Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 2
ARRÊT DU 29 JUIN 2023
(n° , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/01456 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHFX2
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Janvier 2023 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MEAUX – RG n° 21/00701
APPELANT
Monsieur [B] [I]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Francine HAVET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1250
INTIMÉE
S.A.R.L. POINT ORG SÉCURITÉ
RCS de NANTERRE n° 439 437 815
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Franck THILL, avocat au barreau de CAEN, toque : 093
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 84 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 1er Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Paule ALZEARI, présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Marie-Paule ALZEARI, présidente
Christine LAGARDE, conseillère
Didier MALINOSKY, Magistrat Honoraire
Greffière lors des débats : Mme Alicia CAILLIAU
ARRÊT :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
– signé par Marie-Paule ALZEARI, présidente et par Alicia CAILLIAU, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par actes sous seing privé en date des 1er septembre 2005 et 25 mai 2013, Monsieur [I] et la société Point Org Sécurité, dont le siège social est situé à [Localité 4], ont conclu des contrats de prestations de services. Le dernier contrat a perduré jusqu’au 25 mai 2019.
La société Point Org Sécurité, composée de salariés et intervenants libéraux, propose aux entreprises des prestations en matière de prévention des risques professionnels.
La convention collective applicable est celle des bureaux d’études techniques (SYNTEC).
Le 12 juillet 2019, invoquant la requalification de la relation contractuelle de prestataire en contrat de travail et la reconnaissance de l’absence de cause réelle et sérieuse à la rupture du contrat, Monsieur [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Meaux afin d’obtenir la condamnation de la société Point Org Sécurité au paiement de diverses sommes.
Par jugement du 12 janvier 2023, le conseil de prud’hommes :
– s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris ;
– a dit qu’à défaut de recours, le dossier sera transmis à cette juridiction ;
– a réservé les dépens.
Selon déclaration du 22 février 2023, Monsieur [I] a interjeté appel de cette décision.
Par ordonnance en date du 6 mars 2023, il a été autorisé à assigner à jour fixe la Société pour l’audience du 1er juin 2023 à 13h30.
L’assignation a été délivrée le 16 mars 2023 et déposée le 17 mars suivant.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 4 mai 2023, Monsieur [I] demande à la cour de:
‘JUGER M. [I] recevable et fondé en son appel,
Y faisant droit
A TITRE PRINCIPAL,
Vu l’article L.1235-3 du Code du travail,
Vu les articles 15 et 19 de la convention collective des bureaux d’études techniques,
– Réformer le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Meaux le 12 janvier 2023 se déclarant matériellement incompétent au profit du Tribunal de Commerce de PARIS.
– Statuant à nouveau,
– Juger seul matériellement compétent le Conseil de Prud’hommes de Meaux pour statuer sur les demandes de Monsieur [B] [I].
– Ordonner le renvoi devant le Conseil de Prud’hommes de Meaux
STATUER ce que de droit sur les dépens.
Vu l’article 88 du Code de Procédure Civile,
Vu l’article 6 de la CEDH
Vu le droit au double degré de juridiction
JUGER n’y avoir lieu à évoquer la présente affaire
A défaut,
ORDONNER la réouverture des débats afin de permettre aux parties de conclure sur le fond
A TITRE SUBSIDIAIRE, si la Cour jugeait devoir évoquer sans ordonner la réouverture des débats
JUGER que la collaboration entre la société POINT ORG Sécurité et Monsieur [B] [I] qui s’est exécutée du 1er septembre 2004 au 31 décembre 2018 était un contrat de travail.
JUGER que la rupture de cette collaboration le 31 décembre 2018 constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
JUGER que la société POINT ORG Sécurité et d’autres sociétés du groupe POLE PREVENTION ont effectué des prestations pour des clients apportés par Monsieur [B] [I] sans lui verser les commissions d’apport.
En conséquence,
CONDAMNER la société POINT ORG Sécurité à payer à Monsieur [B] [I] les sommes suivantes :
une indemnité de préavis :
23 038,75 €,
une indemnité de congés payés sur préavis :
2 303,88 €,
l’indemnité conventionnelle de licenciement :
37 117,99 €,
une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
92 155,00 €,
un rappel de commissions d’apport :
50 000,00 €,
une indemnité de congés payés sur commissions d’apport :
5 000,00 €.
au titre de l’article 700 du Code de procédure civile :
6 000,00 €,
DEBOUTER la société POINT ORG Sécurité de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes,
CONDAMNER la société POINT ORG Sécurité aux dépens qui seront recouvrés pour ceux la concernant par Me HAVET, Avocat au Barreau de Paris, dans les conditions de l’article 699 du CPC’.
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 20 mars 2023, la société Point Org Sécurité demande à la cour de:
‘ In limine litis :
– Débouter Monsieur [I] de l’ensemble des demandes formées dans le cadre de son appel’;
– Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de MEAUX le 12 janvier 2023 en ce qu’il s’est déclaré matériellement incompétent au profit du Tribunal de commerce de Paris et dit qu’à défaut de recours, le dossier serait transmis à cette juridiction ;
– Renvoyer l’affaire devant le Tribunal de commerce de Paris ;
A titre subsidiaire,
– Déclarer mal fondées et en tout cas prescrites les demandes de Monsieur [I] à l’encontre de la SARL POINT ORG SECURITE ;
– Débouter Monsieur [I] de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de la SARL POINT ORG SECURITE ;
En tout état de cause,
– Réformer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de MEAUX en ce qu’il n’a pas accueilli les demandes de la SARL POINT ORG SECURITE tendant à obtenir la condamnation de Monsieur [I] à devoir :
o Verser 10.000€ de dommages et intérêts à la SARL POINT ORG SECURITE à titre de procédure abusive et injustifiée ;
o Verser 6.000€ d’indemnité à la SARL POINT ORG SECURITE au titre de l’article 700 du CPC ;
o Supporter les entiers dépens.
Et, de statuer à nouveau comme il suit :
– Condamner Monsieur [I] à payer à la SARL POINT ORG SECURITE les sommes suivantes :
o 10.000 € à titre de procédure abusive et injustifiée ;
o 6.000 € sur le fondement de l’art. 700 du CPC ;
– Condamner Monsieur [I] aux entiers dépens de première instance et d’appel.’.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Sur la compétence du conseil de prud’hommes
Monsieur [I] soutient que l’existence d’une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’elles ont donné à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité professionnelle.
Les tribunaux reconnaissent une relation de travail et le lien de subordination selon des faisceaux d’indices :
– l’intégration à un service organisé,
– la réception d’ordres de l’entreprise et le contrôle du travail,
– le pouvoir de sanction de l’entreprise,
– la détermination unilatérale par l’entreprise des conditions d’exécution du travail,
– la facturation des interventions à un taux fixé par l’entreprise,
– la dépendance économique, qui ne permet pas à elle seule d’identifier un contrat de travail, mais valide la pertinence des éléments de fait relevant des points précédents.
Au préalable, Monsieur [I] fait valoir qu’il travaillait de façon permanente et exclusive pour la société Point Org Sécurité, comme en attestent les relevés de facturation et ses déclarations fiscales annuelles.
En premier lieu, il explique qu’il était intégré à un service organisé. En effet, les intervenants sont regroupés dans des zones d’animation coordonnées par un cadre de la société. Ils reçoivent des directives sur la façon de présenter leur travail et doivent également participer à des réunions obligatoires et à des formations.
En deuxième lieu, Monsieur [I] explique qu’il recevait des ordres de la société. Il recevait chaque semaine par courriel (puis par lien VPN) le fichier mis à jour des clients à contacter pour lesquels les DU étaient à effectuer ; il s’agissait soit de commandes prises par les commerciaux de la SEPR, soit de clients du portefeuille de la société, soit de clients qu’il apportait directement. De même, la répartition des missions entre les intervenants est décidée unilatéralement par la société, ce qui est prévu par le contrat de prestations de services.
En troisième lieu, il fait valoir que la société détermine seule les conditions d’exécution du travail. A cet égard, la direction impose des conditions de réalisation des DU selon les clients.
Les documents uniques sont normalisés, les données sont collectées par l’intervenant et traitées sur une matrice mise à disposition et mise à jour par la société. En outre, les documents uniques sont identifiés Point Org Sécurité, le nom de l’intervenant n’apparaît pas.
En quatrième lieu, Monsieur [I] soutient que la rémunération des prestations est décidée unilatéralement par la société, qui, par ailleurs, définit elle-même le montant des factures mensuelles des consultants sur la base des relevés de prestations qui sont établis et de parts commerciales assorties du montant à facturer par l’intervenant.
Enfin, la société surveille le travail des intervenants et n’hésite pas à les recadrer.
En conséquence, Monsieur [I] conclut qu’il était lié par un contrat de travail avec la société.
En réponse, la société soutient qu’il appartient à Monsieur [I] de démontrer l’existence du lien de subordination revendiqué puisque l’existence d’un contrat écrit de prestations de services et d’une immatriculation au RCS présument d’une relation indépendante.
En premier lieu, les contrats de prestations de services successivement conclus prévoient que Monsieur [I] restait ‘libre d’exercer d’autres activités’. La société ne lui a ainsi jamais imposé d’exclusivité de services.
En deuxième lieu, Monsieur [I] ne justifie ainsi d’aucun ordre qui lui aurait été donné d’autorité ou qui aurait donné lieu à une quelconque forme de sanction en cas de non-respect. L’appelant renvoie à 2 mails qui se bornent à donner des conseils généraux sur l’archivage des données et à retranscrire les souhaits exprimés par certains clients. S’agissant des réunions obligatoires, Monsieur [I] participait spontanément à ces réunions occasionnelles car elles constituaient justement un moment privilégié d’échanges avec les autres intervenants. Lorsqu’il était absent, aucune remarque ou sanction ne lui était adressée.
En troisième lieu, la société soutient que les communications, exigées de tout prestataire aux termes d’un cahier des charges, ou comme en l’espèce une charte qualité, sont usuelles et indispensables à la bonne exécution des prestations commandées. La société est naturellement et légitimement en droit de maîtriser les paramètres de la commande, les délais pris ou les résultats attendus et de s’exprimer sur ces sujets sans que cela ne constitue une immixtion caractérisant un lien de subordination. Cette mise à disposition ne remet absolument pas en cause l’indépendance du prestataire qui reste libre de la gestion de son agenda, de ses déplacements ou encore de l’évaluation des risques qu’il réalise chez les clients en toute indépendance. Il s’agit d’un cahier des charges que tout client est en mesure de définir dans le cadre de la prestation attendue du prestataire.
Plus encore, la charte qualité invite précisément le prestataire à utiliser ‘le moins possible des textes pré saisis’ ce qui vient confirmer que les outils mis à disposition constituaient un pur référentiel méthodologique qui n’entravait aucunement la liberté d’appréciation de Monsieur [I] en sa qualité d’IPRP.
En dernier lieu, la société soutient qu’il n’existait pas de lien de subordination juridique aux motifs que :
Monsieur [I] est un travailleur indépendant qui gérait lui-même l’administration de son activité professionnelle ;
il avait la maîtrise de ses propres coûts de fonctionnement et choisissait librement ses moyens d’exploitation ;
le contrat prévoyait que Monsieur [I] avait la libre ‘gestion de son agenda »;
il n’a pas reçu la moindre sanction sur une durée particulièrement longue.
Ainsi, la société conclut à l’absence de contrat de travail et, par conséquent, à l’incompétence du conseil de prud’hommes pour connaître du présent litige.
En application de l’article L. 8221-6 I code du travail, « sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription :
1° Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales ;
(‘)
II.-L’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les personnes mentionnées au I fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci. »
Aux termes de l’article L. 8221-6-1 du même code, « est présumé travailleur indépendant celui dont les conditions de travail sont définies exclusivement par lui-même ou par le contrat les définissant avec son donneur d’ordre. »
Les dispositions précitées édictent une présomption de non salariat qui peuvent être levées lorsque ces personnes fournissent directement ou par personne interposée des prestations à un donneur d’ouvrage dans les conditions qui les placent dans un lien de subordination comparable à celui existant entre un salarié et son employeur.
Il est constant que cette présomption s’applique à M. [I] qui est immatriculé en qualité de travailleur indépendant depuis le 1er janvier 1987 soit, plus de 18 ans avant le début des relations contractuelles avec la société intimée.
Sur l’existence d’un lien de subordination, il doit être rappelé que ce lien doit être caractérisé au regard d’un faisceau d’indices.
En effet, l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais, des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité du travailleur alors que le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
Sur l’activité permanente et exclusive pour le compte de la Société, il doit être considéré que les contrats de prestations de services successivement conclus prévoient expressément que M.[I] reste libre d’exercer d’autres activités.
Au demeurant, le chiffre d’affaires réalisé par l’intéressé, une moyenne mensuelle de 11’500 euros, est de nature à expliquer le choix de ne pas travailler pour d’autres sociétés.
Il doit y être ajouté que M.[I] a fait le choix d’apporter à la Société ses propres prospects moyennant le versement d’une commission d’apport d’affaires dont il a négocié le montant.
Sur l’intégration à un service organisé, et en premier lieu s’agissant de la participation à des réunions obligatoires et à des formations, les e-mails produits par l’intéressé ne démontrent nullement une quelconque obligation à son endroit.
En effet, ce dernier, dans l’un des messages, exprime que ‘c’est une excellente idée de faire cette réunion à laquelle il se joindra très volontiers’.
Quant aux directives sur la façon de présenter le travail, il n’est justifié que de deux e-mails qui se bornent à donner des conseils généraux sur l’archivage des données et à retranscrire les souhaits exprimés par certains clients.
Ces deux éléments sont insuffisants à démontrer la réalité d’ordre et de directives au sens du droit du travail.
S’agissant de la réception d’ordre de l’entreprise , il résulte effectivement du contrat de prestation de services que « Point Org Sécurité s’engage à porter à la connaissance du Prestataire la liste des clients à visiter, le Prestataire ayant pour charge la gestion de son agenda et s’assurer que tous les clients ayant conclu un contrat avec Point Org Sécurité recevront la prestation convenue, dans le respect de la charte qualité des interventions Point Org Sécurité annexée au présent contrat. »
Il en résulte un engagement pour la société et non pour le Prestataire, cette dernière proposant ainsi régulièrement à celui-ci une liste de clients demandeurs de prestations situés dans des départements voisins de son lieu d’implantation qu’il était parfaitement libre de refuser ou d’accepter en fonction de ses propres disponibilités.
Ainsi, aucun horaire n’était imposé au prestataire qui était libre d’organiser lui-même directement le volume d’activité qu’il avait accepté conformément, au demeurant, au contrat de prestation de services.
À cet égard, il convient de ne pas confondre les ordres et directives pouvant être donnés par un employeur avec des demandes de communication pouvant être exigées par le donneur d’ordre au titre de la prestation acceptée.
Sur la détermination unilatérale par l’entreprise des conditions d’exécution du travail, le contrat de prestation du 25 mai 2013 stipule que « le Prestataire est expressément tenu de prendre en charge la réalisation de la prestation : prise de rendez-vous, déplacement sur site, réalisation de la prestation avec le client, rédaction, correction et expédition du document unique et de ses éventuels compléments à Point Org sous la forme d’un document informatique au format des outils Point Org dans le respect de la charte qualité des interventions Point Org Sécurité annexée au présent contrat. »
Cependant, à la suite de cet article il est rappelé que le Prestataire est lié à titre exclusif à la société Point Org Sécurité pour la prestation EvRP auprès des clients de la société, y compris pour les mises à jour annuelles et les éventuelles prestations complémentaires.
Il est ensuite expressément convenu que le Prestataire demeure libre d’exercer d’autres activités à la seule condition que celles-ci ne porte pas atteinte aux intérêts de la société Point Org Sécurité.
Surtout, cet article doit être examiné au regard du préambule du contrat dans lequel il est spécifié que la société Point Org Sécurité a mis au point un questionnaire type et une méthodologie qui constituent des outils éprouvés pour remplir une mission d’audit des entreprises clientes.
Ainsi, cette mise à disposition dans le cadre du contrat de prestation de services ne remet nullement en cause l’indépendance du prestataire qui demeure libre de la gestion de son propre agenda, de ses déplacements ou encore de l’évaluation des risques qu’il réalise chez les clients.
Dans cette mesure, il est naturel et conforme aux dispositions contractuelles que la mise à disposition d’une marque ou d’un savoir-faire soit encadrée notamment, comme en l’espèce, quant au respect de la charte qualité des interventions de la société.
La demande de la société s’agissant du respect de cette charge ne saurait être constitutive de l’existence d’un lien de subordination.
Sur la facturation des interventions à un taux fixé par l’entreprise, l’intimée observe pertinemment que M.[I] facturait à la fois l’apport des clients qu’il avait personnellement démarchés et les prestations effectuées pour le compte de la Société.
S’agissant de l’envoi par la Société d’un récapitulatif mensuel des encaissements réalisés par celle-ci, il doit être rappelé qu’il est conforme aux stipulations contractuelles qui prévoyaient une rétribution de 36 % du montant payé par le client final.
Ainsi, l’envoi du récapitulatif des encaissements permettait à M. [I] d’établir sa propre facturation par référence aux encaissements réalisés par la Société.
Dans cette mesure, il est inopérant de conclure à une absence de maîtrise de l’intéressé sur sa facturation au regard des stipulations contractuelles librement consenties.
Sur le contrôle du travail et le pouvoir de sanction de l’entreprise, il est versé aux débats un seul e-mail étant rappelé que la relation entre les parties a duré plus de 10 ans.
Dans ce message du mois de septembre 2018, il est simplement demandé à M. [I] de fournir des explications sur un rendez-vous annulé auprès d’une cliente après interpellation du réseau commercial.
Celui-ci a répondu et il n’est pas établi ni même allégué que la Société ait pris d’autres dispositions, éventuellement contraignantes, suite à cette seule interpellation.
Enfin, s’agissant de la rupture du contrat, il résulte effectivement des messages produits tant par la Société que par M. [I] que ce dernier ‘cherchait effectivement une porte de sortie et que cela passerait par des canaux de type politiques ou géopolitiques qui le passionnaient nettement plus que l’évaluation des risques professionnels.’
D’autre part, dans un e-mail du 27 janvier 2019, le président du Pôle Prévention rappelait à l’intéressé que ‘c’était lui qui avait fixé la date de cessation de son activité avec un délai lui permettant très largement de terminer proprement ses missions dans les temps et les formes qui n’auraient posé aucun problème tout en assurant une transition en douceur vers ses nouvelles activités internationales.’
Force est de constater qu’il n’est justifié d’aucune réponse à ce message par M. [I] , étant observé que la société intimée produit aux débats des photographies attestant d’autres activités pouvant être qualifiées d’internationales de la part de ce dernier.
Compte tenu de ces circonstances et à défaut de plus amples indications, la rupture du contrat de prestation de services ne peut s’analyser en une sanction au sens du droit du travail.
Enfin, il doit être considéré que M.[I] fournissait régulièrement les attestations de vigilance URSSAF, établissait ses propres factures en collectant la TVA qu’il déduisait de ses achats, remplissait chaque année une déclaration fiscale spécifique destinée à recenser ses produits et ses charges professionnelles.
D’autre part, il était totalement indépendant dans ses moyens d’exploitation étant observé qu’il a déménagé à trois reprises le siège social de son entreprise.
Il doit également être rappelé qu’aux termes du contrat, il était totalement libre de la gestion de son agenda et n’avait pas à prévenir ou à demander une autorisation lorsqu’il s’absentait.
En considération de l’ensemble de ces éléments, il doit être admis que M.[I] n’établit pas l’existence d’un lien de subordination juridique envers la société intimée.
Le jugement est donc confirmé.
Il n’y a donc pas lieu d’examiner les demandes subsidiaires.
À titre reconventionnel, la société Point Org Sécurité sollicite le paiement de la somme de 10’000 euros à titre de procédure abusive et injustifiée.
Elle estime que M.[I] a, en toute connaissance de cause, engagé la présente action dans un but malveillant à titre de mesure de représailles et d’intimidation face aux légitimes recommandations et demandes de la Société à la suite de la rupture des relations contractuelles.
Cependant, il doit être considéré que la Société procède par affirmations sans toutefois justifier de ses allégations quant à une attitude particulièrement malveillante de M.[I] postérieurement à la rupture du contrat.
Cette prétention sera donc rejetée.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
M.[I], qui succombe sur le mérite de son appel, doit être condamné aux dépens et débouté en sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
À l’opposé, il sera fait application de l’art 700 du code de procédure civile au profit de la partie intimée.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, publiquement et en dernier ressort
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Rejette la demande reconventionnelle de la société Point Org Sécurité en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive et injustifiée,
Condamne M.[B] [I] aux dépens et le déboute en sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M.[B] [I] à payer à la société Point Org Sécurité la somme de 3000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La Greffière, La Présidente,