Prêt entre particuliers : 11 janvier 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/14341

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Prêt entre particuliers : 11 janvier 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/14341

11 janvier 2023
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG
19/14341

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 11 JANVIER 2023

N° 2023/ 009

N° RG 19/14341

N° Portalis DBVB-V-B7D-BE3WX

SA BMW FINANCE

C/

[W] [F]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sylvain DAMAZ

Me Séverine TARTANSON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d’Instance de DIGNE LES BAINS en date du 04 Juin 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-18-0263.

APPELANTE

SA BMW FINANCE

prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sylvain DAMAZ , membre de l’AARPI ADSL, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [W] [F]

né le [Date naissance 3] 1966 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Séverine TARTANSON, membre de la SELARL CABINET D’AVOCATS TARTANSON, avocat au barreau des ALPES DE HAUTE-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 08 Novembre 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Janvier 2023.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Janvier 2023, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La SA BMW FINANCE a consenti, le 26 mars 2015, à Monsieur [F] un prêt personnel d’un montant de 19 700 €, remboursable en 60 mois, au taux d’intérêt fixe de 7, 90 % l’an.

Monsieur [F] ayant cessé de régler les échéances du prêt, la banque lui a adressé une mise en demeure le 11 mai 2017, pour se prévaloir de la clause d’exigibilité prévue au contrat et lui réclamer le paiement de la totalité des sommes dues à hauteur de 16 270, 43 €.

Ce courrier est, toutefois, demeuré sans effet.

Suivant acte d’huissier, signifié le 24 mai 2018, la SA BMW FINANCE a fait assigner Monsieur [F] devant le Tribunal d’instance de DIGNE-LES-BAINS aux fins d’obtenir, au bénéfice de l’exécution provisoire, sa condamnation aux dépens et à lui payer, au titre du prêt, la somme de 16 237,32 €, outre intérêts au taux conventionnel de 7,09 % et celle de 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement en date du 4 juin 2019, le Tribunal d’instance de DIGNE-LES-BAINS a rejeté la demande en paiement, rejeté la demande fondée sur l’article 700 du Code de procédure civile, ordonné l’exécution provisoire de son jugement et condamné la SA BMW FINANCE aux dépens.

Par déclaration au greffe en date du 10 septembre 2019, la SA BMW FINANCE a interjeté appel de ce jugement afin qu’il soit réformé en ce qu’il a rejeté sa demande en paiement. A titre principal, elle demande à la Cour de dire que la déchéance du terme est régulièrement acquise et, à titre subsidiaire, de prononcer la résolution judiciaire du contrat en l’état des manquements du débiteur à ses obligations contractuelles. Elle sollicite la condamnation de Monsieur [F] à lui verser la somme de 16 237,32 €, actualisée au 11 mai 2017, assortie des intérêts au taux nominal conventionnel de 7,90 %, la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile outre la condamnation de l’intimé aux entiers dépens.

A l’appui de son recours, elle fait valoir :

que le contrat de prêt litigieux contient une clause de résiliation de plein droit, sans aucune autre formalité préalable, en cas de défaillance de l’emprunteur dans le remboursement des échéances.

que le contrat de crédit à la consommation n’est pas régi par les dispositions du Code civil mais par celles du Code de la consommation, qui n’obligent pas le créancier à délivrer une mise en demeure, restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

que, de surcroit, l’assignation vaut mise en demeure.

que si la Cour venait à considérer que la déchéance du terme n’était pas acquise, elle devrait constater que le défendeur n’a pas payé la moindre somme d’argent depuis l’assignation, ce qui représente un manquement grave et réitéré à ses obligations contractuelles, et prononcer la résolution judiciaire sur le fondement des dispositions du Code civil.

Monsieur [F] conclut à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions. Il sollicite le rejet de la demande en paiement de la SA BMW FINANCE, le constat de l’irrégularité du prononcé de la déchéance du terme et le rejet de la demande en résolution judiciaire du contrat de la SA BMW FINANCE. A titre infiniment subsidiaire, si la décision était infirmée, il demande à la Cour de prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la banque et de rejeter toutes les demandes présentées au titre de la clause pénale ou de réduire celle-ci à 1 €. En tout état de cause, il sollicite la condamnation de la SA BMW FINANCE à lui verser la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens de l’instance.

Il soutient :

que les demandes présentées par la SA BMW FINANCE se heurtent désormais à la chose jugée attachée à la décision rendue par le juge d’instance en matière de surendettement, en date du 3 septembre 2019.

que c’est de manière justifiée que le tribunal a pu rejeter la demande en paiement présentée par l’appelante, qui n’a pas respecté le formalisme applicable à la déchéance du terme.

que la Cour ne pourra pas prononcer la déchéance du terme car cette demande est nouvelle en cause d’appel et donc irrecevable.

que si la Cour venait à infirmer le jugement entrepris, la déchéance du droit aux intérêts contractuels de la banque devrait être prononcée dans la mesure où l’encadré figurant au début du contrat ne mentionne pas toutes les hypothèses utilisées pour calculer ce taux et où la banque ne justifie pas avoir consulté le FICP, en contradiction avec ses obligations légales.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que la SA BMW FINANCE a consenti, le 26 mars 2015, à Monsieur [F] un prêt personnel d’un montant de 19 700 €, remboursable en 60 mois, au taux d’intérêt fixe de 7,90 % l’an ;

Que Monsieur [F] ayant cessé de régler les échéances du prêt, la banque lui a adressé une mise en demeure, le 11 mai 2017, pour se prévaloir de la clause d’exigibilité prévue au contrat et lui réclamer le paiement de la totalité des sommes dues, à hauteur de 16 270,43 € ;

Que ce courrier est, toutefois, demeuré sans effet ;

Attendu que, sur le fondement des dispositions de l’article L. 312-1 du Code de la consommation, les dispositions relatives au crédit à la consommation sont applicables à tout opération ou contrat de crédit, c’est-à-dire tout contrat en vertu duquel un prêteur s’engage à consentir à l’emprunteur un crédit, sous la forme d’un délai de paiement, d’un prêt ou de toute autre facilité de paiement similaire ;

Que le montant du crédit à la consommation doit être compris entre 200 et 75 000 € ;

Attendu qu’en application des dispositions de l’article L. 312-39 du même Code, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés ;

Que jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt ;

Que la déchéance du terme ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ;

Attendu que le contrat conclu entre les parties, en date du 26 mars 2015, est intitulé « contrat de crédit affecté » ;

Qu’il consiste en la mise à la disposition de Monsieur [F] de la somme de 19 700 €, destinée à financer l’achat d’un véhicule, remboursable en 60 mensualités de 402,46 € ;

Qu’il s’agit donc bien d’un contrat de crédit à la consommation, auquel sont applicables les dispositions du Code de la consommation relatives aux contrats de crédit à la consommation ;

Attendu que, connaissant des difficultés financières, Monsieur [F] a cessé de régler les échéances du prêt qui lui a été consenti par la SA BMW FINANCE le 26 mars 2015, ce qui a conduit la banque à lui adresser une lettre de mise en demeure, datée du 11 mai 2017, afin de se prévaloir de la clause d’exigibilité prévue au contrat et de lui réclamer le paiement de la totalité des sommes dues ;

Attendu que le contrat de crédit affecté conclu entre les parties, dont une copie est versée aux débats par la SA BMW FINANCE, précise, en son article 6. d relatif à la « défaillance » du débiteur, qu’en cas de défaillance dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés ;

Que les stipulations contractuelles se bornent donc à reprendre les dispositions légales, sans préciser, de manière expresse et non équivoque, si la délivrance d’une mise en demeure préalablement au prononcé de la déchéance du terme est nécessaire ;

Que le contrat ne comporte donc aucune disposition expresse et non équivoque indiquant que la banque ne serait pas soumise à l’obligation de délivrer une mise en demeure, restée sans effet et précisant le délai dont le débiteur dispose pour y faire obstacle, avant le prononcé de la déchéance du terme ;

Que, dès lors, dans la mesure où la SA BMW FINANCE s’est contentée d’adresser à Monsieur [F] un courrier, le 11 mai 2017, constatant la défaillance de son débiteur, mentionnant la clause d’exigibilité stipulée au contrat ainsi que son applicabilité et prononçant la déchéance du terme dans la mesure où Monsieur [F] était mis en demeure de régler la somme de 16 270,43 €, correspondant à la totalité des sommes dues ;

Que l’assignation devant le Tribunal d’instance de DIGNE-LES-BAINS ne valait pas mise en demeure et que la mise en demeure aurait dû être adressée à Monsieur [F] préalablement à la saisine de la juridiction de première instance ;

Qu’il convient donc de confirmer le jugement rendu le 4 juin 2019 par le Tribunal d’instance de DIGNE-LES-BAINS en ce qu’il a constaté que la SA BMW FINANCE n’avait pas respecté le formalisme applicable à la déchéance du terme et rejeté sa demande en paiement ;

Attendu que, sur le fondement de l’article 1224 du Code civil, la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice ;

Que l’article 1227 du même Code précise que la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice ;

Que l’article 1228 du Code civil dispose que le juge peut, selon les circonstances, prononcer la résolution du contrat ;

Attendu que l’article 564 du Code de procédure civile dispose qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la Cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait ;

Que l’article 565 du même Code précise que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ;

Attendu que la SA BMW FINANCE demande à la Cour de prononcer la résolution judiciaire du contrat en l’état des manquements du débiteur à ses obligations contractuelles ;

Attendu que cette demande n’est pas nouvelle dans la mesure où elle tend aux mêmes fins que la demande en paiement formulée devant le tribunal d’instance, c’est-à-dire obtenir le remboursement des sommes prêtées et sanctionner le débiteur à raison de sa défaillance ;

Que la demande de la SA BMW FINANCE tendant à obtenir le prononcé de la résolution judiciaire du contrat est donc recevable en cause d’appel ;

Attendu que Monsieur [F] fait valoir que les demandes de la SA BMW FINANCE se heurtent désormais à l’autorité de la chose jugée attachée à la décision rendue par le juge d’instance en matière de surendettement, le 3 septembre 2019 ;

Attendu, toutefois, que le juge d’instance a fixé le montant de la dette de Monsieur [F] à l’encontre de la SA BMW FINANCE à la somme de 0 €, en application du jugement rendu le 4 juin 2019 par le tribunal d’instance de DIGNE-LES-BAINS et dont la SA BMW FINANCE entend obtenir réformation ;

Que l’autorité de chose jugée attachée à la décision rendu le 3 septembre 2019 par le tribunal d’instance de DIGNE-LES-BAINS, en matière de surendettement, ne saurait priver la SA BMW FINANCE de sa possibilité de faire appel et d’obtenir la réformation du jugement entrepris, et dont elle se contente de tirer les conséquences ;

Attendu, néanmoins, qu’il n’y a pas lieu de prononcer la résolution judiciaire du contrat de crédit affecté dans la mesure où les stipulations du contrat permettaient à la SA BMW FINANCE de se prévaloir de la déchéance du terme ;

Qu’il lui suffisait de se plier aux conditions entourant le prononcé de cette déchéance ;

Que dans la mesure où la SA BMW FINANCE n’a pas respecté l’exigence de mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme, sa demande tendant à obtenir la résolution du contrat de crédit affecté conclu avec Monsieur [F] doit être rejetée ;

Attendu qu’il sera alloué à Monsieur [F], qui a dû engager des frais irrépétibles pour défendre ses intérêts en justice, la somme de 1 500 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que la SA BMW FINANCE, qui succombe, supportera les dépens d’appel ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe en dernier ressort,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal d’instance de DIGNE-LES-BAINS, en date du 4 juin 2019 ;

Y ajoutant,

REJETTE toutes autres demandes ;

CONDAMNE la SA BMW FINANCE à verser à Monsieur [F] la somme de 1 500 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

LA CONDAMNE aux dépens d’appel.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

 


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