9 mai 2023
Cour d’appel de Besançon
RG n°
21/01945
ARRÊT N°
FD/FA
COUR D’APPEL DE BESANÇON
– 172 501 116 00013 –
ARRÊT DU 09 MAI 2023
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
Contradictoire
Audience publique du 07 mars 2023
N° de rôle : N° RG 21/01945 – N° Portalis DBVG-V-B7F-EOB7
S/appel d’une décision du TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE VESOUL en date du 27 avril 2021 [RG N° ]
Code affaire : 54D Demande en paiement direct du prix formée par le sous-traitant contre le maître de l’ouvrage
E.A.R.L. [T] C/ S.A.R.L. MBA
PARTIES EN CAUSE :
E.A.R.L. [T] prise en la personne de ses représentants légaux demeurant pour ce audit siège,
Sise [Adresse 3]
RCS de Vesoul sous le numéro 509 547 311
Représentée par Me Isabelle TOURNIER de la SCP CODA, avocat au barreau de BESANCON, avocat postulant
Représentée par Me Marine-Laure COSTA-RAMOS de la SELAS LEGI CONSEILS BOURGOGNE, avocat au barreau de DIJON, avocat plaidant
APPELANTE
ET :
S.A.R.L. MBA
Sise [Adresse 1]
RCS de Vesoul sous le numéro 533 840 138
Représentée par Me Anne LAGARRIGUE de la SELARL ANNE LAGARRIGUE, avocat au barreau de HAUTE-SAONE, avocat postulant
Représentée par Me Emeline JACQUES, avocat au barreau de DIJON, avocat plaidant
INTIMÉE
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats :
PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.
ASSESSEURS : Madame Florence DOMENEGO et Monsieur Jean-François LEVEQUE, conseillers.
GREFFIER : Monsieur Xavier DEVAUX, directeur de greffe.
Lors du délibéré :
PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre
ASSESSEURS : Madame Florence DOMENEGO, magistrat rédacteur et Monsieur Jean-François LEVEQUE, conseiller.
L’affaire, plaidée à l’audience du 07 mars 2023 a été mise en délibéré au 09 mai 2023. Les parties ont été avisées qu’à cette date l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.
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Faits et prétentions des parties :
La SARL MBA, qui a pour activité le soutien aux cultures, a effectué des prestations pour le compte de l’EARL [Adresse 2] à compter de l’année 2013.
Le 31 juillet 2016, M. [U]-[F] [T], gérant de l’EARL [Adresse 2], est décédé et selon ordonnance en date du 21 octobre 2016, M. [D] [T], son frère, a été désigné en qualité de mandataire ad hoc de l’EARL, avant d’en devenir gérant et de modifier sa dénomination.
Le 6 juillet 2017, la SARL MBA a mis en demeure l’EARL [T], venant aux droits de l’EARL [Adresse 2], de régulariser le paiement de la somme de 20 051,80 euros lui restant due au titre d’une reconnaissance de dette sous seing privé en date du 6 janvier 2014.
Soutenant que sa demande était demeurée vaine, la SARL MBA a saisi le 31 octobre 2019 le tribunal de grande instance de Vesoul, devenu tribunal judiciaire, lequel a, dans son jugement du 27 avril 2021 :
– dit n’y avoir lieu à statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription ;
– condamné l’EARL [T], venant aux droits de l’EARL [Adresse 2] en suite du décès de son gérant, à payer à la SARL MBA la somme de 20 051,50 euros à titre principal, outre intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 2019, capitalisés à la condition qu`il s`agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière ;
– condamné l’EARL [T] à payer à la SARL MBA la somme de l 800 euros au titre de l`article 700 du code de procédure civile ;
– ordonné l`exécution provisoire ;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
– condamné l’EARL [T] aux dépens.
Pour statuer ainsi, les premiers juges ont retenu que :
– la demanderesse n’avait soulevé dans le dispositif de ses dernières conclusions aucune fin de non-recevoir tirée de la prescription et qu’il n’y avait dès lors pas lieu à statuer de ce chef ;
– que la preuve des prestations, objet de la reconnaissance de dette, était rapportée par témoins ; que l’obligation de la SARL MBA n’était pas sérieusement contestable ; que l’EARL [T] ne rapportait pas la preuve de s’en être libérée et que les sommes restant dues avaient été rendues exigibles par la mise en demeure ;
– que le caractère abusif de la procédure n’était dès lors pas établi.
Par déclaration en date du 28 octobre 2021, l’EARL [T] a relevé appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions transmises le 2 janvier 2023, l’EARL [T] demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau de :
– à titre principal, débouter la SARL MBA de l’intégralité de ses demandes ;
– à titre subsidiaire, dire que le montant dont elle reste éventuellement redevable est de 3 289,50 euros ;
– condamner la SARL MBA à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la SARL MBA aux entiers dépens et autoriser la SCP CODA, prise en la personne de Mme [H] [B], avocate, à recouvrer ceux dont elle aurait fait l’avance en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
A l’appui de ses demandes, l’EARL [T] fait principalement valoir qu’elle a régularisé sous forme authentique une reconnaissance de dette le 7 juillet 2014 d’un montant de 23 000 euros ; que cette dernière englobe le solde restant dû de 15 027 euros au titre de la première reconnaissance de dette du 6 janvier 2014 et intégre les travaux d’hiver à venir d’un montant prévisible de 8 000 euros ; que le 20 décembre 2014, elle a cependant payé la somme de 15 952,80 euros et que le solde de 4 099 euros a été acquitté par compensation avec d’autres sommes dues par la SARL MBA elle-même et un paiement en nature sur les récoltes ou un prêt à usage de parcelles ; qu’elle ne reste en conséquence redevable d’aucune somme, et subsidiairement de la seule somme de 3 289,50 euros.
Dans ses dernières conclusions transmises le 2 mars 2023, la SARL MBA demande à la cour de :
– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire deVesoul le 27 avril 2021 en toutes ses dispositions ;
– à titre subsidiaire, condamner l’EARLMEIER à lui payer la somme de 9 123,80 euros TTC outre intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 2019, capitalisés à la condition qu’il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année ;
– condamner l’EARL [T], venant aux droits de l’EARL [Adresse 2], à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d`appel ;
– condamner l’EARL [T] aux entiers dépens.
La SARL MBA fait principalement valoir qu’elle était en relations habituelles et de confiance avec l’EARL [Adresse 2]; qu’elle effectuait depuis 2013 de nombreux travaux agricoles pour M. [U] [T] ; que ces différentes prestations ont donné lieu à une première reconnaissance de dette le 6 janvier 2014 à hauteur de 20 051,80 euros TTC ; que si une seconde reconnaissance de dette a été régularisée le 7 juillet 2014 pour un montant de 23 000 euros, cette dernière a été consentie par M. [Y], gérant de la SARL MBA, à titre personnel aux fins d’aider M. [T] à acquérir des terres et a été remboursée le 23 janvier 2019 ; que seule reste due la première reconnaissance de dette dans sa totalité, dès lors que les paiements postérieurs dont se prévaut l’EARL concernent d’autres prestations et qu’aucune compensation n’est de ce fait intervenue.
Pour l’exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 mars 2023.
Motifs de la décision :
Aux termes de l’article 1353 du code civil, il appartient à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
En l’espèce, la SARL MBA se prévaut du courrier de M. [U]-[F] [T] en date du 6 janvier 2014 pour solliciter le paiement du solde des prestations agricoles qu’elle a effectuées pour le compte de l’EARL [Adresse 2] aux droits de laquelle intervient l’EARL [T].
Si l’EARL fait grief aux premiers juges d’avoir fait droit à cette demande à hauteur de 20 051,50 euros, cette dernière ne conteste pas cependant l’authenticité de l’acte sous seing privé du 6 janvier 2014 par lequel M. [T] reconnaît expressément d’une part la réalisation par la SARL MBA des travaux d’exploitation sur ses surfaces de cultures au cours de l’année 2013 et d’autre part, la dette ainsi contractée à l’encontre de la société prestataire.
Si l’EARL soutient cependant à hauteur de cour que cette reconnaissance de dette a été remplacée par celle établie selon acte authentique en date du 7 juillet 2014 pour un montant de 23 000 euros et qu’elle a été soldée par le chèque d’un même montant adressé le 23 janvier 2019, une telle argumentation ne saurait cependant prospérer.
Cette deuxième reconnaissance de dette, conclue entre M. [U]-[F] [T] et M. [F] [Y], ne concerne en effet pas les mêmes parties que celle régularisée le 6 janvier 2014, dès lors qu’elle est établie en leurs noms personnels et non en tant que représentants
des personnes morales et, d’autre part, dans un contexte indéterminé ne mentionnant aucunement les conditions d’exploitation des surfaces de culture pour les campagnes 2013 et 2014, comme revendiqué par l’appelante.
L’EARL ne peut en conséquence être recherchée en paiement qu’au regard de la reconnaissance de dettes du 6 janvier 2014, laquelle déterminait précisément à cette date les sommes restant dues entre les parties.
L’EARL est dès lors mal fondée à venir solliciter le retrait de la somme de de 5 024,80 euros dont elle a effectué le paiement en faveur de la SARL MBA le 1er octobre 2013, comme en témoigne son grand livre comptable.
Doivent cependant venir en déduction les propres créances que l’EARL avait à l’encontre de la SARL MBA, résultant des deux factures des 20 décembre 2014 à hauteur de 5 400 euros (vente d’un pulvérisateur et divers matériels) et de 528 euros (vente de 20 bottes de foin), dont la SARL MBA, qui les produit, ne justifie pas s’être acquittée.
Doit également être déduite la somme de 5 000 euros qui figure au grand livre comptable et que la SARL MBA reconnaît dans ses conclusions avoir reçue, sans toutefois justifier que ce paiement correspondrait à un nouveau prêt d’argent, comme cette dernière le prétend dans ses conclusions.
La créance de la SARL MBA s’élève donc à la somme de 9 123,50 euros.
Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé de ce chef et l’EARL [T] sera condamnée à payer à la SARL MBA cette somme, qui sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 2019, date de l’assignation.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a ordonné la capitalisation des intérêts à compter du 31 octobre 2020.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi,
– Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Vesoul en date du 27 avril 2021 sauf en ce qu’il a condamné l’EARL [T] à payer la somme de 20 051,50 euros en principal à la SARL MBA ;
Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant :
– Condamne l’EARL [T], venant aux droits de l’EARL [Adresse 2], à payer à la SARL MBA la somme de 9 123,50 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 2019 ;
– Condamne l’EARL [T] aux dépens d’appel avec autorisation donnée à la SCP CODA, prise en la personne de Mme [H] [B], avocate, de les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
– et vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne l’EARL [T] à payer à la SARL MBA la somme de 2 000 euros au titre de ses frais irrépétibles et la déboute de sa demande présentée sur le même fondement.
Ledit arrêt a été signé par Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.
Le greffier, Le président,