Prêt entre particuliers : 23 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00413

·

·

Prêt entre particuliers : 23 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00413

23 mars 2023
Cour d’appel de Paris
RG
21/00413

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 3

ARRET DU 23 MARS 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/00413 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CC4GI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Juin 2020 -Juge des contentieux de la protection du RAINCY – RG n° 1120000096

APPELANTE

S.A.S. SOGEFINANCEMENT, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés es-qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Immatriculée au RCS Nanterre sous le numéro B 394 352 272

Représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELARL CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMES

Monsieur [B] [M]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Assignation devant la Cour d’Appel de PARIS, en date du 31/03/2021, déposée à l’Etude d’Huissier de Justice conformément aux articles 656 et 658 du code de procédure civile.

Madame [D] [C] épouse [M]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Assignation devant la Cour d’Appel de PARIS, en date du 31/03/2021, déposée à l’Etude d’Huissier de Justice conformément aux articles 656 et 658 du code de procédure civile.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. François LEPLAT, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur François LEPLAT, président

Madame Anne-Laure MEANO, présidente

Madame Aurore DOCQUINCOURT, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Joëlle COULMANCE

ARRET :

– Par défaut

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par François LEPLAT, Président de chambre et par Joëlle COULMANCE, Greffière, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 11 décembre 2013, la SAS Sogefinancement a consenti à M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C] un prêt personnel d’un montant de 20.000 euros, avec intérêts au taux nominal conventionnel de 5,50 %, remboursable en 84 mensualites s’élevant à 287,40 euros hors assurance.

Selon avenant de réamenagement du 28 septembre 2017, les parties ont convenu du remboursement de la somme de 10.992,34 euros en 63 mensualites de 208,43 euros assurance incluse à compter du 10 novembre 2017.

La SAS Sogefinancement a adressé à M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C] une mise en demeure d’avoir à payer la somme de 625,59 euros au titre des échéances impayées et 9921,42 euros au titre du capital par lettres recommandées en date du 26 juin 2018.

Selon les mesures approuvées par la Commission de surendettement des particuliers de la Seine-Saint-Denis le 19 avril 2019, à effet au 31 mai 2019, la créance de la SAS Sogefinancement a été fixée à 11.629,68 euros, avec moratoire de 24 mois sans remboursement.

Par acte d’huissier en date du 16 decembre 2019, la SAS Sogefinancement a fait assigner M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C] devant le juge des contentieux de la protection du Raincy afin de :

– constater que la décheance du terme est acquise, à défaut prononcer la résiliation judiciaire

du contrat,

– condamner les défendeurs au paiement des sommes suivantes :

– 10.554,72 euros au titre des mensualites impayées, du capital restant dû et des intérêts échus avec intérêts au taux de 5,50% l’an sur la somme de 10.546,71 euros à compter du 11 juin 2018 jusqu’au parfait paiement,

– 830,59 euros au titre de l’indemnité légale de 8% sur le capital restant dû,

– 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens,

– ordonner l’exécution provisoire.

Par jugement réputé contradictoire entrepris du 11 juin 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité du Raincy a ainsi statué :

– déclare recevable la demande en paiement,

– condamne solidairement M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C] payer à la SAS Sogefinancement la somme de 6.212,53 euros avec intérêts au taux légal a compter du 16 decembre 2019,

– rappelle que l’exécution de la présente décision sera affectée par la procédure de traitement de surendettement selon les articles L722-1 et suivants du code de la consommation,

– condamne in solidum M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C] à payer à la SAS Sogefinancement la somme de 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamne in solidum M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C] aux dépens,

– déboute la SAS Sogefinancement de ses autres demandes et prétentions,

– ordonne l’exécution provisoire du présent jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu l’appel interjeté le 28 décembre 2020 par la SAS Sogefinancement,

Vu les dernières conclusions remises au greffe le 29 mars 2021 par lesquelles la SAS Sogefinancement demande à la cour de :

Vu les articles 561 et suivants du code de procédure civile,

Vu l’article 9 du code de procédure civile,

Vu les articles L 311-1, L 311-18, R 311-5 et L 311-48, L. 311-19, L.311-24 du Code de la consommation dans leur rédaction applicable à la date de l’offre de crédit,

Vu les articles 1134 alinéa 1, 1184 et 1154, 1315 et 1322 du code civil dans leur rédaction antérieure au 1er octobre 2016,

– infirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité du Raincy le 11 juin 2020 en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels ; en ce qu’il a limité la condamnation solidaire de M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C] à payer à la société Sogefinancement la somme de 6.212,53 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 2019 ; en ce qu’il a rappelé que l’exécution de la présente décision sera affectée par la procédure de traitement de surendettement selon les articles L722-1 et suivants du code de la consommation ; en ce qu’il a débouté partiellement la société Sogefinancement de ses demandes formées à l’encontre de M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C], en ce compris sa demande en condamnation solidaire au paiement de la somme de 10.554,72 euros, représentant les mensualités impayées, le capital restant dû et les intérêts échus, augmentée des intérêts de retard courus au taux conventionnel de 5,50 % l’an sur la somme en principal de 10.546,71 euros à compter du 11 juin 2018 jusqu’au jour du parfait paiement, sa demande en paiement de la somme de 830,59 euros au titre de l’indemnité légale de 8% du capital restant dû,

Statuant à nouveau sur les chefs contestés,

– déclarer irrecevables les moyens visant à faire prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme contractuel ou précontractuel comme prescrits eu égard au délai de prescription quinquennale ;

– dire et juger subsidiairement que la déchéance du droit aux intérêts contractuels n’est pas encourue ;

– rejeter le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels ;

– constater que la déchéance du terme a été prononcée ;

– subsidiairement, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit au vu des manquements de l’emprunteur dans son obligation de rembourser les échéances du crédit et fixer la date des effets de la résiliation au 08/06/2018 ;

– en conséquence, et en tout état de cause, condamner solidairement M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C] à payer à la société Sogefinancement la somme de 11.385,31 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 5,50 % l’an à compter du 09/06/2018 sur la somme de 10.546,71 euros et au taux légal pour le surplus, en remboursement du prêt personnel n°35196959999 contracté suivant offre acceptée le 11/12/2013 ;

– subsidiairement, en cas de prononcé de la déchéance du droit aux intérêts contractuels, condamner solidairement M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C] à payer à la société Sogefinancement la somme de 6.667,56 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26/06/2018 ;

– en tout état de cause, condamner in solidum M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C] à payer à la société Sogefinancement la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– les condamner in solidum aux entiers dépens avec distraction au profit de la SELARL Cloix & Mendes-Gil en application de l’article 699 du Code de procédure civile.

M. [B] [M] et Mme [D] [M] née [C], auxquels la déclaration d’appel a été signifiée le 31 mars 2021 à étude d’huissier, n’ont pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions remises au greffe et au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte de l’article 472, alinéa 2, du code de procédure civile, que si l’intimé ne comparait pas le juge d’appel est tenu de vérifier si la demande de l’appelant est régulière recevable et bien fondée.

En application de l’article 954 alinéa 6 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas est réputée s’approprier les motifs du jugement.

En application de l’article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’est pas tenue de statuer sur les demandes tendant à   » constater « ,  » donner acte « ,  » dire et juger  » en ce qu’elles ne sont pas, exception faite des cas prévus par la loi, des prétentions, mais uniquement des moyens, comme c’est le cas en l’espèce.

1/ Sur la déchéance du droit aux intérêts

1.1/ Sur la prescription soulevée par la SAS Sogefinancement

La SAS Sogefinancement soutient que l’emprunteur ou le juge peut soulever la déchéance du droit aux intérêts contractuels uniquement dans le délai de prescription quinquennale de droit commun courant à compter de la souscription de l’offre de crédit, et affirme que le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels ne constitue pas une simple défense au fond mais une demande.

Il résulte toutefois de l’avis n°15014 rendu par la cour de cassation le 18 septembre 2019 que le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts opposé par le souscripteur d’un crédit à la consommation constitue une défense au fond (sauf si elle tend à la restitution d’intérêts trop perçus, il constitue alors une demande reconventionnelle).

Il en résulte que le juge, qui dispose du pouvoir de relever d’office toutes les dispositions du code de la consommation dans les litiges nés de son application par application de l’article L.141-4, devenu l’article R. 632-1 du code de la consommation, ne peut se voir opposer aucune prescription dans l’exercice de ce pouvoir.

Il convient dès lors de déclarer les moyens tirés de la déchéance du droit aux intérêts recevables, et de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de ces moyens soulevée par la SAS Sogefinancement.

1.2/ Sur le défaut de preuve de la remise de la notice d’assurance aux emprunteurs

Il résulte de l’article L.311-6 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur au jour de la souscription de l’offre de crédit litigieuse que, « préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur donne à l’emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres lui permettant d’appréhender clairement l’étendue de son engagement ».

Selon l’article L.311-19, « lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur ».

Ces dispositions sont issues de la transposition par la France de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE.

Par arrêt du 18 décembre 2014 (CA Consumer Finance, C-449/13), la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que les dispositions de la directive précitée doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à ce qu’en raison d’une clause type, le juge doive considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, cette clause entraînant ainsi un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 (point 32).

L’arrêt de la Cour précise qu’une clause type figurant dans un contrat de crédit ne compromet pas l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 si, en vertu du droit national, elle implique seulement que le consommateur atteste de la remise qui lui a été faite de la fiche d’information européenne normalisée (point 29). Il ajoute qu’une telle clause constitue un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents et que le consommateur doit toujours être en mesure de faire valoir qu’il n’a pas été destinataire de cette fiche ou que celle-ci ne permettait pas au prêteur de satisfaire aux obligations d’informations précontractuelles lui incombant (point 30). Selon le même arrêt, si une telle clause type emportait, en vertu du droit national, la reconnaissance par le consommateur de la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, elle entraînerait un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 (point 31).

Il s’ensuit qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations précontractuelles et que la signature par l’emprunteur d’une fiche explicative et de l’offre préalable de crédit comportant chacune une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis la fiche précontractuelle d’information normalisée européenne et la notice d’assurance constitue seulement un indice qu’il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires. Exiger des emprunteurs qu’ils prouvent que la notice d’assurance ne leur a pas été remise ou qu’elle serait non conforme aux exigences imposées par les textes conduit à renverser la charge de la preuve (Cass. Civ. 1re, 8 avril 2021, n°19-20.890).

En l’espèce, ainsi que l’a relevé avec pertinence le premier juge, alors que les emprunteurs ont souscrit à l’assurance facultative, aucune clause du contrat ne mentionne une remise de la notice d’assurance, mais seulement de la « synthèse des garanties », et les emprunteurs ont apposé leur signature sous la mention selon laquelle ils auraient « pris connaissance » de la notice d’information, mais pas l’avoir reçue.

C’est par une parfaite appréciation des textes précités que le premier juge a considéré que ces mentions pré-imprimés pouvaient constituer un indice que le prêteur n’avait corroboré par aucun élément complémentaire, de sorte que la preuve qu’il avait respecté son obligation d’information et avait remis l’ensemble des documents exigés était insuffisamment rapportée.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels pour ce motif, sans qu’il y ait lieu d’examiner le second moyen de déchéance du droit aux intérêts relevé.

2/ Sur le montant des sommes dues

Il résulte de l’historique de compte que les emprunteurs ont réglé la somme totale de 14087,10 euros, qu’il convient de déduire du montant du capital prêté en application de la déchéance du droit aux intérêts prononcée.

Il convient dès lors de condamner solidairement les époux [M] au paiement de la somme totale de :

(20 000 – 14 087,10) = 5912,90 euros au titre du solde du prêt, qui portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, infirmant le jugement entrepris sur le montant de la condamnation prononcée.

L’indemnité de 8% du capital restant dû constitue une clause pénale susceptible de réduction par application de l’article 1152 alinéa 2 du code civil dans sa rédaction applicable au jour de la souscription de l’offre de crédit litigieuse, qui dispose que ‘le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; toute stipulation contraire sera réputée non écrite’. Le montant dû étant manifestement excessif, alors que la déchéance du droit aux intérêts a été prononcée, il convient de la modérer, et de condamner solidairement les époux [M] au paiement de la somme de 1 euro au titre de la clause pénale, infirmant le jugement entrepris sur ce point.

Bien que déchu de son droit aux intérêts, le prêteur est fondé, en vertu de l’article 1153 du code civil, devenu l’article 1231-6, à réclamer à l’emprunteur le paiement des intérêts au taux légal sur le capital restant dû à compter de la mise en demeure (Cass. Civ.1re, 27 mai 2003, n°01-10.635), le taux d’intérêt légal étant majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l’article L.313-3 du Code monétaire et financier.

Toutefois, l’article 23 de la directive 2008/48 du Parlement européen et du Conseil concernant les contrats de crédits aux consommateurs dispose que les Etats membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la directive, et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu’elles soient appliquées, et que les sanctions soient ‘effectives, proportionnées et dissuasives’.

Par arrêt du 27 mars 2014, la Cour de Justice de l’Union Européenne (affaire C-565/12, LCL / Fesih Kalhan) a jugé que l’article 23 de la directive 2008/48 s’oppose à l’application d’intérêts au taux légal si ‘les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l’application de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations’. La Cour de Justice a ainsi ajouté que, ‘si la sanction de la déchéance du droit aux intérêts se trouvait affaiblie, voire purement et simplement annihilée, en raison du fait que l’application des intérêts au taux légal majoré est susceptible de compenser les effets d’une telle sanction, il en découlerait nécessairement que celle-ci ne présente pas un caractère véritablement dissuasif’, et qu’il appartient à la juridiction saisie ‘de comparer, dans les circonstances de l’affaire dont elle est saisie, les montants que le prêteur aurait perçus en rémunération du prêt dans l’hypothèse où il aurait respecté son obligation avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction de la violation de cette même obligation’.

Or, la Cour de Justice a édicté le principe selon lequel ‘le juge national chargé d’appliquer, dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit communautaire, a l’obligation d’assurer le plein effet de ces normes, en laissant au besoin inappliquée, de sa propre initiative, toute disposition contraire de la législation nationale, même postérieure, sans qu’il ait à demander ou à attendre l’élimination préalable de celle-ci’ (CJCE, 9 mars 1978, aff. 106/77, Simmenthal).

En l’espèce, il résulte des pièces produites que les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal majoré de cinq points, nonobstant la déchéance du droit aux intérêts, ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci aurait pu bénéficier s’il avait respecté ses obligations découlant de la directive 2008/48, de sorte que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts ne revêt pas de caractère effectif et dissuasif.

Il convient donc de juger qu’il n’y a pas lieu de faire application de l’article 1153 (devenu 1231-6) du code civil et de l’article L.313-3 du code monétaire et financier et de dire que la somme restant due en capital ne portera pas intérêts au taux légal majoré. Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

3/ Sur l’article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné les époux [M] à verser la somme de 200 euros à la SAS Sogefinancement au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’équité commande de ne pas faire application de l’article 700 que ce soit en première instance ou en appel.

Les époux [M], parties perdantes à titre principal, seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt par défaut,

Rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription des moyens de déchéance du droit aux intérêts soulevée par la SAS Sogefinancement,

Infirme, en ses dispositions frappées d’appel, le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels,

Et statuant à nouveau,

Condamne solidairement M. [B] [M] et Mme [D] [C] épouse [M] à payer à la SAS Sogefinancement les sommes de :

– 5912,90 euros au titre du solde du prêt, qui portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

– 1 euro au titre de la clause pénale,

Dit que ces sommes ne porteront pas intérêts au taux légal majoré,

Rejette toutes demandes plus amples ou contraires,

Et y ajoutant,

Condamne in solidum M. [B] [M] et Mme [D] [C] épouse [M] aux dépens de première instance et d’appel, avec droit de recouvrement direct, par application de l’article 699 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes.

La Greffière Le Président

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x