Droits des héritiers : 16 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/04902

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Droits des héritiers : 16 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/04902

16 mai 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
21/04902

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 8

ARRÊT DU 16 MAI 2023

(n° / 2023, 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/04902 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDJB4

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 23 Février 2021- Juge commissaire du tribunal de commerce de PARIS – RG n° P201901639

APPELANTE

Monsieur [O] [B], expert-comptable,

Né le [Date naissance 5] 1947 à [Localité 13] ( ALGÉRIE)

De nationalité française

Demeurant [Adresse 6]

[Localité 9]

Représenté par Me Audrey LAZIMI de la SELEURL AUDREY LAZIMI AVOCAT, avocate au barreau de PARIS, toque : L0245,

Assisté de Me Richard RONDOUX de la SELARL BRG, avocat au barreau de PARIS, toque : R095,

INTIMÉES

S.C.I. DE LA GARE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés d’ORLÉANS sous le numéro 421 169 384,

Dont le siège social est situé [Adresse 1]

[Localité 4]

S.E.L.A.R.L BCM, prise en la personne de Maître [J] [K], ès qualités

Dont l’étude est située [Adresse 8]

[Localité 10]

S.E.L.A.F.A. MJA, prise en la personne de Maître [G] [V], ès qualités,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 440 672 509,

Dont l’étude est située [Adresse 3]

[Localité 11]

Représentées par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocate au barreau de PARIS, toque : B0653,

Assistées de Me Dominique BOUTIERE de l’AARPI SKDB Associés, avocate au barreau de PARIS, toque : L0168,

PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE :

S.E.L.A.R.L BCM, prise en la personne de Maître [J] [K], ès qualités

Dont l’étude est située [Adresse 8]

[Localité 10]

Représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocate au barreau de PARIS, toque : B0653,

Assistée de Me Dominique BOUTIERE de l’AARPI SKDB Associés, avocate au barreau de PARIS, toque : L0168,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Mars 2023, en audience publique, devant la cour, composée de :

Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère,

Madame Constance LACHEZE, conseillère,

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l’audience par Madame Florence DUBOIS-STEVANT dans le respect des conditions prévues à l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL

ARRÊT :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE:

M. [C] [Z] exerçait en nom personnel, sous l’enseigne Promoré, une activité de promotion immobilière. Il est décédé le [Date décès 2] 2016.

M. [B] intervenait auprès de M. [Z] en tant que comptable et conseiller financier. En 2018, la comptabilité du groupe a été confiée au cabinet Cogeed.

Par jugements du 25 juin 2019, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la succession de M. [Z] – comprenant son épouse, Mme [M] [T] et son fils, M. [H] [Z] – et des sociétés du groupe, à savoir les sociétés La Hutterie et Le Renouveau, les SCI La Sulpicienne, Les Jardins de [Localité 4], Méliès [Localité 14], Du Moulin, Promoloire Amilly 2, Montrep, La Nemourienne, [Localité 12], [Localité 12] Pelletier, Amilly transit, de la Gare et Pyrénées et la SNC Patripro. Par ces jugements, le tribunal a également désigné la SELARL BCM, prise en la personne de Me [K], en qualité d’administrateur judiciaire et la SELAFA MJA, prise en la personne de Me [V], en qualité de mandataire judiciaire.

Le 2 août 2019, M. [B] a déclaré des créances d’honoraires au passif des sociétés du groupe, de Mme [T] et de M. [H] [Z] pour un montant total de 9.762.218,91 euros.

Ces créances ont été contestées et, par ordonnances du 31 décembre 2020, le juge-commissaire les a toutes rejetées.

Par déclarations du 15 janvier 2021, M. [B] a fait appel de chacune de ces ordonnances.

Par jugements du 5 mai 2021, le tribunal a arrêté un plan de redressement par voie de continuation d’une durée de dix ans de chacune des personnes sous procédure, désigné la SELARL BCM, prise en la personne de Me [K], en qualité de commissaire à l’exécution du plan et maintenu la SELAFA MJA, prise en la personne de

Me [V], en qualité de mandataire judiciaire jusqu’à la fin de la procédure de vérification des créances et le compte-rendu de fin de mission.

La SELARL BCM est intervenue volontairement en qualité de commissaire à l’exécution du plan.

Mme [T] est décédée le [Date décès 7] 2022, laissant son fils comme héritier.

La présente procédure a trait à l’appel de l’ordonnance du juge-commissaire ayant rejeté la créance déclarée au passif de la SCI de la Gare pour un montant de 163.040,20 euros.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 11 mars 2023,

M. [B] demande à la cour d’infirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions, de constater l’absence de contestation sérieuse de la créance, d’ordonner son inscription au passif de la SCI de la Gare et son règlement, de condamner solidairement la SCI de la Gare, la SELARL BCM ès qualités et la SELAFA MJA ès qualités à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

M. [B] expose qu’il a collaboré avec M. [Z] à partir de 1978, que leurs relations, fondées sur une confiance mutuelle, et la pratique alors en vigueur, dépourvues de lettres de mission et de contrats écrits, expliquent l’absence de tels écrits, que toutefois il produit des pièces justifiant de la réalité des prestations. Il soutient que ses créances d’honoraires, ainsi justifiées, n’ont pas été remises en cause par M. [Z], qui en a accepté le montant, qu’elles ont été comptabilisées soit en provisions pour factures non parvenues soit en dettes fournisseurs, et que leur existence a résulté d’un accord des parties quant à un report de leur paiement.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 6 février 2023, la SCI de la Gare et les organes de la procédure demandent à la cour de débouter M. [B] de son appel, de mettre hors de cause la SARL BCM prise en la personne de Me [J] [K] en qualité d’administrateur judiciaire, sa mission ayant pris fin, et de la recevoir en son intervention volontaire en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan, de rejeter la demande de M. [B] d’admission de sa créance en raison de la prescription encourue et, à titre subsidiaire, en l’absence du caractère sérieux et justifié de ses demandes, de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, de débouter M. [B] de toutes ses demandes et de le condamner à leur payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

La SCI de la Gare expose qu’au 31 décembre 2017 les dettes comptabilisées envers le cabinet de M. [B] s’élèvent à la somme totale de 6.267.685 euros dont une somme de 2.086.815 euros correspond à des provisions pour des factures non parvenues, dont

64 % des prestations réalisées sont antérieures à 2008, et une autre somme de 4.180.870 euros correspondant à des dettes fournisseurs, dont un montant de 3.420.000 euros dans l’indivision Promodoré constitué de deux écritures de 3.000.000 euros et de 420.000 euros enregistrées onze jours avant le décès de M. [Z] en ” opérations diverses “. Elle soutient que les factures antérieures à deux ans à compter de la déclaration de créances sont prescrites sur le fondement de l’article L. 218-2 du code de la consommation, subsidiairement que celles antérieures à cinq ans à compter de la déclaration de créances sont prescrites en vertu du droit commun, que parmi les autres factures, les créances correspondant à des factures qualifiées de ” non parvenues “, qui n’ont dès lors jamais été établies ni émises, doivent être rejetées en l’absence de preuve de la matérialité de l’existence de ces créances, que les créances correspondant à des provisions sur honoraires et non prescrites ne sont pas davantage justifiées alors que M. [B] les a lui-même inscrites sur les comptes de ses clients, qu’aucune lettre de mission ni mandat n’ont existé, qu’au surplus des paiements venant en déduction des créances déclarées au passif de certaines sociétés n’ont pas été pris en compte par M. [B], que ce dernier ne justifie pas de certaines prestations pourtant facturées pour des montants importants (SCI [Localité 12] Pelletier, SNC Patripro), que la facture émise le 15 avril 2016 pour 3.420.000 euros quelques mois avant le décès de M. [Z] n’a pas été portée à la connaissance de M. et Mme [Z] et qu’elle repose sur un protocole élaboré par M. [B] seul qui n’a jamais été signé, que, globalement, en l’absence de mission et de facturation détaillée il est impossible de savoir à quoi correspondent les montants réclamés par M. [B]. S’agissant de sa créance, fondée sur une facture établie par M. [B] le 5 mars 2019 pour un montant de 163.040,82 euros, elle expose que les factures non parvenues ont été comptabilisées par M. [B] au 31 décembre 2017 pour un montant de 148.257 euros, sur une période de facturation allant de 2002 à 2016, et que le montant de sa créance pour 163.040,82 euros ne s’explique alors qu’elle a réglé une somme globale de 53.112,26 euros. Elle soutient que sa réalité n’est pas établie faute de justification des imputations des règlements reçus auxquelles M. [B] a lui-même procédé pour se régler et justifier les compensations qui s’imposaient et ce, alors qu’au sein du groupe les sociétés générant des revenus supportaient la charge des sociétés n’en générant pas.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 16 mai 2023.

SUR CE,

Il convient au préalable de mettre hors de cause la SARL BCM prise en la personne de

Me [J] [K] en qualité d’administrateur judiciaire, sa mission ayant pris fin, et de la recevoir en son intervention volontaire en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan.

L’article L. 624-2 du code de commerce dispose qu’au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge-commissaire décide de l’admission ou du rejet des créances ou constate soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence. Il ajoute qu’en l’absence de contestation sérieuse, le juge-commissaire a également compétence, dans les limites de la compétence matérielle de la juridiction qui l’a désigné, pour statuer sur tout moyen opposé à la demande d’admission.

La créance déclarée au passif de la SCI de la Gare est constituée de factures non parvenues sur une période allant de 2002 à 2016 pour un montant total de 163.040,82 euros.

Pour s’opposer à la demande d’admission de la créance de M. [B] à son passif, la SCI de la Gare soulève la prescription de la créance et l’absence de preuve de la matérialité de l’existence de la créance, les factures non parvenues n’ayant jamais été établies ni émises et les imputations des règlements reçus, auxquelles M. [B] a lui-même procédé pour se régler et justifier les compensations qui s’imposaient, n’étant pas justifiées et ce, alors qu’au sein du groupe les sociétés générant des revenus supportaient la charge des sociétés n’en générant pas.

De telles contestations, qui ont trait à la prescription et à l’existence même de la créance revêtent un caractère sérieux et leur appréciation excède le pouvoir juridictionnel du juge de la vérification des créances de sorte qu’il convient d’infirmer l’ordonnance entreprise, de surseoir à statuer et d’inviter M. [B] à saisir le juge compétent pour faire établir l’existence et le montant de sa créance.

PAR CES MOTIFS,

La Cour statuant contradictoirement,

Met hors de cause la SARL BCM prise en la personne de Me [J] [K] en qualité d’administrateur judiciaire ;

Reçoit en son intervention volontaire la SARL BCM, prise en la personne de Me [J] [K], en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan ;

Infirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Dit que la contestation soulevée par la SCI de la Gare à l’égard de la créance déclarée à son passif par M. [O] [B] ne relève pas des pouvoirs juridictionnels du juge de la vérification des créances ;

Invite en conséquence M. [O] [B] à saisir la juridiction compétente dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt, à peine de forclusion ;

Sursoit à statuer ;

Réserve les dépens et les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile;

Ordonne la radiation de l’affaire du rôle de la cour, dit que l’affaire sera rétablie à l’initiative de la partie la plus diligente et dit qu’en cas de rétablissement de l’affaire, elle sera instruite sous le contrôle du conseiller de la mise en état.

La greffière,

Liselotte FENOUIL

La présidente,

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT

 


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