Droits des héritiers : 7 juin 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 17/01343

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Droits des héritiers : 7 juin 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 17/01343

7 juin 2023
Cour d’appel de Colmar
RG n°
17/01343

MINUTE N° 271/23

Copie exécutoire à

– Me Loïc RENAUD

– Me Dominique Serge BERGMANN

Le 07.06.2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 07 Juin 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A N° RG 17/01343 – N° Portalis DBVW-V-B7B-GNOI

Décision déférée à la Cour : 28 Juin 2013 par le Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG – 2ème chambre commerciale

APPELANTE :

Madame [L] [A] [J] [U]

[Adresse 8]

Représentée par Me Loïc RENAUD, avocat à la Cour

INTERVENANTS VOLONTAIRES :

Madame [W] [U] épouse [Y]

[Adresse 7]

Madame [S] [U] épouse [F]

[Adresse 2]

Monsieur [T] [U]

[Adresse 8]

Es qualités d’héritiers de M. [R] [U] ayant accepté la succession à hauteur de l’actif net

Représentés par Me Loïc RENAUD, avocat à la Cour

SA KOHLER REHM en liquidation judiciaire

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

SARL SOGHAL KIRIAD HOTEL prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

Maître [N] [O] [B], mandataire judiciaire de la succession de Monsieur [R] [U] [Adresse 5]

S.E.L.A.R.L. [Z] & ASSOCIES, prise en la personne de Me [D] [Z], mandataire de la SA KOHLER REHM

[Adresse 6]

Représentés par Me Loïc RENAUD, avocat à la Cour

INTIMEE :

SA BPI FRANCE FINANCEMENT, anciennement dénommée SA CE PME puis OSEO BD PME prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

Représentée par Me Dominique Serge BERGMANN, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 28 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

– Contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

– signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l’arrêt rendu par cette cour en date du 28 février 2022, ordonnant la réouverture des débats, la révocation de l’ordonnance de clôture et invitant les parties appelantes et intervenantes, soit Mme [L] [U], née [H], Mme [W] [Y], née [U], Mme [S] [F], née [U] et M. [T] [U], ‘ès qualités d’héritiers ayant accepté la succession à hauteur de l’actif net’, et en personne s’agissant de Mme [L] [U], ci-après également dénommés ‘les consorts [U]’, la SARL Soghal et la SELARL [Z] & Associés, ès qualités, à déposer les pièces mentionnées dans leur dernier bordereau de communication et invitant les parties à régulariser leurs dernières écritures, arrêt auquel il sera renvoyé pour le surplus de l’exposé des faits et de la procédure,

Vu les dernières conclusions en date du 18 mars 2022, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n’a fait l’objet d’aucune contestation des parties, et par lesquelles, Mme [L] [U], née [H], Mme [W] [Y], née [U], Mme [S] [F], née [U] et M. [T] [U], ‘ès qualités d’héritiers ayant accepté la succession à hauteur de l’actif net’, et en personne s’agissant de Mme [L] [U], la SARL Soghal et la SELARL [Z] & Associés, ès qualités, demandent à la cour de :

‘1. SUR LES CAUTIONS :

1.1 NULLITÉ DES ACTES DE CAUTIONS :

DÉCLARER purement et simplement nuls tous les actes et engagements de cautions.

En conséquence, PRONONCER la nullité pure et simple des actes de cautions, les annuler.

En conséquence, DÉCHARGER intégralement l’ensemble des cautions de leurs engagements de cautions et ce en raison de la responsabilité de BPI France pour avoir manqué à son devoir de mise en garde et/ou à raison du manquement à l’obligation de renseignements et d’obligations de BPI France sur les conditions de fonctionnement de la garantie SOFARIS et ainsi en conséquence EN DÉCHARGER toutes les cautions.

En conséquence, DÉBOUTER la partie adverse de l’ensemble de ses conclusions.

1.2 SUBSIDIAIREMENT DÉCHÉANCE DE LA BPI À RAISON DU DÉFAUT DE DÉCLARATION DE CRÉANCES DANS LA SUCCESSION À HAUTEUR DE L’ACTIF NET :

CONSTATER le défaut de déclaration de créances de la BPI France dans la succession de Monsieur [R] [U]

En conséquence, CONSTATER l’abandon pur et simple de la réclamation de la BPI France.

En conséquence, DÉCLARER BPI France déchue de toute demande à l’encontre de la succession à savoir :

– Madame [L] [U]

– Madame [W] [Y] ;

– Madame [S] [F] ;

– Monsieur [T] [U].

– Ainsi qu’à l’encontre de Madame [L] [U] née [H] à titre personnel.

ET ENFIN EN CONSÉQUENCE DÉBOUTER BPI France de toutes ses demandes à l’encontre de toutes les parties à la procédure.

1.3

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a condamné aux montants suivants :

650.727,42 €uros en quittances ou deniers ;

Avec intérêts au taux variable Euribor 3 MM + 1,30 points majoré de trois points de pourcentage l’an sur la somme de 169 974,37 € à compter du 27 février 2007 ;

Avec intérêts au taux variable Euribor 1 MQ + 1,20 points majoré de trois points de pourcentage l’an sur la somme de 50 677,66 € à compter du 27 février 2007 ;

Avec intérêts au taux variable Euribor 3 MM + 1,20 points majoré de trois points de pourcentage l’an sur la somme de 288 317,80 € à compter du 27 février 2007 ;

Avec intérêts au taux variable Euribor 3 MM + 1,30 points majoré de trois points de pourcentage l’an sur la somme de 141 757,62 €uros à compter du 27 février 2007

La capitalisation des intérêts a été ordonnée pour chaque année entière.

6.000,00 €uros au titre de l’article 700 du CPC ;

Aux entiers frais et dépens.

STATUANT À NOUVEAU :

DÉBOUTER la Société BPI FRANCE de sa demande initiale et de ses conclusions d’appel.

LE CAS ÉCHÉANT, CONSTATER que les montants réglés dans le cadre des plans d’apurement de passif des Société KOHLER REHM SA et SOGHAL Sàrl ont libéré les cautions de toute obligation, de toute garantie et de tous paiements.

En conséquence, DÉBOUTER la partie adverse de l’ensemble de ses conclusions.

EN CAS DE CONDAMNATION, DIRE ET JUGER que les éventuelles condamnations interviendront en deniers ou quittances.

1.4

CONDAMNER la Société BPI FRANCE à un montant de 7.000,00 €uros au titre de l’article 700 du CPC.

LA CONDAMNER aux frais et dépens.

2. SUR L’INTERVENTION VOLONTAIRE DU MANDATAIRE JUDICIAIRE DE LA SUCCESSION (ORDONNANCE DU 19 AVRIL 2018 DE LA PREMIERE VICE-PRÉSIDENTE DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG)

DONNER acte de la non-intervention de Maître [N] [B] es-qualité de mandataire désigné par l’ordonnance du 19 avril 2018 à la date du 18 avril 2020 et ce à raison de l’extinction du mandat à lui donné par le Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG.

3. SUR L’INTERVENTION VOLONTAIRE DE LA SA KOHLER REHM ET SUR LES CONCLUSIONS À SON ENCONTRE :

DONNER ACTE de l’intervention volontaire de la SA KOHLER REHM.

DÉCLARER irrecevables les conclusions de la BPI aux fins de fixation de la Société KOHLER REHM à un montant de 38.670,93 €uros et ce à raison des exceptions de fin de non-recevoir des articles 70 ainsi que les articles 564 à 566 du Code de Procédure Civile et ce à raison du défaut de demande de fixation du montant de la créance dans la liquidation prononcée le 28 septembre 2020

DÉCLARER irrecevable la demande de la BPI aux fins de fixation à hauteur d’un montant de 38.670,93 €uros à raison de l’autorité de la chose jugée de l’ordonnance de référé du 19 juillet 2005 et du jugement de la 2 ème Chambre Commerciale du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG du 15 février 2007, du jugement de la 1ère Chambre Commerciale du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG du 25 août 2008.

En tout état de cause, CONSTATER la litispendance avec le dossier numéro RG 19/00464 (avant radiation RG 18/01023)

Le cas échéant, DÉBOUTER BPI France FINANCEMENT à raison de son caractère infondé de sa demande.

Subsidiairement, CONSTATER que la SA KOHLER REHM n’est plus débitrice de quelque montant que ce soit et ce à raison du respect du plan d’apurement du passif fixé par le jugement de la 1ère Chambre Commerciale du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG du 25 août 2008.

En conséquence et en tout état de cause, DÉBOUTER BPI France FINANCEMENT de toutes ses fins et conclusions.

CONDAMNER BPI France FINANCEMENT à verser un montant de 5.000,00 €uros au titre de l’article 700 du CPC à la Société KOHLER REHM.

4. SUR L’INTERVENTION VOLONTAIRE DE LA SARL SOGHAL :

DONNER ACTE de l’intervention volontaire de la Sàrl SOGHAL.

CONSTATER que plus aucune demande n’est formulée à l’encontre de la Sàrl SOGHAL.’

et ce, en invoquant, notamment :

– la déchéance totale de la SA BPI France Financement, ci-après également ‘BPI’, à leur demander quelque montant que ce soit, envers les cautions comme l’ensemble des coobligés, compte tenu de sa défaillance dans la procédure de déclaration de créance, fût-ce à titre provisionnel, dans les 15 mois de la publicité de l’acceptation de la succession à hauteur de l’actif net,

– la nullité et la non-opposabilité des actes de cautions :

* au regard de la disproportion manifeste des engagements souscrits, impliquant subsidiairement une responsabilité de la banque délivrant les cautions de leurs engagements,

* au titre de l’absence d’information de la société Kohler Rehm, emprunteur dans le cadre du prêt du 13 octobre 2000, et des cautions en ce qui concerne le fonctionnement de la garantie Sofaris,

* en raison de l’absence d’indication claire dans la mention manuscrite inscrite dans l’acte par la personne qui se porte caution de la dénomination sociale de l’entreprise débitrice,

– subsidiairement, sur le montant, la prise en compte de l’apurement du passif des sociétés Soghal, pour laquelle il est reconnu que la dette a été soldée, et Kohler Rehm, dont les propositions incluant les intérêts auraient été homologuées, alors que BPI ne respecterait pas, notamment dans le décompte des intérêts, les dispositions du jugement prononçant le plan d’apurement, les montants réclamés par BPI excédant ceux prévus par ce plan, et prenant en compte des montants déjà inclus dans une autre condamnation, et en tout état de cause impliquant une interprétation du plan d’apurement objet d’une autre procédure,

– l’impossibilité, de surcroît, de demander à ce titre la condamnation de la société Kohler Rehm, demande irrecevable comme nouvelle et se heurtant à l’autorité de la chose jugée, sans incidence de la déclaration de créance faite à ce titre par la BPI dans le cadre de la liquidation judiciaire ouverte en 2020, avec laquelle cette créance serait sans lien,

– la limitation, en tout état de cause, de la somme réclamée à 50 % du montant concernant Mme [L] [U],

– sur les intérêts et leur capitalisation, l’application des dispositions de l’article L. 622-28 du code de commerce, sur l’arrêt du cours des intérêts, non pas à compter du jugement de redressement, mais tout de même à compter du jugement prononçant le plan d’apurement, et l’absence de justification de l’anatocisme, non prévu contractuellement, au regard du comportement de la caution et en l’absence de sommation judiciaire faite à la partie adverse, et au vu de l’importance des montants en jeu, alors même que les plans d’apurement seraient respectés,

– la recevabilité des interventions volontaires des sociétés cautionnées, et en particulier de la société Kohler Rehm s’agissant d’une somme ayant fait l’objet d’une déclaration, définitivement admise, au passif de la procédure collective de cette société, pour laquelle a été mis en place, par une décision également devenue définitive, un plan d’apurement,

– l’absence d’utilité aux débats, compte tenu de leur évolution, de certaines pièces évoquées dans les écritures précédentes de la concluante.

Vu les dernières conclusions en date du 30 juin 2022, auxquelles est joint un bordereau de pièces récapitulatif qui n’a fait l’objet d’aucune contestation des parties, et par lesquelles la SA BPI France Financement, venant aux droits de la SA CE PME dénommée Oseo, demande à la cour de :

‘- REJETER l’appel principal et les conclusions des parties intervenantes volontaires

– CONFIRMER le jugement de la 1ère Chambre Commerciale du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG en date du 28 juin 2014

– DONNER acte à la société SOGHAL de ce qu’elle a obtenu le paiement de sa créance

– CONDAMNER les héritiers de Monsieur [R] [U] à savoir Madame [L] [U] née [H], Madame [W] [Y] née [U], Madame [S] [F] née [U] et Monsieur [T] [U] et Madame [L] [U] née [H] en son nom personnel, solidairement à payer la somme de 38.670,93 € ainsi que la somme de 10.000,00 € au titre de l’article 700 du CPC et aux dépens des deux instances au profit de la SA BPI FRANCE FINANCEMENT

– FIXER la créance de la SA BPI France FINANCEMENT à la somme de 38.670,93 € ainsi qu’à la somme de 10.000,00 € au titre de l’article 700 du CPC et aux dépens des deux instances, à l’égard de la SA ETABLISSEMENTS KOHLER REHM en liquidation judiciaire’

et ce, en invoquant, notamment :

– l’absence de contestation sérieuse de sa créance, compte tenu des titres exécutoires obtenus, en référé puis au fond, puis des créances définitivement admises, cette admission ayant autorité de chose jugée à l’égard des cautions solidaires,

– l’absence d’application de l’article L. 626-11 du code de commerce, s’agissant de plans de redressement, dans le cadre desquels les paiements effectués profitent néanmoins aux cautions, qui devraient être condamnées en deniers ou quittances,

– la prise en compte des stipulations d’intérêts conventionnels, compte tenu de l’admission définitive de la créance de la banque Oseo incluant le taux d’intérêt variable, sans incidence des plans d’apurement, la concluante disposant d’une créance exigible envers les sociétés cautionnées avant l’ouverture de la procédure collective, créance sur laquelle les intérêts courent à l’encontre des deux cautions et de leurs ayants droit jusqu’à parfait paiement, sous réserve de déduction des paiements intervenus dans le cadre des plans,

– l’impossibilité de recours à l’assurance décès, les contrats correspondant ayant été résiliés pour non-paiement bien avant le décès de M. [R] [U],

– l’absence d’éléments permettant aux consorts [U], qui fonderaient leur discussion sur des informations confuses, de contester l’exactitude de ses calculs,

– les éléments d’actualisation, en particulier le solde de sa dette par la société Soghal, et la liquidation judiciaire de la société Kohler Rehm, qui restait devoir à la concluante la somme de 38 670,93 euros.

Vu l’ordonnance de clôture en date du 9 novembre 2022,

Vu les débats à l’audience du 28 novembre 2022,

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l’article 455 du code de procédure civile, pour l’exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS :

Sur les demandes en paiement de la SA BPI France Financement, venant aux droits de la SA CE PME :

La cour rappelle, au préalable, que M. [R] [U] et Mme [L] [H], son épouse, se sont portés cautions solidaires des engagements de la société Soghal au titre de trois prêts en date du 13 février 1998 pour le premier, 3 mars 1999 pour le deuxième et 3 mars 2001 pour le troisième, d’un montant en principal respectivement de 700 000 Frs, soit 106 714,31 euros, 2 400 000 Frs, soit 365 877,64 euros et 1 600 000 Frs, soit 943 918,43 euros, ainsi que d’un prêt consenti en date du 20 octobre 2000 à la société Kohler Rehm, pour un montant en principal de 2 100 000 Frs, soit 390 149,94 euros, leur engagement étant limité à 50 % de l’encours s’agissant des deux derniers prêts mentionnés.

La déchéance du terme de ces quatre prêts a été prononcée successivement en dates des 24 et 27 septembre, et 16 octobre 2003, avant que la SA CE PME ne poursuive le paiement des cautions, par assignation délivrée le 30 décembre 2003, puis que les débiteurs principaux n’interviennent à l’instance, tout en faisant parallèlement l’objet de poursuites ayant donné lieu à deux ordonnances du juge des référés commerciaux en date du 19 juillet 2005, confirmées par la cour de céans, les deux sociétés devant, par la suite, être placées en redressement judiciaire, par jugement en date du 27 février 2007, suivi d’un jugement du 25 août 2008 ouvrant un plan d’apurement, la société Kohler Rehm se trouvant désormais en liquidation judiciaire, selon jugement du 28 septembre 2020.

Le jugement entrepris est entré en voie de condamnation à l’égard de M. [R] [U] et de Mme [L] [H], épouse [U], tout en étant

déclaré opposable aux sociétés Soghal et Kohler Rehm.

À la suite du décès de M. [R] [U], en cours d’instance d’appel, viennent aux droits de celui-ci Mme [L] [U], née [H], Mme [W] [Y], née [U], Mme [S] [F], née [U] et M. [T] [U].

La société Soghal ne fait l’objet d’aucune demande à hauteur de cour.

Sur la validité des engagements de caution des consorts [U] :

Les parties appelantes entendent invoquer, à ce titre, ainsi qu’il a été rappelé, la validité et l’inopposabilité de leurs engagements :

– au regard de la disproportion manifeste des engagements souscrits, impliquant subsidiairement une responsabilité de la banque délivrant les cautions de leurs engagements,

– au titre de l’absence d’information de la société Kohler Rehm, emprunteur dans le cadre du prêt du 13 octobre 2000, et des cautions en ce qui concerne le fonctionnement de la garantie Sofaris,

– en raison de l’absence d’indication claire dans la mention manuscrite inscrite dans l’acte par la personne qui se porte caution de la dénomination sociale de l’entreprise débitrice.

Sur ce, la cour observe, s’agissant du premier point, que si, aux termes de l’article L. 341-4, devenu L. 332-1 et L. 343-4, du code de la consommation, en leur version applicable à la cause, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation, les parties appelantes ne forment, au dispositif de leurs conclusions, aucune demande tendant à voir déclarer inopposable leur engagement de caution, pas davantage que n’y est mentionnée une demande indemnitaire formée à l’encontre de BPI, au titre, notamment, d’un éventuel manquement à son devoir de mise en garde, seule étant sollicitée le prononcé de la nullité ‘pure et simple’ des actes de cautions, et le débouté, par voie de conséquence, de la partie adverse, ce qui rend inopérants les moyens développés à ce titre par les consorts [U].

Pour le surplus, les appelants n’invoquent aucune cause de nullité des actes de caution litigieux, telle que relevant, en particulier, d’un vice du consentement, mais développent une argumentation relative à un défaut d’information susceptible uniquement, le cas échéant, d’engager la responsabilité de BPI, les griefs relatifs au défaut d’information précise quant à la mention manuscrite n’impliquant pas par eux-mêmes, en l’état du droit applicable à l’espèce, la remise en cause de la validité des engagements de caution litigieux.

Il convient, en conséquence, de rejeter la demande formée à ce titre par les appelants.

Sur la contestation opposée subsidiairement par les cautions à la créance de la SA BPI France Financement  :

Les cautions entendent faire valoir que BPI aurait été défaillante dans la procédure de déclaration de créance, fût-ce à titre provisionnel, dans les 15 mois de la publicité de l’acceptation de la succession à hauteur de l’actif net, de sorte qu’elle serait déchue de toute demande à leur encontre comme envers leurs coobligés.

Cela étant, selon les articles 788 et 792 du code civil, lorsque la succession a été acceptée par un héritier à concurrence de l’actif net, les créanciers de la succession doivent déclarer leurs créances en notifiant leur titre au domicile élu de la succession, lequel est indiqué dans la déclaration d’acceptation de l’héritier, le délai de déclaration des créances soumises à cette formalité, d’une durée de quinze mois, courant à compter de la publicité nationale dont fait l’objet la déclaration d’acceptation de l’héritier, outre que, selon l’article 796 du même code, les créanciers tenus de déclarer leurs créances sont désintéressés dans l’ordre des déclarations, de sorte que, même si BPI disposait déjà d’un titre exécutoire, s’agissant, en l’espèce, des jugements rendus tant en référé que sur le fond à l’encontre des sociétés Soghal et Kohler Rehm, il lui appartenait de déclarer sa créance dans le délai prévu par les dispositions précitées en notifiant son titre au domicile élu par les ayants droit, soit en l’espèce l’étude de Me [M], notaire à la résidence de [Localité 9], ce dont il n’est pas justifié par BPI, qui ne répond pas particulièrement sur ce point à l’argumentation des parties appelantes, lesquelles justifient, pour leur part, de l’acceptation de la succession à hauteur de l’actif net, qui a fait l’objet d’un avis de la direction de l’information légale et administrative du Premier ministre en date du 28 juillet 2015, et d’une publication dans un journal d’annonces légales, en l’occurrence les Affiches du Moniteur, en date du 14 août 2015.

Or, par application des dispositions de l’alinéa 2 de l’article 792 précité, faute de déclaration dans un délai de quinze mois à compter de la publicité prévue à l’article 788, les créances non assorties de sûretés sur les biens de la succession sont éteintes à l’égard de celle-ci. Cette disposition bénéficie également aux cautions et coobligés, ainsi qu’aux personnes ayant consenti une garantie autonome portant sur la créance ainsi éteint.

Et en l’espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n’est, d’ailleurs, pas allégué par BPI que des sûretés auraient été prises, au titre des créances litigieuses, sur les biens de la succession.

Dans ces conditions, la créance doit être considérée comme éteinte, tant envers les ayants droit de M. [R] [U], à savoir Mme [L] [U], née [H], Mme [W] [Y], née [U], Mme [S] [F], née [U] et M. [T] [U], ‘ès qualités d’héritiers ayant accepté la succession à hauteur de l’actif net’, mais également de leurs co-obligés, soit Mme [L] [U] en personne ou la société Kohler Rehm, débiteur principal au titre de la créance dont les consorts [U] s’étaient portés solidairement caution.

Par voie de conséquence, la SA BPI France Financement sera déboutée de ses demandes en paiement et en fixation de créance dirigées respectivement contre les parties appelantes précitées, et ce en infirmation de la décision entreprise, sans qu’il ne soit nécessaire d’examiner le surplus des prétentions et moyens présentés par les parties.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La SA BPI France Financement succombant pour l’essentiel, sera tenue des dépens de l’appel, par application de l’article 696 du code de procédure civile, ainsi qu’en infirmation du jugement de première instance, des dépens de première instance.

L’équité commande de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’une ou l’autre des parties au litige, en infirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 28 juin 2013 par la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg,

Et statuant à nouveau,

Constate que la SA BPI France Financement ne forme aucune demande à l’encontre de la SARL Soghal Kiriad Hôtel,

Dit que la créance de la SA BPI France Financement est éteinte tant envers Mme [L] [U], née [H], Mme [W] [Y], née [U], Mme [S] [F], née [U] et M. [T] [U], ès qualités d’ayants droit de M. [R] [U], que de Mme [L] [U], née [H], en personne, et de la société Kohler Rehm,

Déboute, en conséquence, la SA BPI France Financement de ses demandes en paiement dirigées contre Mme [L] [U], née [H], Mme [W] [Y], née [U], Mme [S] [F], née [U] et M. [T] [U], ès qualités d’ayants droit de M. [R] [U], et Mme [L] [U], née [H], en personne et de sa demande en fixation de créance dirigée contre la société Kohler Rehm, en liquidation judiciaire, représentée par la SELARL [Z] et Associés, prise en la personne de Me [D] [Z], ès qualités de mandataire liquidateur,

Condamne la SA BPI France Financement aux dépens de première instance et d’appel,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice tant de la SA BPI France Financement, que de Mme [L] [U], née [H], Mme [W] [Y], née [U], Mme [S] [F], née [U] et M. [T] [U], ès qualités d’ayants droit de M. [R] [U], de Mme [L] [U], née [H], en personne, et de la société Kohler Rehm, en liquidation judiciaire, représentée par la SELARL [Z] et Associés, prise en la personne de Me [D] [Z], ès qualités de mandataire liquidateur.

La Greffière : la Présidente :

 


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