Droits des héritiers : 16 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/00025

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Droits des héritiers : 16 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/00025

16 mars 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/00025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 2

ORDONNANCE DU 16 MARS 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/00025 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CG5FD

APPELANT

Monsieur [Y] [C]

[Adresse 1]

[Localité 2]

* * *

Nous, Olivier FOURMY, Président de la chambre 2 pôle 6 en sa qualité de délégataire du Premier Président de la Cour d’appel de PARIS, assisté de Alicia CAILLIAU, Greffière,

Vu les articles 341 et suivants du code de procédure civile ;

Vu l’article L. 111-6 du code de l’organisation judiciaire ;

Vu l’article L. 1457-1 du code du travail ;

Vu la requête de M. [C] aux fins de « DEMANDE DE RÉCUSATION ET DE RENVOI POUR CAUSE DE SUSPICION LÉGITIME POUR DÉNI DE JUSTICE POUR INSCRIPTION DE FAUX » (ci-après, la ‘Requête’), déposée au secrétariat de la première présidence de la cour d’appel entre les mains du greffe social et central le 11 janvier 2023 ;

Vu les observations relatives à cette demande, de M. le président de chambre [Z] [S], en date du 15 janvier 2023 ;

Vu les observations relatives à cette demande, de M. le conseiller [V] [X], en date du 1er février 2023 ;

Vu les observations relatives à cette demande, de Mme la conseillère [O] [P], en date du 6 février 2023 ;

Vu les observations du ministère public en date du 5 février 2023, dont il résulte que le ministère public « est d’avis que (la) requête soit rejetée » ;

Vu la note d’audience dressée par Mme la greffière d’audience, le 11 janvier 2023 ;

* * *

La Requête présentée par M. [Y] [C] est relative à une affaire l’opposant à la société Logware informatique SAS, attribuée à la chambre 6-9 de la cour, s’agissant d’un litige prud’homal.

Ce litige est ancien, l’instance initiale ayant été introduite devant le conseil de prud’hommes en avril 2004, le jugement rendu le 18 mars 2016 et l’affaire finalement appelée devant la cour, après radiation et réinscription, à l’audience du 11 janvier 2023, après avoir été appelée à l’audience du 2 novembre 2022 et renvoyée « pour permettre à M. [C] de prendre connaissance des dernières conclusions, le bordereau de pièces et les pièces de Me [S] et d’y répondre ».

A cet égard, il importe de préciser que, compte tenu de cette ancienneté, ce sont les dispositions du code de procédure civile relatives à la procédure orale qui s’applique.

M. [C], à la Requête ainsi qu’aux pièces qui y sont jointes duquel il est expressément fait référence pour plus ample précision sur les moyens et arguments qu’il entend développer, fait notamment valoir qu’il a pu par le passé solliciter l’aide juridictionnelle, qu’il ne bénéficie pas de l’assistance d’un conseil, que celui désigné au titre de l’aide juridictionnelle a, en février 2022, informé tant le greffe sociale que Me [F] [S] « de son désistement pour ne plus recevoir de correspondance à son cabinet pour ses affaires civiles ».

Le 7 mars 2022, M. [C] a accusé réception de pièces.

Le 30 juin 2022, il a informé la partie adverse, par LRAR, qu’il est « seul sans avocat » (en gras dans la Requête) et de lui « adresser ses écritures à son adresse postale ».

Le 25 octobre 2022, M. [C] a formé une demande de renvoi « en certifiant sur l’honneur que la partie adverse ne lui a notifié aucune écriture ni conclusion ni aucun bordereau » (en gras comme dans la Requête).

Le 2 novembre, il s’est « inscrit en faux pour dénonciation calomnieuse à l’encontre de la pièce N°92 produite le jour de l’audience par la partie adverse ».

Le renvoi contradictoire est fixé à l’audience du 11 janvier 2023.

Le 31 décembre 2022, M. [C] met en demeure son contradicteur « par sommation de communiquer des éléments de preuve nécessaires au soutien de ses prétentions en justice ».

Puis, le 6 janvier 2023, M. [C] « dépose une demande de renvoi en fixations d’astreintes de produire des éléments de preuve nécessaires au soutient de ses prétentions en justice ».

« En raison du grave préjudice résultant d’un incident de mise en état, l’appelant [Y] [C] a l’honneur de réitérer « IN LIMINE LITIS » sa demande de renvoi en fixations d’astreintes de produire, aux fins d’équité du procès garantissant l’égalité des armes dans la présente affaire sur le fondement des articles 3, 11, 145 du Code de Procédure Civile » (en gras et souligné comme dans la Requête).

M. [C] considère que « la Cour de céans n’a pas répondu favorablement aux requêtes déposées par (lui) aux fins d’instruire sur les incidents de mise en état, portant une appréciation de nature à faire douter de son impartialité » (en gras comme dans la Requête). « Dès connaissance de la cause de récusation en raison du flagrant déni de justice de nature à faire douter de l’impartialité de la Cour, l’appelant fait immédiatement recours en renvoi (récusation) pour suspicion légitime » (en gras et souligné comme dans la Requête).

M. [C] considère que, le 11 janvier 2023, la cour a, sur ses demandes liminaires, pris une décision de rejet en s’abstenant « de prendre toutes les mesures d’instruction utiles nécessaires compte tenu de l’incident de mise en état et de l’obstruction de la partie adverse d’apporter son concours à la manifestation de la Vérité justifiant un renvoi en fixation d’astreintes de produire aux fins d’équité du procès garantissant l’égalité des armes, constituant un cas d’espèce de flagrant déni de justice en portant ainsi une appréciation de nature à faire douter de son impartialité dans la phase suivante du procès dans cette affaire ».

M. [C] fait référence à l’article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ainsi qu’à ses articles 8 et 14, en outre à l’article 1er des Conventions internationales de l’OIT 135 et 98, et à l’article 11 de la Convention internationale de l’OIT n°87.

Le ministère public est d’avis que la requête soit rejetée.

Sur ce

Sur la récusation

A titre liminaire, il est précisé, à toutes fins, qu’il n’existe aucun lien autre que d’homonymie entre le président des audiences des 2 novembre 2022 et 11 janvier 2023 (M. [Z] [S]), et le conseil de la société Logware informatique, aux droits de laquelle est venue, selon M. [C], la société Extia (Me [F] [S]).

Aux termes des articles 341 du code de procédure civile et L. 111-6 du code de l’organisation judiciaire, sauf disposition particulière, la récusation d’un juge est admise pour les causes suivantes :

1° Si lui-même ou son conjoint a un intérêt personnel à la contestation ;

2° Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l’une des parties ;

3° Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l’une des parties ou de son conjoint jusqu’au quatrième degré inclusivement ;

4° S’il y a eu ou s’il y a procès entre lui ou son conjoint et l’une des parties ou son conjoint ;

5° S’il a précédemment connu de l’affaire comme juge ou comme arbitre ou s’il a conseillé l’une des parties ;

6° Si le juge ou son conjoint est chargé d’administrer les biens de l’une des parties ;

7° S’il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l’une des parties ou son conjoint ;

8° S’il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l’une des parties ;

9° S’il existe un conflit d’intérêts, au sens de l’article 7-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. (souligné par nous)

L’article 344 du même code précise :

La demande de récusation ou de renvoi pour cause de suspicion légitime est portée devant le premier président de la cour d’appel. Elle est formée par acte remis au greffe de la cour d’appel.

Lorsque la cause justifiant la demande est découverte à l’audience, la demande est formée par déclaration consignée par le greffier dans un procès-verbal, qui est adressé sans délai au premier président. Une copie en est conservée au dossier.

La demande doit, à peine d’irrecevabilité, indiquer les motifs de récusation ou de renvoi pour cause de suspicion légitime et être accompagnée des pièces justificatives.

Il est délivré récépissé de la demande. (souligné par nous)

La requête de M. [C], qui respecte ces dispositions, est donc recevable.

Cela étant, force est de constater que M. [C], dans la Requête, ne vise aucun des motifs de récusation expressément prévus par la loi, rappelés ci-dessus.

Il appartient au juge saisi de la requête en récusation s’il peut exister une autre cause, s’agissant notamment de s’assurer de l’impartialité du juge.

A cet égard, la juridiction du premier président est d’avis qu’il importe non seulement que la justice soit rendue de manière impartiale mais comme étant perçue pour l’avoir été.

En l’occurrence, la juridiction du premier président se trouve face à une absence totale d’éléments permettant d’envisager un manque d’impartialité, avéré ou perceptible.

En effet, il convient tout d’abord que l’affaire avait été initialement appelée à l’audience du 22 novembre 2022 mais renvoyée, à la demande de M. [C], qui avait indiqué ne pas avoir reçu les conclusions et pièces de son contradicteur alors qu’il se défend seul. En d’autres termes, le renvoi avait précisément pour but de permettre à M. [C] de préparer sa défense, observation faite au demeurant que, dans l’affaire en cause, c’est lui l’appelant.

A l’audience du 11 janvier 2023, M. [C] a déposé ses conclusions, qui ont été visées par le greffe et sollicité un renvoi au motif que l’affaire n’aurait pas été en état.

A cet égard, la cour doit rappeler que, la procédure étant orale, il n’existe pas de phase de mise en état de la procédure au sens strict.

Il appartient certes au juge de s’assurer que les éléments du débat ont été débattus contradictoirement.

En l’espèce, sans qu’il soit besoin de relever que l’affaire est particulièrement ancienne et que M. [C] a disposé de maintes occasions de solliciter et obtenir les conclusions et pièces de la partie opposée, force est de relever que c’est M. [C] lui-même qui s’est mis en situation de mettre le juge dans l’impossibilité d’apprécier s’il avait effectivement été destinataire des conclusions et pièces de son contradicteur.

En effet, alors que M. [C] avait d’emblée, à l’appel des causes (son affaire était la huitième inscrite au rôle), indiqué que l’affaire n’était pas en état, le président de l’audience lui avait indiqué qu’il allait examiner « les demandes du dossier » et, M. [C] disant « que le dossier n’est pas en état ainsi » et demandant un renvoi, « décidé que la demande (de) renvoi sera examinée lorsque le dossier passera à son tour ».

A ce moment, M. [C] a indiqué qu’il allait solliciter la récusation de M. [Z] [S], le président d’audience et aller voir le directeur de greffe.

De fait, ainsi qu’en atteste le procès-verbal de récusation dressé par M. le chef de service responsable du greffe civil et social, M. [C] est allé déposer, en six exemplaires, la Requête, dans les minutes qui ont suivi.

La juridiction ne peut que relever que c’est à 13h49 que M. [C] a déposé la Requête alors que l’audience était à 13h30.

En d’autres termes, compte tenu de la longueur de la Requête et des pièces annexées, du soin que M. [C] avait pris d’en établir six exemplaires, reliés, force est de constater que la Requête avait été préparée avant même l’audience et que M. [C] n’entendait pas que l’affaire puisse être examinée par la cour.

Ce refus caractérisé est démontré, en tout état de cause, par la circonstance que, alors que rien n’avait été décidé, sinon d’appeler l’affaire, comme il est d’usage, pour débattre, dans l’ordre du rôle (encore une fois, c’était la huitième affaire inscrite), M. [C] n’a pas attendu que puisse être discuté l’incident de ‘mise en état’ qu’il entendait soulever et n’a laissé aucune chance à la cour de ne serait-ce que décider du renvoi de l’affaire.

Ainsi, la Requête de M. [C] est dépourvue de tout fondement et doit être rejetée.

M. [C] supportera les éventuels dépens de la présente procédure.

Il est de bonne justice que le contradicteur et les magistrats ayant composé la chambre 6-9 à l’audience du 11 janvier 2023 soient informés de la présente décision par la copie qui leur en sera adressée.

Sur l’amende civile

Aux termes de l’article 32-1 du code de procédure civile, celui « qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 € sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés ».

Il résulte directement des considérations qui précèdent que M. [C], en présentant une Requête aux fins de récusation qui n’est fondée ni en droit ni en fait, a agi de manière abusive.

Il faut encore relever ici que l’affaire est particulièrement ancienne, que M. [C] a fait le choix de se défendre seul (il a bénéficié par le passé de l’assistance d’un conseil au titre de l’aide juridictionnelle), qu’il ne peut prétendre oser mettre en cause un manque d’impartialité d’un juge alors qu’il a par anticipation préparé une requête à cette fin et n’a pas même pris le temps d’attendre que la demande de renvoi qu’il souhaitait formuler ait pu être entendue et débattue.

Si M. [C] est libre de choisir les moyens de sa défense, encore lui appartient-il de considérer qu’il est le seul responsable de ses choix et que le refus de soumettre au juge le litige alors qu’il en est, peut-être à raison d’ailleurs, à l’origine s’agissant de la procédure d’appel, en saisissant toute occasion de retarder la possibilité pour le juge de statuer, y compris sur une simple demande de renvoi, caractérise un abus de droit qui doit être sanctionné.

La juridiction du premier président ne peut que noter que la pièce annexée par M. [C] à la Requête est la copie d’un courriel adressé par son ancien avocat à Me [F] [S], en date du 28 octobre 2022, dans lequel il est précisé que M. [C] désire plaider lui-même ses dossiers, a fait le tri des pièces que ce conseil souhaitait lui remettre et « a refusé de prendre (les) conclusions (de Me [S]), notamment du au fait qu’il ne connaissait pas la société », étant observé que ces conclusions étaient au nom de Extia vu l’intitulé de ce courriel.

En d’autres termes, M. [C] multiplie les artifices et les incidents de toute nature pour retarder l’examen d’une affaire dont, encore une fois, il est, à hauteur d’appel, à l’origine en tant qu’appelant.

Un tel comportement, aussi dilatoire qu’abusif, doit être sanctionné et M. [C] sera condamné à une amende civile d’un montant qui sera justement fixé à 3 000 euros.

Le greffe adressera une copie exécutoire de la présente décision au Trésor public, précision donnée que M. [C] est né le 25 novembre 1970 à [Localité 3] (93).

PAR CES MOTIFS

Rejetons la requête en récusation de M. [Y] [C] ;

Condamnons M. [Y] [C] à une amende civile d’un montant de 3 000 euros ;

Disons que le greffe adressera une copie exécutoire de la présente décision au Trésor public ;

Condamnons M. [Y] [C] aux dépens de la présente procédure ;

Disons que le greffe adressera une copie de la présente décision à Me [F] [S] ainsi qu’à M. le président [Z] [S], M. le conseiller [X], Mme la conseillère [P] ;

Disons que la présente décision peut faire l’objet d’un pourvoi dans les quinze jours de sa notification par le greffe.

La Greffière, Le Président,

 


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