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4 janvier 2023
Cour de cassation
Pourvoi n°
21-21.497
COMM.
DB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 4 janvier 2023
Rejet non spécialement motivé
M. VIGNEAU, président
Décision n° 10022 F
Pourvoi n° A 21-21.497
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023
La société Lfp, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 6], a formé le pourvoi n° A 21-21.497 contre l’arrêt rendu le 23 juin 2021 par la cour d’appel de Paris (pôle 5 – chambre 6), dans le litige l’opposant à la société Bpifrance, société anonyme à conseil d’administration, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Boutié, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Lfp, de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société Bpifrance, après débats en l’audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Boutié, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Lfp aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Lfp et la condamne à payer à la société Bpifrance la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société Lfp.
La société LFP fait grief à l’arrêt attaqué de l’AVOIR déboutée de sa demande de dire et juger que BpiFrance n’est pas fondée à exiger le remboursement par exigibilité anticipée du prêt litigieux ; de l’AVOIR déboutée de sa demande de constater que dès le 17 mai 2016, LFP a opposé à BpiFrance Financement l’exception d’inexécution de ses obligations ; de l’AVOIR déboutée de sa demande de dire et juger que l’exécution de ses obligations au titre du remboursement du prêt est suspendue jusqu’au jugement que doit rendre le tribunal de commerce de Créteil ; de l’AVOIR condamnée en conséquence à payer à BpiFrance Financement la somme de 1 076 605,92 euros avec intérêts au taux de 9,93 % à compter du 19 mai 2016 et capitalisation de ces intérêts conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil à compter du 21 juillet 2016 ;
AUX MOTIFS QUE l’exception d’inexécution soulevée résulte du postulat posé par LFP selon lequel dépourvu des recettes tirées de l’exploitation des actifs cédés, elle n’a pu faire face à ses échéances ; qu’elle ajoute qu’à la suite du refus de BPI d’agréer le cédant et donc de transférer les prêts, CSE Spain a sollicité la résolution de la cession sans pour autant restituer les actifs cédés ; que LFP ne démontre cependant pas que CSE Spain ait sollicité la résolution de la cession, qui ne concernait que quatre des six unités de production vendues, alors encore que la clause contractuelle traitant les conséquences du défaut d’agrément du cessionnaire lui ouvrait une autre option dans les termes précisés ci-après : « Clause particulière relative au transfert des contrats de financement. Il est convenu qu’en cas d’opposition des banques à la suite du changement d’actionnaires découlant des présentes pour la poursuite des contrats de financement de [Localité 5], [Localité 2], [Localité 3] et [Localité 4], l’Acquéreur pourra librement : – Soit maintenir sa volonté d’acquérir les titres et droits des sociétés [Localité 5], [Localité 2], [Localité 3] et [Localité 4] comme prévu aux présentes ; Dans ce cas l’Acquéreur fera son affaire personnelle et en toute transparence vis à vis du cédant du refinancement des projets et du remboursement du capital restant dû aux banques ; En pareil cas, les surcoûts liés à un tel refinancement comme notamment – et sans que la liste soit exhaustive – les frais bancaires et le différentiel des intérêts, ne sauraient être supérieurs à 500 000 €, ces surcoûts éventuels viendront en déduction des versements prévu(s) à partir de la seconde échéance et des suivantes ; – Soit de renoncer purement et simplement à sa volonté d’acquérir les titres et droits des sociétés [Localité 5], [Localité 2], [Localité 3] et [Localité 4] ; En pareil cas, le prix d’acquisition de référence se trouvera diminué des montants correspondants » ;
qu’en toute hypothèse aucune exception d’inexécution ne peut être invoquée « par anticipation » ; qu’or, en l’espèce, c’est en raison de la défaillance de LFP dans le remboursement d’échéances nées avant que BpiFrance n’ait à se prononcer sur l’agrément du cessionnaire, les 31 juillet 2015 et 31 octobre suivant que BpiFrance a résilié le contrat de sorte que le jugement doit être confirmé pour avoir écarté cette exception ; qu’il sera ajouté qu’une exception d’inexécution suppose l’existence d’une obligation contractuelle ; que cette condition fait défaut dans ce dossier, les contrats de prêts n’imposant pas à BpiFrance d’agréer les cessionnaires des sociétés emprunteuses, lui accordant au contraire un droit discrétionnaire de ne pas y procéder ; qu’ainsi l’argumentation de LFP suppose acquise sa thèse – qu’elle formule dans cette procédure après avoir admis dans ses rapports avec le cessionnaire, par l’insertion de la clause précitée qu’elle n’ignorait pas ne pas avoir à la date de la cession l’accord de BpiFrance – selon laquelle après avoir agréé la cession, la banque s’est ravisée ; qu’or le tribunal de commerce de Créteil ne s’est pas encore prononcé en raison du sursis à statuer ordonné à sa demande ; que [l’exception d’inexécution suppose encore] une interdépendance des obligations lorsque l’inexécution alléguée découle d’une convention distincte ; que cette condition fait également défaut, l’agrément de cession de quatre sociétés du groupe n’ayant aucun lien avec l’obligation de paiement par LFP d’un prêt personnel dont les échéances sont revenues impayées avant la cession comme il vient d’être précisé et alors que BpiFrance a satisfait à la seule obligation à sa charge à savoir la mise à disposition des fonds empruntés ;
1) ALORS QUE l’exception d’inexécution peut être opposée en cas de risque avéré d’inexécution d’une obligation non encore exigible ; qu’en l’espèce, la société LFP soutenait que l ‘inexécution de ses obligations était justifiée par les manquements de la société BpiFrance qui refusait abusivement d’autoriser la cession de quatre sociétés du groupe ayant souscrit des prêts après l’avoir pourtant autorisée ; qu’en énonçant, pour écarter cette exception d’inexécution, qu’« aucune exception d’inexécution ne peut être invoquée ‘‘par anticipation” » (arrêt, p. 5), la cour d’appel a violé l’article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
2) ALORS au surplus QUE la contradiction de motifs équivaut à l’absence de motif ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a retenu qu’« informée du projet de cession des sociétés 1, 2 et 3, BpiFrance donnait un accord de principe à l’opération envisagée le 17 avril 2015 », que « le 27 avril 2015 , la société Econerphile, détenteur de l intégralité du capital social des sociétés 1, 2, 3, 6 et représentant la totalité des actionnaires des sociétés 4 et 7, et la société LFP, actionnaire majoritaire de la société Econerphile, cédaient à la société de droit espagnol CSE Spain les société 1, 2 , 3, 4, 6, et 7 », et que « le 29 juin 2015, BpiFrance notifi ait à LFP son refus d agréer la cession des titres des sociétés ayant souscrit des prêts et prononçait la déchéance du terme des concours concernés » (arrêt, p. 2, avant dernier §) ; que la cour d’appel a également relevé que la déchéance du terme du prêt conclu le 8 janvier 2015 prononcée par la société BpiFrance était justifiée par le non paiement par la société LFP de « trois échéances impayées de juillet, octobre 2015 et janvier 2016 » (arrêt, p. 4, avant dernier §) ; que la société LFP soutenait que l’inexécution de ses obligations était justifiée par les manquements de la société BpiFrance qui refusait abusivement d’autoriser la cession après l’avoir pourtant autorisée ; qu’en retenant, pour écarter cette exception d’inexécution, que « c’est en raison de la défaillance de LFP dans le remboursement d’échéances nées avant que BpiFrance n’ait à se prononcer sur l’agrément du cessionnaire, les 31 juillet 2015 et 31 octobre suivant, que BpiFrance a résilié le contrat » (arrêt, p. 5) et que « l’agrément de cession de quatre sociétés du groupe n'[avait] aucun lien avec l’obligation de paiement par LFP d’un prêt personnel dont les échéances sont revenues impayées avant la cession comme il vient d’être précisé » (arrêt, p. 6, § 3), quand elle constatait pourtant que la cession avait eu lieu le 27 avril 2015, que la société BpiFrance s’y était opposée le 29 juin 2015 et que les échéances impayées étaient celles de juillet 2015, octobre 2015 et janvier 2016, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE l’exercice d’un droit, quel qu’il soit et même s’il est laissé à la discrétion de son titulaire, est toujours susceptible de dégénérer en abus ; qu’en l’espèce, la société LFP soutenait l’inexécution de ses obligations était justifiée par les manquements de la société BpiFrance qui refusait abusivement d’autoriser la cession après l’avoir pourtant autorisée ; que pour écarter cette exception d’inexécution, la cour d’appel s’est fondée sur la circonstance que les contrats de prêt n’imposaient pas à la société BPI France d’agréer les cessionnaires des sociétés emprunteurs et lui accordaient au contraire « un droit discrétionnaire de ne pas y procéder » (arrêt, p. 5, dernier §) ; qu’en se fondant ainsi sur des motifs impropres à écarter tout abus dans l’exercice du droit de ne pas autoriser la cession, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
4) ALORS QUE toute juridiction saisie d’une demande de sa compétence connaît de tous les moyens de défense à l’exception de ceux qui soulèvent une question relevant de la compétence exclusive d’une autre juridiction ; qu’en l’espèce, la société LFP soutenait l’inexécution de ses obligations était justifiée par les manquements de la société BpiFrance qui refusait abusivement d’autoriser la cession après l’avoir pourtant autorisée ; qu’en se fondant, pour écarter cette exception d’inexécution, sur la circonstance que « l argumentation de LFP suppose acquise sa thèse [ ] selon laquelle après avoir agréé la cession, la banque s est ravisé e » et que « le tribunal de commerce de Créteil ne s est pas encore prononcé en raison du sursis à statuer ordonné à sa demande » (arrêt, p. 6, § 1), quand le fait qu’une autre juridiction soit appelée à se prononcer sur les mêmes questions de fait ne dispensait pas la cour d’appel de statuer elle même sur la réalité et le caractère fautif des agissements de la société BpiFrance allégués par la société LFP, la cour d’appel a violé l’article 49 du code de procédure civile, ensemble l’article 4 du code civil ;
5) ALORS QUE lorsque l’inexécution d’un contrat cause un dommage à un tiers et est suffisamment grave, celui-ci peut, à ses risques et périls, suspendre l’exécution de ses propres obligations vis-à-vis de la partie défaillante ; qu’en l’espèce, la société LFP soutenait l’inexécution de ses obligations était justifiée par les manquements de la société BpiFrance qui refusait abusivement d’autoriser la cession après l’avoir pourtant autorisée ; qu’en retenant, pour condamner la société LFP à payer les sommes réclamées par la société BpiFrance, que l’exception d ‘inexécution suppose « l’interdépendance des obligations lorsque l’inexécution alléguée découle d’une convention distincte » et que « l’agrément de cession de quatre sociétés du groupe n ‘avait [ aucun lien avec l’obligation de paiement par LFP d’un prêt personnel » (arrêt, p. 6, § 3), la cour d’appel, qui s’est fondée sur des considérations impropres à exclure l’exception d’inexécution, a violé l’article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
6) ALORS QUE l’exception d’inexécution peut être invoquée dès lors que l’inexécution qui la fonde est suffisamment grave, même si elle ne rend pas impossible l’exécution, par le débiteur poursuivi, de ses propres obligations ; qu’en l’espèce, la société LFP soutenait l’inexécution de ses obligations était justifiée par les manquements de la société BpiFrance qui refusait abusivement d’autoriser la cession de quatre sociétés du groupe après l’avoir pourtant autorisée ; qu’en retenant, pour condamner la société LFP à payer les sommes réclamées par la société BpiFrance, que la société LFP ne démontrait pas que la cession avait été résolue, et donc qu’elle ne disposait pas des ressources nécessaire pour régler son emprunt, la cour d’appel, qui s’est fondée sur des considérations impropres à exclure l’exception d’inexécution, a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1184 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.