Prêt entre particuliers : 5 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/13510

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Prêt entre particuliers : 5 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/13510

5 janvier 2023
Cour d’appel de Paris
RG
20/13510

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 05 JANVIER 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/13510 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCMIV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 juin 2020 – Juge des contentieux de la protection du RAINCY – RG n° 11-20-000296

APPELANTE

La société SOGEFINANCEMENT, société par actions simplifiée, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès-qualités audit siège

N° SIRET : 394 352 272 00022

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée et assistée de Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉ

Monsieur [M] [R]

né le 15 mai 1974 en TUNISIE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 9 novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– DÉFAUT

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par un acte sous seing privé du 10 septembre 2014, M. [M] [R] a contracté auprès de la société Sogefinancement, un prêt personnel en regroupement de crédits de 17 336 euros remboursable en 84 mensualités de 265,05 euros chacune, moyennant un taux d’intérêts annuel fixe de 7,40 %.

Un avenant de réaménagement a été conclu entre les parties le 23 novembre 2017 portant les échéances à 160,09 euros par mois assurance comprise sur 99 mois.

A la suite d’impayés, la société Sogefinancement s’est prévalue de la déchéance du terme du contrat.

Saisi le 22 janvier 2020 par la société Sogefinancement d’une demande tendant principalement à la condamnation de M. [R] au paiement du solde restant dû au titre du contrat ainsi qu’à la constatation de la déchéance du terme du contrat, le tribunal de proximité du Raincy par un jugement réputé contradictoire rendu le 11 juin 2020 auquel il convient de se reporter, a :

– reçu la société Sogefinancement en son action,

– prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Sogefinancement,

– condamné M. [R] à payer à la société Sogefinancement la somme de 5 976,96 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision,

– débouté la société Sogefinancement du surplus de ses demandes,

– condamné M. [R] aux dépens.

Après avoir vérifié la recevabilité de l’action au regard des dispositions de l’article R. 312-35 du code de la consommation, et pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le tribunal a retenu que le prêteur ne justifie pas avoir remis à M. [R] une notice comportant les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant telle qu’exigée par l’article L. 312-29 du code de la consommation et que la clause par laquelle l’emprunteur reconnaissait avoir eu communication de cette fiche n’était corroborée par aucun autre élément.

Par une déclaration enregistrée le 25 septembre 2020 la société Sogefinancement, a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 21 décembre 2020, l’appelante demande à la cour :

– de voir infirmer le jugement entrepris,

– de dire et juger que les arguments visant à faire prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel ou contractuel sont prescrits eu égard au délai de prescription quinquennale et de déclarer en conséquence le moyen irrecevable,

– subsidiairement, de dire et juger que la déchéance du droit aux intérêts contractuels n’est pas encourue et que le moyen infondé,

– en conséquence, et en tout état de cause, de condamner M. [R] à lui payer la somme de 12 261,99 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 7,40 % l’an à compter du 9 mars 2019 sur la somme de 11 364,16 euros et au taux légal pour le surplus,

– en tout état de cause, de condamner M. [R] à lui payer la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

L’appelante soutient que le premier juge a soulevé à l’audience du 20 février 2020 le moyen d’office tendant à la déchéance de son droit aux intérêts contractuels alors qu’il ne pouvait être invoqué que jusqu’au 10 septembre 2019 soit dans le délai de prescription quinquennale de l’article L. 110-4 du code de commerce et dans la mesure où l’offre de crédit avait été acceptée le 10 septembre 2014.

Elle indique que M. [R] a signé une clause par laquelle il reconnaît avoir reçu et pris connaissance de la notice d’assurance, ce qui fait pleine foi à son encontre. Elle soutient que le tribunal a inversé la charge de la preuve qui ne pesait pas sur elle mais sur M. [R] qui était non-comparant et qui n’a jamais contesté avoir reçu la notice d’assurance qu’il a reconnu avoir conservée. Afin de clore toute contestation, elle précise verser aux débats copie de la notice d’assurance remise à l’emprunteur.

Régulièrement assigné par acte d’huissier délivré à étude le 25 novembre 2020, l’intimé n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 octobre 2022 et l’affaire a été appelée à l’audience du 9 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Au regard de sa date de conclusion, le contrat est soumis aux dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016.

Sur la recevabilité de l’action au regard de la forclusion biennale

La recevabilité de l’action de la société Sogefinancement, examinée par le premier juge, doit être confirmée.

Sur la prescription du moyen tiré de l’irrégularité de l’offre préalable

L’appelante soutient que le juge ne pouvait soulever d’office le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts à son audience du 20 février 2020 au regard de la prescription quinquennale ayant joué au 10 septembre 2019.

La prescription est sans effet sur l’invocation d’un moyen qui tend non pas à l’octroi d’un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C’est ainsi que, défendant à une action en paiement du solde d’un crédit à la consommation, l’emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d’une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription, pour autant qu’il n’entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d’intérêts indûment acquittés.

Dans le rôle qui lui est conféré tant par l’article L. 141-4 (devenu R. 632-1) du code de la consommation que par le droit européen, le juge peut relever d’office, sans être enfermé dans un quelconque délai, toute irrégularité qui heurte une disposition d’ordre public de ce code.

En l’espèce, le moyen soulevé d’office par le premier juge et susceptible de priver le prêteur de son droit aux intérêts contractuels n’a pas pour effet de conférer à l’emprunteur un avantage autre qu’une minoration de la créance dont la société Sogefinancement poursuit le paiement.

Loin de constituer un remboursement des intérêts acquittés par le jeu d’une compensation qui supposerait une condamnation -qui n’est pas demandée- de l’organisme de crédit à payer une dette réciproque, ces moyens ne peuvent avoir pour seul effet que de modifier l’imputation des paiements faits par l’emprunteur.

En conséquence, il convient d’écarter la fin de non-recevoir soulevée par l’appelante à ce titre.

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

Pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le premier juge a relevé que la société Sogefinancement ne produisait pas la notice d’assurance remise à l’emprunteur l’empêchant d’en contrôler le contenu. Il a considéré que la clause par laquelle l’emprunteur avait reconnu être en possession de cette notice était insuffisante à prouver cette remise et valait comme simple indice.

Aux termes de l’article L. 311-19 du code de la consommation en sa version applicable au litige, lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus. Si l’assurance est exigée par le prêteur pour obtenir le financement, la fiche d’informations mentionnée à l’article L. 311-6 et l’offre de contrat de crédit rappellent que l’emprunteur peut souscrire une assurance équivalente auprès de l’assureur de son choix. Si l’assurance est facultative, l’offre de contrat de crédit rappelle les modalités suivant lesquelles l’emprunteur peut ne pas y adhérer.

Aux termes de l’article L. 311-48 du même code, le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées notamment par l’article L. 311-19 est déchu du droit aux intérêts.

L’offre de crédit soumise à M. [R] comporte une proposition d’assurance que l’emprunteur a souscrite.

M. [R] a apposé sa signature au pied d’une clause du contrat qui se situe juste au-dessus de sa signature aux termes de laquelle il déclare accepter la présente offre de contrat de crédit et en conserver un exemplaire et par laquelle il reconnaît avoir pris connaissance de toutes les conditions, de la synthèse des garanties des contrats d’assurance DIT et perte d’emploi et de la notice d’information relative l’assurance DIT-PE facultative figurant dans les documents annexés, le tout représentant 11 pages, formant une convention unique et indivisible.

La société Sogefinancement communique également copie de la notice d’assurance remise à M. [R].

Ces éléments sont suffisants à justifier de la remise à l’emprunteur de la notice d’assurance et de la conformité de celle-ci à la réglementation applicable.

Il en résulte que le jugement doit être infirmé en ce qu’il a déchu la société Sogefinancement de son droit aux intérêts contractuels sur ce fondement.

Sur le bien-fondé de la demande en paiement

L’appelante produit à l’appui de sa demande :

– l’offre de crédit et son avenant du 23 novembre 2017,

– la fiche de dialogue (ressources et charges) et les pièces de solvabilité,

– la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées,

– le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement,

– la notice d’assurance et la synthèse des garanties des assurances,

– le document propre aux regroupements de crédits,

– les tableaux d’amortissement,

-l’historique de prêt,

– un décompte de créance.

Pour fonder sa demande de paiement, la société Sogefinancement justifie de l’envoi à l’emprunteur le 14 février 2019 d’un courrier recommandé de mise en demeure exigeant le règlement sous quinze jours de la somme de 886,89 euros au titre des échéances impayées sous peine de voir l’intégralité des sommes devenir exigible. Un courrier recommandé du 12 mars 2019 adressé à M. [R] acte la déchéance du terme du contrat et le met en demeure de régler la somme de 12 271,20 euros comprenant les échéances échues et impayées, le capital restant dû, les intérêts de retard outre la pénalité légale.

C’est donc de manière légitime que la société Sogefinancement se prévaut de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues.

En application de l’article L. 311-24 du code de la consommation dans sa version applicable au litige eu égard à la date de conclusion du contrat, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur pourra demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application des articles 1152 devenu 1231-5 et 1231 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret.

Au vu des pièces justificatives produites, la créance de l’appelante s’établit de la façon suivante :

– échéances impayées : 818,34 euros

– capital restant dû à la date de déchéance du terme du contrat : 10 545,82 euros

– intérêts de retard sur échéances impayées arrêtés au 8/3/2019 : 12,50 euros

soit la somme totale de 11 376,66 euros.

M. [R] est en conséquence condamné à payer cette somme augmentée des intérêts au taux contractuel de 7,4 % l’an à compter du 9 mars 2019 sur la somme de 11 364,16 euros.

L’appelante sollicite en outre la somme de 885,33 euros au titre de l’indemnité de résiliation.

Selon l’article D. 311-6 du code de la consommation, lorsque que le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L. 311-24, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

Il s’infère de cette disposition que la notion de capital restant dû fait référence au capital rendu exigible par l’effet de la déchéance du terme.

Or, la somme demandée par la société Sogefinancement est supérieure à 8 % de 10 545,82 euros et elle s’ajoute aux indemnités de même nature d’ores et déjà capitalisées s’agissant d’un regroupement de crédits antérieurs et lors de la signature de l’avenant de réaménagement.

En conséquence, il est fait droit à la demande de la société Sogefinancement dans la seule limite de 100 euros.

M. [R] est condamné au paiement de cette somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2019.

M. [R] qui succombe est tenu aux dépens. L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le surplus des demandes est rejeté.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut, par décision mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement dont appel sauf en ce qu’il a déclaré la société Sogefinancement recevable en son action ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Rejette la fin de non-recevoir ;

Dit n’y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels de la société Sogefinancement ;

Condamne M. [M] [R] à payer à la société Sogefinancement la somme de 11 376,66 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 7,4 % l’an à compter du 9 mars 2019 sur la somme de 11 364,16 euros outre la somme de 100 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2019 ;

Déboute la société Sogefinancement du surplus de ses demandes ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [M] [R] aux dépens d’appel.

La greffière La présidente

 


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