Prêt entre particuliers : 17 novembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/15134

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Prêt entre particuliers : 17 novembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/15134

17 novembre 2022
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
19/15134

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 17 NOVEMBRE 2022

N°2022/436

Rôle N° RG 19/15134 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BE6FH

[E] [L]

C/

SA CREDIT LYONNAIS

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Olivier MEFFRE

Me Sophie BAYARD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d’Instance de TARASCON en date du 29 Août 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18-000080.

APPELANTE

Madame [E] [L]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2019-013692 du 22/11/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

née le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 4] (84), demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Olivier MEFFRE de la SELAS MEFFRE AVOCATS, avocat au barreau de TARASCON

INTIMEE

SA CREDIT LYONNAIS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié de droit audit siège, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sophie BAYARD de la SELARL CARDONNEL-BAYARD, avocat au barreau de TARASCON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 806 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Septembre 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :

Madame Carole DAUX-HARAND, Président Rapporteur,

et Madame Carole MENDOZA, conseiller- rapporteur,

chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère,

M. Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022.

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [E] [L] est titulaire d’un compte de dépôt auprès de la société LE CREDIT LYONNAIS par contrat du 05 octobre 2007.

Selon offre préalable acceptée le 14 mai 2010, cette même banque lui a consenti un crédit renouvelable dans la limite d’un montant maximum autorisé de 7300 euros.

Selon offre préalable acceptée le 26 septembre 2012, cette banque lui a consenti un prêt personnel d’un montant de 15.000 euros, remboursable en 84 mensualités de 207,73 euros hors assurance (208,78 euros avec assurance), au taux nominal de 3,30% pour financer des travaux immobiliers.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 avril 2016, la société LE CREDIT LYONNAIS a mis en demeure Madame [L] de lui verser les sommes respectives de 2794,10 euros au titre du prêt personnel, 8757, 19 euros au titre du crédit renouvelable et 2985, 72 euros au titre du solde débiteur de son compte courant.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 août 2016, le prêteur a prononcé la déchéance du terme des prêts.

Par acte d’huissier du 13 décembre 2016, la société LE CREDIT LYONNAIS a fait assigner Madame [L] devant le tribunal de grande instance de Tarascon aux fins principalement de la voir condamner aux soldes des prêts et du compte courant.

Le juge de la mise en état s’est estimé incompétent et a renvoyé l’examen de l’affaire au tribunal de Tarascon, qui, par jugement du 13 décembre 2018, a ordonné la réouverture des débats pour obtenir un historique complet des deux crédits et les relevés bancaires du compte de dépôt à vue.

Par jugement contradictoire du 29 août 2019, le tribunal d’instance de Tarascon a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :

– dit que la forclusion n’est pas encourue,

– déclaré l’action de la SA CREDIT LYONNAIS recevable,

– condamné Madame [E] [L] à payer à la SA Crédit Lyonnais la somme de

12 383,26 € au titre du prêt impayé, assortie aux intérêts au taux contractuel de 3,30 % à compter du jugement ;

– condamné Madame [L] à payer à la SA Crédit Lyonnais la somme de 9 283,96 euros arrêtée au 17 octobre 2016 au titre du solde débiteur du crédit renouvelable ainsi que les intérêts au taux de 16,20% à compter du jugement,

– condamné Madame [L] à payer à la SA Crédit Lyonnais la somme de 2 940,24 euros au titre du débit en compte, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement,

– condamné Madame [L] aux dépens,

– dit n’y avoir lieu à indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le premier juge a indiqué que l’action en paiement du prêteur n’était pas forclose.

Il a estimé que les créances de la société LE CRÉDIT LYONNAIS n’étaient pas contestables et a condamné Madame [L] au versement des soldes sollicités, avec intérêts au taux contractuels pour le prêt personnel et le crédit renouvelable.

Le 30 septembre 2019, Madame [L] a relevé appel du jugement en ce qu’il a indiqué que l’action en paiement n’était pas forclose, en ce qu’il l’a condamnée au versement des sommes de 12.383, 26 euros avec intérêts au taux contractuel et 9283,96 euros avec intérêts au taux de 16,20%.

La société LE CRÉDIT LYONNAIS a constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 05 janvier 2022.

Par arrêt mixte rendu le 24 mars 2022, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a statué ainsi :

– DIT que la cour n’est pas saisie par l’appelante d’un débat relatif au solde débiteur de son compte courant,

– CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a déclaré que l’action en paiement de la société LE CRÉDIT LYONNAIS était recevable s’agissant du prêt personnel et du crédit renouvelable et en ce qu’il a condamné Madame [E] [L] à verser à la SA LE CRÉDIT LYONNAIS la somme de 12.383,26 euros avec intérêts au taux contractuel de 3,30%

AVANT DIRE DROIT SUR LE CRÉDIT RENOUVELABLE,

ORDONNE la réouverture des débats et la révocation de l’ordonnance de clôture,

INVITE les parties à s’expliquer sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels encourue par la société LE CRÉDIT LYONNAIS en lien avec la consultation du FICP trois ans après le premier renouvellement du contrat,

INVITE la société LE CREDIT LYONNAIS à fournir un décompte de sa créance expurgés des intérêts contractuels,

RENVOIE à l’audience du 21 septembre 2022 à 9 heures salle 5 Palais Monclar,

DIT que la clôture interviendra 15 jours avant l’audience,

SURSOIT à statuer sur les autres demandes,

SURSOIT à statuer sur les dépens’

L’ordonnance de clôture, prononcée le 07 septembre 2022, a été révoquée le 21 septembre 2022, afin de prendre en compte les dernières conclusions de la société LE CREDIT LYONNAIS.

Par conclusions notifiées le 05 septembre 2022 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, Madame [L] demande à la cour de statuer en ce sens :

‘À TITRE PRINCIPAL :

SURSEOIR À STATUER jusqu’à ce que la SA CREDIT LYONNAIS ait déféré à la demande

de communication de décompte de la créance de crédit renouvelable expurgé des intérêts.

À TITRE SUBSIDIAIRE :

Vu les dispositions des articles L 311-48, L. 311-8 et L. 311-9 du code de la consommation ;

Après communication dudit décompte ;

DÉCLARER la SA CREDIT LYONNAIS déchue des intérêts au taux contractuel du crédit renouvelable.

DÉCLARER que Madame [E] [L] n’est débitrice que du capital duquel les

versements qu’elle a opérés seront déduits.

CONDAMNER la SA CREDIT LYONNAIS à payer à Madame [E] [L] une

somme de 3 500 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER la SA CREDIT LYONNAIS aux entiers dépens de première instance et

d’appel’

Elle demande un sursis à statuer en l’attente de la production par le prêteur d’un décompte expurgé du droit aux intérêts.

Subsidiairement, elle sollicite la déchéance du droit aux intérêts du prêteur au motif de l’absence de justification de la consultation du FICP lors de chaque renouvellement du contrat de crédit.

Par conclusions notifiées le 20 septembre 2022 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, la société LE CREDIT LYONNAIS demande à la cour de statuer en ce sens :

‘Révoquer l’ordonnance de clôture intervenue et de recevoir les présentes en vertu de l’article 803 du Code de Procédure civile

Déclarer que le CREDIT LYONNAIS verse aux débats les justificatifs de la consultation FICP et dire que la consultation a été effectuée

Rejeter la déchéance du droits aux intérêts contractuels

Confirmer le jugement et condamner Madame [L] à payer la somme de 9283,96 €

au 17 octobre 2016 du titre du solde débiteur du crédit renouvelable outre intérêts de 16,20 % à compter du présent jugement

Subsidiairement si la Cour devait prononcer la déchéance des intérêts tenir compte du décompte produit aux débats contenant la créance pour la somme de 7404,36 € en principal et condamner Madame [L] à régler cette somme

Débouter Madame [L] de ses demandes

La condamner à payer la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens’

Elle indique avoir consulté le FICP et le justifier. Elle fait ainsi état de sa créance.

Subsidiairement, elle sollicite le montant du capital emprunté, hors intérêts.

MOTIVATION

L’ordonnance de clôture a été révoquée et une nouvelle clôture est intervenue permettant d’accueillir les conclusions de la société LE CREDIT LYONNAIS.

Les pièces produites au débat permettent d’avoir l’historique complet du crédit renouvelable. Il n’y a donc pas lieu de surseoir à statuer. Les parties ont pu s’expliquer sur l’éventuelle déchéance du droit aux intérêts contractuels du prêteur.

L’article L 311-9 issu de la loi n° 2010-737 du 1 er juillet 2010 entrée en vigueur le premier mai 2011, prévoit qu’”avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur (…) consulte le fichier prévu à l’article L. 333-4″.

L’article L 311-16 (al. 4) ajoute : “avant de proposer à l’emprunteur de reconduire le contrat, le prêteur consulte tous les ans le fichier prévu à l’article L. 333-4, dans les conditions prévues

par l’arrêté mentionné à l’article L. 333-5, et, tous les trois ans, il vérifie la solvabilité de l’emprunteur dans les conditions fixées à l’article L. 311-9”.

L’article L 311-16 al 4 s’applique, selon le décret n° 2011-457 du 26 avril 2011 (article 1 er , III), aux contrats de crédit renouvelable souscrits avant le 1 er mai 2011 et dont la première reconduction (postérieure à cette date) intervient à compter du 1 er août 2011, lors de cette reconduction.

En conséquence, ces dispositions sont applicables au crédit renouvelable souscrit par Madame [L] le 14 mai 2010, à compter de son deuxième renouvellement.

Selon l’article L 311-48 du code de la consommation dans sa version applicable au crédit renouvelable de Madame [L], le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l’emprunteur les informations précontractuelles dans les conditions fixées par les articles L. 311-6 ou L. 311-43, sans remettre et faire signer ou valider par voie électronique la fiche mentionnée à l’article L. 311-10, ou sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-11, L. 311-12, L. 311-16, L. 311-18, L. 311-19, L. 311-29, le dernier alinéa de l’article L. 311-17 et les articles L. 311-43 et L. 311-46, est déchu du droit aux intérêts.

Lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

L’article 12 de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif à la consultation des données du FICP par les organismes financiers, prévoit que la communication des informations s’effectue soit par procédure de consultation sécurisée sur internet, soit par remise ou télétransmission d’un fichier informatique sécurisé et l’article 13 dispose que les organismes financiers doivent, afin de pouvoir justifier qu’ils ont consulté le fichier, conserver des preuves de cette consultation, de son motif et de son résultat, sur un support durable. Ils doivent être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation du résultat des consultations garantissent l’intégrité des informations ainsi collectées.

La société LE CREDIT LYONNAIS produit (ses pièces 10) de simples documents provenant de ses services sans production d’un support objectif, quand bien même elle fait mention d’une date d’émission, d’un numéro de requête et d’une date et heure de réponse; ces documents ne peuvent valoir de preuve de la consultation du FICP dans les conditions précédemment évoquées.

Dès lors, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels s’agissant du crédit renouvelable.

La société LE CREDIT LYONNAIS verse un décompte dont il indique qu’il est expurgé des intérêts, sans aucune précision. Il n’est pas mentionné le total des sommes empruntées par Madame [L] ni le total des sommes qu’elle a remboursées.

L’emprunteuse n’est débitrice que de l’éventuelle différence entre le capital emprunté et les sommes qu’elle a versées.

Il convient de prendre en compte la somme due par Madame [L] avant la souscription du nouveau contrat de crédit renouvelable, soit 7094,53 euros.

De mai 2010 jusqu’au terme du crédit renouvelable, Madame [L] a versé la somme totale de 16.749, 81 euros (comprenant, outre les échéances débitées, la somme de 7029, 81 euros versée en juillet 2013). Durant la même période, elle a emprunté la somme de 12.539 euros. A cette somme s’ajoute donc celle de 7094,53 euros due avant la souscription de ce nouveau crédit renouvelable. C’est donc la somme totale de 19.633,53 euros qui était due par l’emprunteuse.

En conséquence, elle reste redevable à l’égard de la société LE CREDIT LYONNAIS de la somme de 2883, 72 euros (différence entre les sommes empruntées et les sommes remboursées, du fait de la déchéance du droit aux intérêts contractuels).

Elle sera condamnée à verser cette somme à la société LE CREDIT LYONNAIS avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision (le prêteur sollicitant le point de départ des intérêts à compter ‘du présent jugement’).

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a condamné Madame [L] à verser la somme de 9283,96 euros avec intérêts au taux de 16,20% à compter du jugement.

Sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile

Madame [L] est principalement succombante. Elle sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel. Elle sera déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Pour des raisons tirées de l’équité, il convient de rejeter la demande de la société LE CREDIT LYONNAIS au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a condamné Madame [L] aux dépens et en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe

Vu l’arrêt mixte du 24 mars 2022,

DIT n’y avoir lieu à surseoir à statuer,

INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a condamné Madame [L] à verser la somme de 9283,96 euros avec intérêts au taux de 16,20% à compter du jugement, au titre du crédit renouvelable,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a condamné Madame [L] aux dépens et en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts du crédit renouvelable souscrit par Madame [L] le 14 mai 2010,

CONDAMNE Madame [L] à verser à la société LE CREDIT LYONNAIS la somme de 2883, 72 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, au titre du crédit renouvelable,

REJETTE les demandes des parties au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

CONDAMNE Madame [L] aux dépens de la présente procédure.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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