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15 décembre 2022
Cour d’appel de Lyon
RG n°
21/06265
N° RG 21/06265 – N° Portalis DBVX-V-B7F-NY6E
Décision du Tribunal de Commerce de LYON au fond du 22 juin 2021
S.A.S. DALLAGE DE L’ATLANTIQUE
C/
S.A.S. DUMATOS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 15 Décembre 2022
APPELANTE :
S.A.S. DALLAGES DE L’ATLANTIQUE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Florence CHARVOLIN de la SELARL ADK, avocat au barreau de LYON, toque : 1086, postulant et par Me Fanny MERCIER, avocat au barreau de CHARENTE
INTIMEE :
S.A.S. DUMATOS agissant poursuites et diligences de son Président en exercice, domicilié ès qualités audit siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475, postulant et par Me Jean-Michel RAYNAUD, membre de la SELARL RAYNAUD Avocats, avocat au barreau de LYON
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 28 Septembre 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 09 Novembre 2022
Date de mise à disposition : 15 Décembre 2022
Audience tenue par Aurore JULLIEN, présidente, et Marianne LA-MESTA, conseillère, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistées pendant les débats de Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, greffière
A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
– Patricia GONZALEZ, présidente
– Marianne LA-MESTA, conseillère
– Aurore JULLIEN, conseillère
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
EXPOSÉ DU LITIGE
Selon devis n°72073 accepté le 27 novembre 2019, la SAS Dallages de l’Atlantique (ci-après la société Dallages de l’Atlantique) a conclu avec la SAS Dumatos (ci-après la société Dumatos) un contrat de louage portant sur un rabot béton autoporté et un aspirateur pour une durée de 5 jours moyennant 563 euros HT par jour pour le rabot et 194 euros HT par jour pour l’aspirateur, outre 1380 euros HT au titre du transport et le versement d’un dépôt de garantie à hauteur de 8.000 euros.
Le matériel a été livré sur le chantier le 3 décembre 2019.
Par mails du 23 décembre 2019, la société Dallages de l’Atlantique a signalé à la société Dumatos que le rabot présentait des dysfonctionnements et que la cadence n’était pas atteinte.
La société Dumatos a fait procéder à l’enlèvement de la machine le 10 janvier 2020, avant d’adresser à la société Dallages de l’Atlantique une facture n°190023587 du 31 décembre 2019 d’un montant de 12.507,24 euros TTC au titre du transport et de la location du matériel entre le 2 décembre 2019 et le 31 décembre 2019, une facture n°200020065 du 22 janvier 2020 d’un montant de 5.706 euros TTC au titre de la location du matériel du 1er janvier au 10 janvier 2020 et une facture n°200020145 du 31 janvier 2020 à hauteur de 6.834 euros au titre de la remise en état du matériel.
Le 31 janvier 2020, la société Dallages de l’Atlantique a envoyé à la société Dumatos une facture d’un montant de 32.400 euros TTC au titre du coût de la main d’oeuvre supplémentaire et des pénalités de retard qu’elle se verrait appliquer en raison du retard engendré sur le chantier.
Le 9 avril 2020, la société Dumatos a mis la société Dallages de l’Atlantique en demeure de lui payer la somme de 17.047,24 euros TTC au titre du solde des factures impayées, déduction faite de la caution de 8.000 euros.
Cette mise en demeure étant restée infructueuse, la société Dumatos a, suivant acte du 26 mai 2020, fait assigner la société Dallages de l’Atlantique devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins d’obtenir le règlement de ces sommes, outre celle de 2.557 euros à titre de clause pénale et une indemnité de procédure.
Par jugement contradictoire du 22 juin 2021, le tribunal de commerce de Lyon a :
– déclaré le tribunal de commerce de Lyon compétent pour connaître du litige,
– condamné la société Dallages de l’Atlantique à payer à la société Dumatos la somme de 17.047,24 euros TTC déduction faite des 8.000 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 2020,
– rejeté la demande de majoration des intérêts,
– condamné la société Dallages de l’Atlantique à payer 1 euro à la société Dumatos au titre de la clause pénale,
– rejeté la demande d’indemnité forfaitaire pour absence de fondement d’article de loi,
– dit les parties mal fondées quant au surplus de leurs demandes, fins et conclusions et les en a déboutées respectivement,
– maintenu l’exécution provisoire du présent jugement,
– condamné la société Dallages de l’Atlantique à verser la somme de 3.000 euros à la société Dumatos au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société Dallages de l’Atlantique aux entiers dépens de l’instance.
La société Dallages de l’Atlantique a interjeté appel par acte du 27 juillet 2021.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 20 avril 2022, fondées sur les articles 1112-1, 1217 et 1231-5 du code civil, la société Dallages de l’Atlantique demande à la cour :
A titre principal :
– de débouter la société Dumatos de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– de condamner la société Dumatos à lui restituer le montant du dépôt de garantie à hauteur de 8.000 euros,
A titre subsidiaire :
– de dire et juger que la société Dumatos ne pouvait facturer le coût de la location et du transport que pour la période courant du 5 décembre 2019 au 18 décembre 2019 soit une somme totale s’élevant à 8.260 euros HT ,
– de condamner la société Dumatos à lui restituer le montant du dépôt de garantie à hauteur de 8.000 euros,
– d’ordonner la compensation entre les sommes dues par chacune des parties,
– de réduire à néant le montant de la clause pénale,
– de débouter la société Dumatos de son appel incident ainsi que de toutes ses demandes plus amples ou contraires aux présentes,
En tout état de cause :
– de condamner la société Dumatos à lui régler une somme s’élevant à 3.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance outre 4.000 euros au titre des frais irrépétibles en cause d’appel, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner la société Dumatos aux dépens de l’instance.
A l’appui de ses prétentions, la société Dallages de l’Atlantique fait valoir pour l’essentiel :
– qu’en application de l’article 1112-1 du code civil, la société Dumatos était tenue d’une obligation renforcée d’information et de conseil à son égard concernant les modalités d’utilisation du matériel loué, peu courant sur le marché de la location de matériel professionnel et nécessitant un savoir-faire particulier,
– que dans le cas présent, le matériel a été livré sans que la société Dumatos lui propose une formation sur place et sans qu’elle lui fournisse, a minima, le manuel d’utilisation, avant la livraison ou dès le début du chantier, comme le révèle le mail qu’elle a adressé à son cocontractant le 9 décembre 2019,
– que le lien envoyé par la société Dumatos ne contient que des informations relatives aux tarifs et des vidéos montrant la machine en fonctionnement, sans commentaire explicatif,
– qu’elle s’est aperçue rapidement que le matériel loué ne fournissait pas le rendement attendu et surtout qu’il présentait des dysfonctionnements, nécessitant l’intervention d’un technicien puis le remplacement du matériel, ce qu’elle n’a eu de cesse de solliciter en vain auprès de la société Dumatos dès le 18 décembre 2019,
– que la société Dumatos s’est alors bornée à lui répondre qu’elle attendait d’être informée de la fin des travaux afin de prévoir une date de reprise,
– qu’en sus de ne pas avoir mandaté de technicien pour tenter de solutionner le problème, la société Dumatos n’est venue récupérer le matériel que le 10 janvier 2020,
– que la société Dumatos ne peut réclamer le règlement de la location du matériel jusqu’à cette date, dès lors qu’il résulte de l’article 4-2 de ses propres conditions générales que toute modification de la durée prévisible de location, soit 5 jours en l’espèce, doit faire l’objet d’un nouvel accord entre les parties,
– qu’au demeurant, la société Dumatos n’ayant pas respecté son devoir d’information et de conseil, elle est bien fondée, en application de l’article 1217 du code civil, à ne pas exécuter son obligation de paiement à la société Dumatos qui doit en outre être condamnée à lui restituer la somme de 8.000 euros versée à titre de dépôt de garantie,
– qu’elle a en tout état de cause alerté la société Dumatos du dysfonctionnement du matériel loué dès le 18 décembre 2019, ce qui aurait dû entraîner tout à la fois la suspension du contrat de location et le remplacement des pièces d’usure en vertu des articles 8-2, 9-1 et 9-2 des conditions générales du contrat,
– qu’il n’est nullement établi par les pièces du dossier, comme l’a retenu à tort le tribunal de commerce, que les dommages subis par le matériel auraient été causés par sa mauvaise utilisation, la société Dumatos ne rapportant nullement la preuve de ses allégations sur ce point,
– que les conditions générales du contrat imposent la suspension de la location en cas de panne entraînant l’immobilisation du matériel, sans distinction quant à la cause des désordres, de sorte que seul le coût de la location du 5 au 18 décembre 2019 pourrait éventuellement lui être facturé, ce qui correspond à la somme de 8.260 euros HT,
– qu’en l’absence de démonstration de l’existence de dégradations lui étant imputables, le remplacement des pièces d’usure est à la charge du loueur,
– que surtout l’article 14-5 des conditions générales du contrat prévoit que dans le cas où le matériel nécessite des remises en état consécutives à des dommages imputables au locataire, le loueur peut les facturer au locataire après constat contradictoire conformément à l’article 12,
– qu’en l’occurrence, la société Dumatos ne produit aucun constat contradictoire à l’appui de ses demandes,
– que c’est à bon droit que le tribunal de commerce a estimé que la clause pénale était manifestement excessive par application des dispositions de l’article 1231-5 du code civil, dès lors que la société Dumatos ne justifie nullement subir un préjudice autre que le simple retard dans le paiement des factures, déjà amplement réparé par la majoration du taux d’intérêt légal,
– que l’indemnité forfaire par ailleurs réclamée par la société Dumatos doit également être considérée comme une clause pénale devant être réduite à néant au vu de son caractère manifestement excessif.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 24 janvier 2022, fondées sur les articles 1103 et 1231-1 du code civil, ainsi que sur l’article 48 du code de procédure civile, la SAS Dumatos demande à la cour :
A titre principal :
– de confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 22 juin 2021 en ce qu’il a :
– déclaré le tribunal de commerce de Lyon compétent pour connaître du litige,
– condamné la société Dallages de l’Atlantique à lui payer la somme de 17.047,24 euros TTC, déduction faite des 8.000 euros,
– maintenu l’exécution provisoire du jugement,
– condamné la société Dallages de l’Atlantique à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance,
– d’ infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 22 juin 2021 en ce qu’il a :
– rejeté sa demande de majoration des intérêts
– jugé la clause pénale d’un montant de 15% des sommes dues, soit 2.557 euros comme étant une clause pénale manifestement excessive,
– condamné la société Dallages de l’Atlantique à lui payer 1 euro au titre de la clause pénale
– rejeté la demande d’indemnité forfaitaire pour absence de fondement d’article de loi,
– dit qu’elle est mal fondée quant au surplus de ses demandes, fins et conclusions,
En conséquence et statuant à nouveau :
– de recevoir l’intégralité de ses moyens et prétentions,
– de condamner la société Dallages de l’Atlantique à lui payer sur la somme de 17.047,24 euros, déduction faite de la caution de 8.000 euros, à compter du 31 janvier 2020, les intérêts au taux légal majoré de trois fois,
– de juger que la clause pénale prévue à l’article 16 des conditions générales de location d’un montant de 15% des sommes dues, soit 2.557 euros n’est pas manifestement excessive,
– de juger que les sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 10 décembre 1996 seront supportées par la société Dallages de l’Atlantique,
En conséquence :
– de condamner la société Dallages de l’Atlantique à lui payer une indemnité forfaitaire de 40 euros pour chacune des factures impayées sur le fondement des articles L. 441-3 et L.441-6 du code de commerce,
– de condamner la société Dallages de l’Atlantique à lui payer les sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 10 décembre 1996,
En tout état de cause :
– de débouter la société Dallages de l’Atlantique de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à son encontre,
– de condamner la société Dallages de l’Atlantique à lui payer la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de Me Aguiraud, avocat sur son affirmation de droit.
La société Dumatos expose en substance :
– que l’article 22 des conditions générales de location, dont la société Dallages de l’Atlantique a reconnu avoir pris connaissance, désigne le tribunal de commerce de Lyon comme seul compétent pour connaître du litige, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté par l’appelante dans ses dernières conclusions en appel,
– que le 3 décembre 2019, M.[O], président de la société Dallages de l’Atlantique a reçu la livraison des matériels loués sans formuler la moindre réserve, lesdits matériels étant par conséquent réputés conformes et en parfait état de fonctionnement comme prévu à l’article 3.2 des conditions générales de location,
– que les matériels ont été livrés accompagnés d’un jeu de soixantes pics de fraisage neufs, ainsi que du manuel utilisateur papier inclus dans le rabot,
– qu’au démarrage du chantier, elle a effectué un accompagnement téléphonique auprès de la société Dallages de l’Atlantique,
– que lors de l’envoi du devis, avaient également été transmis à la société Dallages de l’Atlantique deux liens donnant accès au téléchargement et/ou à la lecture du manuel opérateur sur l’onglet fiche technique,
– que si le loueur est tenu de fournir un matériel conforme et en parfait état de fonctionnement avec son manuel utilisateur, il incombe au seul locataire du matériel de s’assurer qu’il dispose du personnel qualifié et compétent à son usage, étant rappelé que la société Dallages de l’Atlantique est un professionnel de la construction spécialisé dans la réalisation de dallages à destination industrielle,
– qu’elle n’avait en aucun cas l’obligation de venir sur le chantier de la société Dallages de l’Atlantique pour former son personnel,
– que 20 jours après la livraison, la société Dallages de l’Atlantique lui a adressé un courriel au terme duquel elle a prétendu subir des soucis de cadence et d’usure de la machine, tout en précisant qu’il était prévu que les travaux se terminent le 6 janvier 2020, alors même que dans un précédent courriel du 9 décembre 2019, la société Dallages de l’Atlantique ne faisait aucunement état d’un dysfonctionnement et/ou d’un problème de rendement,
– qu’elle lui a repondu le jour-même que personne ne pouvait donner de rendement pour la machine, pas même le fabriquant compte tenu des paramètres propres à chaque chantier, que le devis du 22 novembre 2019 précisait bien que la durée de location était donnée à titre indicatif et que lorsque le client n’est pas satisfait d’une machine, il la retourne le plus rapidement possible,
– qu’elle a également précisé qu’elle ne comprenait pas ce que signifiait “elle ne fonctionne pas”, sachant qu’au début de la semaine 50, M.[O] lui avait dit au téléphone avoir raboté 400 m², soit la moitié du chantier,
– qu’elle a en outre proposé de récupérer la machine sur le chantier au plus vite afin d’arrêter la location, en rappelant que celle-ci est due pour chaque jour ouvrable même si le matériel n’est pas utilisé,
– qu’elle n’a pas reçu de réponse cohérente de la société Dallages de l’Atlantique à sa demande d’explications sur la nature des problèmes rencontrés,
– que par courriel du 31 décembre 2019, elle a réitéré sa proposition à la société Dallages de l’Atlantique de fixer un créneau pour récupérer le matériel loué afin de pouvoir l’examiner en ses ateliers, puis le lui retourner, le cas échéant, des les meilleurs délais,
– que la société Dallages de l’Atlantique a rétorqué par courriel de la même date que le matériel ne démarrait plus et sollicitait l’intervention d’un technicien sur site, alors même que les informations données ne permettaient aucun diagnostic préalable,
– que neuf jours plus tard, elle apprendra pourtant par l’un des collaborateurs de la société Dallages de l’Atlantique que le rabot continuait de travailler,
– que le 10 janvier 2020, la société Dallages de l’Atlantique lui a envoyé des photographies du tambour de fraisage établissant sans discussion possible une mauvaise utilisation du matériel ayant entraîné la destruction de celui-ci,
– qu’au retour du matériel loué le 10 janvier 2020 suite à une nouvelle demande de sa part en ce sens, eu égard à l’impossibilité d’utiliser le matériel et d’effectuer un dépannage sur le chantier au vu de l’ampleur des dégâts constatés, elle a constaté que le matériel était parfaitement opérationnel, à l’exception des pièces détruites du fait de leur mauvaise utilisation, à savoir le tambour de fraisage nu 60 pics, la roue motrice, un strapontin et une plaque de protection côté tambour,
– que le tambour de fraisage était hors service en raison du non remplacement par la société Dallages de l’Atlantique des pics de fraisage qui constituent des consommables et non pas des pièces d’usure dont le remplacement lui incombait, étant rappelé qu’un jeu de 60 pics de fraisage avait bien été livré avec la machine louée,
– que de même, elle a relevé que la moitié des pics avait peu travaillé, ce qui expliquait en partie un rendement amoindri,
– qu’en réalité, la société Dallages de l’Atlantique ne disposait pas du personnel qualifié pour la conduite du matériel, ce qui a eu pour conséquence directe d’entraîner une mauvaise utilisation de celui-ci, de réduire fortement le rendement et d’user anormalement les outils,
– que la société Dallages de l’Atlantique ne peut valablement faire état de l’absence de constat contradictoire entre les parties sur les réparations à effectuer, dès lors qu’elle a elle-même joint à son courriel du 28 janvier 2020 les photographies des dégradations constatées et qu’elle n’a pas contesté le devis n°70525 de remise en état du rabot béton,
– que la société Dallages de l’Atlantique a reconnu avoir pris connaissance des conditions générales figurant au verso du devis qu’elle a retourné signé le 27 novembre 2019, lesquelles prévoient notamment à l’article 4.1 que la location part du jour de la mise à disposition des matériels loués, soit le 29 novembre 2019, et prend fin le jour où ces derniers sont restitués au loueur, soit le 10 janvier 2020,
– que l’article 16 de ces mêmes conditions générales fixe également la clause pénale à 15% du montant des sommes dues, étant observé que les agissements fautifs de la société Dallages de l’Atlantique lui ont causé un préjudice distinct du simple retard dans le paiement des factures émises, ce d’autant que celle-ci a refusé d’exécuter volontairement le jugement, ce qui l’a contrainte à engagerune procédure d’exécution forcée par huissier de justice pendant plusieurs mois avant de récupérer les sommes dues,
– que la société Dallages de l’Atlantique doit par conséquent assumer la prise en charge des émoluments de l’huissier à hauteur de 1.067,04 euros,
– que chacune des factures émises par ses soins comporte en bas de page les mentions contractuelles suivantes: “tout règlement au-delà de l’échéance déclenche une pénalité fixée à 3 fois le taux d’intérêt légal” et “selon les articles L 441-3 et L441-6 du code de commerce, l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement d’un montant de 40 euros est due de plein droit dès le premier jour de retard de paiement”.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 7 juillet 2022, les débats étant fixés au 9 novembre 2022.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes de constat et dire et juger ne constituent pas des prétentions mais uniquement un rappel des moyens et qu’il n’y a donc pas de lieu de statuer sur ce point, la cour n’en étant pas saisie.
Il est également précisé que le litige est soumis au nouveau droit des contrats issu de l’ordonnance du 10 février 2016 puisque le contrat litigieux est postérieur au 1er octobre 2016.
Sur la compétence du tribunal de commerce de Lyon
Selon l’article 562 du code de procédure civile, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.
Seul l’acte d’appel opère dévolution des chefs critiqués du jugement.
En l’occurrence, la lecture de l’acte d’appel de la société Dallages de l’Atlantique fait apparaître que celle-ci n’a pas interjeté appel du chef du jugement ayant déclaré le tribunal commerce de Lyon compétent pour connaître du litige.
De son côté, la société Dumatos n’a pas formé d’appel incident, puisqu’elle se borne à solliciter la confirmation de la décision déférée sur ce point.
Il convient dès lors de constater que la cour n’est pas saisie d’une demande sur la compétence, le jugement étant définitif sur ce point, de sorte que l’argumentation développée par la société Dumatos à cet égard est sans objet.
Sur le manquement de la société Dumatos à son obligation d’information et de conseil
En vertu de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L’article 1112-1 du même code énonce par ailleurs que celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.
Néanmoins, ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation.
Ont une importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie.
Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.
Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.
A l’égard d’un professionnel, l’obligation d’information et de conseil du loueur n’existe toutefois que dans la mesure où la compétence du cocontractant ne lui donne pas les moyens d’apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques du ou des biens loués. De même, l’obligation de conseil n’est concevable que s’il existe une différence de compétence entre le loueur et le preneur.
En l’espèce, si la société Dumatos, spécialisée dans la location et la vente de tout matériel, outillage et produits accessoires pour le bâtiment, est tenue d’un devoir de conseil quant aux conditions d’utilisation des machines qu’elle loue, il est constant que cette obligation ne revêt un caractère renforcé que vis-à-vis d’un loueur profane, son contenu étant en revanche beaucoup plus limité à l’égard d’un professionnel de même spécialité.
Dans le cas présent, il n’est pas contesté par la société Dallages de l’Atlantique que celle-ci est un professionnel spécialisé dans le bâtiment et que dans le cadre de son activité, elle effectue notamment du rabotage de dalles en béton.
Le rabot autoporté et l’aspirateur qu’elle a loués auprès de la société Dumatos selon devis accepté le 27 novembre 2019 sont donc des matériels dont l’utilisation fait en principe partie de son domaine de compétence.
Certes, s’agissant d’un produit spécifique, ainsi que l’a d’ailleurs admis la société Dumatos lorsqu’elle mentionne qu’elle ne dispose que “d’une seule machine de ce type” (courriel du 31 décembre 2019 à 17h59, pièce n°3ter de l’intimée) et qu’il s’agit de la “seule en location en Europe à ma connaissance” (courriel du 10 janvier 2020 à 16h57, pièce n°2 de l’appelante), il y a lieu de retenir que celle-ci était tenue de fournir à son cocontractant un manuel d’utilisation comportant les informations nécessaires au bon usage du rabot.
En revanche, sauf à dénaturer le contenu minimal du devoir de conseil entre professionnels avertis et en l’absence de demande complémentaire de l’appelante après avoir pris connaissance des spécificités techniques de l’appareil telles que décrites dans le manuel d’utilisation, il n’incombait pas à la société Dumatos, contrairement à ce que prétend la société Dallages de l’Atlantique, de prévoir, au titre de son obligation d’information, la mise à disposition sur place d’un formateur dédié, sachant qu’une telle prestation avait un coût significatif compte tenu du lieu éloigné du chantier, ce qui impliquait qu’elle fasse l’objet d’une négocation préalable entre les parties.
Or, il ressort du courriel adressé le 22 novembre 2019 à 10h11 à la société Dallages de l’Atlantique par la société Dumatos que parallèlement à l’envoi du devis pour la location du rabot et de l’aspirateur, cette dernière lui a communiqué deux liens internet relatifs à ces produits (pièce n°2 de l’intimée).
La société Dallages de l’Atlantique ne verse aucune pièce, comme les captures d’écran des pages litigieuses, de nature à étayer ses allégations selon lesquelles ces liens renvoyaient uniquement à des tarifs et des vidéos sans aucune explication sur les modalités de fonctionnement du rabot et de l’aspirateur, et non à la documentation technique afférente à ces appareils, objets du devis, ainsi que le soutient la société Dumatos. Si la société Dallages de l’Atlantique estimait, après avoir procédé au visionnage des liens communiqués, que ceux-ci ne suffisaient pas à l’éclairer suffisamment sur les conditions concrètes d’utilisation du matériel, il lui appartenait de se rapprocher de son futur cocontractant pour solliciter des renseignements supplémentaires, ce qu’elle ne justifie pas avoir fait.
Il est en outre à noter que l’article 3-1 des conditions générales annexées au devis accepté le 27 novembre 2019 par la société Dallages de l’Atlantique et dont elle a reconnu avoir pris connaissance en signant ce document, stipule que “le matériel, ses accessoires, et tout ce qui en permet un usage normal, sont mis à disposition au locataire en bon état de marche. Le locataire est en droit de refuser le matériel si le loueur ne fournit pas les documents exigés par la réglementation, ainsi que toutes les consignes techniques nécessaires”.
Il s’évince de cette clause que les appareils loués sont réputés livrés avec le manuel d’utilisation, à charge pour le locataire de ne pas accepter de les réceptionner ou, à tout le moins, de formuler des réserves, s’il constate que ledit manuel n’est pas fourni.
Dans ces circonstances, la société Dallages de l’Atlantique, qui a pris possession des matériels loués le 3 décembre 2019, sans formuler une quelconque réserve à ce sujet (pièce n°3 de l’intimée), ne peut valablement soutenir qu’elle n’a pas reçu la documentation technique nécessaire pour utiliser les appareils conformément à l’usage prévu.
Il doit d’ailleurs être souligné que dans le premier courriel envoyé le 9 décembre 2019 à 12h02 à la société Dumatos (pièce n°1 de l’appelante), la société Dallages de l’Atlantique se plaint uniquement de l’absence de mise à disposition d’un formateur, mais n’évoque nullement le défaut de communication du manuel technique, seul document que la société Dumatos était contractuellement tenue de lui transmettre au titre de son devoir de conseil vis-à-vis d’un professionnel de même spécialité. Bien plus, dans ce message, la société Dallages de l’Atlantique reconnaît qu’elle a finalement été en mesure de démarrer les travaux à compter du 6 décembre 2019.
Il découle de l’ensemble de ces développements que la société Dallages de l’Atlantique échoue à démontrer l’existence d’un manquement de la société Dumatos à son obligation d’information susceptible d’engager la responsabilité de cette dernière et doit donc être déboutée de sa demande d’indemnisation à ce titre.
Sur les demandes en paiement de la société Dumatos
Selon l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L’article 1104 du même code dispose quant à lui que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
Par ailleurs, en vertu de l’article 1217 du code civil, la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :
– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– obtenir une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
– demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.
– Sur la demande en paiement au titre de la location des matériels
L’article 4-1 des conditions générales annexées au devis n°72073 d’un montant de 7.339,80 euros incluant les frais de transport, accepté le 27 novembre 2019 par la société Dallages de l’Atlantique, précise que “la location part du jour de la mise à disposition au locataire du matériel loué et de ses accessoires dans les conditions définies à l’article 3. Elle prend fin le jour où le matériel loué et ses accessoires sont restitués au loueur dans les conditions définies à l’article 14. Ces dates sont fixées dans le contrat de location.”
L’article 4-2 de ces mêmes conditions générales mentionne de son côté que “toute modification de cette durée doit faire l’objet d’un nouvel accord entre les parties”.
Il est constant que le devis précité mentionne une durée de location de 5 jours.
Il convient toutefois de retenir qu’au regard de l’usage auquel était destiné le matériel loué, à savoir le rabotage d’une dalle de béton sur un chantier de construction d’une concession automobile, il s’agissait nécessairement d’une durée prévisible et non d’une durée impérative, le loueur ne pouvant garantir un taux de rendement à son cocontractant, compte tenu des aléas inhérents à ce type de travaux et des spécificités techniques de chaque chantier, comme souligné à juste titre par la société Dumatos. Il sera à cet égard observé que cette dernière avait bien pris soin de signaler à la société Dallages de l’Atlantique, dans le courriel qu’elle lui a envoyé le 22 novembre 2019 pour lui faire part de son offre de prix, que ” la durée est donnée à titre indicatif, le rendement varie selon la dureté de votre béton et des contraintes du chantier” (pièce n°2 de l’intimée).
Dans un message électronique envoyé à la société Dumatos le 23 décembre 2019 à 15h15, le gérant de la société Dallages de l’Atlantique concède d’ailleurs lui-même qu’”il est exact que nous avons évoqué ensemble l’impossibilité de définir de manière juste la durée des travaux. Cependant, malgré votre certitude d’effectuer cette prestation entre 3 et 6 jours (pour preuve, 5 jours estimés de location sur votre devis), nous sommes très loin du résultat escompté”.
Or, la société Dallages de l’Atlantique ne produit aucun message de la société Dumatos dont il résulterait que celle-ci se serait engagée fermement sur la durée maximale nécessaire pour la réalisation des travaux au moyen du matériel loué.
Ceci étant dit, il n’est pas discuté par la société Dallages de l’Atlantique que celle-ci a pris possession des matériels loués le 3 décembre 2019 (pièce n°3 de l’intimée) et qu’elle ne les a restitués à la société Dumatos que le 10 janvier 2020, comme indiqué par cette dernière dans ses écritures et mentionné dans sa facture n°200020065 (pièce n°8 de l’intimée).
L’analyse des échanges de courriels intervenus entre les parties et versés aux débats par chacune d’entre elles (pièces n°3 bis et 3ter de l’intimée, pièce n°4 de l’appelante) fait par ailleurs apparaître que suite à la demande de la société Dumatos, dans un message du 23 décembre 2019 à 9h58, d’être tenue informée de la fin des travaux pour prévoir une date de reprise du matériel, la société Dallages de l’Atlantique s’est bornée à répondre le jour-même à 10h12 que le rabot n’avait pas le rendement annoncé et présentait des dysfonctionnements, sans toutefois manifester corrélativement sa volonté de suspendre ou de mettre un terme au contrat de location, puisqu’elle a au contraire évoqué une date de fin de chantier au 6 janvier 2020.
Suite à ces doléances exprimées par son cocontractant, la société Dumatos a pourtant immédiatement offert à la société Dallages de l’Atlantique de “récupérer la machine sur votre chantier au plus vite afin d’arrêter la location” (courriel du 23 décembre 2019 à 11h24).
En retour, la société Dallages de l’Atlantique n’a pas fait part de son accord pour la reprise du matériel par la société Dumatos, se contentant de réitérer ses déclarations selon lesquelles la machine fonctionne mal ou peu et demandant que le rabot soit réparé ou remplacé (mail du 23 décembre 2019 à 15h15). Dans ce message, elle précise néanmoins avoir réussi à raboter 100 m² par jour entre le 6 décembre et le 12 décembre 2019, soit environ 500 m², ce qui est très loin de l’estimatif de la société Dumatos selon elle.
Surtout, lorsque la société Dumatos lui a de nouveau proposé de récupérer le matériel “pour voir pourquoi celui-ci ne fonctionne pas selon vos exigences” (courriel du 23 décembre 2019 à 20h58), la société Dallages de l’Atlantique est restée taisante.
Ainsi, après ce dernier message du 23 décembre 2019, elle ne reprendra attache avec la société Dumatos que plus d’une semaine plus tard le 31 décembre 2019 à 12h00 pour dire uniquement “nous sommes toujours dans l’attente d’une solution de reprise ou de remplacement de la raboteuse afin de terminer la prestation”.
La société Dumatos a rapidement rétorqué qu’elle était toujours en attente d’un retour de la part de la société Dallages de l’Atlantique afin de convenir d’un créneau pour d’aucune autre machine du même type.
Elle a également ajouté que seul l’examen du rabot dans ses ateliers pourrait permettre de déterminer l’origine des difficultés, car la description des problèmes faite par la société Dallages de l’Atlantique n’est pas suffisamment concrète en l’état (courriel du 31 décembre 2019 à 16h17).
Aucune réponse immédiate ne sera apportée par la société Dallages de l’Atlantique à ce message, puisque le courriel suivant renvoyé par ses soins à la société Dumatos date du 10 janvier 2020 à 15h59, soit 10 jours plus tard, pour réclamer encore une fois l’intervention d’un réparateur sur site avec “les dents de rechange du rabot” (courriel du 10 janvier 2020 à 15h59), ce à quoi la société Dumatos a répliqué qu’au vu de la conversation avec le personnel ayant eu lieu le matin même et des photos envoyées par celui-ci, les dégradations constatées sont telles que pour y remédier, il est nécessaire de lever la machine sur un pont pour sortir le tambour et voir comment extraire les pics abîmés, lesdits travaux ne pouvant être réalisés que dans ses ateliers. Elle a en outre indiqué qu’après l’intervention et la vérification de l’état de fonctionnement de la machine, un retour sur site était envisageable vers le 22 janvier 2020 (courriel du 10 janvier 2020 à 16h35).
Dans un message du même jour à 17h56, la société Dallages de l’Atlantique a finalement fait savoir qu’elle préparait le rabot pour réexpédition à la société Dumatos.
Enfin, dans un courriel ultérieur du 3 février 2020 à 14h02 en réponse à l’envoi du devis de remise en état du matériel par la société Dumatos, la société Dallages de l’Atlantique a notamment indiqué à cette dernière que “vous nous avez communiqué de fausses informations sur le rendement de la machine. En effet, votre base estimative était de 5 jours, alors qu’en réalité, il a fallu 15 jours.”
Il s’infère des observations qui précèdent :
– que le contrat de location du rabot et de l’aspirateur s’est poursuivi du commun accord des parties jusqu’au 10 janvier 2020, dès lors que la société les Dallages de l’Atlantique n’a pas sollicité qu’il y soit mis fin avant cette date, ou à tout le moins qu’il soit suspendu, et que de son côté, la société Dumatos n’a pas entendu reprendre possession de la machine avant cette date en dépêchant elle-même un transporteur pour la récupérer sur site, ce qui révèle qu’elle n’était pas opposée à la poursuite du contrat,
– que la société Dallages de l’Atlantique n’a pas estimé que les dysfonctionnements du rabot évoqués à compter du 23 décembre 2019 étaient suffisamment graves pour justifier le renvoi de la machine au loueur avant le 10 janvier 2020, ce qui conduit à retenir qu’elle a pu en faire usage jusqu’à cette date, même si celle-ci n’a pas eu le rendement répondant à ses attentes au regard des délais impartis pour la réalisation de son chantier,
– que la société Dallages de l’Atlantique a d’ailleurs admis in fine qu’elle avait été en mesure d’effectuer la prestation prévue avec le matériel loué sur une durée de 15 jours.
La Cour ayant considéré que la société Dumatos a satisfait à son devoir de conseil et qu’elle n’était par ailleurs pas contractuellement tenue de garantir la durée exacte du louage, et donc le taux de rendement de la machine, il s’ensuit que la société Dallages de l’Atlantique est redevable du coût de la location pour toute la période durant laquelle elle a eu le rabot et l’aspirateur à sa disposition, soit du 3 décembre 2019 au 10 janvier 2020, outre le coût du transport aller et retour, celui-ci étant à sa charge en vertu du devis n°72073 qu’elle a accepté le 27 novembre 2019, ce qui correspond à une somme globale de 18.213,24 euros se décomposant comme suit :
– 12.507,24 euros au titre de la facture n°190023587 émise le 31 décembre 2019 (coût de la location sur la période du 3 décembre 2019 au 31 décembre 2019 et transport aller du matériel),
– 5.706 euros au titre de la facture n°200020065 émise le 22 janvier 2020 (coût de la location pour la période du 1er janvier 2020 au 10 janvier 2020 et transport retour du matériel).
Conformément à la demande de la société Dumatos en ce sens, la caution de 8.000 euros réglée par la société Dallages de l’Atlantique sera déduite de ce montant.
Celle-ci sera dès lors condamnée à verser à la société Dumatos la somme résiduelle de 10.213,24 euros, de sorte que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a dit que la société Dallages de l’Atlantique est tenue de payer ces deux factures à la société Dumatos.
S’agissant des autres sommes réclamées par la société Dumatos, il y a lieu d’observer que l’article 16-2 des conditions générales du contrat prévoit que “toute facture impayée à son échéance entraîne des pénalités de retard dont le taux est fixé aux conditions particulières et, à défaut, conformément à l’article L 441-6 du code de commerce (…) Une indemnité forfaitaire de 40 euros est due pour frais de recouvrement. A titre de clause pénale, le loueur se réserve le droit d’ajouter aux pénalités de retard une indemnité de 15% pour remise du dossier au contentieux, sans préjudice de tous autres frais judiciaires.”
Il sera rappelé qu’en vertu des dispositions de l’article L441-6 du code de commerce, devenu l’article L441-10 du code de commerce à la date de conclusion du contrat, à défaut de règlement d’une facture dans les délais convenus, le débiteur est redevable envers son créancier de pénalités de retard égal au taux d’intérêt européen BCE (taux de refinancement) majoré de 10 points. Toutefois, les parties peuvent convenir de modalités de calcul différentes, qui ne peuvent conduire à l’application d’un taux d’intérêt de retard inférieur à 3 fois le taux de l’intérêt légal.
Ces pénalités de retard sont dues de plein droit, sans rappel et sans avoir à être indiquées dans les conditions générales des contrats.
C’est pourquoi, il convient d’accueillir favorablement la demande de majoration des intérêts, à hauteur de trois fois le taux légal, formulée par la société Dumatos, ce qui conduit à l’infirmation du jugement déféré de ce chef.
La condamnation sera ainsi assortie des intérêts majorés à compter du 10 mars 2020, date à laquelle la seconde facture est devenue exigible, ce qui correspond à sa date d’émission plus 60 jours, conformément au délai de paiement prévu par l’article L 441-10 précité et rappelé sur la facture.
Sur le fondement de ce même article, repris à l’article 16-2 des conditions générales, il sera en outre fait droit à la demande de la société Dumatos tendant au paiement de la somme de 40 euros pour chacune des deux factures impayées à titre d’indemnité de recouvrement, le jugement déféré étant dès lors infirmé sur ce point.
Pour ce qui est de la clause pénale contractuelle fixée à hauteur de 15% des sommes dues, soit 10.213,24 x 15% = 1.531,98 euros, celle-ci apparaît manifestement excessive au regard du préjudice effectivement subi par la société Dumatos à raison du non règlement des factures par la société Dallages de l’Atlantique, étant rappelé que celui-ci est d’ores et déjà réparé par l’octroi des intérêts moratoires majorés et que l’intimée ne fait pas état de l’existence d’un préjudice distinct causé par la mauvaise foi de son cocontractant.
Par application des dispositions de l’article 1231-5 du code civil, elle sera par conséquent réduite à la somme de 750 euros, le jugement déféré étant par conséquent infirmé sur ce point.
– Sur la demande en paiement au titre de la remise en état du rabot
L’article 14-5 des conditions générales du contrat stipule que dans le cas où le matériel nécessite des remises en état imputables au locataire, le loueur peut les facturer au locataire après constat contradictoire conformément à l’article 12.
Cet article 12, en son premièrement, mentionne quant à lui qu’en cas de dommages, le loueur invite le locataire à procéder à un constat amiable et contradictoire, qui doit intervenir dans un délai de 5 jours ouvrés.
En l’occurrence, les parties s’accordent sur le fait que le rabot a subi des dommages mais divergent sur la cause de ceux-ci.
La société Dumatos estime ainsi, au vu des photographies qui lui ont été envoyées par la société Dallages de l’Atlantique le 10 janvier 2020 puis des vérifications opérées dans son atelier au retour du rabot, que les dégradations constatées sont nécessairement le fruit d’une mauvaise utlisation du matériel par la société Dallages de l’Atlantique et qu’elles lui sont par conséquent imputables.
Mais, dans cette hypothèse, il lui incombait, conformément aux clauses contractuelles précitées, de se rapprocher de la société Dallages de l’Atlantique dans un délai de 5 jours ouvrés pour lui demander de procéder à un constat amiable et contradictoire, ce qui aurait donné la possibilité à cette dernière de faire valoir ses observations sur les causes des avaries.
Faute d’avoir effectué cette démarche, la société Dumatos n’était donc pas fondée à facturer la remise en état du matériel à la société Dallages de l’Atlantique, étant à titre superfétatoire observé que son analyse unilatérale quant à l’origine des désordres subis par le rabot ne saurait à elle-seule suffire à établir que ceux-ci sont exclusivement dus à un usage anormal de la machine par l’appelante, ce qui est contesté par cette dernière.
Il convient en conséquence d’infirmer la décision du tribunal de commerce, en ce qu’elle a condamné la société Dallages de l’Atlantique à verser à la société Dumatos la somme de 6.834 euros au titre de la facture n°200020145 émise le 31 janvier 2020 correspondant aux frais de remise en état du matériel.
Compte tenu du rejet des prétentions de la société Dumatos au titre de cette facture, celle-ci sera corrélativement déboutée des demandes accessoires qui y étaient attachées, à savoir l’indemnité forfaitaire de 40 euros et la clause pénale de 15 %, le jugement déféré étant confirmé sur ces dispositions, par ces motifs substitués.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Succombant pour l’essentiel dans ses prétentions, la société Dallages de l’Atlantique devra supporter les dépens d’appel. Elle est également condamnée à verser à la société Dumatos une indemnité de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile pour la cause d’appel. Les condamnations de ce chef et sur les dépens prononcées par les premiers juges sont par ailleurs confirmées, étant rappelé qu’en vertu de l’article 695 du code de procédure civile, lesdits dépens incluent les frais relatifs aux procédures d’exécution forcée supportés par la société Dumatos pour obtenir le recouvrement des sommes allouées par la décision de première instance.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant dans les limites de l’appel,
Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a condamné la SAS Dallages de l’Atlantique aux dépens et à verser la somme de 3.000 euros à la SAS Dumatos au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
L’infirme pour le surplus, statuant à nouveau et ajoutant,
Condamne la SAS Dallages de l’Atlantique à verser à la SAS Dumatos les sommes suivantes :
– 10.213,24 euros au titre des factures n°190023587 et n°n°200020065, déduction faite de la somme de 8.000 euros déjà réglée, ce avec intérêts au taux légal majoré de trois fois à compter du 22 mars 2020,
– 80 euros au titre des indemnités forfaitaires de recouvrement,
– 750 euros au titre de la clause pénale,
Déboute la SAS Dumatos de sa demande en paiement de la facture n°200020145 d’un montant de 6.834 euros et de ses accessoires (indemnité de recouvrement et clause pénale),
Condamne la SAS Dallages de l’Atlantique aux dépens d’appel, ces derniers avec droit de recouvrement,
Condamne la SAS Dallages de l’Atlantique à verser à la SAS Dumatos une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE