Dépendance économique : 6 décembre 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 16-20.465

·

·

Dépendance économique : 6 décembre 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 16-20.465

COMM.

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 décembre 2017

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 1446 F-D

Pourvoi n° A 16-20.465

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société EGM Wind, anciennement dénommée Iberdrola Renovables France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est […]                              ,

2°/ la société Perfect Wind, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est […]                               ,

contre l’arrêt rendu le 13 mai 2016 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige les opposant à la société Electricité de France EDF, société anonyme, dont le siège est […]                              ,

défenderesse à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 17 octobre 2017, où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme Y…, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Y…, conseiller, les observations de la SCP Ohl et Vexliard, avocat des sociétés EGM Wind et Perfect Wind, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Electricité de France, l’avis de Mme X…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 13 mai 2016), que la société Iberdrola Renovables France, devenue EGM Wind, et la société Perfect Wind ont entrepris la construction de six parcs de production éolienne ; que les demandes de contrat d’achat à la société EDF se sont échelonnées de mars 2007 à janvier 2008 ; que les mises en service ont eu lieu pour deux des installations en juillet 2008 et, pour les autres, en décembre 2008 et que les contrats ont été signés entre mars et avril 2009 ; que le 6 août 2008, l’arrêté tarifaire E06 du 10 juillet 2006 fixant les prix de rachat par la société EDF a été annulé par un arrêt du Conseil d’Etat ; que soutenant que les contrats d’électricité avaient été formés à la date de leur demande d’achat de sorte qu’ils étaient soumis au prix d’achat fixé par le tarif E06, les sociétés Iberdrola et Perfect Wind ont assigné la société EDF pour faire constater ses manquements fautifs, les procédés déloyaux et les pratiques anticoncurrentielles tenant à son refus d’appliquer le tarif E06 ou E08 avant la date du 29 décembre 2008 et en réparation de leurs préjudices respectifs ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les sociétés EGM Wind et Perfect Wind font grief à l’arrêt de dire que les contrats d’achat d’électricité relatifs aux sites d’Erize-Saint-Dizier, d’Amelécourt, de Talizat Rézentières I-Montlouby, de Bel Air-Maché, du Hamel au Brun-la Héroudière et du Mulsonnier-Rampont ont été formés à la date de leur signature et de rejeter leurs demandes alors, selon le moyen, que le juge doit statuer au regard des dernières conclusions déposées par les parties ; qu’en se prononçant au visa de conclusions signifiées le 8 janvier 2015 par les sociétés EGM Wind et Perfect Wind, cependant que celles-ci avaient déposé et signifié de nouvelles conclusions récapitulatives le 27 novembre 2015 en réponse aux conclusions de la société EDF en date du 11 novembre 2015, la cour d’appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu’en dépit du visa erroné des conclusions des sociétés EGM Wind et Perfect Wind, la cour d’appel a statué sur toutes les prétentions de celles-ci, et au vu de tous les moyens formulés dans leurs dernières conclusions, aucun défaut de réponse à un moyen n’étant invoqué ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Et sur le second moyen :

Attendu que les sociétés EGM Wind et Perfect Wind font le même grief à l’arrêt alors, selon le moyen :

1°/ que le contrat de vente, en principe consensuel, se forme dès la rencontre des volontés des parties sur la chose et le prix, sauf dispositions légales ou conventionnelles contraires ; qu’en retenant que les sociétés EGM Wind et Perfect Wind ne pouvaient se prévaloir de l‘article 1583 du code civil dès lors qu’existe une réglementation spécifique pour l’organisation du marché de la vente d’électricité prévalant sur les dispositions supplétives de l’article 1583 du code civil, la cour d’appel, qui s’est prononcée par des motifs impropres à établir l’existence d’une dérogation légale ou conventionnelle au caractère consensuel de la vente, a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

2°/ que la société EDF est tenue de conclure un contrat pour l’achat de l’électricité produite sur le territoire national par les producteurs titulaires d’un certificat leur ouvrant droit à l’obligation d’achat dès lors qu’ils lui en font la demande ; qu’il en résulte que la société EDF ne dispose d’aucune marge d’appréciation pour accepter ou refuser la demande de contrat des producteurs créanciers de l’obligation légale d’achat pesant sur elle ; qu’en retenant que le consentement de la société EDF à la demande présentée par le producteur ne pouvait être présumé, cependant que, le consentement de la société EDF, tenue d’acquérir l’électricité, est acquis à tout producteur remplissant les conditions légales pour bénéficier de l’obligation d’achat, la cour d’appel a violé l’article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 dans sa rédaction antérieure à loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, ensemble l’article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 dans sa rédaction applicable au litige ;

3°/ que le prix auquel la société EDF est tenue d’acquérir l’électricité auprès des producteurs bénéficiaires de l’obligation d’achat qui lui en font la demande, est déterminé par référence aux tarifs publiés par voie réglementaire au jour de la demande complète de contrat d’achat ; qu’il en résulte que la société EDF ne dispose d’aucune faculté de refuser le prix d’achat de l’électricité tel qu’il résulte des textes réglementaires applicables au jour de la demande complète de contrat ; que, pour exclure l‘existence d’un accord des parties sur le prix d’achat dès la date où la demande complète de contrat est adressée à la société EDF, la cour d’appel relève que le tarif publié par voie réglementaire à la date de la demande est soumis à un calcul d’actualisation ; qu’en statuant de la sorte, cependant que l’accord de la société EDF pour acquérir au prix résultant des actualisations du tarif fixé par voie réglementaire était acquis de plein droit, la cour d’appel a méconnu l’article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 dans sa rédaction antérieure à loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, ensemble l’article 3 de l’arrêté du 10 juillet 2006 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie mécanique du vent, en vigueur à la date à laquelle les demandes de contrats litigieuses ont été adressées ;

4°/ que l’accord des parties sur les modalités de détermination du prix rend la vente parfaite dès la rencontre des consentements sur la chose et le prix ; qu’en retenant que l’actualisation du tarif publié par voie réglementaire prévue par les conditions générales de vente d’électricité, postérieurement à la date de la demande de contrat, excluait l’existence d’un accord sur le prix d’achat de l‘électricité au jour de la demande complète, cependant qu’elle constatait que le prix de vente était déterminable à cette date en fonction d’éléments d’actualisation du tarif ne dépendant pas de la volonté des parties, la cour d’appel a méconnu les articles 1583 et 1591 du code civil, ensemble les articles 10 de la loi du 10 février 2000 dans sa rédaction antérieure à loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, ensemble l’article 3 de l’arrêté du 10 juillet 2006 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie mécanique du vent, en vigueur à la date à laquelle les demandes de contrats litigieuses ont été adressées ;

5°/ que la vérification de ce que les producteurs ont effectué les démarches nécessaires pour bénéficier de l’obligation d’achat d’électricité et pour sa mise en oeuvre ne conditionne pas l’obligation faite à la société EDF d’acheter, selon le tarif en vigueur au jour de la demande complète, l’électricité qui sera produite par l’installation concernée et pour laquelle la société EDF ne dispose d’aucune marge de décision ; qu’en retenant, au contraire, qu’aucun contrat ne pouvait être formé avant le terme de la procédure d’instruction de la demande, dont l’issue est incertaine, cependant que, selon les propres constatations de l’arrêt, l’instruction de la demande de contrat par la société EDF avait seulement pour objet de vérifier que les sociétés productrices étaient titulaires des autorisations ou documents requis, la cour d’appel a violé l’article 10 de la loi du 10 février 2000 dans sa rédaction antérieure à loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, l’article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble l’article 3 de l’arrêté du 17 novembre 2008 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie mécanique du vent, en vigueur à la date à laquelle les demandes de contrats litigieuses ont été adressées ;

6°/ que selon l’article 5 du décret n° 2001-410 du 10 mai 2011, dans sa rédaction applicable au litige, la prise d’effet du contrat régissant les relations entre le producteur et l’acheteur d’électricité est subordonnée au raccordement de l’installation au réseau ; qu’en retenant que le contrat d’achat d’électricité ne pouvait être formé qu’après le raccordement de l’installation au réseau, cependant que ce raccordement ne conditionne que la prise d’effet du contrat et non pas sa formation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

7°/ que la convention de raccordement de l’installation au réseau, qui n’est qu’un préalable technique à la délivrance d’électricité, n’est pas l’accessoire du contrat d’achat d’électricité ; qu’en relevant que le contrat d’achat ne pouvait être formé au moment de la demande complète dès lors que le producteur devait disposer d’une convention de raccordement dont les conditions techniques et financières sont déterminées postérieurement à la demande de contrat, cependant que la formation du contrat d’achat est indépendante de la conclusion de la convention de raccordement, la cour d’appel a violé l’article 10 de la loi du 10 février 2000 dans sa rédaction antérieure à loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, ensemble l’article 5 du décret du décret n° 2001-410 du 10 mai 2011, dans sa rédaction applicable au litige ;

8°/ que la mise en service industrielle de l’installation, qui procède d’une déclaration du producteur consécutivement au raccordement de l’installation au réseau, correspond à la date à partir de laquelle se décompte la durée d’exécution du contrat d’achat ; qu’en retenant que les contrats d’achat n’avaient pu être formés avant la mise en service industrielle dès lors qu’il résultait des articles 4 des arrêtés successifs relatifs aux conditions d’achat E01, E06 et E08 que les contrats étaient conclus pour une durée de quinze ans à compter de la mise en service industrielle, cependant que ces dispositions se bornent à régir la durée des contrats d’achat, la cour d’appel a violé l’article 10 de la loi du 10 février 2000 dans sa rédaction antérieure à loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, ensemble l’article 4 de l’arrêté du 10 juillet 2006 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie mécanique du vent, en vigueur à la date à laquelle les demandes de contrats litigieuses ont été adressées ;

9°/ que le contrat d’achat d’électricité est un contrat de vente dans lequel le producteur s’engage à livrer sa production et l’acheteur à verser le prix ; que les modalités techniques de mise en oeuvre de l’obligation d’achat pesant de plein droit sur la société EDF, qui ne concernent ni la chose ni le prix, ne portent pas sur la substance du contrat d’achat ; qu’en retenant que les modalités techniques de l’achat, déterminées postérieurement à la demande de contrat d’achat, ne pouvaient constituer des conditions suspensives de la vente en tant qu’elles portaient sur la substance même de l’objet du contrat, la cour d’appel a méconnu l’article 1582 du code civil, ensemble les articles 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 et 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 dans sa rédaction applicable au litige ;

10°/ qu’en retenant que la mise en service industrielle (MSI) des installations marquait la date de conclusion des contrats aux termes des arrêtés fixant les conditions d’achat E01, E06 et E0, tout en considérant que les contrats d’achat litigieux avaient été formés « à la date de leur signature », la cour d’appel a méconnu les dispositions des articles 455 et 458 du code de procédure civile ;

11°/ qu’à supposer même que la date de formation du contrat soit celle de la mise en service industrielle de l’installation et non la date des demandes d’achat, la cour d’appel, qui a relevé que deux des installations concernées avaient été mises en service au mois de juillet 2008, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il découlait que, pour les deux installations en cause, les contrats avaient nécessairement été formés avant l’annulation, par le Conseil d’Etat, de l’arrêté tarifaire E 06 du 10 juillet 2006, prononcée par arrêt rendu le 6 août 2008 ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article 10 de la loi du 10 février 2000 dans sa rédaction antérieure à loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, ensemble l’article 4 de l’arrêté du 10 juillet 2006 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie mécanique du vent, en vigueur à la date à laquelle deux des installations litigieuses ont été mises en service ;

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x