Droits des héritiers : 10 mars 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 17/02497

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Droits des héritiers : 10 mars 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 17/02497

10 mars 2023
Cour d’appel de Montpellier
RG n°
17/02497

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre de la famille

ARRET DU 10 MARS 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 17/02497 – N° Portalis DBVK-V-B7B-NEVJ

Décisions déférées à la Cour :

Jugements des 05 MAI 2015 et 15 DECEMBRE 2015

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 13/02358

APPELANTES :

Madame [W] [B] épouse [C]

née le 27 Juin 1968 à [Localité 17]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Madame [T] [B] épouse [I]

née le 11 Avril 1961 à [Localité 13] (CONGO)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 5]

Madame [R] [B] épouse [K] [Z]

née le 15 Juillet 1965 à [Localité 12]

de nationalité Française

[Adresse 14]

[Adresse 14]

[Localité 6] (ESPAGNE)

Représentées par Me Jean-Louis DEMERSSEMAN de la SELARL ACCESSIT, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIME :

Monsieur [A] [M] [V] [B]

décédé le 5 février 2019

étant né le 17 Juin 1966 à [Localité 12]

ayant demeuré [Adresse 11]

[Localité 19]

Représenté par Me Jean-Baptiste CESBRON, avocat au barreau de MONTPELLIER

PARTIE INTERVENANTE :

Monsieur [D] [N] [U]

né le 08 Février 1999 à [Localité 15] (CANADA)

[Adresse 3]

[Localité 16]-ONTARIO – CANADA

Représenté par Me Jean-Baptiste CESBRON, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 06 Décembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 JANVIER 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Nathalie LECLERC-PETIT, Conseillère, chargée du rapport, et Mme Morgane LE DONCHE, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente de chambre

Madame Nathalie LECLERC-PETIT, Conseillère

Madame Morgane LE DONCHE, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Séverine ROUGY

ARRET :

– Contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente de chambre, et par Madame Séverine ROUGY, greffière.

*

* *

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [J] [X] est décédée à [Localité 19] le 21 février 2012 en laissant pour lui succéder ses quatre enfants : [R] [B], [T] [B], [W] [B] et [A] [B].

Le 15 mai 1996, Mme [J] [X] avait consenti en faveur de ses quatre enfants une donation-partage de la nue-propriété indivise de l’immeuble à usage d’habitation lui appartenant édifié sur trois niveaux sur une parcelle sise à [Localité 18], [Adresse 7].

Exposant que leur mère occupait jusqu’à son décès les lots 1 et 3 composés respectivement d’un appartement de 107 m2 type 2 au rez de chaussée et d’un appartement type 2 au premier étage, et que leur frère M. [A] [B] continuait d’occuper sans payer de loyer les lots 2 et 7 sis au rez de chaussée à usage, pour le premier, d’un appartement de type 2 et d’un jardin avec remise pour le second, et qu’il avait, suite au décès de leur mère, étendu son occupation aux deux lots que celle-ci avait habités, sans qu’aucun accord n’ait pu être trouvé quant aux conditions de son occupation ni quant à la gestion du bien indivis, ses soeurs, Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K]-[Z] l’ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Montpellier, par acte d’huissier en date du 12 avril 2013, aux fins :

de voir ordonner l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de leur mère, et l’expulsion de leur frère de l’immeuble indivis,

de voir fixer le montant de l’indemnité d’occupation due à l’indivision par M. [A] [B] à la somme de 3 450 €,

de se voir autorisées à vendre le bien à un prix de 516 000€,

de voir condamner M. [A] [B] à leur payer la somme de 1 800€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens et avec exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par un premier jugement mixte rendu le 5 mai 2015, le tribunal de grande instance de Montpellier a :

déclaré irrecevable la demande de vente du bien indivis formée sur le fondement de l’article 815-5-1 du code civil,

dit que M. [A] [B] est redevable envers l’indivision relative à l’immeuble de [Localité 18] d’une indemnité d’occupation pour les seuls lots qu’il occupe et en fonction de la valeur locative du ou des lots en cause,

rejeté la demande d’indemnité d’occupation formée à l’encontre de M. [A] [B] concernant les lots 5, 1 et 3,

rejeté la demande d’expulsion de M. [A] [B],

ordonné la réouverture des débats sur la demande de partage et de fixation d’une indemnité d’occupation,

renvoyé de ce chef l’affaire et les parties à la mise en état électronique,

invité les parties à produire avant cette date l’acte de donation partage du 15 mai 1996,

invité les demanderesses à justifier pour cette date de la consistance de la succession, de leurs tentatives de partage amiable, et des difficultés s’y opposant, ainsi que de la valeur locative des lots effectivement occupés par leur frère,

sursis à statuer sur la demande de partage de l’indivision successorale et sur le quantum de l’indemnité d’occupation,

réservé les autres demandes.

Par un second jugement contradictoire rendu le 15 décembre 2015, le tribunal a :

débouté Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] de leur demande d’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Mme [J] [X],

renvoyé en tant que de besoin les parties devant Me [F], notaire à [Localité 20], déjà en charge de la succession d'[J] [X], afin qu’il procède aux opérations d’ouverture, comptes et liquidation de ladite succession,

donné acte aux parties de leur projet de convention amiable relative aux comptes de l’indivision existant entre elles quant à l’immeuble à [Localité 18],

dit qu’en l’absence d’accord définitif, il leur appartiendra de se rapprocher du notaire pour la fixation de l’indemnité d’occupation due par M. [A] [B] à l’indivision relative à l’immeuble à [Localité 18],

débouté Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] de leur demande tendant au prononcé de l’exécution provisoire,

débouté Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

condamné les demanderesses aux entiers dépens.

Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] ont relevé appel de chacun de ces deux jugements par déclaration au greffe en date du 2 mai 2017 aux fins “d’annulation ou de réformation de ces décisions selon les moyens qui seront développés par conclusions ultérieures”.

Le bien immobilier sis à [Localité 18], [Adresse 7], a été vendu par les parties le 24 mars 2017 au prix de 380 000 euros.

Par acte d’huissier en date du 18 août 2017 transformé en procès-verbal de recherches infructueuses, Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] ont fait signifier à M. [A] [B] leur déclaration d’appel et leurs conclusions d’appelantes.

M. [A] [B] a constitué avocat devant la cour le 1er septembre 2017.

Il est décédé en cours d’instance, le 5 février 2019, laissant comme héritier pour lui succéder son fils, [D] [U], alors domicilié au Canada.

Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] ont fait signifier à M. [D] [U] par un acte remis le 22 avril 2022 aux autorités canadiennes compétentes, assignation d’avoir à se faire représenter devant la cour et à y comparaître.

M. [D] [U] a constitué avocat devant la cour le 13 octobre 2022.

Les dernières écritures des appelantes ont été déposées le 29 novembre 2022 et celles de l’intimé, M. [D] [U], le 17 octobre 2022.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 6 décembre 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans le dispositif de leurs dernières écritures déposées au greffe le 29 novembre 2022 Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] demandent à la cour, au visa des articles 815, 836, 1686 et suivants du code civil et des articles 1361 et 1364 du code de procédure civile, de :

infirmer le jugement en date du 5 mai 2015 en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnité d’occupation à l’encontre de M. [A] [B], concernant les lots 5, 1 et 3,

infirmer le jugement en date du 15 décembre 2015 en ce qu’il :

les a déboutées de leur demande d’ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession d'[J] [X] et les a renvoyées en tant que de besoin devant Me [F], notaire à [Localité 20], afin qu’il procède aux opérations d’ouverture compte et liquidation de ladite succession,

a dit qu’en l’absence d’accord définitif il leur appartiendra de se rapprocher du notaire pour la fixation de l’indemnité d’occupation due par M. [A] [B] à l’indivision relative à l’immeuble à [Localité 18],

les a déboutées de leur demande formulée au titre des frais irrépétibles et les a condamnées aux entiers dépens,

statuant à nouveau,

ordonner l’ouverture des opérations de compte, de liquidation et de partage de la succession d'[J] [X] ainsi que de l’indivision conventionnelle existant entre elles-mêmes et M. [D] [U] venant aux droits de M. [A] [B], qui résulte de l’acte de donation-partage en date du 15 mai 1996,

dire qu’elles-mêmes et M. [D] [U] pourront participer aux opérations,

désigner pour procéder aux opérations de compte liquidation et partage Me [S] [F], notaire exerçant au sein de la SCP [F] Gayraud Billet Llorca à [Localité 20],

commettre le juge de la mise en état de la 2ème chambre civile B du tribunal de grande instance de Montpellier ou toute autre magistrat délégué à cet effet pour surveiller les opérations de partage et faire rapport en cas de difficultés,

dire qu’en cas d’empêchement ou de motif légitime, le notaire requis, ou le juge chargé du contrôle, pourra être remplacé par ordonnance sur simple requête

fixer l’indemnité d’occupation due par M. [D] [U] au profit de l’indivision successorale jusqu’au 21 février 2012, puis à l’indivision conventionnelle pour la période postérieure, aux sommes suivantes et l’y condamner si besoin,

s’agissant des lots 1 et 3 à hauteur de 1.800 € par mois à compter du 21 février 2012,

s’agissant des lots 2 et 7 à la somme de 750 € par mois à compter du 1er janvier 2006,

s’agissant du lot 5 à la somme de 900 € par mois à compter du 1er octobre 2012,

dire qu’il appartiendra au notaire chargé des opérations de compte liquidation et partage de liquider définitivement et de comptabiliser ladite indemnité d’occupation,

condamner M. [D] [U] à leur payer la somme de 1.800€ au titre des frais irrépétibles de première instance outre celle de 3.000 € en cause d’appel,

condamner M. [D] [U] aux entiers dépens de première instance et d’appel, et subsidiairement, dire et juger qu’il sera fait masse de l’ensemble des dépens de première instance et d’appel lesquels seront supportés par la succession.

Dans le dispositif de ses dernières écritures déposées au greffe le 17 octobre 2022, M. [D] [U] demande à la cour, au visa des articles 815-10, alinéa 3, 840, et 1360 du code civil, et de l’article 784 du code de procédure civile, de:

confirmer en tous points les deux jugements déférés et ce faisant,

débouter Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] de l’ensemble de leurs prétentions comme injustes et infondées,

les condamner à lui payer la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de première instance et d’appel.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour l’exposé exhaustif de leurs moyens.

SUR QUOI LA COUR

Sur l’effet dévolutif et l’objet de l’appel

L’étendue de l’appel est déterminée par la déclaration d’appel et peut être élargie par l’appel incident ou provoqué (articles 562 et 901 4° du code de procédure civile) alors que l’objet du litige est déterminé par les conclusions des parties (article 910-4 du code de procédure civile). L’objet du litige ne peut s’inscrire que dans ce qui est dévolu à la cour et les conclusions ne peuvent étendre le champ de l’appel.

Les parties ne forment dans le dispositif de leurs conclusions respectives aucune prétention concernant l’irrecevabilité de la demande de vente du bien immobilier indivis, le rejet de la demande d’expulsion de M. [A] [B] et le principe d’une dette d’indemnité d’occupation de M. [A] [B] envers l’indivision relative à l’immeuble de [Localité 18] pour les seuls lots qu’il a occupés en fonction de la valeur locative du ou des lots en cause, de sorte qu’il s’agit de chefs confirmés.

En l’absence d’appel incident, la cour est saisie de par l’appel principal à l’encontre du jugement en date du 5 mai 2015 : des chefs relatifs au rejet de la demande d’indemnité d’occupation concernant les lots 5, 1 et 3, et de par l’appel principal interjeté à l’encontre du jugement du 15 décembre 2015 : de la demande d’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de feue [J] [X], de la demande d’ouverture des opérations de compte, de liquidation et de partage de l’indivision existant entre les appelantes et M. [D] [U], venant aux droits de M. [A] [B], qui résulte de l’acte de donation-partage en date du 15 mai 1996, de la désignation du notaire, de la demande d’indemnité d’occupation à la charge de M. [D] [U], venant aux droits de M. [A] [B], au profit de l’indivision successorale jusqu’au 21 février 2012, au titre des seuls lots que M. [B] occupait, de la demande d’indemnité d’occupation à la charge de M. [D] [U], venant aux droits de M. [A] [B], au profit de l’indivision conventionnelle pour la période postérieurement au 21 février 2012 concernant les lots 5, 2 et 7, et de la fixation du montant de l’indemnité d’occupation due au titre d’une occupation exclusive des lots 1, 2, 7, 3 et 5, des frais irrépétibles et des dépens de première instance.

*****

Sur les demandes d’ouverture des opérations de comptes, liquidations et partages de la succession de feue Mme [J] [X] et de l’indivision conventionnelle issue de la donation-partage

‘ Par son jugement du 15 décembre 2015, le premier juge a considéré que la demande de Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] de procéder à l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de Mme [X] pour sortir de l’indivision concernant l’immeuble situé à [Localité 18] est sans objet, s’agissant d’une indivision conventionnelle et non successorale, dès lors que ce bien avait été donné en nue-propriété le 15 mai 1996 à ses quatre enfants par la défunte avec dispense de rapport, de sorte qu’il ne fait pas partie de l’actif de sa succession.

Il a également retenu que les demanderesses sont en voie de parvenir à un accord amiable permettant de mettre un terme à leur indivision conventionnelle et que leur demande de partage de la succession est dépourvue d’intérêt eu égard au montant de l’actif successoral exclusivement mobilier que le notaire en charge de la succession a estimé à une valeur infèrieure à 5 000 euros, sans que ne soit rapportée la preuve qu’il existerait une discussion entre les héritiers le concernant.

‘ Au soutien de leur appel, Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] font valoir, en ce qui concerne leur demande de partage de l’indivision successorale, que quel que soit le montant des sommes à partager, celles-ci devront l’être, ce qui suppose l’ouverture des opérations de partage et qu’il conviendra de désigner la SCP [F] Gayraud Billet Llorca pour y procéder.

En ce qui concerne leur demande de partage de l’indivision conventionnelle, elles soutiennent que même si le bien immobilier indivis qui en était l’objet a été vendu en 2017, aucun accord avec leur défunt frère n’ayant pu intervenir depuis sur les comptes d’indivision à faire entre eux, notamment s’agissant de l’indemnité d’occupation due par M. [A] [B], et donc sur la répartition du prix de vente entre indivisaires, il est nécesaire d’ordonner l’ouverture des opérations de partage de l’indivision et de désigner la même SCP de notaires pour y procéder.

‘ M. [D] [U] qui conclut pour sa part à la confirmation, soutient que la demande de liquidation de l’indivision conventionnelle portant sur l’immeuble sis à [Localité 18] est une demande nouvelle qui est donc irrecevable en appel, et que ce bien indivis ayant été vendu, la demande de partage est devenue sans objet.

Il fait sienne l’argumentation développée par son père M. [A] [B], faisant valoir en premier lieu qu’il n’existait pas de conflit particulier concernant la liquidation de la succession justifiant le recours au tribunal, et ajoute que les appelantes restent taisantes sur la consistance de la succession et sur leurs intentions personnelles, les seules questions soulevées restant limitées à l’indivision conventionnelle.

‘ Réponse de la cour :

Il résulte des dispositions des articles 1873-1 et 1873-2 relatives aux indivisions conventionnelles, que les coïndivisaires qui y consentent tous peuvent convenir de demeurer dans l’indivision, la convention peut être conclue pour une durée qui ne saurait être supérieure à cinq ans et qui est renouvelable par une décision expresse, le partage ne pouvant être provoqué avant le terme convenu qu’autant qu’il y a de justes motifs.

La convention d’indivision peut également être conclue pour une durée indéterminée. Le partage peut en ce cas être provoqué à tout moment pourvu que ce ne soit pas de mauvaise foi ou à contretemps.

Il peut être décidé que la convention à durée déterminée se renouvellera par tacite reconduction pour une durée déterminée ou indéterminée. A défaut de pareil accord, l’indivision sera régie par les articles 815 et suivants à l’expiration de la convention à durée déterminée.

L’article 815 du code civil dispose par ailleurs que nul ne peut être contraint de demeurer dans l’indivision et que le partage peut toujours être provoqué à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention.

Selon l’article 840, le partage est fait en justice lorsque l’un des co-indivisaires refuse de consentir au partage amiable, ou s’il s’élève des contestations entre eux sur la manière d’y procéder ou de le terminer.

Il s’évince de ces dispositions que lorsque aucun terme n’a été stipulé dans une convention d’indivision qui est ainsi à durée indéterminée tout indivisaire a le droit à tout moment de demander que son partage en soit judiciairement ordonné, sauf à ce qu’il soit démontré que cet indivisaire fait preuve de mauvaise foi ou qu’il agit à contre temps.

Par ailleurs, l’action en partage judiciaire se justifie pour faire cesser une indivision légale lorsque l’un des co-indivisaires refuse de consentir au partage amiable, ou s’il s’élève des contestations entre les co-indivisaires sur la manière d’y procéder.

Sur la demande de partage de l’indivision successorale

L’article 720 du code civil dispose que les successions s’ouvrent par la mort au dernier domicile du défunt.

Selon l’article 724, les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt.

L’article 725 dispose ensuite notamment que pour succéder, il faut exister à l’instant de l’ouverture de la succession.

En l’espèce, il résulte de l’acte de décès de Mme [J] [X] qu’elle est décédée à [Localité 19] le 21 février 2012 laissant alors pour lui succéder, selon l’acte de notoriété établi par le notaire, ses trois filles et son fils [A] [B], ses héritiers désignés par la loi qui ont été saisis de plein droit.

Il est constant que le seul bien immobilier, sis à [Localité 18], qui dépendait du patrimoine de Mme [J] [X] avait fait l’objet d’une donation partage qu’elle avait consentie en 1996 au profit de ses quatre enfants, gratifiés chacun d’un quart indivis en nue-propriété, et avec dispense de rapport de sorte que ce bien ne faisait pas partie de l’actif successoral.

Il n’en demeure pas moins qu’il dépend de la succession un actif mobilier nécessairement indivis, peu important que le notaire l’ ait évalué à une somme infèrieure à 5000 euros, outre la revendication par Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] d’une créance de l’indivision envers leur frère au titre de son occupation privative sans contrepartie financière d’une partie de l’immeuble indivis postérieurement au dècès de leur mère, ce qui a vocation à caractériser un actif successoral.

S’il existait, à la date à laquelle le premier juge a statué, en mai puis décembre 2015, des tentatives des co-héritiers indivisaires de transaction pour parvenir à un partage amiable de l’indivision successorale et de l’indivision conventionnelle portant sur le bien immobilier de [Localité 18], telles que transcrites dans des mails, l’un en date du 14 juillet 2014 émanant de Mme [W] [B] épouse [C] à l’intention de ses deux soeurs et de son frère, l’autre daté du 7 juillet 2015 établi par M. [A] [B] à l’entête de son notaire, Maître [L], donnant son accord pour la vente de l’immeuble et s’engageant à payer toutes factures et indemnité d’occupation mises à sa charge en échange d’une renonciation par ses trois soeurs à la procédure pendante devant le tribunal de grande instance de Montpellier, force est de constater que ces négociations n’ont pas abouti et qu’aucun partage amiable n’a pu se concrétiser, à défaut en particulier, pour les co-héritiers, d’être parvenus à s’entendre relativemment aux indemnités d’occupation revendiquées à l’égard de M. [A] [B].

Le maintien de la procédure devant le premier juge puis l’appel, sans accord intervenu entre les héritiers quant aux créances de l’indivision depuis le décès de leur mère survenu il y a dix ans désormais, témoigne des contestations persistantes qui les opposent, sans même que le dècès de leur frère[A] en cours d’instance d’appel, n’ait permis un rapprochement et l’obtention d’une issue amiable après que le jeune fils et héritier de ce dernier ait été attrait devant cette cour qui reste saisie des prétentions opposées des parties quant aux modalités du partage de l’actif successoral.

Il y a donc lieu d’ordonner le partage judiciaire de la succession de feue Mme [J] [X] décédée à [Localité 19] le 21 février 2012 dont les conditions légales sont vérifiées, et de commettre, à défaut d’accord express exprimé par les parties quant à l’étude de notaires dont les appelantes sollicitent la désignation, le président de la chambre des notaires de l’Hérault avec mission de désigner l’un de ses confrères pour procéder aux opérations de comptes liquidation et partage de ladite succession ainsi que le vice président du tribunal judiciaire de Montpellier pour surveiller lesdites opérations et en faire rapport au tribunal en cas de nécessité.

Le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef.

Sur la demande de partage de l’indivision conventionnelle

La demande de partage de l’indivision conventionnelle existant entre les héritiers, co-indivisaires, s’analysant en une demande accessoire à la demande de partage de l’indivision légale successorale, dont elle est le complément nécessaire, au sens de l’article 566 du code de procédure civile, elle sera déclarée recevable.

La vente en date du 24 mars 2017 de l’immeuble objet de l’indivision conventionnelle qui existait entre les parties en nue propriété avant le dècès de leur mère puis en pleine propriété, à compter du 21 février 2012 date de l’extinction de l’usufruit de la donataire, ne supprime en rien l’intérêt d’un partage judiciaire, dès lors d’une part que le prix de vente de 380 000 euros s’est substitué à l’immeuble, et d’autre part que les indivisaires persistent dans leurs contestations quant aux créances réclamées au bénéfice de l’indivision.

Considérant que le désaccord profond persistant entre les parties concernant les comptes à faire entre co-indivisaires a fait obstacle à l’aboutissement de tout partage amiable des fonds détenus par le séquestre provenant de la vente du bien immobilier, et qui constituent l’actif de l’indivision conventionnelle, la nécessité d’un partage judiciaire est établie.

La cour infirmera donc le jugement déféré en ce qu’il avait exclusivement donné acte aux parties de leur projet de convention en les invitant à se rapprocher du notaire pour la fixation de l’indemnité d’occupation due par M. [A] [B] relativement à l’immeuble sis [Adresse 9] à [Localité 18], et y ajoutant, ordonnera le partage judiciaire de l’indivision conventionnelle existant entre les parties relativement au prix de vente du bien immobilier reçu en donation-partage, en avancement d’hoiries, de feue Mme [J] [X].

A défaut d’accord express exprimé par les parties quant à la désignation de l’étude de notaires que les appelantes sollicitent, le président de la chambre des notaires de l’Hérault sera commis avec mission de désigner celui de ses confrères qu’il chargera des opérations de comptes liquidation partage de l’indivision successorale, pour procéder également aux opérations de comptes liquidation et partage de l’indivision conventionnelle précitée, le vice-président du tribunal judiciaire de Montpellier étant désigné pour surveiller lesdites opérations et en faire rapport au tribunal en cas de nécessité.

Sur les demandes d’indemnité d’occupation

‘ Par son jugement du 5 mai 2015, le premier juge a dit que M. [A] [B] est redevable envers l’indivision relative à l’immeuble de [Localité 18] d’une indemnité d’occupation pour les seuls lots qu’il occupe et en fonction de la valeur locative du ou des lots en cause et a rejeté la demande d’indemnité d’occupation formée à l’encontre de ce dernier concernant les lots 5, 1 et 3, après avoir considéré que si cet indivisaire ne conteste pas avoir occupé une partie de l’immeuble indivis et avait proposé de verser une indemnité, les demanderesses ne produisent aucun document permettant de connaître les lots qu’il avait effectivement occupés, ni la date de son entrée dans les lieux, ni encore l’étendue des droits conservés par l’usufruitière à défaut de production de l’acte de donation-partage ayant motivé qu’il enjoigne sa production.

Le premier juge a estimé en outre que même s’il est vérifié que l’agence immobilière avait rendu à M. [A] [B] les clefs du lot 5 au départ des locataires, ce dernier avait proposé à ses soeurs de mettre cet appartement en location ce dont il se déduit qu’il n’avait pas l’intention de l’occuper lui-même, sans que les demanderesses ne rapportent la preuve que leur frère aurait pris possession de ce lot ni de l’appartement occupé par la défunte.

Le tribunal ayant considéré dans son jugement du 15 décembre 2015 qu’en dépit de la réouverture des débats, les demanderesses ne produisaient aucune pièce utile permettant de déterminer les lots effectivement occupés par M. [A] [B] ainsi que leur valeur locative, il a invité les parties à se rapprocher du notaire pour la fixation de l’indemnité d’occupation due par M. [B].

‘ Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] concluent à l’infirmation du jugement du 5 mai 2015 du chef du rejet de leur demande d’indemnité d’occupation à l’encontre de M. [A] [B] concernant les lots 5,1 et 3, faisant valoir qu’il occupait les lots 2 et 7 à usage d’habitation depuis le 1er janvier 2006, et qu’il s’était également réservé l’occupation exclusive de l’ancien appartement qu’occupait leur défunte mère correspondant aux lots 1 et 3 à compter du décès de celle-ci.

Exposant qu’au départ des locataires du lot n°5 à compter du 1er octobre 2012, M. [A] [B] a pris possession des clefs de cet appartement qui a été estimé à 130 000 euros, ce qui justifie une valeur locative annuelle qui peut être fixée à 6 % de ce montant, les appelantes concluent que ce dernier devait à l’indivision une indemnité d’occupation de 900 euros par mois pour son occupation exclusive de ce lot.

Concernant les lots 1, 3, 2 et 7, elles concluent que leur défunt frère était redevable à compter du 21 février 2012 envers l’indivision successorale d’une indemnité d’occupation qu’elles entendent voir fixer à 1 800 euros par mois sur la base de la valeur des deux lots 1 et 3 qui ont été estimés à 180 000€ chacun.

‘Faisant sienne l’argumentation développée dans ses conclusions par son défunt père avant son décès, M. [D] [U] fait valoir que les demandes de paiement d’une indemnité d’occupation de ses tantes appelantes sont pour partie prescrites pour la période antérieure au 12 avril 2008.

Il conclut par ailleurs au rejet de ces demandes faisant valoir en premier lieu que les appelantes n’apportent aucune preuve permettant de corroborer un quelconque usage du bien par son père au-delà de ses droits sur l’immeuble, et que dans leurs propres écritures, les appelantes reconnaissent que M. [B] n’occupait qu’un seul lot à compter du décès de sa mère.

Il soutient d’autre part que les 10 nouvelles pièces produites par les appelantes ne démontrent pas quel lot son père aurait occupé dans l’immeuble indivis, ni qu’il les aurait placées dans l’impossibilité, de fait ou de droit, d’occuper également le bien indivis, condition à laquelle la Cour de Cassation subordonne le versement d’une indemnité d’occupation.

‘ Réponse de la cour :

Sur la demande d’indemnité d’occupation pour la période antérieure au décès de la donataire

Les articles 815-9 alinéa 2 et 815-10 alinéa 2 disposent que l’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité d’occupation, sans qu’aucune recherche relative aux fruits et revenus ne soit recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l’être.

Il en résulte qu’une indemnité d’occupation telle que les appelantes la revendiquent au titre d’une occupation par leur frère [A] [B] d’une partie de l’immeuble sis à [Localité 18], ne peut être due qu’à la condition que la jouissance d’un indivisaire prive les autres de la possibilité d’exercer leurs propres droits indivis sur le même bien.

Au cas présent, il résulte de l’acte de donation-partage en date du 15 mai 1996 versé au débat par les appelantes, que Mme [J] [X] avait consenti en faveur de ses quatre enfants la donation de la nue-propriété indivise de la maison à usage d’habitation sise à [Localité 18] dont elle était seule propriétaire pour en avoir reçu attribution le 17 mars 1986 dans le cadre du partage de la communauté ayant existé avec son ex-époux, mais dont elle s’était réservé l’usufruit à titre viager, de sorte que les donataires n’en sont devenus pleinement propriétaires indivis qu’à son décès.

Dans cette situation juridique, la jouissance privative d’une partie de l’immeuble dont M. [A] [B] a reconnu avoir bénéficié sans contrepartie financière avant le décès de sa mère, en habitant un appartement voisin des deux lots 1 et 3 qu’elle-même occupait, est nécessairement intervenue du chef de cette dernière qui était alors seule détentrice de l’usufruit de l’entier immeuble.

Avant le décès de feue Mme [J] [X], aucun de ses enfants n’a donc pu être privé de la possibilité d’exercer un droit indivis d’usufruit puisqu’il n’existait alors entre eux aucune indivision en usufruit, mais exclusivement en nue-propriété.

Il en résulte qu’aucune dette d’indemnité d’occupation ne saurait être valablement revendiquée par les appelantes à l’encontre de M. [D] [U], venant aux droits de son père décédé et au profit de l’indivision, au titre de l’occupation exclusive par ce dernier d’un appartement ou de lots dépendant de l’immeuble objet de la donation partage.

La demande d’indemnité d’occupation formée par les appelantes sera ainsi rejetée comme étant juridiquement infondée pour toute période antérieure au 21 février 2012, date du décès de leur mère.

La fin de non recevoir pour cause de prescription que leur oppose M. [D] [U], venant aux droits de son père, au titre d’une occupation par ce dernier de l’immeuble litigieux antérieurement au 12 avril 2008 s’avérant de ce fait dépourvue d’intérêt quant à la solution du litige, la cour n’a pas à statuer de ce chef.

Sur la demande d’indemnité d’occupation pour la période postérieure au 21 février 2012

En application de l’article 815-9 du code civil, la jouissance privative d’un immeuble indivis résulte de l’impossibilité de droit ou de fait pour les autres co-indivisaires d’user de ce même bien.

En vertu de l’article 9 du code de procédure civile, les appelantes, qui demandent le paiement d’une indemnité d’occupation à l’encontre de [D] [U], ès qualité d’ayant droit de leur frère co-indivisaire, pré-décédé, doivent rapporter la preuve à la fois de la réalité de l’étendue de la jouissance du bien indivis par ce dernier mais également de son caractère exclusif en ce qu’elle les a privées de la possibilité d’exercer leur propre droit indivis sur le bien.

A supposer qu’une telle preuve du caractère privatif de la jouissance de d’un ou plusieurs lots par leur frère co-indivisaire soit rapportée par les appelantes, c’est à l’ayant droit de ce dernier, partie à l’instance, de justifier au soutien de sa contestation, que son père a restitué à l’indivision la jouissance de la partie de l’immeuble indivis après avoir cessé de l’occuper, sauf à demeurer tenu d’une indemnité envers l’indivision, même en l’absence d’occupation effective du chef de M.[A] [B].

M. [D] [U] qui conclut que son père n’a jamais contesté avoir occupé une partie de l’immeuble mais qui oppose aux appelantes un défaut de preuve du point de départ de son occupation et des lots effectivement concernés, est infondé à soutenir pour contester la demande d’indemnité d’occupation du chef de son père, que la jouissance de celui-ci n’ayant porté que sur un seul lot, elle n’a pu excéder ses droits de propriétaire qu’il détenait à compter du décès de sa mère, au motif allégué que chacun des co-indivisaires avait droit à un quart de l’immeuble indivis comportant 6 lots, alors que l’attribution éventuelle de lots suppose un partage préalable en nature, qui n’a pas eu lieu de sorte qu’aucun indivisaire ne peut revendiquer de droit sur un lot précis ou un quota de l’immeuble et que la question de savoir si le lot ou les lots que M [A] [B] a pu occuper ont représenté l’équivalent, plus, ou moins, que la valeur de ses droits indivis de propriété sur l’immeuble est dépourvue de sens au plan juridique.

Comme déjà exposé, le principe de la dette de feu M. [A][B] envers l’indivision au titre d’une indemnité d’occupation pour les seuls lots qu’il a occupés dans l’immeuble indivis de [Localité 18] est un chef dévolu, mais non critiqué du jugement du 5 mai 2015, de sorte qu’il est confirmé.

Restent à trancher les contestations relatives à la détermination des appartements ou “lots” concernés par cette occupation exclusive et à la durée pendant laquelle les co-indivisaires de feu [A] [B] ont été privés de la possibilité d’exercer leur propre droit sur le ou les dits lots, et enfin à évaluer l’indemnité d’occupation due à l’indivision par l’ayant droit de feu M. [A] [B].

En vertu du principe selon lequel nul ne peut se pré-constituer une preuve à lui-même, la demande d’expulsion des cinq lots 1,2,3,5 et 7 que les appelantes ont formée dans leur assignation à l’encontre de M. [A] [B], et dont le rejet par le premier juge est un chef définitif, est inopérante à rapporter la preuve de l’étendue et de la durée de la jouissance exclusive de ces lots telle qu’elles l’opposent à l’ayant droit de leur défunt frère, M. [D] [U].

Sur la détermination des lots dont M. [A] [B] a joui à titre exclusif

Il est établi par un courrier qu’avait adressé le 25 novembre 2011 l’agence Roussel immobilier à Mme [J] [B] aux fins d’estimation des appartements dépendant de l’immeuble dont elle avait l’entier usufruit et dont elle occupait deux appartements, l’un au premier étage dit lot 3 et l’autre au rez de chaussée gauche dit lot 1 à l’adresse [Adresse 9], décrit “en bon état général” et estimé à 120 000 euros, que son fils, [A] [B] occupait alors l’appartement voisin du rez de chaussée droite mais à l’adresse [Adresse 8], dit lot 2, d’une superficie d’environ 40 m2 qui était décrit comme étant “à rafraîchir” et évalué 70 000 euros, comprenant une seule chambre avec terrasse et jardin attenant avec remise de 56 m2 non aménagée et accessible à partir de celui-ci correspondant à un lot 7, l’appartement du premier étage gauche décrit comme étant non occupé et d’une superficie de 82 m2 avec 2 chambres et dont les plafonds étaient à rénover était évalué à 130 000 euros, trois autres appartements étant par ailleurs décrits: le premier d’une surface de 53 m2 au premier étage gauche, loué dit lot 5, le second au deuxième étage droite inoccupé de 107 m2 type 3 refait à neuf et évalué 110 000 euros, et le troisième type 2 au deuxième étage gauche d’une superficie de 54 m2 en état correct évalué 60 000 euros.

Il s’évince par ailleurs d’un mandat de vente confié à l’agence AZ immobilier, que l’immeuble en cause qui était agrémenté d’un jardin accessible depuis l’appartement lot 2 qu’avait occcupé M. [B], était composé au total de 7 lots, dont 4 logements chauffés à l’électricité avec compteurs EDF individuels dénommés lots 3,4, 5 et 6, alors que l’appartement du rez de chaussée et celui du premier étage qui correspondaient aux lots 1 et 3 initialement été affectés à l’habitation de Mme [J] [X], étaient les seuls à disposer d’un système commun de chauffage au gaz avec un compteur également commun.

Il est avéré par les termes de plusieurs écrits concordants émanant de M. [H] [B] et qui sont versés au débat par les appelantes, qu’il avait reconnu s’être installé, suite au décès de sa mère, dans l’appartement du rez de chaussée dit “lot 1” au [Adresse 10].

Ainsi, dans un courrier adressé à ses soeurs, non daté, mais dont la cour peut déduire qu’il a été écrit en décembre 2012, M. [A] [B] avait reconnu avoir assuré l’appartement lot 1 à la GMF et avoir procédé au changement du contrat EDF de ce même appartement à son nom, ce qui est confirmé par une facture de souscription datée du 25 juin 2012, établie à l’adresse de l’ancien appartement de sa mère et à son propre nom et qu’il avait paraphée avec la mention manuscrite “bon pour accord”.

Dans un courrier en date du 23 octobre 2013 qu’il avait fait parvenir au notaire de [Localité 20] pour contester la répartition des consommations d’eau en détaillant l’état d’occupation ou d’inoccupation des appartements, M. [A] [B] avait déclaré qu’il s’était fait enregistrer auprès des impôts à compter du 1er janvier 2013 comme étant occupant de cet appartement, lot 1, en précisant qu’il avait proposé à ses soeurs de verser une indemnité à l’indivision pour être resté dans la maison, en affirmant qu’il souhaitait demeurer dans cette maison de famille, voire racheter un des appartements la composant.

Enfin, dans un mail daté du 19 novembre 2015 qu’il avait adressé à sa soeur [W] [C], il reconnaissait expressément habiter encore l’appartement du rez de chaussée correspondant au lot 1 dans lequel logeait leur défunte mère.

Force est de constater par contre que dans chacun de ces trois écrits, M. [A] [B] ne cessait de réaffirmer qu’il n’avait jamais pris possession de l’appartement du premier étage dénommé “lot 3” que sa mère avait elle-même cessé d’habiter dès avant son décès suite à un AVC, sans qu’aucun élément justificatif versé au débat par les appelantes ne permette de démontrer l’inverse tel qu’elles le prétendent, les factures de gaz dont elles entendent se prévaloir étant dépourvues de caractère probatoire à cet égard puisque le système de chauffage au gaz était commun aux deux appartements correspondant aux lots 1 et 3 et que l’installation de M. [B] dans le lot 1 comme déjà exposé impliquait qu’il consomme du gaz du chef de cette seule occupation.

Il en résulte que si la preuve de l’occupation exclusive de l’appartement dénommé lot 1 par M. [A] [B] est amplement rapportée par les propres écrits de ce dernier, contrairement à ce que le premier juge a considéré par erreur, il n’est pas démontré par Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z], que leur frère co-indivisaire ait occupé l’appartement du premier étage, dit lot numéro 3, dépendant de l’immeuble indivis, qui était déjà inoccupé en novembre 2011 comme l’avait exposé l’agence Roussel immobilier dans son courrier d’estimation de chaque lot du 25 novembre 2011.

S’agissant de l’appartement type 3 du deuxième étage d’une superficie de 53 m2 , dénommé “lot 5”, il est établi par les pièces produites au débat qu’il était loué à la date du décès de feue Mme [J] [X] à une mademoiselle [O] qui a libéré les lieux le 17 octobre 2012, comme l’exposait M. [A] [B] dans son courrier daté de décembre 2012 adressé à ses co-indivisaires et aux termes duquel il leur proposait de le relouer pour renflouer les comptes de l’indivision “sans dévaloriser l’immeuble aux yeux d’un potentiel investisseur”.

A l’instar de ce que le premier juge a pertinemment considéré, il se déduit de cet écrit de M. [A] [B] par lequel il affirmait avoir été destinataire de demandes de location et incitait ses soeurs, pour abonder les recettes de l’indivision, à mettre aussitôt en location le lot numéro 5 que venait de libérer la locataire, mais également “l’appartement du jardin” qui correspondait au T2 du rez de chaussée avec terrasse ou lot 2 donnant seul accès au jardin avec remise et dans lequel il avait habité, qu’il n’occupait aucun de ces deux lots, et qu’il n’avait également aucune intention de s’opposer à leur jouissance par ses co-indivisaires puisqu’il souhaitait qu’ils soient rentabilisés par une location à des tiers, pour le compte commun de l’indivision.

C’est par une appréciation pertinente de cet élément de fait que le premier juge a considéré à bon droit que le seul fait que l’agence Mèze immobilier ait écrit dans un mail adressé le 9 janvier 2013 à Mme [T] [B] épouse [I] que son frère M. [A] [B] était venu récupérer les clefs de l’appartement correspondant au lot 5 ne peut dans ce contexte, établir qu’il s’en serait alors accaparé la jouissance privative en faisant obstacle à celle de ses soeurs, étant relevé au surplus, que le logement en cause, avait alors pu être évalué à la demande des indivisaires par plusieurs agents précisément parce que M. [B], seul indivisaire présent sur place en permanence qui disposait d’un jeu de clefs dans l’intérêt commun leur avait permis de le visiter, ce qui expliquait que personne ne lui ait demandé de restituer ces clefs, aucun des agents immobilier n’ayant au demeurant mentionné une occupation du lot 5 par M. [B].

Sur la durée de la jouissance exclusive des lots 1, 2 et 7

S’agissant de la durée de l’occupation exclusive par feu M. [A] [B] de certains lots indivis au cours des mois ou années postérieures au décès de Mme [J] [X], les appelantes chiffrent leur demande d’indemnité d’occupation devant la cour en la forme d’une indemnité mensuelle qui n’a pas été évaluée par le premier juge.

A cet égard, si M. [A] [B] ne se domiciliait plus à [Localité 18] mais à [Localité 19] dès le 7 juillet 2015 aux termes d’un accord amiable de vente de l’immeuble indivis qu’il avait signé, il reconnaissait encore dans son mail postérieur du 19 novembre 2015 adressé à sa soeur qu’il occupait l’appartement du rez de chaussée ou lot 1 et la dernière facture d’EDF sur laquelle il apparaît en tant que titulaire du contrat d’abonnement qu’il avait souscrit le 25 juin 2012 pour ce même appartement est en date du 18 août 2016, sans que ne soit rapportée par ses soeurs la preuve de son occupation privative de l’immeuble indivis postérieurement à cette dernière date.

La créance que l’indivision détient à l’égard de M. [D] [U] en tant qu’héritier et ayant droit de son père au titre de l’occupation exclusive par ce dernier de ce lot 1 de l’immeuble indivis sera donc limitée à la période comprise entre le 25 juin 2012 et le 18 août 2016.

L’indemnité relative à son occupation exclusive des lots 2 et 7 dans lequels il vivait du vivant de feue Mme [J] [X] sera retenue comme étant due à l’indivision pour la période comprise entre le 21 février 2012 et le 31 décembre 2012, en considération de son courrier de décembre 2012 dans lequel, après avoir énoncé son emménagement dans l’appartement voisin, lot 1, il proposait la mise en location de cet appartement et du lot 7 à usage de jardin ce qui suffit à établir qu’il n’en jouissait alors plus à titre exclusif.

Le jugement déféré en date du 5 mai 2015 sera donc infirmé du chef du rejet des demandes d’indemnité d’occupation de Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K]- [Z] tenant les éléments qui établissent une occupation exclusive par M. [A] [B] des lots 1, 2 et 7 pendant des durées telles que précédémment retenues.

Les appelantes étant par contre défaillantes dans la preuve qui leur incombe de toute occupation par M. [A] [B] qui aurait exclu l’exercice de leurs propres droits indivis concernant l’appartement type 4 du premier étage dénommé lot 3, comme de l’appartement dénommé lot 5 suite au départ de la locataire [O] intervenu le 17 octobre 2012, le jugement déféré du 5 mai 2015 doit être confirmé en ce qu’il les a déboutées à juste titre de leurs demandes d’indemnité d’occupation pour ces deux lots.

La cour, statuant à nouveau, juge que M. [A] [B] était à la date de son décès, débiteur envers l’indivision conventionnelle :

d’une indemnité d’occupation au titre de sa jouissance exclusive des biens indivis dénommés lots 2 et 7 dépendant de l’indivision conventionnelle existant avec ses soeurs, pendant la période comprise entre le 21 février 2012 et le 31 décembre 2012,

d’une indemnité d’occupation au titre de sa jouissance exclusive de l’appartement dénommé lot 1 au sein de l’immeuble indivis pendant la période comprise entre le 25 juin 2012 et le 18 août 2016.

Sur l’évaluation de l’indemnité d’occupation due à l’indivision du chef de l’occupation exclusive par feu M. [A] [B]

Considérant la localisation de l’immeuble à [Localité 18], la description non contestée des appartements et les divers avis de valeur des professionnels versés au débat s’agissant en particulier de l’appartement de 104 m2 dénommé lot 1 type 4 estimé 120 000 euros, mais également l’estimation de l’appartement de type 2 avec accès au jardin incluant une remise attenante, correspondant aux lots 2 et 7, et enfin le relevé de gérance daté du 6 mars 2012 afférent aux autres appartements loués dans le même immeuble et notamment le T2 du deuxiéme étage décrit en état correct évalué 60 000 euros dont le loyer mensuel s’élevait comparativement en 2012 à 326,74 euros, la cour entend comparativement fixer la valeur locative des biens dont M. [A] [B] a eu la jouissance exclusive au cours des périodes précitées échues entre 2012 et 2016 ainsi que suit :

à 650 euros par mois concernant l’appartement du rez de chaussée ou lot 1 décrit comme étant d’une surface de 104 m2 et en bon état général, sans que cela ne soit contesté,

à 450 euros par mois concernant l’ensemble constitué par le lot 2 type 2 d’une surface d’environ 40 m2 à rafraichir évalué 70 000 euros et par le lot 7 à usage de jardin y attenant avec remise.

Les jugements déférés seront ainsi complétés en ce sens.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Considérant l’objet du litige relatif au partage de deux indivisions et la succombance partielle de chaque partie, la cour estime qu’il y a lieu de dire que les dépens doivent être considérés comme frais privilégiés de partage qu’il s’agisse des dépens de première instance comme d’appel.

Le jugement déféré du 15 décembre 2015 sera seul infirmé du chef des dépens, celui du 5 mai 2015 les ayant exclusivement réservés.

Chaque partie succombant partiellement en ses prétentions en cause d’appel, l’équité ne commande pas qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile en première instance comme en appel.

Les parties seront déboutées de leurs demandes respectives d’indemnité au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

CONSTATE que les chefs dévolus mais non critiqués qui concernent l’irrecevabilité de la demande de vente du bien immobilier indivis, le rejet de la demande d’expulsion de M. [A] [B], le principe d’une dette d’indemnité d’occupation de M. [A] [B] envers l’indivision relative à l’immeuble de [Localité 18] pour les seuls lots qu’il a occupés en fonction de la valeur locative du ou des lots en cause sont des chefs confirmés,

DÉCLARE recevable la demande de partage de l’indivision conventionnelle existant entre les co-héritiers co-indivisaires afférente au prix de vente de l’immeuble indivis sis à [Localité 18] objet de la donation partage consentie à ses quatre enfants par feue Mme [J] [X],

INFIRME les deux jugements déférés prononcés les 5 mai et 15 décembre 2015 par le tribunal de grande instance de Montpellier en leurs dispositions déférées non définitives et critiquées, à l’exception du rejet par le jugement du 5 mai 2015 de la demande d’indemnité d’occupation revendiquée pour le compte de l’indivision conventionnelle à l’encontre de M. [A] [B] concernant les deux appartements lots 3 et 5 de l’immeuble indivis sis à [Localité 18] et des dépens réservés, ainsi que du rejet des demandes pour frais irrépétibles par le jugement du 15 décembre 2015,

STATUANT A NOUVEAU des chefs déférés, critiqués et infirmés,

ORDONNE le partage et l’ouverture des opérations de compte liquidation de l’indivision successorale faisant suite au décès de Mme [J] [X] survenu à [Localité 19] le 21 février 2012,

COMMET le président de la chambre des notaires de l’Hérault avec mission de désigner l’un de ses confrères pour procéder aux opérations de comptes liquidation et partage de ladite succession,

DÉSIGNE le vice président du tribunal judiciaire de Montpellier en charge des liquidations d’indivisions pour surveiller lesdites opérations et en faire rapport au tribunal en cas de nécessité,

DÉBOUTE Mmes [W] [B] épouse [C], [T] [B] épouse [I] et [R] [B] épouse [K] [Z] de toute demande d’indemnité d’occupation au titre d’une jouissance par feu M. [A] [B] d’une partie de l’immeuble sis à [Localité 18] pour la période antérieure au décès de Mme [J] [X] survenu le 21 février 2012,

Y AJOUTANT,

ORDONNE le partage de l’indivision conventionnelle qui existait entre les donataires à la donation partage consentie par Mme [J] [X] au profit de ses quatre enfants concernant le bien immobilier sis [Adresse 9] à [Localité 18], et l’ouverture des opérations de compte liquidation,

COMMET le président de la chambre des notaires de l’Hérault avec mission de désigner pour procéder au dit partage et aux opérations de comptes liquidation celui de ses confrères qu’il aura désigné pour procéder aux opérations de comptes liquidation et partage de la succession de feue Mme [J] [X],

DÉSIGNE le vice président du tribunal judiciaire de Montpellier en charge des liquidations d’indivisions pour surveiller lesdites opérations et en faire rapport au tribunal en cas de nécessité,

DIT que M. [A] [B] était, à la date de son décès, débiteur d’indemnités d’occupation envers l’indivision conventionnelle au titre de sa jouissance exclusive des appartements dépendant de l’immeuble indivis sis à [Localité 18] [Adresse 9], au cours des périodes ci-après indiquées :

l’appartement du rez de chaussée dénommé lot 1, pour la période comprise entre le 25 juin 2012 et le 18 août 2016,

et l’appartement dénommé lot 2 ainsi que du jardin avec remise dénommé lot 7, pour la période comprise entre le 21 février 2012 et le 31 décembre 2012,

FIXE le montant mensuel des indemnités d’occupation qui étaient dues par feu M. [A] [B] à la date de son décès à l’indivision conventionnelle au titre de son occupation exclusive des biens et lots précités qui dépendaient de l’immeuble indivis et aux périodes précitées, aux sommes suivantes :

à 650 € ( SIX CENT CINQUANTE EUROS) par mois concernant l’appartement lot 1 du rez de chaussée ,

à 450 € (QUATRE CENT CINQUANTE EUROS) par mois concernant l’ensemble du rez de chaussée à usage d’appartement ou lot 2 et de jardin attenant avec remise ou lot 7,

DIT que les actes de partage seront établis par le notaire commis sur la base des chefs des jugements déférés qui sont définitifs comme n’ayant pas été dévolus à la cour, et de ceux non définitifs qui sont tranchés et ajoutés par le présent arrêt en particulier s’agissant des indemnités d’occupation dues à l’indivision conventionnelle,

RENVOIE à cette fin les parties devant le notaire commis devant être désigné par le président de la chambre des notaires,

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles,

DÉCLARE les dépens de première d’instance comme ceux d’appel frais privilégiés de partage.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

SR/NLP

 


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