24 janvier 2023
Cour d’appel de Grenoble
RG n°
21/01879
N° RG 21/01879 – N° Portalis DBVM-V-B7F-K23O
C3
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
la SCP VBA AVOCATS ASSOCIES
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 24 JANVIER 2023
Appel d’une décision (N° RG 20/00372)
rendue par le Juge des contentieux de la protection de BOURGOIN JALLIEU
en date du 09 mars 2021
suivant déclaration d’appel du 22 Avril 2021
APPELANTE :
LA CIC LYONNAISE DE BANQUE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Franck BENHAMOU de la SCP VBA AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIME :
M. [D] [B]
de nationalité française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Non représenté
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Catherine Clerc, président de chambre,
Mme Joëlle Blatry, conseiller,
M. Laurent Desgouis, vice- président placé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 22 novembre 2022 où l’affaire a été mise en délibéré au 10 Janvier 2023, prorogé au 24 Janvier 2023 Mme Clerc président de chambre chargé du rapport, assistée de Mme Anne Burel, greffier, a entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.
Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu ce jour.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Le 18 janvier 2011, M. [D] [B]’a signé avec la CIC Lyonnaise de Banque’une convention d’ouverture de compte courant assortie d’une autroisation de crédit sous forme découvert’en compte ; ce contrat de découvert a été résilié le 25 juillet 2019’à la suite d’un solde débiteur persistant malgré deux mises en demeure des 6 mai et 29 mai 2019.
Le 12 juillet 2013, la CIC Lyonnaise de Banque a accordé à M. [B] un crédit renouvelable «’Allure Libre’» n° 60015203 d’un montant initial de 1.200€ d’une durée d’un an renouvelable, au taux de 10,820’% variable en fonction de l’indice Euribor selon une moyenne mensuelle à 6 mois’; la somme de 1.200€ a été débloquée le 20 juillet 2013.
Le 21 avril 2016, la CIC Lyonnaise de Banque a accordé à M. [B] un crédit renouvelable «’Crédit en réserve’» n° 60015205 d’un montant initial de 7.000€ d’une durée d’un an renouvelable, utilisable par fractions de 1.500€ minimum, le taux applicable étant déterminé selon différents critères (nature des utilisations, options et durée choisies pour chacunes d’elles) selon une grille des taux applicables au 21 avril 2016 établie par la banque’; ce crédit a été renouvelé le 30 décembre 2016 et le 13 septembre 2018.
M. [B] a effectué 4 déblocages, à savoir’:
7.000€ le 28 avril 2016 (sous-compte n° 60015200506) ,remboursable en 42 mensualités de 178,13€ au taux de 2,76’% hors assurance,
2.000€ le 26 mai 2017 (sous-compte n° 60015200508), remboursable en 60 mensualités de 38,20€ au taux de 2,76’% hors assurance ,
1.621€ le 16 janvier 2018 (sous-compte n° 60015200509), remboursable en 21 mensualités de 81,14€ au taux de 4,50’% hors assurance,
1.638,83€ le 10 août 2018 (sous-compte n°60015200510), remboursable en 60 mensualités de 32, 07€ au taux de 5,50’% hors assurance.
A la suite d’échéances impayées, la CIC Lyonnaise de Banque après mise en demeure infructeuse du 28 juin 2019 retournée avec la mention «’pli avisé non réclamé’», a prononcé la déchéance du terme le 25 juillet 2019 en mettant M. [B] de lui payer l’intégralité des montants dus.
Selon acte extrajudiciaire du 12 mars 2020, la CIC Lyonnaise de Banque a assigné M. [B] devant le tribunal judiciaire de Bourgoin Jallieu en paiement de diverses sommes au titre du solde débiteur du compte courant , des impayés des utilisations au titre des deux crédits renouvelables, outre indemnités conventionnelles et de recouvrement de 8’%, avec capitalisation des intérêts, sans préjudice des frais irrépétibles et des dépens.
Le tribunal a ordonné par jugement du 3 novembre 2020 la réouverture des débats pour recevoir les observations des parties sur les moyens qu’il avait soulevé d’office, à savoir les conséquences à tirer d’un éventuel manquement à l’obligation d’information annuelle de l’emprunteur sur les conditions de reconduction du contrat renouvelable «’Allure Libre’», sur la régularité du contrat de crédit «’Crédit en réserve’» présenté comme un crédit renouvelable mais correspondant à une succession de crédits personnels ou affectés, sans régularisation d’offres préalables conformes au droit de la consommation.
Par jugement réputé contradictoire du 9 mars 2021, le tribunal précité a’:
déclaré l’action de la CIC Lyonnaise de Banque recevable,
condamné M. [B] à payer à la CIC Lyonnaise de Banque la somme de 2.036,44€ au titre du découvert en compte avec intérêts au taux contractuel à compter du 25 juillet 2019,
condamné, après déchéance du droit aux intérêts, M. [B] à payer la CIC Lyonnaise de Banque, avec intérêts au taux légal à compter du jugement’:
1.656,10€ au titre du crédit Réserve utilisation n° 60015200506,
1.274,20€ au titre du crédit Réserve utilisation n°60015200508,
809,60€ au titre du crédit Réserve utilisation n° 60015200509,
1.510,55€ au titre du crédit Réserve utilisation n°60015200510,
784,87€ au titre du crédit Allure Libre,
débouté la CIC Lyonnaise de Banque de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
débouté la CIC Lyonnaise de Banque du surplus de ses demandes,
rappelé que la décision est exécutoire de plein droit,
condamné M. [B] aux dépens.
Par déclaration du 22 avril 2021, la CIC Lyonnaise de Banque a relevé appel de ce jugement pris en ses seules dispositions relatives au Crédit en Réserve et à l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses uniques conclusions déposées le 7 juillet 2021 sur le fondement de l’article L.311-16 du code de la consommation dans sa version en vigueur au 21 avril 2016, la CIC Lyonnaise de Banque demande à la cour de’:
infirmer le jugement déféré en ce qu’il :
a condamné après déchéance du droit aux intérêts, M. [B] à lui payer, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, les sommes de :
‘ 1 656,10 € au titre du crédit « Réserve utilisation n°60015200506 »
‘ 1 274,20 € au titre du crédit « Réserve utilisation n°60015200508 »
‘ 809,60 € au titre du crédit « Réserve utilisation n°60015200509 »
‘ 1 510,55 € au titre du crédit « Réserve utilisation n°60015200510 »
‘ 784,87 € au titre du crédit « Allure Libre »
l’a déboutée de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
l’a déboutée du surplus de ses demandes,
sur le contrat de crédit Réserve 10096 18206 60015205 et ses utilisations 15206, 15208, 15209 et 15210
juger que le contrat crédit Réserve 10096 n°18206 60015205 souscrit le 21 avril 2016 par M. [B] relève des dispositions du code de la consommation relatives au crédit renouvelable,
en conséquence, juger qu’elle a respecté ses obligations contractuelles et légales selon le code de la consommation,
condamner M. [B] à payer au titre du contrat de crédit Réserve 15205 et ses utilisations la somme de 6.701, 58€ (somme arrêtée au 19 novembre 2019), outre intérêts contractuels jusqu’à la date du complet règlement, ainsi que l’indemnité conventionnelle et de recouvrement de 8 %,
sur le contrat de crédit Allure Libre 10096 18206 00060015203
confirmer la condamnation de M. [B] à lui payer la somme de 784,87€,
en tout état de cause,
condamner M. [B] à lui payer la somme 3.000€ en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamner M. [B] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Franck Benhamou, avocat, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
La déclaration d’appel accompagnée des conclusions d’appelante a été signifiée à la personne de M. [B] selon acte du 6 juillet 2021′; ce dernier n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 8 novembre 2022.
MOTIFS
Il est statué par décision réputée contradictoire eu égard au mode de délivrance de la signification de la déclaration d’appel à M. [B].
Il est d’ores et déjà relevé que la CIC Lyonnaise de Banque ne critique pas en définitive la décision du premier juge à l’égard du crédit «’Libre Allure’» dès lors qu’elle demande par voie de conclusions à la cour de confirmer le jugement sur ce point, alors même que sa déclaration d’appel ne portait pas sur ce point.
Sur le contrat de crédit renouvelable «’Crédit en Réserve’»
La CIC Lyonnaise de Banque fait grief au premier juge d’avoir considéré que le contrat de crédit renouvelable «’Crédit Réserve’» n’était pas un contrat unique, offrant la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates du choix de l’emprunteur, du montant du crédit consenti, mais que chaque utilisation était un «’emprunt qui s’analysait en un prêt personnel justifiant de l’acceptation d’une offre préalable spécifique ouvrant à chaque fois droit à rétractation’».
Elle soutient au contraire que le contrat «’Crédit Réserve’»relève de la qualification de crédit renouvelable et conteste donc l’obligation de régulariser pour chacune des utilisations une offre préalable de crédit.
Il résulte de l’avis de la Cour de cassation du 6 avril 2018, que l’article L. 312-57 du code de la consommation créé par l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, en ce qu’il reprend la définition énoncée à l’article L. 311-16 du même code selon laquelle constitue un crédit renouvelable une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l’usage d’une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti, doit être interprété en ce sens qu’il ne permet pas de qualifier de « crédit renouvelable par fractions » un contrat qui, s’il définit un montant maximal d’emprunts accordés à un consommateur, suppose lors de chacun des emprunts successifs, remboursable indépendamment des autres, à un taux fixe qui lui est propre, une négociation quant à ses clauses essentielles, de durée de remboursement, et du taux d’intérêts conventionnels fixe spécifique.
Ne peut donc recevoir la qualification de crédit renouvelable le contrat «’Crédit en réserve’» dans la mesure où la faculté accordée à M. [B] de disposer de façon fractionnée à partir de 1.500€, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti dans une enveloppe de 7.000€, est assortie de la mise en place pour chacune des fractions utilisées, de modalités de remboursement par échéances prédéterminées suivant un tableau d’amortissement établi lors de chaque emprunt d’une fraction de capital disponible, comportant un taux fixe spécifique selon l’affectation des fonds prêtés.
Ces «’utilisations’» d’un minimum de 1.500€ doivent donc s’analyser en un prêt personnel ou affecté, justifiant à chaque fois l’acceptation d’une offre préalable, ouvrant notamment droit à rétractation’: en effet, elles ne constituent pas un simple déblocage d’une fraction du crédit accordé de 7.000€ dont le remboursement s’intégrerait à celui-ci dans le cadre de l’acceptation unique donnée par l’emprunteur lors la conclusion du contrat initial’, mais relèvent pour chacune de modalités de remboursement (durée, taux etc.) autonomes et distinctes selon la nature de leur affectation (véhicule auto/moto’; travaux’; autres projets).
Dès lors, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a fait application de la déchéance du droit aux intérêts de la CIC Lyonnaise de Banque en retenant l’absence de nouvelle offre préalable de crédit pour chacun des déblocages sollicités par M. [B], étant relevé que l’appelante s’est limitée à conclure sur la qualification de crédit renouvelable et les sommes dues à ce titre, sans discuter le montant de sa créance tel que retenu par le premier juge après déchéance de son droit aux intérêts.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Succombant dans son recours, la CIC Lyonnaise de Banque est condamnée aux dépens d’appel’et déboutée de sa réclamation de frais irrépétibles en appel.
Les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et aux frais irrépétibles sont par ailleurs confirmées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, dans les limites de l’appel, par arrêt réputé contradictoire,
Confirme le jugement déféré,
Ajoutant,
Déboute la CIC Lyonnaise de Banque de sa demande présentée en appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la CIC Lyonnaise de Banque aux dépens d’appel.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
Signé par Madame CLERC, président, et par Madame BUREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT