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28 juillet 2023
Cour d’appel de Colmar
RG n°
21/04203
EP/KG
MINUTE N° 23/577
Copie exécutoire
aux avocats
Copie à Pôle emploi
Grand Est
le
Le greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
CHAMBRE SOCIALE – SECTION A
ARRET DU 28 JUILLET 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/04203
N° Portalis DBVW-V-B7F-HVXT
Décision déférée à la Cour : 13 Septembre 2018 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE STRASBOURG
APPELANTE :
Madame [A] [B] [H] ès qualités d’ayant-droit de Madame [J] [Z], décédée le 24 juin 2018, exploitant sous l’enseigne CREAFOP, immatriculée au RCS de BELFORT sous le numéro 348.958.489
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Vincent BESANCON, avocat au barreau de BELFORT
INTIMEE :
Madame [O] [Y] épouse [M]
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentée par Me Pascaline WEBER, avocat au barreau de STRASBOURG
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 14 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme DORSCH, Président de Chambre
M. PALLIERES, Conseiller
M. LE QUINQUIS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme THOMAS
ARRET :
– contradictoire
– prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,
– signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Madame [J] [Z] exploitait, sous l’enseigne Creafop, une activité de conseil, recherche, évaluation des actions de formations et d’orientations professionnelles.
Elle était spécialisée dans le secteur d’activité de la formation continue d’adultes et, dans ce contexte, recrutait des enseignants qui assuraient la formation des adultes.
Madame [O] [M] née [Y] a été engagée par Madame [J] [Z], selon contrat à durée déterminée à temps partiel, du 14 février 2014 jusqu’au 1er août 2014, en qualité d’animatrice de formation catégorie Technicien qualifié 1er degré – niveau hiérarchique C, coefficient 179.
La convention collective nationale applicable est la convention des organismes de formation.
Selon avenant du 3 mars 2014, ses fonctions ont été modifiées en technicienne qualifiée 2ème degré, niveau D1, coefficient 200.
Selon un deuxième contrat de travail du 1er septembre 2014, toujours à durée déterminée et à temps partiel, elle a été embauchée aux mêmes fonctions, et classification, pour la période du 1er septembre 2014 au 19 décembre 2014 inclus.
Selon un troisième contrat, du même type, elle a été embauchée aux mêmes fonctions, et classification, pour la période du 19 février 2015 au 10 avril 2015.
Les relations contractuelles s’étant poursuivies après cette dernière date, les parties ont formalisé un contrat à durée indéterminée.
Mme [Y] épouse [M] a été en arrêt en maladie du 10 octobre 2015 au 7 février 2016, l’arrêt initial ayant été prolongé à 2 reprises.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 novembre 2015, elle a été convoquée à un entretien préalable à une mesure éventuelle de licenciement.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 décembre 2015, Madame [Z] lui a notifié son licenciement pour désorganisation engendrée par ses absences prolongées et nécessité de son remplacement définitif.
Par requête du 17 juin 2016, Madame [O] [M] née [Y] a saisi le Conseil de prud’hommes de Strasbourg, de demandes de contestation de son licenciement, et aux fins d’indemnisations en conséquence, outre de rappels de salaires pour manquement à une obligation de maintien de salaire pendant une période d’arrêt maladie, suite à reclassification, et pour absence de majoration conventionnelle.
Madame [J] [Z] est décédée le 24 juin 2018.
Par jugement du 13 septembre 2018, le Conseil de prud’hommes a, notamment :
– dit et jugé que la rupture du contrat de travail est dépourvue de toute cause réelle et sérieuse.
– condamné Madame [J] [Z] à verser à Mme [M] les sommes suivantes :
* 12 730 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif augmentées des intérêts légaux à compter du prononcé de la présente décision,
*23 056 euros, au titre de rappel de salaire pour les périodes d’emplois, et 2 305,60 euros, au titre de l’indemnité de congés payés sur rappel de salaire, augmentées des intérêts légaux à compter de la demande,
* 3 123 euros nets, au titre de maintien de la rémunération pour période allant du 11 octobre 2015 au 4 janvier 2016, augmentées des intérêts légaux à compter de la demande,
* 2 338,41 euros bruts, au titre de l’indemnité dite d’usage, augmentées des intérêts égaux à compter du prononcé de la décision.
* 488 euros bruts, au titre des journées mobiles, augmentées des intérêts légaux à compter du prononcé de la décision.
* 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– débouté Mme [M] de sa demande au titre de l’indemnité compensatrice de préavis.
– débouté Madame [J] [Z] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné Madame [J] [Z] aux ” frais et dépens “,
– ” prononcé l’exécution provisoire sur les créances salariales mais débouté Madame [M] de sa demande au titre de l’exécution par provision “.
Par déclaration du 28 septembre 2021, Madame [K] [H], venant aux droits de Madame [J] [Z], en sa qualité d’héritière, a interjeté un appel du jugement en ses dispositions sur la rupture du contrat, condamnant Madame [Z], et rejetant la demande, de cette dernière, au titre des frais irrépétibles.
Par écritures transmises par voie électronique le 25 avril 2022, Madame [K] [H], venant aux droits de Madame [J] [Z], sollicite l’infirmation du jugement entrepris ” en toutes ses dispositions ” et que la Cour statuant à nouveau, :
– lui donne acte de ce qu’elle se reconnaît redevable d’une somme de 1 015,81 euros brut au titre de l’indemnité d’usage,
– déboute Madame [M] du surplus de ses demandes,
– condamne Madame [M] aux dépens de l’instance.
Par écritures transmises par voie électronique le 24 février 2022, Madame [O] [M] née [Y] sollicite la confirmation du jugement entrepris, en toutes ses dispositions, et la condamnation de Madame [K] [H], venant aux droits de Madame [J] [Z], à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, avec ” exécution provisoire “, et intérêts au taux légal, sur les montants, à compter de la condamnation.
L’ordonnance de clôture de l’instruction a été rendue le 4 mai 2022.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère aux conclusions susvisées pour plus amples exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS
I. Sur la reclassification des fonctions
Madame [O] [M] née [Y] sollicite une reclassification au niveau E2 prévu par la convention collective nationale des organismes de formation.
Il appartient au salarié sollicitant une classification supérieure à celle attribuée par l’employeur, de rapporter la preuve des éléments permettant de retenir la classification revendiquée, notamment, le détail des fonctions exercées.
Selon l’article 20 de la convention précitée, ” les partenaires sociaux rappellent au préalable que la classification porte sur l’emploi occupé et non sur les compétences ou qualifications du salarié qui occupe l’emploi. La classification n’est donc pas un outil d’évaluation du personnel. Le positionnement dans la grille doit uniquement tenir compte des exigences et compétences requises par l’emploi, indépendamment des compétences détenues par ailleurs par la personne (si ces dernières ne sont pas mises en ‘uvre dans l’emploi, comme par exemple celles issues d’une formation initiale). “.
L’article 20.4.2 précise, notamment, que ” les partenaires sociaux rappellent que pour classer un emploi, il faut se référer exclusivement et en toute objectivité aux compétences requises par l’emploi et non celles pouvant être détenues par la personne.
Néanmoins, les compétences acquises par le salarié, par la formation ou l’expérience, et validées peuvent aussi permettre de faire évoluer les emplois dans l’entreprise. ”
Il en résulte que Madame [Y] soit titulaire d’un Master, ou un diplôme d’ingénieur, n’est pas, en soi, déterminant.
Selon l’article 22 de la convention, ” l’application des critères classants à ces différentes possibilités d’exercice des compétences pédagogiques, qu’elles soient fondamentales, associées ou institutionnelles, peut donner des contenus d’emplois s’échelonnant sur la grille de classification de D à H selon l’ampleur du champ d’expertise.
Elle peut aussi mettre en évidence une progression professionnelle par enrichissement des compétences pédagogiques fondamentales, sans changement de catégorie dans la grille de classification.
Les compétences pédagogiques fondamentales, selon l’ampleur du champ d’expertise et si celles-ci représentent la plus grande part du contenu de l’emploi, justifieront d’un classement des emplois où elles s’exercent à partir du niveau D.
Les compétences pédagogiques associées, selon l’ampleur du champ d’expertise et si celles-ci représentent la plus grande part du contenu de l’emploi, justifieront d’un classement des emplois où elles s’exercent à partir du niveau E. “.
D’ores et déjà, il convient de relever qu’en qualité de formatrice, Madame [O] [M] née [Y] aurait dû être embauchée, dans le cadre du contrat à durée déterminée, au minimum, au niveau D1, et non au niveau C1.
L’article 21 de la convention collective, dans sa version applicable à la date de la relation contractuelle, prévoit que relèvent de la classification de technicien qualifié 2e degré les emplois répondant aux conditions suivantes :
– Emplois exigeant des connaissances générales et techniques qualifiées ainsi qu’une expérience professionnelle permettant au titulaire de prendre des initiatives et des décisions pour adapter, dans les cas particuliers, ses interventions en fonction de l’interprétation des informations.
L’intéressé peut être appelé dans sa spécialité à conseiller d’autres personnes et exercer un contrôle. Il peut assurer l’encadrement d’un groupe composé principalement d’employés des niveaux A et B et, éventuellement, de techniciens qualifiés.
Niveau de connaissances :
”Bts.-Dut.-Deug. (niveau III, éducation nationale).
A titre d’exemples peuvent être classés dans cette catégorie les salariés suivants :
secrétaire de direction, secrétaire trilingue ;
documentaliste, technicien de documentation ;
assistant commercial, technique ou administratif ;
comptable de gestion budgétaire (il recueille, enregistre et met en forme les documents permettant le contrôle budgétaire), assistant de gestion ;
analyste programmeur, réalisateur appelé à réaliser des produits selon des directives précises et sous le contrôle d’un responsable de projet ;
formateur ayant, dans le cadre tracé de sa spécialité, à adapter l’animation et l’enseignement à son auditoire selon des circonstances qui peuvent être variées.
Le même article stipule que ressortent de la classification de technicien hautement qualifié, niveau E, les fonctions répondant aux conditions suivantes :
– Fonctions exigeant des connaissances acquises par formation spécifique ou par expérience.
Il s’agit de :
connaissances générales dans plusieurs domaines (par exemple techniques, économiques et humaines) dans les emplois où la conduite d’un groupe important de personnel est prédominante ou de connaissances approfondies dans une des disciplines suivantes :
scientifique, pédagogique, technique, administrative, économique, financière, commerciale, sociale, etc., dans les autres emplois.
La mise en oeuvre des travaux composant la fonction est laissée à l’initiative du titulaire de l’emploi qui est placé sous la responsabilité d’un supérieur hiérarchique, chargé notamment du contrôle des résultats.
Les cadres débutants dans la profession, qui, pour l’exercice de leurs fonctions, doivent être titulaires d’un diplôme d’ingénieur (loi du 10 juillet 1934, décret du 10 octobre 1937) ou de formation de niveaux I et II de l’éducation nationale peuvent être classés dans ce niveau hiérarchique E jusqu’à l’âge de 25 ans. Après cet âge, ils sont, selon les exigences de leurs fonctions de cadres, classés en niveau F ou au-dessus.
A titre d’exemples peuvent être classés dans cette catégorie les salariés suivants :
assistant de direction exerçant des fonctions correspondant aux caractéristiques du niveau d’emploi ci-dessus défini ;
comptable (ou premier adjoint au chef comptable) ;
chargé d’études (participe à des études intéressant les programmes des stages ou à l’analyse des questions pédagogiques ou techniques auxquelles l’organisme doit ou devra répondre) ;
formateur ayant à sa disposition des programmes et matières à enseigner.
Toutefois, dans ses interventions, l’intéressé peut être appelé, à partir des composantes qui lui sont fournies, à innover et adapter, compte tenu des contraintes constatées ainsi que des besoins exprimés par ceux à qui il apporte des services.
Il participe à l’amélioration et à l’actualisation des enseignements. Il doit prendre en compte, en application de dispositions préalablement fixées, les incidences financières de la mise en oeuvre des stages qu’il anime, notamment en veillant au respect du cadre budgétaire prévu.
Il peut être appelé également, et en plus de son activité pédagogique, à intervenir commercialement à partir de directives précisant le cadre de ses interventions (notamment : objectifs à atteindre, moyens à mettre en oeuvre, règles de gestion à suivre) :
programmeur organique, concepteur-réalisateur de programmes, technicien appelé à concevoir des scenarii et à définir les cahiers des charges et éventuellement à réaliser des actions de formation dans leur domaine de compétence ;
responsable de service documentation.
Pour justifier des missions exécutées, Madame [O] [M] née [Y] produit :
– une attestation de témoin de Madame [C] [X] détaillant les tâches réalisées par Madame [O] [M] née [Y],
– une attestation de témoin de Madame [V] [U] détaillant également les tâches effectuées, notamment, par Madame [O] [M] née [Y],
– des fiches 1er contact signées par elle,
– des attestations de formation,
– une attestation d’exercice de fonctions de formatrice bénévole [Adresse 4],
– une attestation d’enseignement du français en classes secondaires de l’école [6]
– les justificatifs de ses diplômes.
Toutefois, la Cour relève que les tâches, indiquées, ne correspondent pas aux exemples de missions, relevant du niveau E, et relèvent des fonctions de technicien qualifié 2e degré.
En conséquence, la classification D1 apparaît conforme aux tâches et fonctions, alors, exercées par Madame [O] [M] née [Y], de telle sorte que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a fait droit à la demande de reclassification pour toutes les périodes d’emploi.
La Cour, statuant à nouveau, reclassifiera les fonctions de Madame [O] [M] née [Y], uniquement, pour la période du 14 février au 28 février 2014 au niveau D1, coefficient 200, au lieu de C1, coefficient 170.
Au regard de l’avenant du 18 décembre 2013, à la convention collective applicable, de la date de l’arrêté d’extension, et des bulletins de paie des mois de février et mars 2014, Madame [K] [H], venant aux droits de Madame [J] [Z], sera condamnée à payer à Madame [O] [M] née [Y] la somme de 80, 21 euros bruts, représentant l’arriéré impayé relatif à la rémunération de base.
Pour le surplus, la demande de reclassification sera rejetée.
II. Sur la majoration pour temps de préparation et la rémunération du temps de travail
Selon l’article 10.3 de la convention collective, pour les formateurs non cadres, titulaires de contrats à durée indéterminée ou de contrats à durée déterminée, à plein temps ou à temps partiel au sens des dispositions légales applicables, les accords d’entreprise ou le contrat de travail doivent apprécier et fixer le temps de travail qui est globalement consacré aux diverses fonctions des formateurs. Des accords d’entreprise ou les contrats individuels peuvent prévoir des dispositions analogues pour les formateurs des niveaux supérieurs.
Le temps de travail se répartit entre l’acte de formation (Af), les temps de préparation et de recherche liés à l’acte de formation (Pr) et les activités connexes (Ac).
Par acte de formation, il faut entendre toute action à dominante pédagogique, nécessitant un temps de préparation et de recherche, concourant à un transfert de connaissances, à l’animation de séquences de formation en présence, individuelle ou collective, directe ou médiatisée, sur place ou à distance, de stagiaire(s) ou apprenant(s).
Par Pr, il faut entendre, à titre d’exemple, les activités de conception, de recherche, de préparation personnelle ou matérielle des stages, les réunions et l’ingénierie, quand ces activités sont directement liées à la mise en ‘uvre de l’Af.
Par activités connexes, il faut entendre, à titre d’exemple non exhaustif, selon les organisations mises en ‘uvre dans l’entreprise, les activités de conception, d’ingénierie, quand elles ne sont pas directement liées à la mise en ‘uvre de l’Af et les activités complémentaires : information, accueil, orientation, bilan, placement, réponse aux appels d’offres, suivi, relations ” tutorales “, réunion dont l’objet n’est pas directement lié à l’Af, permanence, commercialisation et relation avec les prescripteurs ou partenaires.
Le temps d’Af, selon la définition ci-dessus, ne peut excéder 72 % de la totalité de la durée de travail effectif consacrée à l’Af et à la Pr, l’Ac étant préalablement déduite de la durée de travail effectif.
Madame [O] [M] née [Y] fait valoir que ce texte doit s’interpréter en ce que le salaire d’une heure d’enseignement est majoré de 28/72, de telle sorte qu’elle forme une demande de rappel de salaires à ce titre.
Il y a lieu de relever, comme le fait l’appelante, que le jugement entrepris, qui a fait droit, pour l’essentiel à la demande de rappel de salaires, ne comporte aucune motivation quant à ce moyen et au litige des parties sur ce point.
Il résulte de l’article 10.3 précité que le temps de travail effectif, prévu au contrat de travail, correspond à l’acte de formation (Af) et aux temps de préparation et de recherches liés à l’acte de formation (Pr) et que l’acte de formation ne peut excéder 72% de ce temps de travail.
Les contrats de travail stipulent, en l’espèce, :
-Pour le contrat du 14 février 2014, un temps de travail de 28 heures par semaine (mensualisées) ; le coût horaire prévu intègre le travail de préparation des interventions prévues nécessaires à la bonne exécution des missions pédagogiques confiées.
Toutefois, le contrat prévoit des horaires de travail ” en face à face pédagogique ” : ” de 9 H à 12H30 et de 13 H à 16H30 “, ” les lundi, mardi, jeudi et vendredi “, soit 28 heures par semaine.
Il en résulte que l’employeur n’a pas intégré dans le temps de travail conventionnel, les temps de préparation, estimant à tort que le taux horaire consenti couvrait tant le temps de l’Af que le temps relatif au Pr.
Dès lors, les dispositions de ce contrat ne sont pas conformes à la convention collective.
– Selon l’avenant du 3 mars 2014, un temps de travail de 32 heures hebdomadaires, à savoir 4 heures complémentaires par semaine hors face à face pédagogique, soit un temps de l’acte de formation représentant 87, 50 % du temps de travail effectif, de telle sorte que cet avenant est également non conforme à la convention collective.
– Pour le contrat du 1er septembre 2014, les mêmes dispositions que précédemment, de telle sorte qu’il n’est également pas conforme à la convention collective (Af = 87,50 % du temps de travail effectif).
– Pour le contrat du 19 février 2015, un temps de travail de 33 heures, avec une répartition identique de travail ” en face à face pédagogique “, de telle sorte que l’employeur a comptabilisé 5 heures de temps de préparation, soit un temps de l’acte de formation de 84, 85 %, de telle sorte que ce contrat n’est pas conforme à la convention collective.
Si le salarié doit rapporter la preuve du quantum de ses heures de travail de préparation, il résulte clairement de l’article 10.3 précité qu’à tout le moins, son temps de travail de préparation rémunéré doit correspondre à, au moins 28 %, du temps de travail rémunéré.
En conséquence, le rappel de salaire, à ce titre, se présente comme suit :
– du 14 février au 28 février 2014 : 213, 88 euros bruts (tenant compte du taux horaire dû au regard des motifs supra),
– du 1er mars 2014 au 31 mai 2014 : 558, 70 euros bruts,
– du 1er juin 2014 au 31 juillet 2014 : 377, 13 euros bruts,
– le 1er août 2014 : 22, 81 euros bruts,
– du 1er septembre 2014 au 30 novembre 2014 : 565, 69 euros bruts,
– du 1er au 19 décembre 2014 : 130, 54 euros bruts,
– du 19 février au 28 février 2015 : 48, 27 euros bruts,
– du 1er mars au 31 juillet 2015 : 697, 29 euros bruts,
– du 1er au 31 août 2015 : 83, 67 euros bruts,
– du 1er au 30 septembre 2015 : 139, 46 euros bruts,
– du 1er au 10 octobre 2015 : 48, 27 euros bruts.
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé sur le montant du rappel de salaires, outre au titre des congés payés y afférents, et au regard des motifs supra, sur le rappel de salaires en raison de la reclassification partielle, Madame [K] [H], venant aux droits de Madame [J] [Z], sera condamnée à payer à Madame [O] [M] née [Y] la somme totale de 2 965, 92 euros bruts, outre la somme de 296, 59 euros bruts au titre des congés payés y afférents.
III. Sur le maintien du salaire pendant les arrêts maladie
Selon l’article 1226-23 du code du travail, applicable en Alsace-Moselle, le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour une cause personnelle indépendante de sa volonté et pour une durée relativement sans importance a droit au maintien de son salaire.
Toutefois, pendant la suspension du contrat, les indemnités versées par un régime d’assurances sociales obligatoire sont déduites du montant de la rémunération due par l’employeur.
Mme [Y] épouse [M] a été en arrêt maladie du 10 octobre 2015 au 7 février 2016, l’arrêt initial ayant été prolongé à 2 reprises.
Toutefois, le contrat de travail a été résilié, par l’envoi de la lettre de licenciement, soit le 3 décembre 2015.
Il n’y avait donc plus à compter du 4 décembre 2015, suspension du contrat de travail.
A la date du 4 décembre 2015, la salariée était absente depuis 54 jours, ce qui ne constitue pas une durée relativement sans importance, alors que la salariée disposait, au regard de l’article L 1243-11 alinéa 2 du code du travail, d’une ancienneté de moins de 8 mois, seule la période du dernier contrat à durée déterminée entrant dans le calcul de l’ancienneté, les contrats précédents comportant des périodes d’interruption.
Dès lors, il convient de s’interroger sur les dispositions conventionnelles applicables.
Si l’article 14 de la convention collective nationale prévoit que pendant 30 jours, le salarié recevra la rémunération qu’il aurait perçue s’il avait continué à travailler, et que pendant les 60 jours suivants, il recevra les 3/4 de cette même rémunération, après un délai de carence, cette même disposition stipule, comme condition d’éligibilité, une ancienneté de plus d’une année au jour de l’arrêt médical.
Or, comme vu ci-dessus, Madame [O] [M] née [Y] ne justifie pas d’une ancienneté de plus d’un an à compter du 10 octobre 2015, les 2 autres périodes d’arrêt ne constituant que la prolongation de l’arrêt initial.
Dès lors, les dispositions de l’article 14 ne sont pas applicables à Madame [O] [M] née [Y].
L’employeur n’avait donc aucune obligation de maintien du salaire pendant la période d’arrêt de Madame [Y], de telle sorte que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a condamné l’employeur au titre du maintien de la rémunération pour la période du 11 octobre 2015 au 4 janvier 2016.
Si, par lettre du 4 janvier 2016, l’employeur a dispensé la salariée de l’exécution de la période de préavis, de telle sorte qu’il serait tenu au paiement de la rémunération à compter de cette date, malgré l’absence pour maladie non professionnelle, Madame [O] [M] née [Y] n’a pas formé d’appel incident alors que le jugement entrepris a, en son dispositif, débouté la salariée de sa demande au titre de l’indemnité compensatrice de préavis.
Ce rejet de prétention est, en conséquence, définitif.
IV. Sur l’indemnité d’usage
Selon l’article 5.4.3 de la convention collective applicable, à l’issue du Cdd d’usage, le salarié perçoit une indemnité dite ” d’usage ” égale à 6 % de la rémunération brute versée au salarié au titre du contrat dès lors que le contrat n’est pas poursuivi par un contrat à durée indéterminée.
Compte tenu des 2 premiers contrats à durée déterminée, et du rappel de salaires pour la période du 14 février 2014 au 1er août 2014 et du 1er septembre 2014 au 19 décembre 2014, le jugement entrepris sera infirmé en son quantum, et la Cour, statuant, à nouveau, condamnera Madame [K] [H], venant aux droits de Madame [J] [Z], à payer à Madame [O] [M] née [Y] les sommes de :
– 626, 06 euros bruts au titre du premier contrat à durée déterminée,
– 414, 34 euros bruts au titre du 2ème contrat à durée déterminée,
soit un total de 1 040, 40 euros bruts.
La Cour n’a pas à donner acte d’une reconnaissance de dette, le ” donner acte “, de Madame [K] [H] ne constituant pas une prétention au sens de l’article 4 du code de procédure civile.
V. Sur le paiement des congés ou journées mobiles
Madame [O] [M] née [Y] invoque le bénéfice de l’article 10.7.2 de la convention collective relatif au régime conventionnel mis en place avant la loi du 20 août 2008 en application de l’accord de branche du 6 décembre 1999, en soutenant que l’employeur ne lui a pas payé les journées mobiles, ou appelées également congés mobiles.
Il résulte clairement de l’article 10.7 et 10.7.1 que les dispositions de l’article 10.7.2 ne sont applicables qu’aux organismes, qui ont fait application des aménagements du temps de travail tels que prévus par l’accord du 6 décembre 1999 avant la mise en ‘uvre de la loi du 20 août 2008 ou qui, en l’absence de la conclusion d’accord, à l’issue de d’une négociation avec les délégués syndicaux, ou en l’absence de délégués syndicaux et de comité d’entreprise ou de délégués du personnel, ont décidé de recourir aux régimes, notamment de l’article 10.7.2, après information des salariés concernés.
Il n’est pas établi que les dispositions de l’article 10.7.2 étaient applicables à l’entreprise de Madame [Z].
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à ce titre.
VI. Sur le licenciement
La lettre de licenciement, du 3 décembre 2015, est motivée par la désorganisation du fonctionnement de l’entreprise engendrée par les absences prolongées de la salariée et la nécessité de son remplacement définitif.
Madame [O] [M] née [Y] soutient que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse dès lors que l’article 14-2 de la convention collective prévoit que l’employeur ne pourra pas procéder à la notification de la rupture du contrat, en cas d’absence pour maladie, tant que le salarié n’aura pas épuisé ses droits complémentaires à indemnisation de maladie tels que définis ci-dessus, donc, définis par l’article 14-1.
Or, il résulte des motifs supra, que les droits à indemnisation de maladie, prévus par l’article 14-1, ne sont applicables que pour les salariés comptant plus d’une année d’ancienneté au jour de l’arrêt, et que Madame [O] [M] née [Y] ne justifiait pas d’une telle ancienneté.
En conséquence, l’employeur pouvait parfaitement procéder à la notification de la rupture du contrat de travail.
Si un salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé ou de son handicap, son licenciement peut être motivé par la situation objective de l’entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l’absence prolongée ou les absences répétées du salarié, entraînant la nécessité pour l’employeur de procéder à son remplacement définitif par l’engagement d’un autre salarié.
En l’espèce, il est un fait constant que dans le cadre de ses fonctions de formatrice, Madame [O] [M] née [Y] avait la gestion de plusieurs groupes, et que l’entreprise comptait plusieurs formateurs devant également effectuer des actes de formation.
Il résulte des pièces, de l’employeur, suivantes, :
– l’attestation de Madame [G] [D], employée, par Madame [Z], comme responsable de formation depuis le 27 octobre 2015, que les absences répétées de Madame [M] ont provoqué différents dysfonctionnements et un grand désordre dans le fonctionnement de Creafop, à savoir : gestion difficile des plannings, compte tenu des dates d’information de Madame [Z] des prolongations d’arrêt, annulation de certains cours Ofii puisqu’une seule autre personne travaillait sur [Localité 7], ce qui a entraîné l’abandon et l’insatisfaction de stagiaires,
-l’attestation de témoin de Madame [W] [N], employée ayant été embauchée en remplacement de Madame [O] [M] née [Y], par contrat de travail du 4 janvier 2016, selon laquelle, alors animatrice de formation et assistante administrative, elle a dû remplacer Madame [T] [I], certains lundi, afin que cette dernière puisse assurer le poste de Madame [M].
Madame [O] [M] née [Y] produit, quant à elle, des échanges de Sms avec un formateur, prénommé [E] [P], du 12 octobre 2015, selon lesquels ce dernier avait repris le groupe de Madame [O] [M] née [Y].
Par, un autre Sms, dont la date n’est pas précisée, Monsieur [E] [P] informait Madame [O] [M] née [Y] qu’étant à [Localité 5], il pensait que [T] allait la remplacer jusqu’à son retour, Madame [Z] ayant fusionné les 2 groupes.
Il en résulte que l’absence prolongée de Madame [O] [M] née [Y], suite un arrêt maladie non professionnelle, perturbait le fonctionnement de l’entreprise, et désorganisait cette dernière, Madame [Z] n’étant pas en mesure de prévoir à l’avance la prise en charge de l’ensemble des formations que Madame [O] [M] née [Y] devait dispenser, alors que l’arrêt de travail initial, du 10 octobre 2015 jusqu’au 25 octobre 2015, avait été prolongé à 2 reprises, soit les 23 octobre et 13 novembre 2015, et que Madame [Z] se trouvait dans l’incapacité de prévoir la date de retour de Madame [O] [M] née [Y], de telle sorte que l’employeur s’est trouvé dans la nécessité de pourvoir au remplacement définitif de la salariée par l’engagement d’une autre salariée.
Les critiques, de Madame [O] [M] née [Y], sur la qualité et les diplômes de Madame [N], pour pouvoir dispenser des cours de formation Ofii, sont sans emports, alors qu’il est un fait constant que Madame [N] a été embauchée, pour remplacer Madame [Y]-[M] et que les cours en cause ont été effectivement dispensés par Madame [N].
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a dit la rupture du contrat de travail dépourvue de cause réelle et sérieuse et en ce qu’il a condamné l’employeur à payer des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
VII. Sur les demandes annexes
Le jugement sera confirmé en ses dispositions sur les frais irrépétibles et les dépens.
Succombant pour l’essentiel, à hauteur d’appel, Madame [O] [M] née [Y] sera condamnée aux dépens d’appel.
L’équité commande qu’il n’y ait pas condamnation au titre des frais irrépétibles exposés à hauteur d’appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13 septembre 2021 par le Conseil de prud’hommes de Strasbourg SAUF en ses dispositions sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens ;
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
RECLASSE les fonctions de Madame [O] [M] née [Y] au niveau D1, coefficient 200, de la convention collective nationale des organismes de formation, pour la période du 14 février au 28 février 2014 inclus ;
DEBOUTE, Madame [O] [M] née [Y] pour le surplus, de sa demande de reclassification de ses fonctions ;
CONDAMNE Madame [K] [H], venant aux droits de Madame [J] [Z], à payer à Madame [O] [M] née [Y] les sommes suivantes :
* 2 965, 92 euros bruts (deux mille neuf cent soixante cinq euros et quatre vingt douze centimes), au titre du rappel de salaires,
* 296, 59 euros bruts (deux cent quatre vingt seize euros et cinquante neuf centimes) au titre des congés payés afférents au rappel de salaires précédent,
* 1 040, 40 euros bruts (mille quarante euros et quarante centimes) au titre de l’indemnité d’usage ;
DEBOUTE Madame [O] [M] née [Y] de sa demande de maintien de salaire pendant la période d’arrêt maladie non professionnelle ;
DEBOUTE Madame [O] [M] née [Y] de sa demande au titre des journées mobiles, ou jours de congés mobiles ;
DIT que le licenciement de Madame [O] [M] née [Y] repose sur une cause réelle et sérieuse ;
DEBOUTE Madame [O] [M] née [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
DEBOUTE Madame [O] [M] née [Y] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés à hauteur d’appel ;
CONDAMNE Madame [O] [M] née [Y] aux dépens d’appel.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 28 juillet 2023, signé par Madame [J] Dorsch, Président de Chambre et Madame Martine Thomas, Greffier.
Le Greffier, Le Président,