Prêt entre particuliers : 5 janvier 2023 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/01270

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Prêt entre particuliers : 5 janvier 2023 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/01270
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5 janvier 2023
Cour d’appel d’Amiens
RG n°
21/01270

ARRET

[R]

C/

S.A. CREDIT DU NORD

FLR

COUR D’APPEL D’AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 05 JANVIER 2023

F N° RG 21/01270 – N° Portalis DBV4-V-B7F-IAWU

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LAON EN DATE DU 12 JANVIER 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [V] [R]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté par Me Marc ANTONINI de la SCP ANTONINI ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN

ET :

INTIMEE

S.A. CREDIT DU NORD agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Jean-françois DEJAS de la SCP MATHIEU-DEJAS-LOIZEAUX-LETISSIER, avocat au barreau de LAON

DEBATS :

A l’audience publique du 25 Octobre 2022 devant Mme Odile GREVIN, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l’article 786 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 05 Janvier 2023.

GREFFIER : Mme Charlotte RODRIGUES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Odile GREVIN, en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Cybèle VANNIER, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 05 Janvier 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

Suivant convention en date du 26 juillet 2011 la Sa Crédit du Nord (ci-après le Crédit du nord) a consenti à M. [V] [R] l’ouverture d’un compte courant simple portant le n°[XXXXXXXXXX03].

Par avenant en date du 13 avril 2013 le Crédit du Nord a consenti M. [V] [R] une facilité temporaire de trésorerie d’un montant de 3 000 € au taux d’intérêt nominal de 18,18 %, le taux effectif global annuel étant de 20,23 % soient 0,06 % par jour d’utilisation.

Entre temps, par acte sous-seing-privé en date du 27 juillet 2011 le Crédit du Nord a également consenti à M. [V] [R] un prêt personnel étoile express d’un montant de 90 000 € remboursable en 7 annuités de 15 553,78 € par prélèvement sur le compte courant, le 10 novembre 2011 une ouverture de crédit par découvert sur ce compte à hauteur de 20 000 €, autorisation de découvert portée le 31 octobre 2012 à 50 000 €.

Par courrier recommandé reçu le 9 décembre 2016, le Crédit du Nord a dénoncé à M. [V] [R] la convention de compte courant et le découvert à l’expiration d’un délai de deux mois.

A l’expiration du délai de préavis, le Crédit du nord par courrier recommandé reçu le 15 février 2017 a mis en demeure M. [V] [R] de payer un solde débiteur de compte à hauteur de 3 336,95 € et par un courrier recommandé du 1er mars 2017 de payer l’annuité du prêt courant d’août 2015 à août 2016 à hauteur de 17 004,57 €.

Par courrier reçu le 29 mars 2017 le Crédit du nord, se prévalant de l’exigibilité anticipée du prêt a mis en demeure M. [V] [R] de payer la somme de 49 665,20 €.

Par acte d’ huissier en date du 30 mai 2017, le Crédit du Nord a assigné en paiement M. [V] [R] devant le tribunal de grande instance de Laon devenu le tribunal judiciaire qui par jugement en date du 12 janvier 2021 a condamné M. [V] [R] à payer à la Sa Crédit du Nord la somme de 3 336,95 € avec intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2017, 48 285,61 € avec intérêts au taux annuel de 4,4 % à compter du 3 mai 2017, débouté la Sa Crédit du Nord du surplus de ses demandes, débouté M. [V] [R] de ses demandes de report et d’échelonnement de l’exigibilité de ses dettes et de ses demandes indemnitaires, débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et condamné M. [V] [R] aux dépens de l’instance.

En date du 5 mars 2021 M. [V] [R] a relevé appel de ce jugement.

Par dernières conclusions remises le 7 juin 2021, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, M. [V] [R] demande à la cour de déclarer le Crédit du Nord irrecevable et mal fondé en ses demandes et en conséquence de l’en débouter purement et simplement. Subsidiairement il demande à la cour de minorer la clause pénale pour la ramener à l’euro symbolique, de reporter le paiement de la dette de 24 mois à compter de la signification de la décision à intervenir et à défaut de l’échelonner sur 24 mois à compter de la signification de la même décision et de dire que les règlements effectués s’imputeront en priorité sur le capital, de débouter le Crédit du Nord de ses demandes au titre des frais bancaires et de l’intérêt au taux conventionnel pour la demande en paiement au titre du solde du compte courant. À titre reconventionnel il demande de condamner le Crédit du Nord à lui payer la somme de 53 312,67 € de dommages-intérêts et d’en ordonner la compensation éventuelle avec les sommes dues. En tout état de cause il demande de condamner le Crédit du Nord à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de de la faire supporter les dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions remises le 2 septembre 2021, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens développés, la Sa Crédit du Nord demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, de débouter M. [V] [R] toutes ses demandes et de le condamner au paiement de 5000 € sur son article 700 du code de procédure civile.

SUR CE :

Sur la demande en paiement de la Sa Crédit du Nord

Si au dispositif de ses conclusions M. [V] [R] demande que le Crédit du Nord soit déclaré irrecevable et mal fondé en toutes ses demandes, il ne développe aucun moyen au soutien de cette prétention s’agissant de la demande en paiement portant sur le prêt personnel étoile express souscrit au mois de juillet 2011 à l’exception d’une contestation portant sur le montant de l’indemnité de résiliation.

Concernant le débit de compte courant et contrairement à ce que soutient M. [V] [R], la Sa Crédit du nord produit la totalité des relevés de compte courant, de son ouverture jusqu’à sa résiliation de sorte qu’il a été mis en mesure d’évaluer la recevabilité de la demande en paiement portant sur le débit de compte, point sur lequel il ne développe aucun moyen se contentant de poursuivre ses développements aux termes desquels à défaut pour la banque de produire la totalité des relevés de compte il est impossible d’apprécier la recevabilité de la demande en paiement.

Comme l’a justement souligné le premier juge la résiliation du contrat d’ouverture de compte courant est intervenue dans les termes de l’article 14 du contrat et dans le respect d’un délai de préavis, ladite résiliation entrainant l’obligation pour le titulaire du compte de restituer le solde débiteur, que le 31 janvier 2017 le compte courant présentait un solde débiteur de 3 336,95 € qui n’a pas varié jusqu’au 15 février 2017, de sorte que M. [V] [R] devait être condamné à payer ce solde.

La cour adoptant ces motifs confirme le jugement en ce qu’il a condamné M. [V] [R] payer à la Sa Crédit du Nord la somme de 3 336,95 € avec intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2017.

Concernant le prêt, M. [V] [R] se contente de soutenir que l’indemnité de résiliation n’a pas été minorée de façon suffisante par les premiers juges en considération de sa situation personnelle et du préjudice subi par la banque.

Le Crédit du Nord demande quant à lui la confirmation du jugement.

Il ressort du jugement que l’indemnité de résiliation a été ramenée à 5% au lieu des 8 % prévus contractuellement, au motif que M. [V] [R] a remboursé partiellement le prêt litigieux et fait face au paiement d’intérêts moratoires suite au rejet de la troisième annuité de sorte que le préjudice de la banque bien qu’existant était limité dans ces circonstances.

Adoptant ces motifs et à défaut pour M. [V] [R] d’expliquer à quel titre l’ indemnité de 5% allouée à la banque serait supérieure au préjudice qu’elle subit du fait de sa défaillance, le jugement est confirmé en ce qu’il a condamné M. [V] [R] à payer à la Sa Crédit du Nord la somme de 48 285,61 € avec intérêts au taux annuel de 4,4 % à compter du 3 mai 2017.

Sur la demande de M. [V] [R] tendant à être indemnisé de fautes contractuelles commises par la banque

M. [V] [R] soutient que la banque a été défaillante dans son devoir de mise en garde en lui accordant le 26 juillet 2011 un crédit d’un montant de 90 000 € au motif qu’il était excessif et disproportionné par rapport à la consistance de son patrimoine et au montant de ses revenus annuels et que ses modalités de remboursement par annuité étaient risquées. Il ajoute que la banque n’aurait pas dû lui accorder un tel prêt sur la base d’une fiche de renseignement arrêtant l’état de son patrimoine au 1er avril 2010.

La Sa Crédit du Nord demande la confirmation du jugement en ce qu’elle a débouté M. [V] [R] de sa demande d’indemnisation pour manquement contractuel de la banque au titre de son devoir de mise en garde. Elle approuve les premiers juges qui ont retenu que le prêt consenti n’exposait M. [V] [R] qu’à une charge de remboursement de 26,62 % de ses ressources totales, circonstance excluant de pouvoir considérer que l’opération exposait l’emprunteur à un risque d’endettement excessif.

Il est admis que le banquier est tenu à l’égard de ses clients non avertis d’un devoir de mise en garde en cas de risque d’endettement excessif de l’ emprunteur. Ce devoir oblige le banquier, avant d’apporter son concours, à vérifier les capacités financières de son client et à l’alerter des risques encourus.

Ainsi le prêteur n’est débiteur d’une obligation de mise en garde qu’à l’égard de l’emprunteur non averti et qu’en cas de risque d’endettement excessif.

M. [V] [R] qui est propriétaire directement, via des Sci ou en indivision d’au moins 16 biens immobiliers dont 4 d’entre eux ont été acquis à l’aide de prêts accordés par le Crédit du Nord antérieurement au mois de juillet 2011, qui a déclaré être gérant salarié de la Holding Ot exploitant une agence immobilière, connaît parfaitement les mécanismes d’emprunt en matière immobilière, de sorte qu’il est un emprunteur averti.

La Sa Crédit du Nord a justement retenu les revenus personnels de M. [V] [R] au titre de l’année 2010 pour octroyer un prêt en 2011.

Au 1er avril 2010 la valeur de son patrimoine immobilier directement ou en qualité de porteur de parts est évalué à 1 912 465,77 €.

Pour obtenir le prêt litigieux, M. [V] [R] a déclaré à la banque percevoir 80 500 € net de revenus professionnels outre 20 000 € d’autres revenus soit 100 500 € par an et devoir faire face à 9 000 € d’impôts sur le revenu. Il a également déclaré être marié sous le régime de séparation de biens, que son épouse disposait de 27 891 € de revenus par an, avoir deux enfants à charge, n’avoir aucun emprunt ou crédits personnels en cours. Il a certifié de façon manuscrite dans le document de déclaration de ses éléments patrimoniaux n’avoir connaissance d’autres charges que celles énoncées.

Sur la base de ces éléments déclaratifs dont la banque n’avait pas à vérifier la réalité, il n’est pas établi qu’en accordant un prêt de 90 000 € remboursable par annuité de 15 553,78 € soit 1 296 € par mois, M. [V] [R] s’exposait à un endettement personnel excessif.

M. [V] [R] étant un emprunteur averti ne courant pas un risque d’endettement excessif en souscrivant le prêt litigieux, la Sa Crédit du Nord n’était pas débitrice à son endroit d’un devoir de mise en garde portant sur les risques d’endettement de sorte que son action est mal fondée.

Enfin M. [V] [R] prétend que le Crédit du Nord doit être privé de son droit à créance pour l’avoir abusivement soutenu et en parfaite mauvaise foi alors que sa situation personnelle était fortement obérée.

Outre le fait que le crédit accordé n’exposait pas M. [V] [R] à un endettement excessif, ce dernier qui ne produit aucune pièce relative à sa situation financière personnelle sur la période 2012 à 2017 est défaillant à démontrer que les concours financiers accordés sur le compte courant antérieurement à sa résiliation le 9 février 2017 l’ont été abusivement et alors que sa situation était irrémédiablement compromise.

L’analyse des relevés de compte courant démontre au contraire que les facilités accordées en novembre 2011 et octobre 2012 ont permis à M. [V] [R] de poursuivre ses investissements immobiliers et leur gestion jusqu’à leur dénonciation.

En conséquence M. [V] [R] qui est défaillant à démontrer que sa situation personnelle était irrémédiablement compromise lorsque la Sa Crédit du Nord lui a accordé des facilités entre 2011 et 2017 est débouté de sa demande indemnitaire.

Sur la demande de report et/ou d’échelonnement de la dette

M. [V] [R] qui se contente de produire son avis d’imposition 2012 portant sur ses revenus 2011 pour caractériser sa situation financière prive la cour de la possibilité de faire application au jour où elle statue de l’article 1343-5 du code civil.

En conséquence M. [V] [R] est débouté de sa demande.

Sur les demandes accessoires

M. [V] [R] qui succombe supporte les dépens et est condamné à payer à la Sa Crédit du Nord la somme de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Déboute M. [V] [R] de sa demande d’indemnisation au titre du soutien abusif ;

Condamne M. [V] [R] à payer à la Sa Crédit du Nord la somme de 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [V] [R] aux dépens d’appel.

Le Greffier, La Présidente,

 


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