fraude qu’elle invoque à l’article L. 1224-1 du code du travail aux termes duquel, lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise.

Il résulte des pièces versées aux débats que la société Malet a racheté en juin 2018 les fonds de commerce des sociétés Sogecer Equipement Routier et Sogecer Location, deux sociétés du groupe Sogecer dont la société Sogecer Group, employeur de Mme [C], était la holding.

Il est constant qu’elle n’était la salariée d’aucune de ces deux sociétés et elle démontre par les attestations et courriers versés aux débats que, dans le cadre de son contrat de travail de secrétaire de direction de la société Sogecer Group, elle a effectué les tâches de secrétariat des filiales du groupe, et notamment des tâches de préparation d’appels d’offres, du montage et du suivi de dossiers de sous-traitance et de la validation et de la facturation sous ERP.

La lecture de l’extrait K bis de la société Sogecer Group permet de démontrer que c’est dans le cadre de ses fonctions de secrétaire de direction de la société holding, Sogecer Group, dont l’objet social était la gestion administrative, commerciale, juridique, comptable, financière, informatique ainsi que la direction générale, l’animation et la coordination des sociétés du groupe et d’une façon générale, toutes prestations au profit de ses filiales, que Mme [C] a exercé ses tâches de secrétariat des filiales reprises par la société Malet ; les courriers qu’elle a rédigés sont ceux de M. [P], qui était, avant la cession le dirigeant de la société Sogecer Group et de toutes les filiales ; ils sont tous rédigés sous la même forme, quelle que soit la nom de la filiale concernée ; Mme [C] exécutait ainsi des tâches inhérentes à l’activité de la société holding, à savoir la gestion administrative des filiales du groupe.

La cour estime en conséquence que l’exécution de ces missions dans le cadre d’un contrat de travail conclu avec la société holding n’a pas eu pour effet de l’intégrer au personnel des filiales repris par la société Malet ; le contrat de travail s’est en effet exécuté au sein de la société Sogecer Group conformément à son objet social de société holding .

Elle estime encore que l’embauche par les filiales de la société Sogecer Group des deux comptables de la société Sogecer Group qui avaient démissionné en juin 2018 ne permet pas d’établir la réalité de la fraude prétendue à l’application de

l’article L. 1224-1 du code du travail. Les pièces versées aux débats et les explications des parties permettent seulement d’établir que la société Malet, qui a racheté ces filiales en juin 2018, a effectivement choisi d’embaucher deux anciennes comptables de la société holding qui chapeautait ces deux filiales après leur démission des effectifs de la société holding et n’a pas embauché Mme [C] après son licenciement.

La fraude n’est pas établie dans la mesure où Mme [C] ne démontre pas que la société Malet était tenue de reprendre le contrat de travail de ces salariées ; elle ne prouve pas qu’elles étaient intégrées dans l’ensemble organisé concerné par l’opération de cession.

De sorte que la prétendue fraude à l’application de l’article L. 1224-1 du code du travail n’est pas démontrée, ce qui conduit la cour à confirmer le jugement entrepris qui a rejeté la demande de dommages et intérêts pour licenciement nul après avoir analysé ce dernier moyen soulevé pour la première fois devant la cour.

Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement pour motif économique

Mme [C] conteste la réalité et le sérieux du motif économique allégué par l’employeur au soutien du licenciement économique dont elle a fait l’objet ; elle prétend que la baisse d’activité prétendue n’est ni démontrée ni quantifiée et que le chiffre d’affaires de la société Sogecer Group est resté constant ; qu’à la période du licenciement, deux filiales du groupe ont été cédées à la société Malet et qu’à l’exception de Mme [C], tous les salariés ont retrouvé un emploi au sein du groupe.

Elle soutient que l’employeur n’a pas exécuté son obligation de formation, d’adaptation et de reclassement dans le groupe alors que les besoins en secrétariat existaient et que le reclassement aurait également dû être recherché au sein du groupe Malet, repreneur des filiales avant son licenciement.

La société DGSOG rétorque que les difficultés économiques du groupe étaient réelles et sérieuses, comme l’établissent les documents comptables qu’elle verse aux débats et l’ouverture d’une procédure de sauvegarde de la société Sogecer Equipement routier et d’une procédure collective de la société Sogecer Group. Tous les postes ont été supprimés au sein de la société Sogecer Group. Les deux filiales reprises en juin 2018 par la société Malet ne faisaient plus partie du groupe de la société Sogecer Group au moment du licenciement de Mme [C] de sorte qu’aucune recherche de reclassement n’était possible au sein du groupe Malet. Le reclassement était impossible au sein de son groupe, aucun poste n’était disponible, comme le confirment les registres des entrées et sorties du personnel versé aux débats.

Il appartient à la cour de vérifier le caractère réel et sérieux du motif économique énoncé dans la lettre de licenciement de Mme [C] du 27 juillet 2018 qui développe les motifs suivants au soutien du licenciement de Mme [C] :

‘ …les difficultés économiques rencontrées dans le groupe, liées notamment à la baisse d’activité de sa filiale Sogecer Equipement Routier qui a eu pour conséquence la cession de son fonds de commerce et celle de Sogecer Location, impliquent une réorganisation de la société nécessaire pour enrayer la dégradation significative et continue des résultats du groupe. Pour cela, elle se voit donc contrainte de diminuer l’ensemble des charges de fonctionnement et notamment réduire son effectif.

Le groupe Sogecer intervient dans la réalisation de travaux d’équipements routiers, le génie civil et la location de matériel de sécurité routière. Le chiffre d’affaires du groupe a connu un développement important au cours des deux derniers exercices mais qui s’est aussi traduit par une dégradation sensible des marges chantiers impactant la SAS Sogecer Group. Cette situation a conduit à une forte dégradation de la trésorerie et une demande de mise en sauvegarde judiciaire de la société Sogecer Equipement Routier, principale filiale de la société Sogecer Group, validée par le tribunal de commerce de Toulouse le 4 juillet 2017.

Une politique de redressement a été menée par l’ensemble de nos équipes sur le deuxième semestre 2017, l’objectif étant de permettre à la société de repartir et sortir de la sauvegarde en juillet 2018.

Face à cette situation, la SAS Sogecer Equipement Routier a été conseillée de rechercher un partenaire économique et financier.

La société Spie Batignolles, au travers de sa filiale entreprise Malet, s’est portée acquéreur des sociétés Sogecer Equipement Routier et Sogecer Location, ce qui amène une forte baisse des volumes d’affaires pour l’ensemble du groupe et par voie de conséquence une baisse d’activité de la société Sogecer Group qui nécessite une restructuration interne et globale pour mettre en adéquation les moyens humains avec le niveau d’activité actuel du groupe.

Toutefois nous avons étudié les possibilités de votre reclassement sur l’ensemble des postes existants dans l’entreprise.

Ces derniers sont répartis de la façon suivante :

1 poste de dirigeant,

1 poste de directeur,

1 poste de directeur administratif et financier,

1 poste de secrétaire de direction, le vôtre,

1 poste de responsable informatique.

Malheureusement, nous n’avons aucun poste vacant à vous proposer, dans la mesure où ils sont déjà pourvus et/ou ils ne correspondent pas à votre qualification.

Par ailleurs nous nous sommes rapprochés des filiales de la société Sogecer Group , afin de savoir si un reclassement était envisageable, du fait de vos aptitudes.

Cependant, et après avoir passé en revue les disponibilités dans le groupe, et malgré toutes nos recherches, nous n’avons aucun poste vacant correspondant à votre qualification. Il nous est donc impossible de procéder à votre reclassement.

Compte tenu de ce qui précède et afin de perenniser les emplois du groupe Sogecer ce dernier doit donc réduire ses effectifs ; nous sommes dans l’obligation de supprimer votre poste de secrétaire de direction…’

Il est rappelé qu’en application de l’article L. 1233-3 du code du travail dans sa version en vigueur depuis le 1er avril 2018 :

Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l’année précédente, au moins égale à :

a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;

b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;

c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;

d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;

2° A des mutations technologiques ;

3° A une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa

compétitivité ;

4° A la cessation d’activité de l’entreprise.

La matérialité de la suppression, de la transformation d’emploi ou de la modification d’un élément essentiel du contrat de travail s’apprécie au niveau de l’entreprise.

Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise s’apprécient au niveau de cette entreprise si elle n’appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d’activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.

Pour l’application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et à l’article L. 233-16 du code de commerce.

Le secteur d’activité permettant d’apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché…’

Les parties s’accordent sur le fait que la société Sogecer Group, employeur

de Mme [C], faisait partie du groupe de sociétés Sogecer qui était constitué de plusieurs sociétés : deux sociétés holding, la société Sogecer Group, devenue DGSOG, et la société GRGC, la société Sogecer Genie Civil, qui exerce une activité de construction de génie civil, la société Sogecer Location dont l’activité est la location de matériel de chantier, la société Sogecer Equipement Routier qui exploite une activité de construction de route et d’autoroute et la société SITEL SVH dont l’activité concerne les travaux de signalisation et la pose de mobilier urbain.

Il résulte de l’article L. 1233-3 du code du travail précité que les difficultés économiques invoquées par la société Sogecer Group dans la lettre de licenciement doivent s’apprécier au niveau du secteur d’activité du groupe, à savoir le génie civil au sens large, couvrant la location de matériel de chantier, la construction de route et d’autoroute et les travaux de signalisation et de pose de mobilier urbain.

Il résulte des pièces versées aux débats qu’en 2017, le groupe Sogecer a

rencontré des difficultés qui ont entraîné le placement sous sauvegarde judiciaire de la société Sogecer Equipement Routier par jugement du tribunal de commerce

du 4 juillet 2017 , produit aux débats, en raison de difficultés de trésorerie constatées par le tribunal.

Dans le cadre de la politique de redressement conduite par le groupe, par jugement du 17 juillet 2018, le tribunal de commerce a homologué le plan de sauvegarde de la société Sogecer Equipement Rourtier après la cession, suivant protocole d’accord du 25 juin 2018, de tous les titres de la société à l’entreprise Malet.

Il est établi que l’entreprise Malet a également racheté à cette date les titres de la société Sogecer Location.

Pour démontrer la réalité des difficultés économiques alléguées, la société DGSOG verse aux débats les bilans et comptes de résultat des 6 sociétés qui composaient le groupe jusqu’en juin 2018, arrêtés au 31 mars 2018, qui établissent la réalité d’une perte d’exploitation subie par toutes ces sociétés au 31 mars 2018 à l’exception du résultat d’exploitation de la société Sogecer Location positif de 59 782 €.

Elle établit également par la production des chiffres comptables des sociétés du groupe issus des chiffres clés de la plate-forme infogreffe une baisse importante du chiffre d’affaires des sociétés du groupe entre le 31 mars 2017 et le 31 mars 2018 :

– Sogecer Group : 1 288 655 € et 1 207 000 €

– SITEL SVH : 1 093 330 € et 411 941 €

– Sogecer Location : 2 501 615 € et 2 467 637 €, ‘

– Sogecer Equipement Routier : 13 912 258 € et 7 000 005 €,

– Sogecer Génie Civil : 9 016 871 € et 8 502 541 €.

La cour estime que les difficultés économiques du secteur d’activité du groupe sont ainsi parfaitement établies dans les conditions prévues par l’article L. 1233-4 susvisé, étant précisé que le périmètre du groupe a évolué pendant l’année 2018, comme il a déjà été indiqué à plusieurs reprises dans le cadre de cet arrêt, les sociétés Sogecer Equipement Routier et Sogecer Location ayant été cédées à la société Malet

le 25 juin 2018, soit 10 jours avant l’engagement de la procédure de licenciement de Mme [C], dans le cadre du processus de redressement du groupe Sogefer entrepris à compter de 2017 à la suite du placement sous sauvegarde de la société Sogecer équipement Routier.

Il est rappelé qu’en application de l’article L. 1233-4 du code du travail dans sa version en vigueur depuis le 22 décembre 2017 :

‘Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l’application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et

à l’article L. 233-16 du code de commerce.

Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure.

L’employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l’ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.’

En l’espèce, la société DGSOG démontre qu’elle n’a conservé dans les effectifs de la société Sogecer Group que le poste du dirigeant de cette dernière et que ses 4 salariés dont Mme [C] ont fait l’objet d’un licenciement collectif pour motif économique,

les 3 autres salariés ayant accepté, comme Mme [C], le contrat de sécurisation professionnelle.

Elle fait la preuve par la production des registres d’entrée et de sortie du personnel des sociétés du groupe qu’aucun poste n’était disponible en leur sein qui aurait pu être proposé à Mme [C] de sorte que son reclassement au sein du groupe n’était pas possible, étant précisé que la permutation des postes des salariés du groupe avec celui de Mme [C], supprimé comme celui des autres salariés de l’entreprise, n’était pas possible à réaliser.

Contrairement à ce que soutient Mme [C], son reclassement ne devait pas être recherché au sein du groupe Malet qui ne faisait pas partie du groupe Sogecer, seules les sociétés Sogecer Equipement Routier et Sogecer location en faisant partie à compter de leur acquisition par la société Malet, étant rappelé qu’à compter de cette acquisition, ces deux filiales ont quitté le périmètre du groupe Sogecer.

La cour estime ainsi que la société DGSOG fait la preuve de l’impossibilité de reclassement de sa salariée par la société Sogecer Group avant de procéder à son licenciement pour motif économique.

La cour confirmera en conséquence le jugement entrepris en ce qu’il a jugé le licenciement de Mme [C] pourvu d’une cause réelle et sérieuse et débouté cette dernière de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Elle confirmera également le jugement déféré qui a rejeté la demande en paiement d’une indemnité de préavis dont Mme [C] est mal fondée à solliciter le paiement en raison de son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle.

Sur le surplus des demandes

Mme [C] qui perd le procès sera condamnée aux dépens d’appel sans qu’il soit justifié de faire application de l’article 700 du code de procédure civile, le jugement entrepris étant confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à faire application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [N] [M] épouse [C] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par S.BLUMÉ, présidente et par C.DELVER, greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

C.DELVER S.BLUMÉ

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