2 mars 2023
Cour d’appel de Caen
RG n°
21/01870
AFFAIRE :N° RG 21/01870 –
N° Portalis DBVC-V-B7F-GZAN
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : DECISION en date du 27 Mai 2021 du Tribunal de proximité de FLERS – RG n° 1119000150
COUR D’APPEL DE CAEN
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 02 MARS 2023
APPELANTE :
S.A. CA CONSUMER FINANCE
[Adresse 2]
[Localité 4]
prise en la personne de son représentant légal
représentée par Me Guillaume CHANUT, avocat au barreau de CAEN,
assistée de Me Erwan LECLERCQ, avocat au barreau de RENNES
INTIME :
Monsieur [Y] [E]
né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 5]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 3]
non représenté, bien que régulièrement assigné
DEBATS : A l’audience publique du 12 décembre 2022, sans opposition du ou des avocats, Madame EMILY, Président de Chambre, a entendu seule les observations des parties sans opposition de la part des avocats et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme LE GALL, greffier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame EMILY, Président de Chambre,
Mme COURTADE, Conseillère,
M. GOUARIN, Conseiller,
ARRÊT prononcé publiquement le 02 mars 2023 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier
Par acte sous seing privé en date du 9 mai 2017, la société CA Consumer Finance ( ci-après société Consumer), sous l’enseigne SOFINCO, a consenti à M. [Y] [E] et Mme [V] [X] épouse [E] un prêt personnel n°81583007913 de 13.000 euros, remboursable en 72 mensualitésd’un montant de 215,63 euros chacune, avec un taux débiteur fixe de 6,03% l’an, hors assurance.
Suite à des mensualités impayées, la SA société Consumer s’est prévalue de la déchéance du terme par courrier en date du 14 mars 2019, et a saisi le président du tribunal d’instance aux fins d’injonction de payer.
Par ordonnance du 14 mai 2019, le magistrat à titre temporaire du tribunal d’instance de Flers a rendu à l’encontre des époux [E] une ordonnance portant injonction de payer solidairement à la société Consumer la somme en principal de 10.986,04 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 20 mars 2019, outre 10,70 euros au titre des frais accessoires et 51,48 euros au titre des dépens.
Le 19 juillet 2019, Mme [E] a formé opposition à cette ordonnance, préalablement signifiée à domicile le 21 juin 2019.
Il a été procédé à une vérification d’écriture de M. [E] et de Mme [E], cette dernière contestant avoir signé le contrat de prêt.
Par jugement du 27 mai 2021, le tribunal de proximité de Flers a :
– déclaré recevable l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer ;
– déclaré l’action de la société Consumer recevable ;
– prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la société Consumer au titre du prêt personnel n°815830079l3 souscrit par M. [E] le 9 mai 2017, à compter de cette date ;
– condamné M. [E] à payer à la société Consumer la somme de 1.726,52 euros au titre des échéances impayées à la date du 14 mai 2019 de son prêt personnel n°81583007913 souscrit le 9 mai 2017 ;
– dit que ce capital produira intérêts au taux légal non majoré, à compter de la signification du présent jugement ;
– débouté la société Consumer de ses demandes à l’encontre de Mme [E] ;
– octroyé des délais de paiement à M. [E] ;
– condamné M. [E] aux entiers dépens de la présente instance ;
– débouté la société Consumer de sa demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société Consumer à payer à Mme [E] la somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– ordonné l’exécution provisoire du présent jugement ;
– débouté les parties de toute demande plus ample ou contraire.
Par déclaration du 28 juin 2021, la société Consumer a fait appel du jugement à l’encontre de M. [E].
Dans ses dernières conclusions du 1er septembre 2021, elle demande à la cour de :
– dire nul et en tous cas réformer le jugement dont appel ;
– condamner M. [E] à lui payer la somme de 12 347,13 euros avec intérêts au taux de 6,03 % l’an à compter du 14 mars 2019 jusqu’à parfait paiement ;
– débouter M. [E] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– condamner M. [E] à lui payer une somme de 2500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
M. [E] n’a pas constitué avocat. La déclaration d’appel et les conclusions de l’appelante lui ont été signifiées par acte d’huissier du 9 septembre 2021, remis à personne.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 novembre 2022.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens de la société Consumer, il est renvoyé à ces dernières conclusions visées supra.
SUR CE, LA COUR
– Sur la nullité du jugement
La société Consumer sollicite l’annulation du jugement au visa de l’article 16 du code de procédure civile faisant valoir que le tribunal a prononcé la déchéance du droit aux intérêts au motif que le prêteur ne rapportait pas la preuve de la remise d’une fiche d’informations précontractuelles sans mettre ce moyen dans les débats et lui permettre de le discuter.
Selon l’article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.
Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
En l’espèce, il ressort du jugement que les parties n’ont aucunement soulevé la déchéance du droit aux intérêts du prêteur et n’ont de ce fait aucunement fait état de ce qu’aucune fiche d’informations précontractuelle n’avait été fournie.
Il est relevé dans le jugement : ‘ Sur interrogation du magistrat pendant l’audience, la banque affirme que ses demandes ne sont affectées ni par la forclusion ni par quelque cause de déchéance du droit aux intérêts ou de nullité.’
Le tribunal n’a pour autant pas précisé qu’il entendait soulever le moyen tiré de l’absence de communication d’une fiche d’informations précontractuelles et viser les articles L 312-12 , R 312-2 à R312-4 et L341-1 du code de la consommation.
Le tribunal a donc fondé sa décision sur un moyen de droit relevé d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
Le jugement doit par conséquent être annulé.
En vertu de l’effet dévolutif de l’appel, il convient de statuer sur le fond du litige.
– Sur la demande en paiement
Le fait que M. [E] ait reconnu avoir imité la signature de son épouse lors de la conclusion du contrat de prêt, ne dispense pas la société Consumer de justifier de sa créance.
Selon l’article 1225 du code civil, la clause résolutoire précise les engagements dont l’inexécution entraînera la résolution du contrat.
La résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse, s’il n’a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l’inexécution. La mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire.
Le contrat de prêt prévoit en l’espèce qu’en cas de défaillance de la part de l’emprunteur dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés.
Il a donc été convenu en l’espèce d’une déchéance du terme résultant du seul fait de l’inexécution.
M. [E] a signé sous la mention selon laquelle il reconnaissait avoir reçu et pris connaissance de la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées.
Il n’a pas entendu contester avoir bien reçu ladite fiche.
Il résulte du tableau d’amortissement et de l’historique du compte que les échéances sont demeurées impayées à compter de septembre 2018.
Au vu du décompte produit, il reste dû:
– capital à échoir : 9845,99 euros au 5 mars 2019,
– mensualités impayées : 1140,05 euros ;
– primes d’assurance non payées : 114,45 euros
– intérêts échus impayés : 367,76 euros
– indemnité de 8%: 878,88 euros
total : 12 347,13 euros.
M. [E] sera condamné au paiement de cette somme avec intérêts au taux de 6,03% l’an sur la somme de 10 986,04 euros et intérêts au taux légal sur la somme de 878,88 euros à compter du 21 mars 2019, date de réception de la mise en demeure du 20 mars 2019.
M. [E] sera condamné aux dépens de première instance et d’appel.
Il n’y a pas lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. La société Consumer sera déboutée de cette demande.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition au greffe ;
Annule le jugement du tribunal de proximité de Flers du 27 mai 2021 ;
Statuant sur le fond du litige, au vu de l’effet dévolutif de l’appel ;
Condamne M. [Y] [E] à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 12347,13 euros avec intérêts au taux de 6,03% l’an sur la somme de 10 986,04 euros et intérêts au taux légal sur la somme de 878,88 euros à compter du 21 mars 2019 ;
Condamne M. [Y] [E] aux dépens de première instance et d’appel ;
Déboute la société CA Consumer Finance du surplus de ses demandes ;
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
N. LE GALL F. EMILY