14 mars 2023
Cour d’appel de Grenoble
RG n°
21/01430
N° RG 21/01430 – N° Portalis DBVM-V-B7F-KZRJ
C3
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Andrée PERONNARD-PERROT
Me Pierre Lyonel LEVEQUE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 14 MARS 2023
Appel d’une décision (N° RG 20/00895)
rendue par le Juge des contentieux de la protection de GRENOBLE
en date du 28 janvier 2021
suivant déclaration d’appel du 24 mars 2021
APPELANTS :
M. [N] [I]
né le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 4]
Mme [B] [Y] épouse [I]
née le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 4]
représentés par Me Andrée PERONNARD-PERROT, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMEE :
La S.A. CA CONSUMER FINANCE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 6]
représentée par Me Pierre Lyonel LEVEQUE, avocat au barreau de VIENNE
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Catherine Clerc, président de chambre,
Mme Joëlle Blatry, conseiller
Mme Véronique Lamoine, conseiller,
DÉBATS :
A l’audience publique du 24 janvier 2023, madame Clerc président de chambre chargé du rapport, assistée de Anne Burel, greffier, en présence de Catherine Silvan, greffier stagiaire, a entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.
Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu ce jour.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon offre acceptée le 30 mai 2018, la société CA Consumer Finance sous la marque Sofinco a consenti à M. [N] [I] et Mme [B] [I] née [Y] un prêt personnel n° 81595535849 d’un montant de 49.500€ remboursable en 120 mensualités au taux débiteur fixe de 5,699’% et au taux effectif global de 5,850’%.
Le prêt n’a plus été remboursé à partir de janvier 2019 et la société CA Consumer Finance après mise en demeure par courrier recommandé du 6 septembre 2019 d’avoir à régler les échéances impayées d’un montant de 5.666,79€ dans un délai de 15 jours à peine de déchéance du terme, a prononcé cette sanction par courrier recommandé avec AR du 29 octobre 2019.
Suivant acte extrajudiciaire du 24 février 2020, la société CA Consumer Finance a assigné en paiement M. et Mme [I] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Grenoble.
Par jugement contradictoire du 28 janvier 2021, cette juridiction a’:
jugé l’action de la société CA Consumer Finance recevable,
condamné solidairement M. et Mme [I] à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 45.441€ outre intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 2019,
rejeté toutes les autres demandes
rappelé que la décision est assortie de plein droit de l’exécution provisoire,
condamné in solidum M. et Mme [I] aux entiers dépens.
Par déclaration déposée le 24 mars 2021, M. et Mme [I] ont relevé appel.
Dans leurs uniques conclusions déposées le 16 juin 2021, M. et Mme [I] demandent à la cour de’réformer le jugement déféré et statuant à nouveau de’:
à titre principal,
juger que la société CA Consumer Finance ne justifie nullement être leur créancière et la débouter de toutes ses réclamations,
à titre subsidiaire, sur le fondement des articles 1104 et suivants, 1231-5, 1343, 1343-5 du code civil, L.311-6 et suivants, L.312-16, L. 314-20 du code de la consommation,
débouter la société CA Consumer Finance de toutes ses prétentions injustifiées et de tout droit à intérêts sur la somme prêtée,
allouer à Mme [I] un délai de 24 mois pour s’acquitter de sa dette par 23 mensualités de 100€ et une du montant du solde dû, compte tenu de sa situation,
juger que M. [I] ayant été déclaré recevable par la commission de surendettement, la dette sera réglée en fonction du plan qui sera mis en place par la Banque de France,
débouter la société CA Consumer Finance de toutes autres prétentions,
laisser les dépens à la charge de celle-ci.
Ils font valoir en substance que’:
la société CA Consumer Finance n’a pas qualité à agir, le prêt ayant été contracté avec la société Sofinco dont le nom figure également sur le tableau d’amortissement et sur le courrier recommandé des 6 septembre 2019 et 29 octobre 2019, et à considérer que cette dernière est une marque de CA Consumer Finance, elle ne pouvait pas contracter, une marque n’ayant pas la personnalité morale,
la société CA Consumer Finance n’a pas exécuté de bonne foi le contrat et encourt la déchéance de son droit aux intérêts pour non-respect des dispositions d’ordre public concernant l’information de l’emprunteur prévue à l’article L.311-9 du code de la consommation, car ils n’ont pas reçu un exemplaire du contrat d’assurance du prêt pour lequel il leur est prélevé des cotisations qui ne sont donc pas justifiées, cette assurance leur a été imposée car les cases correspondantes étaient cochées d’avance, et les coordonnées de l’assurance et la référence du dossier ne figurent pas dans le contrat, cette déchéance étant également encourue pour défaut de consultation du FICP,
la société CA Consumer Finance ne justifie pas leur avoir fourni toutes les informations nécessaires au sujet du taux réellement appliqué dès l’origine au prêt,
le dossier de surendettement de M. [I] a été déclaré recevable contrairement à celui déposé par son épouse qui exerce une profession libérale, et cette dernière doit subvenir aux besoins de deux enfants mineurs.
Par uniques conclusions déposées le 15 septembre 2021 au visa des articles L.312-39 du code de la consommation, la société CA Consumer Finance sollicite l’infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a jugé son action recevable et condamné in solidum M. et Mme [I], entendant ainsi que la cour, statuant à nouveau,
déboute M. et Mme [I] de leurs demandes, fins et prétentions,
condamne solidairement M. et Mme [I] à lui payer’:
au titre du contrat du 30 mai 2018, la somme de 54.984,70€ outre intérêts contractuels au taux de 5,699’% à compter du 29 octobre 2019,
la somme de 750€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
condamne solidairement les mêmes aux entiers dépens de l’appel.
L’intimée développe en substance que’:
elle justifie de sa qualité à agir,
elle n’encourt pas la déchéance du droit aux intérêts car elle a consulté le FICP,
les emprunteurs ont attesté avoir reçu la notice d’assurance et ont accepté cette assurance, et elle n’a pas à conserver cette notice,
l’indemnité de 8’% prévue au contrat n’est pas excessive car conforme aux dispositions de l’article L.312-39 du code de la consommation,
les protestations des emprunteurs sur les informations relatives aux taux d’intérêt (taux annuel et TEG) ne sont pas établies,
le délai de paiement de 24 mois sollicité n’a pas lieu d’être accordé au regard des larges délais de fait déjà accordés.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 décembre 2022.
MOTIFS
Sur la qualité à agir de la société CA Consumer Finance
Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a dit cette qualité, la société Sofinco figurant clairement en tant que marque de la société CA Consumer Finance’; étant en la forme d’une société anonyme, la société Sofinco a la personnalité morale et donc la capacité de contracter.
Sur la déchéance du droit aux intérêts
Il est vérifié à l’examen des pièces communiquées sous le n° 1 que la société CA Consumer Finance a consulté le FICP pour chacun des deux emprunteurs le 30 mai 2018, respectivement à 10h44 et 10h45 ; le jugement déféré est consécutivement infirmé en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts pour défaut de consultation de ce fichier.
Aucune sanction de cette nature ne peut être prononcée du chef des critiques portées par les appelants à l’égard d’un prétendu défaut d’information sur les taux d’intérêts du prêt, cette prétention exposée laconiquement n’étant pas motivée en droit ni en fait.
S’agissant de la notice d’assurance, le premier juge a retenu à bon droit que les emprunteurs avaient accepté de souscrire à l’assurance facultative du prêt et reconnu être en possession d’un exemplaire de cette assurance, la cour relevant que cette assurance est bien identifiée au contrat de prêt dans le paragraphe concernant l’adhésion à cette assurance (Sécurivie)’; quand bien même les cases d’acceptation par l’emprunteur et le co-emprunteur à cette assurance sont effectivement pré-cochées, M. et Mme [I] n’ont pas manifesté leur refus d’adhésion comme ils y étaient invités par la clause «’si vous ne souhaitez plus l’assurance facultative, barrez la phrase et la ou les case(s) correspondante(s) et signez à côté’».
Sur la demande en paiement de la société CA Consumer Finance
N’encourant pas la déchéance de son droit à intérêts contractuels, la société CA Consumer Finance est donc fondée à obtenir le paiement de sa créance, laquelle sera fixée à la somme de 54.783,31€ selon le détail suivant’:
échéances échues impayées en capital , intérêts et assurance à la déchéance du terme = 6.765€
capital restant dû à la déchéance du terme = 44.408,83€
indemnité de 8% sur le capital restant dû (cette indemnité n’étant pas discutée en tant que telle par M. et Mme [I]) = 3.552,70€ .
M. et Mme [I] sont condamnés solidairement à payer la somme de 54.783,31€ à la société CA Consumer Finance, étant précisé que la somme de 3.552,70€ produira intérêts au taux légal à compter du 29 octobre 2019 la somme de 51.320,61€ produisant quant à elle intérêts au taux contractuel de 5,699’% à compter de la même date et ce jusqu’à parfait règlement’;
Sur le délai de paiement et la procédure de surendettement
Mme [I] ne justifiant pas de ses revenus et charges actualisés, les derniers justificatifs datant de 2021, elle ne peut pas être accueillie dans sa demande de délais de paiement.
Dans le cadre de la procédure de surendettement ouverte au profit de M. [I], la commission de surendettement des particuliers de l’Isère a décidé le 18 mai 2021, au titre des mesures imposées, un moratoire de 24 mois à l’égard des créances déclarées, dont celle de la société CA Consumer Finance au titre du prêt n° 81595535849′; il n’est pas soutenu que ce moratoire a été contesté par les créanciers ou le bénéficiaire.
Le présent arrêt ne pourra donc pas être mis à exécution par la société CA Consumer Finance avant l’échéance de ce moratoire qui est toujours en cours à ce jour. Il lui appartiendra de se conformer aux mesures (plan de surendettement) qui pourront être mises en ‘uvre par la commission de surendettement pour le recouvrement ultérieur de sa créance.
Sur les mesures accessoires
Succombant dans leur recours, M. et Mme [I] sont condamnés in solidum aux dépens d’appel (et non pas solidairement comme demandé par l’intimée) et conservent la charge de leurs frais irrépétibles d’appel. Ils sont dispensés en équité de verser une indemnité de procédure à la société CA Consumer Finance.
Le jugement querellé est par ailleurs confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts à l’encontre de la société CA Consumer Finance,
Statuant à nouveau sur ce point et ajoutant,
Condamne solidairement M. [N] [I] et Mme [B] [I] née [Y] à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 54.783,31€ outre intérêts au taux conventionnel de 5,699’% sur la somme de 51.320,61€ et intérêts au taux légal sur la somme de 3.552,70€ , l’ensemble de ces intérêts étant dus à compter du 29 octobre 2019,
Déboute Mme [B] [I] née [Y] de sa demande de délais de paiement,
Rappelle que M. [N] [I] bénéficiant d’une procédure de surendettement, la société CA Consumer Finance devra se conformer aux mesures de surendettement pour le règlement de sa créance,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en appel,
Condamne in solidum M. [N] [I] et Mme [B] [I] née [Y] aux dépens d’appel.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT