Droits des héritiers : 16 mai 2023 Cour d’appel de Metz RG n° 20/00874

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Droits des héritiers : 16 mai 2023 Cour d’appel de Metz RG n° 20/00874

16 mai 2023
Cour d’appel de Metz
RG n°
20/00874

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 20/00874 – N° Portalis DBVS-V-B7E-FIYB

Minute n° 23/00106

[K]

C/

[K], [K], [K], [K]

Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de METZ, décision attaquée en date du 05 Février 2020, enregistrée sous le n° 18/01226

COUR D’APPEL DE METZ

1ère CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 16 MAI 2023

APPELANTE :

Madame [X] [K]

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me David ZACHAYUS, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/003443 du 18/06/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)

INTIMÉS :

Madame [F] [K]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat au barreau de METZ

Madame [Z] [K] épouse [N]

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat au barreau de METZ

Monsieur [W] [K]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me Stéphane FARAVARI, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/003748 du 29/06/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)

Madame [Y] [K]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/003745 du 29/06/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)

DATE DES DÉBATS : A l’audience publique du 09 Février 2023 tenue en double rapporteur par Mme Anne-Yvonne FLORES, Présidente de chambre et par Mme Laurence FOURNEL, Conseillère, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés et en ont rendu compte à la cour dans son délibéré, pour l’arrêt être rendu le 16 Mai 2023.

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Cindy NONDIER

COMPOSITION DE LA COUR:

PRÉSIDENT : Mme FLORES, Présidente de Chambre

ASSESSEURS : Mme FOURNEL,Conseillère

Mme BIRONNEAU, Conseillère

ARRÊT : Contradictoire

Rendue publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme FLORES, Présidente de Chambre et par Mme NONDIER, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

[S] [H] [P] veuve [K], dite [H] [K], née le 3 février 1922 à [Localité 9], est décédée le 17 mars 2012 à [Localité 6].

Le certificat collectif d’héritiers n°VI 893/2012 établi le 29 août 2012 par le tribunal d’instance de Metz mentionnait en qualité d’héritiers, outre sa petite-fille Mme [F] [K] venant en représentation de son père [A] [K], décédé le 29 juin 1999, les trois enfants de [H] [K] encore en vie à savoir Mme [Z] [K] épouse [N], M. [W] [K] et Mme [Y] [K].

Par actes d’huissier délivrés le 10 avril 2018, Mme [X] [K], née le 8 mars 1986 à Metz, a fait citer devant le tribunal de grande instance de Metz Mme [F] [K], Mme [Z] [N], M. [W] [K] et Mme [Y] [K], afin notamment de faire modifier le certificat d’hérédité établi le 29 août 2012, de faire désigner un notaire dans le cadre d’une procédure de partage judiciaire et afin de faire condamner Mme [F] [K] à rapporter à la succession de [H] [K] l’ensemble des éléments d’actif dissipés.

Mme [X] [K] a exposé qu’elle est la fille de [A] [K] qui l’a reconnue le 10 mars 1986, mais qu’elle n’a pas été appelée à la succession de [H] [K], sa grand-mère, son existence ayant été dissimulée lors du règlement de la succession par les autres héritiers et particulièrement par sa demi-soeur [F] [K] qui connaissait son existence.

Mme [F] [K], Mme [Z] [N], M. [W] [K] et Mme [Y] [K] ont constitué avocat et ont contesté les prétentions de Mme [X] [K] faisant principalement valoir le fait qu’elles étaient prescrites.

Par jugement du 05 février 2020, le tribunal judiciaire de Metz a :

rejeté le moyen d’irrecevabilité tiré de la prescription de la demande de Mme [X] [K];

déclaré Mme [X] [K] recevable en ses demandes ;

dit que Mme [X] [K], née le 08 mars 1986 à [Localité 5] reconnue par [A] [K] en date du 10 mars 1986, a la qualité d’héritière de [S] [P] veuve [K], décédée le 17 mars 2012, en représentation de [A] [K] décédé,

déclaré irrecevable la demande de Mme [X] [K] tendant à voir le tribunal transmettre le dossier au tribunal d’instance de Metz (tribunal judiciaire) aux fins de modification du certificat collectif d’héritiers VI 893/2012 établi le 29 août 2012 et de désignation d’un notaire aux fins de partage judiciaire ;

l’invité à saisir le tribunal judiciaire par voie de requêtes gracieuses tant de sa demande de rectification du certificat collectif d’héritiers VI 893/2012 du 29 août 2012, conformément aux articles 74 à 77 de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation française dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, que de sa demande en partage judiciaire, conformément aux articles 220 et suivants de la même loi ;

rejeté la demande tendant à voir Mme [F] [K] rapporter les éléments d’actifs à la succession en application de l’article 843 du code civil ;

rejeté la demande d’application de la sanction du recel à Mme [F] [K] ;

débouté Mme [X] [K] de sa demande en dommages et intérêts ;

condamné Mme [F] [K], Mme [Z] [N] née [K], M. [W] [K], Mme [Y] [K] à payer à Mme [X] [K] la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamné Mme [F] [K], Mme [Z] [N] née [K], M. [W] [K], Mme [Y] [K] aux dépens ;

prononcé l’exécution provisoire du jugement.

Sur la prescription, le tribunal a considéré que compte tenu de l’état des relations familiales décrites par les parties et notamment de l’absence de liens entre [X] et [A] [K] au moment du décès de ce dernier et entre [X] et [H] [K], les consorts [K]-[N] n’établissaient pas que Mme [X] [K] avait eu connaissance de son droit à une date antérieure à celle qu’elle reconnaît, soit début 2015.

Il en a déduit que le point de départ de la prescription de cinq ans n’a pu débuter qu’à compter du moment où Mme [X] [K] s’est comportée comme successeur de la défunte et a été informée de ses droits par le notaire chargé de la succession, Me [V], qu’elle a rencontré en mars 2015. Le tribunal a donc retenu que l’action de Mme [X] [K], introduite le 10 avril 2018, n’était pas prescrite.

Sur la qualité d’héritière de Mme [X] [K], le tribunal a considéré qu’il résultait de l’acte de naissance de Mme [X] [K], née le 8 mars 1986 à [Localité 5] qu’elle avait été reconnue par [A] [K] le 10 mars 1986, de sorte qu’elle est héritière de [S] [P] veuve [K] au même titre que Mme [F] [K], en représentation de [A] [K] décédé.

Sur la demande de transmission du dossier au tribunal d’instance, le tribunal a retenu qu’il n’appartenait pas à la juridiction saisie au contentieux d’une demande de reconnaissance de la qualité d’héritier et de recel, de formuler et transmettre la demande de Mme [X] [K] et qu’il incombait à cette dernière de saisir le tribunal judiciaire par voie de requêtes gracieuses tant de sa demande de rectification du certificat collectifs d’héritiers que de sa demande en ouverture de partage judiciaire, sur la base de la présente décision lui reconnaissant la qualité d’héritière d'[S] [P] veuve [K].

Sur l’actif de la succession, le tribunal a considéré qu’il n’y avait pas lieu à rapport d’une quelconque donation, mais à rétablir les droits de chaque héritier conformément au certificat collectif d’héritiers qui sera établi dans le cadre du partage qui sera ordonné à la requête de Mme [X] [K], l’acte de partage et la soulte qui en résultera inévitablement à la charge de Mme [F] [K] bénéficiant de l’exécution forcée aux termes de la loi du 1er juin 1924 précité.

Sur le recel, le tribunal a considéré que les éléments produits par Mme [X] [K] ne permettaient pas d’établir que les défendeurs et particulièrement Mme [F] [K] avaient connaissance de la qualité d’héritière de Mme [X] [K] et de leur intention de dissimuler la réalité pour porter atteinte à ses droits successoraux. Le tribunal a retenu que le recel n’était pas caractérisé et que par conséquent il ne serait pas fait application des sanctions de l’article 778 à l’encontre de Mme [F] [K].

Sur la demande en dommages et intérêts, le tribunal a considéré qu’outre le fait que la dissimulation délibérée qu’elle entendait démontrer n’était pas retenue, Mme [X] [K] n’avait pas explicité un tant soit peu le préjudice invoqué de sorte que sa demande devait être rejetée.

Par déclaration enregistrée auprès du greffe de la cour le 29 mai 2020, Mme [X] [K] a interjeté appel de la décision du tribunal judiciaire de Metz aux fins d’annulation et en tout état de cause annulation du jugement en ce qu’il rejeté la demande tendant à voir Mme [F] [K] rapporter les éléments d’actifs à la succession en application de l’article 843 du code civil, en ce qu’il a rejeté la demande d’application de la sanction du recel à Mme [F] [K] et en ce qu’il a débouté Mme [X] [K] de sa demande en dommages et intérêts.

Par conclusions déposées le 30 novembre 2020, Mme [F] [K], Mme [Z] [N], M. [W] [K] et Mme [Y] [K] ont formé un appel incident.

Par ordonnance du 8 septembre 2022, le conseiller de la mise en état s’est déclaré incompétent pour statuer sur les fins de non-recevoir invoquées par Mme [F] [K], Mme [Z] [N], M. [W] [K] et Mme [Y] [K].

EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS

Par conclusions déposées le 09 novembre 2022, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, Mme [X] [K] demande à la cour de :

faire droit à l’appel et rejeter l’appel incident ;

débouter Mme [Z] [N], M. [W] [K], Mme [Y] [K] et Mme [F] [K] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

infirmer partiellement le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

Vu les dispositions de l’article 778 du code de procédure civile,

condamner Mme [F] [K] à rapporter à la succession de Mme [H] [P] l’ensemble des éléments actif dissipés ainsi que les fruits desdits bien et notamment la somme de 24 086,50 euros ;

condamner Mme [F] [K] pour l’ensemble des biens et sommes dissimulés, par application des dispositions de l’article 778 du code civil, à les rapporter à la succession sans pouvoir prétendre à aucune part dans les objets divertis rappelés ci-avant ;

condamner respectivement chacune des parties défenderesses et intimées au paiement de la somme de 2 000 euros en réparation du préjudice de Mme [X] [K] ;

mentionner que le notaire devra réouvrir les opérations de règlement successoral sur la base desdits éléments et ce avec toutes conséquences en droit ;

confirmer le jugement rendu en ses autres dispositions ;

condamner les parties défenderesses et intimées aux entiers frais et dépens, ainsi qu’au règlement d’une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au profit de Mme [X] [K].

Sur le recel, l’appelante estime que le tribunal n’a pas donné de base légale à sa décision et a dénaturé les faits de la cause. Mme [X] [K] expose que l’héritier ayant dissimulé l’existence d’un cohéritier est sanctionné par la peine du recel et que cette sanction peut être indivisible dès lors qu’il y a plusieurs héritiers fraudeurs et dans la mesure où chacun a eu connaissance du recel commis par l’autre. Elle soutient que Mme [F] [K] ainsi que l’ensemble des cohéritiers ne peuvent prétendre avoir ignoré l’existence de Mme [X] [K], laquelle n’a appris le décès de sa grand-mère paternelle qu’au début de l’année 2015, date à laquelle elle a pu prendre attache avec le notaire en charge de la succession.

Mme [X] [K] indique que Mme [F] [K] était proche de la mère de Mme [X] [K], qu’elle s’était également liée d’amitié avec l’autre fille de cette dernière, qu’elle-même a assisté à des réunions en famille ayant eu lieu entre 1986 et 1989, de sorte que l’intention frauduleuse des héritiers est clairement établie.

Mme [X] [K] estime que c’est par le fait des déclarations mensongères respectives de Mme [Z] [N], de M. [W] [K], Mme [Y] [K] et Mme [F] [K] que Mme [X] [K] n’a jamais été appelée à la succession d'[S] [P]-[K].

Sur l’irrecevabilité de ces prétentions en raison de l’absence d’instance en partage, Mme [X] [K] fait valoir que cette irrecevabilité n’a pas été soulevée dès les conclusions visées à l’article 909 du code de procédure civile et qu’elle est donc elle-même irrecevable.

Sur sa qualité à agir, l’appelante expose que la preuve de la qualité d’héritier s’établit par tous moyens de sorte que la production d’un certificat d’héritier n’est pas une condition substantielle. Elle rappelle que son acte de naissance établit qu’elle a été reconnue par [A] [K] le 10 mars 1986 et qu’elle est donc héritière de [S] [P] veuve [K] au même titre que Mme [F] [K] en représentation de [A] [K] décédé.

Mme [X] [K] soutient être recevable à solliciter que le dispositif de la décision fasse mention du fait que le notaire devra ouvrir à nouveau les opérations de règlement successoral, en ce qu’il s’agit d’une demande accessoire à tout le moins complémentaire à la demande principale conformément aux dispositions de l’article 566 du code de procédure civile.

Enfin Mme [X] [K] fait valoir que sa demande de dommages et intérêts est parfaitement fondée, puisque son préjudice résulte des faits de la cause et des man’uvres employées aux fins de dissimuler sa qualité d’héritière.

Par conclusions déposées le 09 novembre 2022, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, Mme [F] [K], Mme [Z] [N] née [K], M. [W] [K], Mme [Y] [K] demandent à la cour de:

rejeter l’appel de Mme [X] [K], le dire mal fondé ;

recevoir l’appel incident des consorts [K]-[N] et y faire droit ;

En conséquence,

infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau :

Vu les articles 2224 du code civil ;

dire et juger l’action et les demandes formées par Mme [X] [K] prescrites et par conséquent irrecevables ;

Vu l’article 850 du code civil,

constater l’absence d’instance en partage successoral ;

en conséquence, déclarer irrecevables les demandes en rapport formées par Mme [X] [K] ainsi que ses demandes en application de la sanction d’un recel successoral ;

subsidiairement, déclarer irrecevables les demandes de Mme [X] [K] pour défaut de qualité à agir ;

Déclarer irrecevables la demande de réouverture des opérations de règlement successoral dans la mesure où la cour n’est pas saisie d’une telle demande dans la déclaration d’appel;

Plus subsidiairement encore, vu les articles 778 et 843 du code civil,

dire et juger que les intimés n’ont pas dissimulé l’existence de [X] [K] puisqu’ils l’ignoraient de bonne foi ;

rejeter l’ensemble des demandes de Mme [X] [K], les dire mal fondées ;

condamner Mme [X] [K] aux entiers frais et dépens d’instance et d’appel ainsi qu’à payer à chaque intimé une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur la prescription de l’action, Mme [F] [K], Mme [Z] [N], M. [W] [K] et Mme [Y] [K] rappellent que l’action en recel successoral est prescrite par un délai de cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits permettant de l’exercer, selon les dispositions de l’article 2224 du code civil. Les intimés exposent que l’assignation de Mme [X] [K] est intervenue le 10 avril 2018 soit postérieurement au délai de cinq ans à compter du décès d'[H] [K] survenu le 17 mars 2012. Ils estiment que Mme [X] [K] aurait dû avoir connaissance du décès de sa grand-mère, car elle résidait à proximité de son domicile, qu’elle ne s’est pas intéressé à la vie de sa grand-mère et n’entretenait pas de réels liens familiaux avec elle et qu’elle ne justifie d’aucune interruption de la prescription.

Subsidiairement sur l’irrecevabilité des prétentions, les consorts [N]-[K] exposent que l’action en rapport successoral ne peut être réalisée que dans le cadre d’un partage judiciaire, que Mme [X] [K] ne justifie pas d’une requête en partage ni d’une modification du certificat d’héritier et qu’elle n’a donc pas qualité à agir en recel successoral. Les intimés rappellent que Mme [X] [K] n’a pas fait valoir sa qualité d’héritière au décès de son père et ils en déduisent qu’elle ne peut rien réclamer dans la succession de sa grand-mère. Enfin les intimés ajoutent que la demande dans le dispositif des conclusions de l’appelante tendant à « voir mentionner que le notaire devra rouvrir les opérations de règlement successoral sur la base desdits éléments » ne figure pas dans la déclaration d’appel. Ils en déduisent que la cour n’est pas saisie d’une telle demande qui est donc irrecevable.

Plus subsidiairement, sur le rejet des demandes, les consorts [N]-[K] exposent ne pas avoir frauduleusement dissimulé l’existence de Mme [X] [K] lors du règlement de la succession de [H] [K]. Ils font valoir que malgré sa présence sur quelques photos lorsqu’elle était âgée de quelques mois et de trois ans, Mme [X] [K] n’a jamais été présentée comme la fille de [A] [K], mais simplement comme étant la fille d’une amie que fréquentait [A] [K]. Ils ajoutent que Mme [X] [K] n’a jamais assisté à une réunion de famille ni passé aucune période de vacances avec eux et que rien ne laissait à penser à l’existence d’une demi-s’ur ou d’une nièce.

De plus, les consorts [N]-[K] exposent que Mme [X] [K] ne produit aucun écrit entre elle et [F] et que le recel successoral ne peut résulter de simples affirmations et allégations de Mme [X] [K]. Ils estiment donc que la demande de recel successoral à l’égard de Mme [F] [K] doit être rejetée et qu’il doit en être de même pour la demande de dommages et intérêts, non motivée et infondée.

Enfin ils soutiennent que Mme [X] [K] ne peut pas opposer l’article 910-4 du code de procédure civile au moyen d’irrecevabilité tiré de l’absence d’instance en partage, car cet article 910-4 ne vise que les prétentions au fond et n’interdit pas de soulever de nouveaux moyens d’irrecevabilité.

MOTIFS DE LA DECISION

I ‘ Sur l’étendue de la dévolution

L’article 562 du code de procédure civile dispose que :

« L’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible ».

En outre, l’article 910-4 du code de procédure civile dispose que :

« A peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait ».

La déclaration enregistrée auprès du greffe de la cour le 29 mai 2020 par Mme [X] [K] était libellée dans les termes suivants : « aux fins d’annulation et en tout état de cause annulation du jugement en ce qu’il rejeté la demande tendant à voir Mme [F] [K] rapporter les éléments d’actifs à la succession en application de l’article 843 du code civil, en ce qu’il a rejeté la demande d’application de la sanction du recel à Mme [F] [K] et en ce qu’il a débouté Mme [X] [K] de sa demande en dommages et intérêts ».

La formulation : « aux fins d’annulation et en tout état de cause annulation du jugement » correspond à une simple erreur matérielle, l’intéressée ayant manifestement voulu interjeter appel « aux fins d’annulation et en tout état de cause infirmation du jugement ».

En revanche, il résulte des termes de cette déclaration que Mme [X] [K] n’entendait pas interjeter appel de la décision en ce qu’elle a déclaré irrecevable sa demande tendant à voir le tribunal transmettre le dossier au tribunal d’instance de Metz aux fins de modification du certificat collectif d’héritiers VI 893/2012 établi le 29 août 2012 et de désignation d’un notaire aux fins de partage judiciaire.

De plus et contrairement à ce que prétend Mme [X] [K], la demande de « mentionner que le notaire devra réouvrir les opérations de règlement successoral sur la base desdits éléments et ce avec toutes conséquences en droit » ne constitue pas une simple prétention destinée à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

En conséquence, la cour déclare irrecevable la demande de Mme [X] [K] de faire « mentionner que le notaire devra réouvrir les opérations de règlement successoral sur la base desdits éléments et ce avec toutes conséquences en droit ».

II- Sur la recevabilité de la demande d’irrecevabilité des prétentions en rapport formées par Mme [X] [K] ainsi que de ses demandes en application de la sanction d’un recel successoral

L’article 910-4 du code de procédure civile dispose que :

« A peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait ».

L’article 954 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

Dans le corps de ses écritures, Mme [X] [K] fait valoir que la demande d’irrecevabilité de ses prétentions au prétexte de l’absence d’instance en partage serait elle-même irrecevable, car n’ayant pas été soulevée dès les premières conclusions des intimés.

Mais cette demande d’irrecevabilité ne figure pas dans le dispositif des écritures de Mme [X] [K].

La cour ne statuera donc pas sur ce point.

III- Sur la qualité d’héritière de Mme [X] [K]

Sur le point de départ du délai de prescription

Mme [F] [K], Mme [Z] [N], M. [W] [K] et Mme [Y] [K] s’en réfèrent à l’article 2224 du code civil qui dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

Mme [X] [K] ne discute pas ce fondement juridique et s’en réfère seulement à la motivation du jugement de première instance qui a retenu l’absence de prescription de sa demande.

Mme [X] [K] a indiqué qu’elle n’avait plus de relations avec son père dans les années précédant le décès de ce dernier, qu’à la mort de son père elle était âgée de treize ans seulement et qu’elle aurait eu un dernier contact avec sa grand-mère, une tante et Mme [F] [K] peu après ce décès.

Cette absence de relations même ponctuelles entre Mme [X] [K] et sa mère d’une part et les membres de la famille [K] dont [H] [K] d’autre part ne peut pas être contestée par les intimés, puisqu’ils soutiennent eux-mêmes que Mme [X] [K] n’a jamais assisté à une quelconque réunion de famille et qu’ils ignoraient qu’elle était la fille de [A] [K].

Ainsi [J] [E], gendre de [A] [K] et mari de [F] [K], indique n’avoir jamais vu ni entendu parler d’une « dénommée [X] » alors qu’il connaissait [A] [K] depuis 1988.

La simple proximité du domicile de Mme [X] [K] avec celui de sa grand-mère ne permet pas de présumer que l’appelante aurait eu connaissance du décès de l’intéressée, en l’absence de relations familiales suivies ou même occasionnelles.

Par ailleurs, les consorts [K] ne peuvent pas soutenir que cette absence de liens familiaux constituerait une faute imputable à Mme [X] [K] et susceptible de justifier que le point de départ du délai de prescription soit fixé à la date du décès de [H] [K].

Il sera donc considéré que le point de départ du délai de prescription de cinq ans a débuté à la date à laquelle Madame [X] [K] s’est comportée comme successeur de la défunte et a été informée par le notaire chargé de la succession, c’est-à-dire en mars 2015 selon les indications de Maître [V].

Les assignations ont été délivrées le 10 avril 2018.

La cour confirme donc le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande tendant à l’irrecevabilité tiré de la prescription de la demande de Mme [X] [K].

Sur le bien-fondé de la demande

L’acte de naissance de Mme [X] [K], née le 8 mars 1986 à [Localité 5], mentionne le fait qu’elle a été reconnue par [A] [K] le 10 mars 1986.

Par voie de conséquence, elle est héritière de [H] [K] au même titre que Mme [F] [K], en représentation de [A] [K] précédé, peu important le fait que Mme [X] [K] ou son représentant légal ne se soit pas manifesté au moment du décès de ce dernier.

IV- Sur les demandes de rapport à la succession en raison d’un recel successoral.

Il se déduit des dispositions de l’article 778 du code civil que les demandes en rapport d’une libéralité dont aurait bénéficié un héritier et en application de la sanction du recel successoral ne peuvent être formées qu’à l’occasion d’une instance en partage successoral et qu’une telle action ne peut plus être engagée lorsque les parties, ayant déjà procédé au partage amiable de la succession, ne sont plus en indivision.

Dans cette hypothèse, l’héritier qui demande la sanction du recel successoral doit engager une action en nullité du partage ou agir en complément de part ou en partage complémentaire (sur ce point voir par exemple Cass. 1re Civ., 6 novembre 2019, pourvoi n° 18-24.332 ou encore Cass. 1re Civ., 2 septembre 2020, pourvoi n° 19-15.955).

Enfin il sera rappelé que dans le département de la Moselle, la procédure de partage judiciaire relève des articles 220 et suivants de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

Mme [X] [K] demande à la présente cour de condamner Mme [F] [K] à rapporter à la succession de [H] [P] l’ensemble des éléments actif dissipés ainsi que les fruits desdits bien et notamment la somme de 24 086,50 euros et de condamner Mme [F] [K] pour l’ensemble des biens et sommes dissimulés, par application des dispositions de l’article 778 du code civil, à les rapporter à la succession sans pouvoir prétendre à aucune part dans les objets divertis.

Mais d’une part, il est constant que les parties ne sont pas en indivision, Mme [F] [K], Mme [Z] [K] épouse [N], M. [W] [K] et Mme [Y] [K] ayant achevé le partage amiable de la succession de [H] [K] (certificat de non-exigibilité des droits de succession du 3 juillet 2012).

D’autre part, Mme [X] [K] n’a pas engagé d’action ni présenté une demande en nullité de ce partage amiable, ni sollicité de complément de part ou un partage complémentaire.

Ainsi ses prétentions au titre du rapport et du recel successoral ne sont pas recevables.

Il appartiendra à Mme [X] [K], si elle l’estime opportun, d’assigner devant le tribunal judiciaire Mme [F] [K], Mme [Z] [K] épouse [N], M. [W] [K] et Mme [Y] [K] aux fins de demander la nullité du partage amiable déjà réalisé ou afin d’agir en complément de part ou en partage complémentaire.

Par voie de conséquence, la cour infirme le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté au fond la demande tendant à voir Mme [F] [K] rapporter les éléments d’actifs à la succession en application de l’article 843 du code civil et la demande d’application de la sanction du recel à Mme [F] [K] et statuant à nouveau, déclare irrecevables les demandes de Mme [X] [K] de faire condamner Mme [F] [K] à rapporter à la succession de Mme [H] [P] l’ensemble des éléments actifs dissipés ainsi que les fruits desdits bien et notamment la somme de 24 086,50 euros et de faire condamner Mme [F] [K] pour l’ensemble des biens et sommes dissimulés, par application des dispositions de l’article 778 du code civil, à les rapporter à la succession sans pouvoir prétendre à aucune part dans les objets divertis rappelés ci-avant.

V- Sur la demande de dommages et intérêts formée par Mme [X] [K]

A hauteur de cour, Mme [X] [K] maintient une demande de dommages et intérêts en raison des agissements frauduleux dont elle aurait été victime dans le cadre de la succession de [H] [K].

Mais dans la mesure où la cour a déclaré irrecevable ses demandes de rapport et de recel successoral, Mme [X] [K] ne fait pas la démonstration d’une faute commise par les consorts [N]-[K].

En conséquence, la cour confirme la décision entreprise en ce qu’elle a rejeté la demande de dommages et intérêts de Mme [X] [K].

VI- Sur les dépens et les frais irrépétibles

La cour confirme le jugement entrepris en ce qu’il a condamné Mme [F] [K], Mme [Z] [N] née [K], M. [W] [K], Mme [Y] [K] à payer à Mme [X] [K] la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et en ce qu’il a condamné Mme [F] [K], Mme [Z] [N] née [K], M. [W] [K], Mme [Y] [K] aux dépens.

Mme [X] [K] qui succombe sera condamnée aux dépens de l’appel.

Aucune considération d’équité ne justifie qu’il soit fait droit aux différentes demandes en application de l’article 700 du code procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevable la demande de Mme [X] [K] de faire « mentionner que le notaire devra réouvrir les opérations de règlement successoral sur la base desdits éléments et ce avec toutes conséquences en droit » ;

Confirme le jugement rendu le 5 février 2020 par le tribunal judiciaire de Metz en ce qu’il a :

rejeté le moyen d’irrecevabilité tiré de la prescription de la demande de Mme [X] [K];

déclaré Mme [X] [K] recevable en ses demandes ;

dit que Mme [X] [K], née le 08 mars 1986 à [Localité 5] reconnue par [A] [K] en date du 10 mars 1986, a la qualité d’héritière de [S] [P] veuve [K], décédée le 17 mars 2012, en représentation de [A] [K] décédé,

débouté Mme [X] [K] de sa demande en dommages et intérêts ;

condamné Mme [F] [K], Mme [Z] [N] née [K], M. [W] [K], Mme [Y] [K] à payer à Mme [X] [K] la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamné Mme [F] [K], Mme [Z] [N] née [K], M. [W] [K], Mme [Y] [K] aux dépens ;

Infirme le jugement rendu le 5 février 2020 par le tribunal judiciaire de Metz en ce qu’il a :

rejeté au fond la demande tendant à voir Mme [F] [K] rapporter les éléments d’actifs à la succession en application de l’article 843 du code civil ;

rejeté au fond la demande d’application de la sanction du recel à Mme [F] [K];

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevables les demandes de Mme [X] [K] de faire condamner Mme [F] [K] à rapporter à la succession de Mme [H] [P] l’ensemble des éléments actifs dissipés ainsi que les fruits desdits bien et notamment la somme de 24 086,50 euros et de faire condamner Mme [F] [K] pour l’ensemble des biens et sommes dissimulés, par application des dispositions de l’article 778 du code civil, à les rapporter à la succession sans pouvoir prétendre à aucune part dans les objets divertis rappelés ci-avant ;

Y ajoutant ;

Condamne Mme [X] [K] aux dépens de l’appel ;

Rejette toutes les prétentions en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente de chambre

 


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