Prêt entre particuliers : 16 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/03533

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Prêt entre particuliers : 16 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/03533

16 mai 2023
Cour d’appel de Versailles
RG
22/03533

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53B

1re chambre 2e section

ARRET N°

PAR DEFAUT

DU 16 MAI 2023

N° RG 22/03533 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VG46

AFFAIRE :

S.A.S. SOGEFINANCEMENT

C/

M. [T] [W]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Février 2022 par le Juge des contentieux de la protection de POISSY

N° RG : 11-21-650

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 16/05/23

à :

Me Stéphanie CARTIER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.S. SOGEFINANCEMENT

Ayant son siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Maître Stéphanie CARTIER, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 350 – N° du dossier 2204.184

APPELANTE

****************

Monsieur [T] [W]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Assigné par dépôt à étude

INTIME DEFAILLANT

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 02 Février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,

EXPOSE DU LITIGE

Suivant offre préalable acceptée le 14 novembre 2013, la société anonyme Société générale agissant par sa filiale Sogefinancement a consenti à M. [T] [W], un prêt personnel d’un montant de 22 502 euros, avec un taux d’intérêt annuel fixe de 7,40 % (TAEG 7,86 %) remboursable selon 70 échéances mensuelles d’un montant de 396,79 euros (sans assurance facultative).

Par acte de commissaire de justice du 27 août 2021, la société Sogefinancement a assigné M. [W] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Poissy aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, la résiliation judiciaire du contrat de prêt et la condamnation du défendeur à lui payer les sommes de :

– 7 855,26 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,40 % à compter du 25 août 2020 et jusqu’à parfait paiement,

– 700 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– le condamner aux dépens de l’instance.

Par jugement réputé contradictoire du 17 février 2022, le tribunal de proximité de Poissy a :

– déclaré recevable l’action en paiement de la société Sogefinancement à l’encontre de M. [W],

– débouté la société Sogefinancement de sa demande de paiement du prêt n°35196796672,

– débouté la société Sogefinancement de sa demande d’indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Sogefinancement aux dépens de l’instance,

– dit n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire.

Par déclaration reçue au greffe le 25 mai 2022, la société Sogefinancement a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions signifiées le 15 juillet 2022, elle demande à la cour de :

– la recevoir en son appel et l’y dire bien fondée,

Y faisant droit,

– infirmer le jugement rendu le 17 février 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Poissy (RG : 11-21-650) en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels et l’a déboutée de sa demande en paiement,

Statuant à nouveau,

– condamner M. [W] au paiement de la somme totale de 7 855,26 euros avec intérêts au taux contractuel annuel de 7,40 % à valoir sur la somme totale de 7 288,66 euros (total A + B + C) et au taux légal pour le surplus (D) et ce, à compter de la mise en demeure du 25 août 2020 et jusqu’à parfait paiement, conformément à l’ancien article L.311-24 du code de la consommation,

En tout état de cause,

– condamner M. [W] et au paiement d’une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [W] et aux dépens d’appel au profit de Maître Stéphanie Cartier qui pourra les recouvrer dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

M. [W] n’a pas constitué avocat. Par acte de commissaire de justice délivré le 20 juillet 2022, la déclaration d’appel et les conclusions de l’appelant lui ont été signifiées par dépôt à l’étude.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 12 janvier 2023.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la déchéance du droit aux intérêts

La société Sogefinancement, appelante, fait grief au premier juge de l’avoir déboutée de sa demande de paiement au motif que la fiche normalisée européenne précontractuelle ne serait ni signée ni paraphée, emportant la déchéance du droit aux intérêts, et d’avoir retenu que M. [W] ayant remboursé une somme supérieure au capital, la créance de la banque serait éteinte.

Elle fait valoir que la fiche d’information précontractuelle versée aux débats n’est pas signée mais que le prêteur n’encourt pas la déchéance du droit aux intérêts pour ce seul motif, conformément aux dispositions du Code de la Consommation applicable au litige.

Elle indique qu’en dépit de l’absence de signature de l’emprunteur apposée sur cette fiche, elle justifie avoir satisfait à son obligation d’information en donnant, par écrit, les informations précontractuelles nécessaires et remettant à l’emprunteur la fiche d’information précontractuelle, conformément à l’ancien article L 311-6 du Code de la Consommation.

Elle soutient qu’en acceptant l’offre de prêt, M. [W] a reconnu que la fiche d’information précontractuelle lui a bien été remise en vertu d’une clause acceptée sans réserve et libellée comme suit :

 » L’emprunteur reconnaît avoir reçu de la Société Générale, sur la base de la fiche d’information pré contractuelle qui lui a été remise, les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière’  » .

Cette clause étant corroborée par la fiche d’information précontractuelle versée aux débats elle en déduit que la déchéance du droit aux intérêts n’est pas fondée.

Elle demande à la cour de faire droit à sa demande en paiement des intérêts conventionnels, conformément à l’ancien article L.311-24 précité du Code de la Consommation.

Sur ce,

L’article L 311-48 du code de la consommation, dans sa version applicable en l’espèce, dispose :

‘ Le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l’emprunteur les informations pré-contractuelles dans les conditions fixées par les articles L. 311-6 ou L. 311-43, sans remettre et faire signer ou valider par voie électronique la fiche mentionnée à l’article L. 311-10, ou sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-11, L. 311-12, L. 311-16, L. 311-18, L. 311-19, L. 311-29, le dernier alinéa de l’article L. 311-17 et les articles L. 311-43 et L. 311-46, est déchu du droit aux intérêts. (…)

L’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.’

Par arrêt du 18 décembre 2014 (CA Consumer Finance, C-449/13), la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que les dispositions de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil, doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à ce qu’en raison d’une clause type, le juge doive considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, cette clause entraînant ainsi un renversement de la charge de la preuve de l’exécution des dites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48.

                                                          

La société Sogefinancement se fonde sur la mention selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu de la société Sogefinancement , sur la base de la fiche d’information précontractuelle qui lui a été remise, les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, et d’avoir été informé des conséquences liées à une éventuelle défaillance de sa part dans les remboursements figurant dans le contrat de prêt signé par M. [W] pour soutenir qu’elle a respecté les obligations légales lesquelles n’exigent pas la production de la fiche d’information signée par les emprunteurs, la preuve étant libre et par tous moyens.

Elle verse aux débats la fiche d’information pré-contractuelle, mais non signée.

Quoique non signée, cette fiche d’information comporte les références exactes du contrat de prêt (montant, durée, échéances, TAEG, etc’) conclu avec M. [W].

En l’espèce, pour corroborer la clause susmentionnée, la société Sogefinancement verse aux débats, le contrat de prêt personnel n° 35196796672 souscrit le 14 novembre 2013, ainsi qu’un avenant de réaménagement en date du 26 janvier 2017, contrat auquel la fiche d’informations européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs versée aux débats fait référence.

L’exemplaire original de l’offre de prêt signé et daté par M. [W] met en exergue, qu’il reconnaît avoir reçu de la société Sogefinancement, sur la base de la fiche précontractuelle qui lui a été remise, les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, et d’avoir été informé des conséquences liées à une éventuelle défaillance de sa part dans les remboursements.

Il convient de dire que ces documents, en ce qu’ils constituent un ensemble cohérent qui a manifestement été reçu par M. [W] puisque sa signature figure à plusieurs endroits du contrat et de l’avenant, corrobore la clause selon laquelle l’emprunteur a reconnu avoir reçu la fiche d’informations européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs.

Le contenu de la fiche d’informations européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs est conforme aux dispositions du code de la consommation.

La déchéance du droit aux intérêts n’est donc pas encourue pour ce motif, et le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur le montant de la créance

La société Sogefinancement demande la condamnation de M. [W] au paiement de la somme totale de 7.855,26 Euros avec intérêts au taux contractuel annuel de 7,40 % à valoir sur la somme de 7.288,66 Euros et au taux légal pour le surplus et ce, à compter d’une mise en demeure du 25 août 2020, jusqu’à parfait paiement.

A l’appui de sa demande, la société Sogefinancement produit aux débats en cause d’appel :

– le contrat de prêt personnel n° 35196796672 souscrit le 14 novembre 2013,

– un tableau d’amortissement,

– un avenant de réaménagement en date du 26 janvier 2017,

– un tableau d’amortissement de l’avenant de réaménagement,

– un historique de compte,

– une lettre recommandée AR adressée par la banque à M. [W] le 30 juillet 2020 avant déchéance du terme,

– une lettre recommandée AR. adressée par la banque à M. [W] le 25 août 2020 valant mise en demeure de payer,

– un décompte des sommes dues à la date de déchéance du terme,

Dès lors, la créance de la société Sogefinancement s’établit comme suit :

échéances impayées :                                                                            871, 32 euros

capital restant dû :                                                                               6413, 42 euros

intérêts de retard :                                                                                     3, 92 euros

Total :                                                                                                7 288, 66 euros

Il convient donc de condamner M. [W] à verser à la société Sogefinancement cette somme de 7 288, 66 euros, et le jugement sera infirmé de ce chef. Cette somme portera intérêts au taux contractuel de 7, 40 % à compter du 25 août 2020, date de la déchéance du terme.

Aux termes de l’article 1231-5 du code civil, le juge peut toujours, même d’office, modérer ou réduire la pénalité prévue au contrat si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

En l’espèce, l’indemnité de 8% apparaît manifestement excessive eu égard à l’importance du taux d’intérêt contractuel applicable. Il convient de la réduire à la somme d’un euro, que M. [W] sera condamné à payer.

                                                                   

Sur l’indemnité procédurale et les dépens

                       

Il convient de condamner M. [W], qui succombe, aux dépens de première instance et d’appel, les dispositions du jugement attaqué relatives aux dépens étant infirmées.

En équité, il y a lieu de condamner M. [W] à verser à la société Sogefinancement la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt par défaut, par mise à disposition au greffe de la première chambre,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Condamne M. [T] [W] à verser à la société Sogefinancement la somme de 7 288, 66 euros au titre du solde du crédit du 14 novembre 2013, outre les intérêts au taux contractuel de 7, 40% à compter du 25 août 2020, et la somme d’un euro au titre de l’indemnité de résiliation,

Déboute la société Sogefinancement de ses demandes plus amples ou contraires,

Condamne M. [T] [W] à verser à la société Sogefinancement la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [T] [W] aux dépens de première instance et d’appel, avec, s’agissant des dépens de la procédure d’appel, application au profit de Me Stéphanie Cartier des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

– prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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