Droits des héritiers : 3 mai 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/06020

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Droits des héritiers : 3 mai 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/06020

3 mai 2023
Cour d’appel de Rennes
RG n°
20/06020

1ère Chambre

ARRÊT N°118/2023

N° RG 20/06020 – N° Portalis DBVL-V-B7E-RETI

Mme [M] [G] [KD] [YI] [B] veuve [XK]

C/

M. [RM] [LM] [J] [T]

M. [NU] [TU]

M. [F], [S] [YI] [V]

Mme [O] [K] [Z] [V]

M. [E] [V]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 03 MAI 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre entendue en son rapport,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 14 fFévrier 2023

ARRÊT :

réputé contradictoire, prononcé publiquement le 03 mai 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [M] [G] [KD] [YI] [B] veuve [XK]

née le 14 Mars 1945 à [Localité 5] (29)

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentée par Me Nathalie TROMEUR de la SCP LARMIER – TROMEUR-DUSSUD, avocat au barreau de QUIMPER

INTIMÉS :

Monsieur [F], [S] [YI] [V]

né le 27 Mai 1940 à [Localité 5] (29)

[Adresse 10]

[Localité 5]

Représenté par Me Laetitia DEBUYSER de la SCP DEBUYSER/PLOUX, avocat au barreau de QUIMPER

Madame [O] [K] [Z] [V]

née le 24 Février 1945 à [Localité 18] (29)

[Adresse 10]

[Localité 5]

Représentée par Me Laetitia DEBUYSER de la SCP DEBUYSER/PLOUX, avocat au barreau de QUIMPER

Monsieur [E] [V]

né le 14 Mars 1970 à [Localité 16] (29)

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Laetitia DEBUYSER de la SCP DEBUYSER/PLOUX, avocat au barreau de QUIMPER

Monsieur [RM] [LM] [J] [T]

né le 23 Août 1955 à [Localité 16] (29)

[Adresse 3]

[Localité 7]

Régulièrement assigné par acte d’huissier délivré le 24 février 2021 à sa personne, n’a pas constitué

Monsieur [NU] [TU]

né le 14 Juillet 1961 à [Localité 17] (29)

[Adresse 4]

[Localité 6]

Régulièrement assigné par acte d’huissier délivré le 25 février 2021 à personne présente au domicile, n’a pas constitué

FAITS ET PROCÉDURE

[J] [W], veuf de [YI] [P] [T], est décédé à [Localité 16] (29), le 13 avril 2019, laissant sa nièce Mme [M] [B] épouse [XK], comme héritière.

Il avait fait trois testaments, dans les termes suivants, déposés à l’étude de Me [D] [U], notaire à [Localité 14]’:

-le 25 août 2018′: «’ceci est mon testament.

Je soussigné [W] [J], né à [Localité 5], Le 22 mai 1937 veuf de [YI] [P] [T] demeurant [Adresse 9], lègue à :

[RM] [T], né à [Localité 16] le 23 Août 1955 demeurant [Adresse 3] ou a défaut ses héritiers 1/3 des biens meuble et immeuble de ma succession et une somme de dix mille euros (10 000 €) ;

[F] né à [Localité 5] le 27 mai 1940 et à [O] [H] son épouse né à [Localité 18] le 24 février 1945 demeurant [Adresse 10] à [Localité 5], ou à défaut leurs héritier une somme de cinq milles euros (5,000) pour une moitié chacun,

le solde de mes biens meubles et immeubles dépendant de ma succession a parts égales a [NU] [TU], né à [Localité 17] le 14 juillet 1961, demeurant [Adresse 10] ou a défaut ses héritiers

[M] [B] né à [Localité 5] le 14 mars 1945 épouse [A] [XK] demeurant [Adresse 2] ou a défaut ses héritiers

Fait à [Localité 5] le 25 Aoûte 2018 ».

-le 22 septembre 2018′: « Je soussigne [J] [W], [Adresse 9] déclare vouloir modifier mon testament depose à l’étude de [Localité 13] comme suit ;

La somme de dix mille euros leguee a [RM] [T] en plus de ses bien reviendra a [F] et a [O] son épouse en plus des cinq milles à eux legues dans legues dans le premier testament a défaut a leurs héritiers,

Le tout net de frais

Je legue egalement à [E] né a [Localité 16] le 14 mars 1970 [Adresse 1] mille cinq cents euros, le tout net de frais

Les pompes funèbres seront Failler [Localité 13].

fait a [Localité 5] le 22 septembre 2018 ».

-le 6 octobre 2018 :

«’ceci est mon testament

je soussigné [W] [J], né à [Localité 5] 22 mai 37, [Adresse 1] à [Localité 5] lègue à

[F] [V] et [O] son épouse la somme de quinze mille euro 15 000

[E] [V], [Adresse 9] 1 500 € milles cinq cents euros

le reste de mes Bien meuble et immeuble dans les proportions d’un tiers (1/3) à

éliane [B] épouse [A] [XK] [Adresse 2]

[RM] [T] [Adresse 3]

[NU] [TU] [Adresse 4]

ou défaut, leurs Héritiers

Je révoque toutes dispositions testamentaire antérieurs

Fait (illisible) à [Localité 5], Le 6 octobre 2018 ».

Les époux [F] et [O] [V] étaient les voisins de [J] [W]. M. [E] [V] est leur fils.

M. [RM] [T] et M. [NU] [TU] sont les neveux de l’épouse de [J] [W].

Le 8 février 2019 Mme [B] a saisi le juge des tutelles de Quimper d’une demande de placement sous tutelle de [J] [W]. Par ordonnance du 19 mars 2019 le juge des tutelles a placé [J] [W] sous sauvegarde de justice et a désigné Mme [I], mandataire judiciaire à la protection des majeurs, comme mandataire spécial.

Les 2, 12 et 18 décembre 2019, Mme [B] a assigné les époux [V], M. [E] [V] (les consorts [V]), M. [RM] [T] et M. [NU] [TU] devant le tribunal judiciaire de Quimper en ouverture des opérations de partage et en nullité des testaments.

Par jugement du 1er décembre 2020 le tribunal judiciaire de Quimper a’:

-dit n’y avoir lieu à prononcer la nullité des trois testaments de [J] [W],

-ordonné l’ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de la succession de [J] [W],

-commis Me [X] [R], notaire à [Localité 15], pour les réaliser,

-rappelé les conditions du partage judiciaire,

-dit que chaque partie supportera la charge des frais irrépétibles qu’elle a engagés,

-condamné Mme [B] à payer aux consorts [V] la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-ordonné l’emploi des dépens en frais généraux de partage, supportés par chacun selon sa part dans l’indivision,

-rejeté toute autre demande,

-ordonné l’exécution provisoire.

Le 8 décembre 2020 Mme [B] a fait appel de tous les chefs du jugement à l’exception des chefs relatifs au partage judiciaire.

Courant 2021, elle a saisi le procureur de la République de Quimper d’une plainte à l’encontre de Mme [V] pour abus de faiblesse et faux en écritures au préjudice de [J] [W].

Mme [B] expose ses moyens et ses demandes dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées le’ 4 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé.

Elle demande à la cour de’:

-réformer le jugement des chefs dont il a été fait appel,

-statuant à nouveau,

-ordonner le rejet des pièces numérotées 24, 28 et 29 communiquées le 2 août 2022 par les intimés, en application des dispositions de l’article 9 du code de civil,

-prononcer, par application des dispositions de l’article 901 du code civil, la nullité des testaments attribués à [J] [W], en date des 25 août 2018, 22 septembre 2018 et 6 octobre 2018,

-subsidiairement, désigner un médecin-expert spécialisé, avec mission de :

*prendre connaissance des pièces et du dossier médical de [J] [W],

*se faire remettre l’entier dossier médical de celui-ci,

*se rapprocher de ses médecins traitants : généralistes, spécialistes, mais également des autres personnels paramédicaux de [12] de [Localité 16], de Mme [Y], directrice de l’EHPAD *décrire autant que possible l’état neurologique et mental de l’intéressé au cours des 6 mois ayant précédé son décès, indiquer son évolution, voire sa dégradation en caractérisant les pathologies dont il aurait pu être atteint,

*dire si cet état de santé a pu altérer ses facultés intellectuelles, notamment au point d’altérer, voire d’abolir, son consentement, ou de le rendre inapte à comprendre ou à mesurer la portée des testaments établis les 25 août, 22 septembre et 6 octobre 2018,

*préciser si cette situation aurait pu, dès le mois de juin 2018, le rendre bénéficiaire d’une mesure de protection,

-débouter les intimés de leurs demandes,

-condamner in solidum les intimés en tous les dépens et à lui payer la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les consorts [V] exposent leurs moyens et leurs demandes dans leurs conclusions déposées et notifiées le’16 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé.

Ils demandent à la cour de’:

-déclarer irrecevables les demandes de Mme [B],

-la débouter de ses demandes,

-confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

-condamner Mme [B] aux entiers dépens et à leur payer la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [RM] [T] et M. [NU] [TU], régulièrement assignés les 24 et 25 février 2021, n’ont pas constitué avocat.

MOTIFS DE L’ARRÊT

1) Sur la demande de rejet des pièces n°s 24, 28 et 29 communiquées le 2 août 2022 par les consorts [V]

Mme [B] demande à la cour de rejeter les pièces n°s 24, 28 et 29 communiquées le 2 août 2022 par les consorts [V], sur le fondement de l’article 9 du code civil.

La pièce 24 est un certificat du docteur [N] du 23 mai 2019, dans lequel il expose les pathologies présentées par [J] [W] pendant son hospitalisation dans le service USLD de [12] de [Localité 16] du 20 février au 13 avril 2019, mentionne que celui-ci a spontanément désigné par écrit Mme [V] comme personne digne de confiance, qu’elle passait le voir et prenait soin de lui de longue date, comme pour son épouse, et qu’il l’a constaté à l’occasion d’expertises aux fins de placement sous protection de l’épouse de [J] [W] réalisées en 2011 et 2014.

La pièce 28 est un certificat du même médecin du 22 mars 2019 (avant le décès de [J] [W]) dans lequel il expose qu’il soigne [J] [W] depuis son hospitalisation, décrit ses pathologies et expose que [J] [W] a choisi spontanément Mme [V] comme personne de confiance, certificat établi à la demande de Mme [V].

La pièce 29 est la photographie, prise le 20 février 2019, d’une ardoise complétée par [J] [W], pour la désignation de Mme [V] comme personne de confiance, transmise par les services de l’hôpital, à la demande du docteur [N].

L’article 9 du code civil dispose’: «’Chacun a droit au respect de sa vie privée.

Les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée : ces mesures peuvent, s’il y a urgence, être ordonnées en référé.’»

Mme [B] soutient que la rédaction et la communication de ces pièces constituent un manquement aux dispositions de l’article 4 du code de déontologie médicale sur le secret médical.

L’article L1110- 4 ‘ V 3° du code de la santé publique sur le secret médical permet de lever le secret médical dans le cas où les informations concernant une personne décédée sont délivrées à ses ayants droit, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès. Les consorts [V], qui sont les successeurs testamentaires de [J] [W], sont donc légitimes à avoir sollicité et obtenu du docteur [N] les pièces litigieuses, alors qu’il n’est pas prétendu par Mme [B] que son oncle s’y était opposé de son vivant.

Par ailleurs, le droit au respect de la vie privée de [J] [W] ne s’oppose pas à ce que ces pièces soient versées à la présente procédure. En effet, d’une part, elles sont nécessaires à la défense de leurs droits par les intimés et d’autre part, l’atteinte au respect de la vie privée de [J] [W] est limitée et proportionnée aux intérêts défendus par les intimés. A cet égard la cour relève que Mme [B] elle-même verse à la procédure des certificats médicaux qui concernent la situation, la santé et les soins reçus par son oncle.’

La demande de Mme [B] sera donc rejetée.

2) Sur la demande d’annulation des testaments

Mme [B] dresse ainsi le portrait de [J] [W], son oncle : un vieillard fragilisé, qui vivait reclus sur lui-même et présentait un éthylisme chronique, vivait dans des conditions d’hygiène plus que douteuses, frustre, d’un très faible niveau intellectuel et ne sachant pas écrire.

Elle soutient que’Mme [V] avait une emprise sur [J] [W], en raison de la faiblesse et de l’isolement de celui-ci, qu’elle s’est occupée de lui par intérêt et qu’ayant été clerc de notaire elle a préparé ou fait préparer des testaments manuscrits et a amené [J] [W] à les signer. Elle ajoute que [J] [W] était dans l’incapacité d’établir les testaments car il était atteint d’une récidive du cancer de la langue causant une élocution difficile, avait une maladie qui rendait l’écriture impossible comme étant atteint d’un trouble neuro-dégénératif lié à un alcoolisme chronique.

Elle prétend qu’il était mentalement incapable de consigner par écrit ses dernières volontés, qu’il était depuis au moins le 25 juillet 2018 incapable de consentir à un acte de disposition et que sa signature a été imité sur un testament.

Bien qu’elle critique la forme des testaments olographes, Mme [B] ne fonde pas sa demande de nullité sur les dispositions de l’article 970 du code civil.

Elle fonde sa demande de nullité sur les dispositions de l’article 901 du code civil’: « Pour faire une libéralité, il faut être sain d’esprit. La libéralité est nulle lorsque le consentement a été vicié par l’erreur, le dol ou la violence ».

Elle doit rapporter la preuve que [J] [W] n’était pas sain d’esprit au moment de la rédaction des trois testaments, les 25 août, le 22 septembre et le 6 octobre 2018.

A l’appui de sa demande de nullité elle produit plusieurs certificats médicaux et attestations.

L’attestation de son époux comporte un portrait de [J] [W] et de ses conditions de vie, affirme qu’il ne savait pas écrire plus d’une ligne et «’encore en la copiant’» et déclare que les testaments ne sont pas de sa main. Elle correspond exactement aux conclusions de l’appelante et ne présente pas suffisamment de garantie d’impartialité. Par ailleurs, elle n’est pas contradictoire avec le fait que [J] [W] a effectivement recopié ou écrit le texte des testaments, ce qui n’est pas contesté, et est démentie sur l’absence de volonté de [J] [W] par les attestations des personnes qui le côtoyaient régulièrement, ce qui n’est pas le cas du témoin, vivant en région parisienne et ne venant que ponctuellement à [Localité 5].

L’attestation de M. [SK] évoque l’alcoolisme de [J] [W], un défaut d’hygiène et son élocution peu intelligible, ce qui n’est pas contesté.

L’attestation de Mme [T] fait état des difficultés de [J] [W] à s’occuper des papiers administratifs et rapporte les conditions d’une hospitalisation de [J] [W] à la suite d’une chute, et du placement en retraite de son épouse, à l’aide de tiers. Ces deux attestations ne révèlent pas l’incapacité de [J] [W] d’exprimer ses dernières volontés.

Les certificats médicaux du docteur [C], des 5 février, 24 mai et 26 novembre 2019, ont été dressés à l’occasion de la demande de mise sous protection légale de [J] [W]. Ils décrivent l’état de [J] [W] à la date du 4 février 2019. A cette date il présentait des troubles cognitifs majeurs. Il était affecté de la maladie d’Alzheimer, d’hypertension, d’éthylisme chronique, du syndrôme de Korsakoff, d’hypothyroïdie, d’insuffisance cardiaque et d’une récidive d’un cancer de la bouche.

Les considérations du médecin, selon lesquelles en 2018 [J] [W] était incapable de rédiger des documents en comprenant ce qu’il écrivait et signait et est spolié par la personne qui s’occupe de lui, ne résultent pas de ses propres constatations et lui ont été manifestement suggérées.

Le certificat d’un cardiologue, du 6 avril 2018, consulté par [J] [W] à l’occasion d’un séjour à l’hôpital pour des problèmes digestifs, rappelle qu’il présente des antécédents de carcinomes de la cavité buccale et de la maladie de Dupuytren. Aucun renseignement n’en ressort sur l’état mental et les capacités de [J] [W].

Aucun de ces éléments ne démontre que [J] [W] était entre août et octobre 2018 dans l’incapacité d’établir les testaments litigieux, alors qu’il ressort des pièces versées à la procédure par les intimés, qu’au contraire, il était encore capable de s’exprimer et d’écrire.

Mme [V], lors de son audition par les services de la gendarmerie d'[Localité 11], le 6 juin 2021 (soit après le jugement), a exposé qu’elle avait connaissance des 3 testaments, qu’elle était présente quand [J] [W] a rédigé le 3ème testament, qu’elle n’a pas écrit elle-même les testaments, que [J] [W] lui a dit ce qu’il voulait y mettre et qu’elle a reformulé ce qu’il devait écrire, qu’il savait très bien ce qu’il voulait et qu’elle ne lui a pas dicté ce qu’il fallait mettre. Elle ajoute qu’il a remis lui-même les testaments à l’étude du notaire et qu’il a fait 3 testaments successifs parce qu’il a changé d’idée.

[J] [W] vivait seul à son domicile, depuis le décès de son épouse en 2014, jusqu’à son hospitalisation courant janvier 2019.

Il ressort des nombreuses attestations concordantes versées à la procédure, émanant de proches de [J] [W], membres de sa famille, voisins, connaissances, que les époux [V], dont la maison est proche de celle de [J] [W], prenaient soin depuis de longues années de [J] [W] et de son épouse, et ont permis son maintien à domicile et que [J] [W], qui tenait à rester à son domicile et à son indépendance, appréciait l’aide apportée par ses voisins. Il était sociable, lucide et cohérent et capable de tenir une conversation normale avant sa dernière hospitalisation. Les témoins n’ont pas constaté d’altération de son raisonnement ou de sa mémoire. Un témoin ajoute avoir entendu [J] [W] se plaindre du manque de relation avec Mme [B], qui quand elle venait à [Localité 5], ne rendait pas nécessairement visite à son oncle.

L’infirmière qui s’est occupée de [J] [W] avant son hospitalisation atteste également qu’il était lucide sur son état de santé et cohérent.

Le docteur [L], médecin traitant de [J] [W] depuis 30 ans, atteste que jusqu’à son hospitalisation le 4 janvier 2019, il était capable d’exprimer sa volonté, cohérent et ne présentait pas de troubles démentiels détectables.

Le docteur [N], qui était le médecin de [J] [W] à l’hôpital de [Localité 16], du 20 février au 13 avril 2019, atteste, le 22 mars et le 23 mai 2019, que si la pathologie de [J] [W] limitait la phonation et l’obligeait à s’exprimer au moyen d’une ardoise, il était capable d’exprimer clairement sa volonté. La photographie de l’ardoise, complétée par [J] [W], sur laquelle il a écrit le nom de [O] [V], comme personne digne de confiance, à son entrée à l’hôpital, est versée à la procédure, attestant qu’il pouvait écrire, même difficilement.

Les 3 testaments manuscrits versés à la procédure sont manifestement de la même main, et ont été écrits d’une écriture hésitante, approximative quant à l’orthographe, et similaire aux quelques mots rédigés sur l’ardoise dont il est question ci-dessus. L’écriture n’est pas la même que celle des messages (pièce 11) attribués à Mme [V] et versés à la procédure par l’appelante.

De l’ensemble de ces pièces il ressort que, d’une part, [J] [W] disposait lors de la rédaction des testaments et notamment de celui daté du 6 octobre 2018, qui a révoqué les dispositions antérieures, des capacités mentales lui permettant de décider du sort de ses biens après son décès et qu’il a bien lui-même écrit les testaments litigieux.

Le fait qu’il a écrit ces testaments avec l’aide de Mme [V], avec laquelle il avait noué des liens anciens et étroits et en qui il avait manifestement confiance, ne démontre ni qu’il a agi sous son emprise ni qu’il a été empêché d’exprimer sa propre volonté.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de nullité des testaments.

Le jugement sera également confirmé pour avoir rejeté la demande d’expertise, une telle mesure n’étant pas utile au regard des pièces versées à la procédure, qui permettent d’apprécier la demande de nullité.

3) Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Le jugement, qui a intégré les dépens dans les frais de partage et condamné Mme [B] à payer une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, sera confirmé de ces deux chefs.

Mme [B], partie perdante en appel, sera condamnée aux dépens et sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

Il n’est pas équitable de laisser à la charge des consorts [V] les frais qu’ils ont exposés qui ne sont pas compris dans les dépens et il leur sera alloué la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déboute Mme [M] [B] de sa demande de rejet des pièces n°s 24, 28 et 29 communiquées le 2 août 2022 par M. [F] [V], Mme [O] [V] et M. [E] [V],

Confirme les chefs, dont il a été fait appel, du jugement rendu le 1er décembre 2020 par le tribunal de grande instance de Quimper,

Déboute Mme [M] [B] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

La condamne aux dépens exposés en appel et à payer à M. [F] [V], Mme [O] [V] et M. [E] [V] la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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