Prêt entre particuliers : 9 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/05548

·

·

Prêt entre particuliers : 9 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/05548

9 février 2023
Cour d’appel de Paris
RG
21/05548

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 09 FÉVRIER 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/05548 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDLDY

Décision déférée à la Cour : Jugement du 2 mars 2021 – Juge des contentieux de la protection de PARIS – RG n° 11-20-007694

APPELANTE

La société COFIDIS, société anonyme à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 325 307 106 00097

[Adresse 4]

[Adresse 7]

[Localité 3]

représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOET HELAIN, avocat au barreau de l’ESSONNE

INTIMÉE

Madame [J] [S] épouse [L]

née le [Date naissance 1] 1989 à [Localité 6] (06)

[Adresse 2]

4ème étage

[Localité 5]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– DÉFAUT

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 17 février 2017, la société Cofidis a consenti à Mme [J] [L] née [S] un prêt personnel en regroupement de crédits antérieurs d’un montant de 16 000 euros remboursable en 96 mensualités de 212,71 euros chacune au taux débiteur annuel de 6,44 %.

Des échéances du crédit étant demeurées impayées, la société Cofidis s’est prévalue de la déchéance du terme du contrat.

Saisi le 28 juillet 2020 par la société Cofidis d’une demande tendant principalement à la condamnation de l’emprunteuse au paiement du solde restant dû au titre du contrat, le tribunal judiciaire de Paris, par un jugement réputé contradictoire rendu le 2 mars 2021 auquel il convient de se reporter, a :

– prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts de la société Cofidis,

– écarté l’application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil et L. 313-3 du code monétaire et financier,

– condamné Mme [L] à payer à la société Cofidis la somme de 11 728,21 euros,

– dit que cette somme ne produira pas intérêt même au taux légal,

– débouté la société Cofidis du surplus de ses demandes,

– dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [D] aux dépens.

Le premier juge a privé le prêteur de son droit aux intérêts contractuels faute d’avoir mentionné dans l’encadré du contrat l’information exigée par les articles L. 312-28 et R. 312-10 du code de la consommation relative à un exemple représentatif mentionnant toutes les hypothèses utilisées pour le calcul du taux annuel effectif global.

Afin de garantir l’effectivité de la sanction de déchéance du droit aux intérêts, il a écarté l’application du taux légal et de la majoration de cinq points du taux d’intérêts légal prévue à l’article L. 313-3 du code monétaire et financier.

Par une déclaration enregistrée le 22 mars 2021, la société Cofidis a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 26 mai 2021, l’appelante demande à la cour :

– de la voir déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions d’appel,

– d’y faire droit et de voir infirmer le jugement entrepris en ses dispositions critiquées dans la déclaration d’appel et statuant à nouveau,

– de voir condamner Mme [L] à lui payer la somme de 16 053,78 euros avec intérêts au taux contractuel de 6,44 % l’an à compter de la mise en demeure du 21 août 2019 avec capitalisation annuelle des intérêts par application de l’article 1343-2 du code civil,

– de la voir condamner à lui payer la somme de 1 200 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

L’appelante soutient qu’il n’appartient pas au prêteur de formuler plusieurs hypothèses de calcul puisque le TAEG figurant dans l’encadré a été calculé sur l’hypothèse d’un déblocage intégral du crédit, ce qui a été le cas en l’espèce, et que d’autre part l’encadré de l’offre de prêt mentionne expressément un TAEG fixe de 6,40 %, pour un montant total dû de 20 515,16 euros. Elle rappelle que le taux n’est pas susceptible de varier rendant inutile la mention de toutes les hypothèses de calcul.

La déclaration d’appel et les conclusions d’appel ont été signifiées dans les formes de l’article 659 du code de procédure civile le 20 mai 2021 à Mme [L], qui n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 novembre 2022 et l’affaire a été appelée à l’audience le 14 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Au regard de la date du contrat, c’est à juste titre que le premier juge a fait application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 ainsi que de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016 et des dispositions du code civil en leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats

Sur la recevabilité de l’action de la société Cofidis au regard du délai biennal de forclusion

Aux termes de l’article R. 312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur, doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé notamment par le premier incident de paiement non régularisé.

En application de l’article 125 du code de procédure civile, il appartient au juge saisi d’une demande en paiement de vérifier d’office même en dehors de toute contestation sur ce point et même en cas de non-comparution du défendeur que l’action du prêteur s’inscrit bien dans ce délai.

En l’espèce, l’historique de compte communiqué permet d’attester que le premier incident de paiement non régularisé remonte à l’appel d’échéance du 3 septembre 2018.

En engageant son action par acte du 28 juillet 2020, soit dans le délai de deux années à compter du premier incident de paiement non régularisé, la société Cofidis doit être déclarée recevable en son action

Sur la déchéance du droit aux intérêts

En l’espèce, le tribunal a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre du contrat de prêt litigieux au motif que l’encadré du contrat ne mentionnait pas les hypothèses de calcul du taux annuel effectif global.

L’article L. 341-4 du code de la consommation dispose que le prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par l’article L. 312-28 est déchu du droit aux intérêts.

L’article L. 312-28 de ce code impose au prêteur de faire figurer, dans l’offre, un encadré inséré au début informant l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit.

L’article R. 312-10 précise les informations à porter dans cet encadré et notamment le taux annuel effectif global et le montant total dû par l’emprunteur, calculés au moment de la conclusion du contrat de crédit. Il est spécifié que toutes les hypothèses utilisées pour calculer ce taux sont mentionnées.

Le crédit souscrit le 17 février 2017 est un prêt à taux fixe, de sorte que le TAEG est lui-même fixe et résulte des conditions d’octroi du crédit relatives au montant, à sa durée, au taux contractuel et aux frais qui sont précisés. Il ne peut donc varier en fonction de l’hypothèse retenue.

En l’espèce, le TAEG n’est soumis à aucune variable et est déterminé de manière fixe et invariable à 6,40 %. L’encadré du contrat n’a donc pas à mentionner les hypothèses pour le calcul de ce taux.

Le prêteur démontre ainsi avoir rempli ses obligations.

C’est donc en ajoutant aux textes précités que le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts du prêteur. Il convient par conséquent d’infirmer le jugement.

Sur la demande en paiement

La société Cofidis verse aux débats l’offre de prêt, la fiche de dialogue et les pièces justificatives de ressources et d’identité, la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées, la synthèse des garanties des contrats d’assurance, la notice d’assurance, le résultat de consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits, le document d’information propre aux regroupements de crédits, le tableau d’amortissement, un historique de compte, un décompte de créance.

Pour fonder sa demande de paiement, l’appelante justifie de l’envoi à l’emprunteuse le 9 juillet 2019 d’un courrier recommandé de mise en demeure exigeant le règlement sous 11 jours des échéances impayées à hauteur de 2 204,08 euros sous peine de voir rendre exigible l’intégralité des sommes dues. Le courrier recommandé avec avis de réception adressé à Mme [L] le 21 août 2019 prend acte de la déchéance du terme du contrat et la met en demeure de régler la somme totale de 16 053,78 euros.

C’est donc de manière légitime que la société Cofidis se prévaut de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues.

En application de l’article L. 312-39 du code de la consommation dans sa version applicable au litige eu égard à la date de conclusion du contrat, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur pourra demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret.

Au vu des pièces justificatives produites, la créance de l’appelante s’établit de la façon suivante :

– échéances impayées : 2 219,43 euros

– capital restant dû à la date de déchéance du terme du contrat : 12 640,35 euros

– intérêts de retard arrêtés au 20 août 2019 : 42,37euros

soit la somme totale de 14 902,15 euros.

Mme [L] est en conséquence condamnée au paiement cette somme augmentée des intérêts au taux contractuel de 6,44 % l’an à compter du 21 août 2019 sur la somme de 14 859,78 euros.

L’appelante sollicite en outre la somme de 1 151,63 euros au titre de l’indemnité de résiliation.

Selon l’article D. 312-6 du code de la consommation, lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L. 312-39, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

Il s’infère de cette disposition que la notion de capital restant dû fait référence au capital rendu exigible par l’effet de la déchéance du terme.

La somme demandée excède 8 % du capital restant dû et vient s’ajouter aux sommes de même nature d’ores et déjà incluses capitalisées s’agissant d’un regroupement de crédits antérieurs. La somme réclamée est donc excessive et doit être réduite à 100 euros, somme à laquelle est condamnée M. [L] augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 août 2019.

La sanction de déchéance du droit aux intérêts n’étant pas prononcée, il n’y a pas lieu de statuer spécifiquement sur l’application de la majoration du taux légal prévue par l’article L. 313-3 alinéa 1er du code monétaire et financier.

La capitalisation des intérêts, dit encore anatocisme, est prohibée concernant les crédits à la consommation, matière dans laquelle les sommes qui peuvent être réclamées sont strictement et limitativement énumérées. En effet, l’article L. 312-38 du code de la consommation rappelle qu’aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 312-39 et L. 312-40, ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.

C’est donc à juste titre que le premier juge a rejeté cette demande. Le jugement est confirmé sur ce point.

Les dispositions du jugement querellé relatives aux dépens et frais irrépétibles sont confirmées. Mme [L] qui succombe supportera les dépens d’appel. L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant après débats en audience publique, par arrêt rendu par défaut et par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement dont appel sauf en ce qu’il a rejeté la demande de capitalisation des intérêts, rejeté la demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et quant au sort des dépens ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare la société Cofidis recevable en son action ;

Dit n’y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels ;

Condamne Mme [J] [L] née [S] à payer à la société Cofidis la somme de 14 902,15 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 6,44 % l’an à compter du 21 août 2019 sur la somme de 14 859,78 euros euros outre la somme de 100 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 août 2019 ;

Rejette le surplus des demandes ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [J] [L] née [S] aux entiers dépens d’appel.

La greffière La présidente

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x