Droits des héritiers : 20 juin 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 21/03537

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Droits des héritiers : 20 juin 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 21/03537

20 juin 2023
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
21/03537

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE

————————–

ARRÊT DU : 20 JUIN 2023

N° RG 21/03537 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-MFML

[H] [Z]

c/

[K] [Z] épouse [C]

Nature de la décision : AU FOND

28A

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 avril 2021 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BORDEAUX (RG n° 18/06259) suivant déclaration d’appel du 21 juin 2021

APPELANTE :

[H] [Z]

née le 07 Janvier 1954 à [Localité 16]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Pierre GARREAU de la SELARL PIERRE GARREAU AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

[K] [Z] épouse [C]

née le 21 Juin 1955 à [Localité 16]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Laeticia CADY de la SELAS GAUTHIER-DELMAS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 09 mai 2023 en audience publique, devant la Cour composée de :

Président : Hélène MORNET

Conseiller : Danièle PUYDEBAT

Conseiller : Isabelle DELAQUYS

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique DUPHIL

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 al. 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

M. [O] [Z] est décédé le 8 avril 1984 en laissant pour recueillir sa succession :

– son épouse survivante, Mme [D] [F], avec laquelle il s’était marié le 2 août 1952 sous le régime de la communauté de biens meubles et acquêts, donataire de l’universalité des biens composant ladite succession, et usufruitière légale du quart des biens composant la succession de son défunt mari,

– ses filles Mme [H] [Z] et Mme [K] [Z] épouse [C], héritières chacune pour moitié, sauf les droits d’usufruit du conjoint survivant.

Par donation-partage en la forme notariée du 7 août 1989, Mme [D] [F] veuve [Z] a fait donation :

– à sa fille Mme [H] [Z], de la nue-propriété d’un immeuble situé à [Localité 9], dénommé “[Adresse 10]”,

– à sa fille Mme [K] [Z] épouse [C] de la nue-propriété d’un immeuble situé à [Localité 11], formant le lot 124 du lotissement [Adresse 15].

Par acte notarié du 5 mai 2000, le bien immobilier situé à [Localité 11] a été vendu avec remploi du prix de vente pour l’acquisition d’un bien immobilier situé à [Adresse 6]. Ce bien a ensuite été vendu le 19 juin 2008.

Mme [D] [F] veuve [Z] a établi un testament olographe daté d’avril 2013, jour non précisé, dans les termes suivants :

‘Pour mémoire : Lors de la vente de l’appartement [Adresse 6], vous vous êtes emparés de votre part mais aussi de celle qui me revenait sans m’avoir demandé si j’étais d’accord, sans discussion au préalable. On aurait pu en parler. Non. J’ai été mise devant le fait accompli. Autrement dit vous m’avez pris pour une imbécile. J’en ai été sidérée. J’ai mis beaucoup de temps à m’en remettre. Un tel manque de respect, manque de reconnaissance. Je crois que je méritais mieux. Si je n’ai rien dit pour manifester mon désarroi c’est parce que je n’aime pas les histoires qui fachent. C’est pourquoi en pensant que je vous ai suffisamment gátés, je souhaite que le peu d’argent que je possède sur les comptes BNP, CPP, Caisse d’Epargne, déduction faite des frais d’obsèques, reviennent uniquement à [H].

Par contre, je souhaite que [H] et [K] se partagent les objets de valeur à savoir les bijoux. l’argenterie, les verres en christal, assiettes, services, livres de valeur, lithos. peut être nappes et autres objets auxquels je ne pense pas….’.

Elle a rédigé un codicille à ce testament olographe dans ce même mois d’avril 2013, sans jour précisé, dans les termes suivants :

‘Etant propriétaire de deux habitations j’ai fait don d’une habitation à chacune de mes filles le 7 août 1989.

Mon appartement de [Localité 5] appartient de ce fait à ma fille [H]. Il se trouve que j’occupe toujours cet appartement alors que ma fille est en location. J’ai donc décidé moi-même de lui donner 400 euros par mois en compensation depuis 4 ans environ. Ma fille [H] a besoin de changer de voiture et les mensualités du financement sont de 400 euros par mois pendant 4 ans. C’est pourquoi j’ai pris la décision de payer les mensualités de cette voiture ce qui revient au même financièrement. De ce fait la carte grise de cette voiture mentionnera le nom de ma fille et le mien. Au cas où je viendrai à décéder avant la fin du financement de la voiture, je souhaite que cette voiture soit la propriété exclusive de ma fille [H] et n’entre pas dans le partage de mes biens, ce qui me semble tout à fait logique. Je pense que ma fille [K] et son mari [N] qui sont loyaux et honnêtes comprendront tout à fait ma démarche (Il faut rappeler que de leur côté, ils ont pleinement profité de l’habitation que je leur al donnée et cela depuis le début de la donation).

Mme [D] [F] veuve [Z] est décédée le 31 août 2014 à [Localité 14].

Faute de parvenir à un partage amiable, Mme [H] [Z] a par acte d’huissier du 18 juin 2018 assigné sa soeur Mme [K] [Z] épouse [C] devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de partage judiciaire.

Par jugement en date du 27 avril 2021, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

– déclaré recevable l’assignation en partage délivrée par Mme [H] [Z],

– ordonné l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Mme [D] [F] veuve [Z] née le 24 février 1929 à [Localité 13] et décédée le 31 août 2014 à [Localité 14],

– désigné pour y procéder la président de la Chambre des notaires de la Gironde avec faculté de délégation à tout notaire de cette chambre, à l’exception de tout notaire de l’étude de Me Dutour et Me Coste, vainement intervenu dans le cadre amiable,

– commis le juge de la mise en état de la première chambre civile du tribunal de grande instance de Bordeaux, en qualité de juge commis pour surveiller les opérations à accomplir,

– dit que Mme [K] [Z] épouse [C] doit rapporter à la succession la somme de 56.090 euros,

– rejeté la demande de recel successoral portant sur cette donation de 56.090 euros,

– dit que Mme [K] [Z] épouse [C] a une créance à l’encontre de la succession de [D] [Z] d’un montant de 27.847,64 euros,

– dit que Mme [H] [Z] doit rapporter à la succession la somme de 25.600 euros,

– rejeté toutes les autres demandes,

– ordonné l’emploi des dépens en frais privilégiés de partage successoral,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement.

Procédure d’appel :

Par déclaration du 21 juin 2021, Mme [H] [Z] a relevé appel limité de ce jugement en ce qu’il a rejeté la demande de recel successoral portant sur la donation de 56.090 euros, dit que Mme [K] [Z] épouse [C] a une créance à l’encontre de la succession de [D] [Z] d’un montant de 27.847,64 euros, dit que Mme [H] [Z] doit rapporter à la succession la somme de 25.600 euros et rejeté toutes les autres demandes.

Selon dernières conclusions du 21 septembre 2021, Mme [H] [Z] demande à la cour de :

– la déclarer recevable et fondé dans son appel interjeté,

Y faisant droit,

– infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau,

– condamner Mme [K] [C] à rapporter la somme de 56.090 € à la succession,

– dire et juger que Mme [K] [C] ne pourra pas prétendre à cette somme,

– dire et juger que la somme de 6.400 euros versée à [H] [Z] a été faite hors part successorale et qu’elle n’est pas rapportable à la succession et subsidiairement qu’elle bénéficie d’une créance à ce titre en sa qualité de légataire à titre particulier du véhicule restitué,

– dire et juger que la mise à disposition gratuite des biens donnés en nue-propriété constitue un avantage indirect rapportable à la succession,

– dire et juger prescrite les factures de travaux dont se prévaut Mme [C],

– fixer le cas échéant la créance de Mme [C],

– débouter Mme [K] [C] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

– la condamner à payer à Mme [H] [Z] la somme de 5.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner aux entiers dépens.

Selon dernières conclusions du 17 décembre 2021, Mme [K] [C] demande à la cour de :

– débouter Mme [H] [Z] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Bordeaux du 27 avril 2021 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

– déclarer irrecevable la demande de Mme [H] [Z] au titre du legs du véhicule Renaud Megane immatriculé [Immatriculation 7], s’agissant d’une demande nouvelle en appel et, en conséquence, l’en débouter,

– En tout état de cause,

– juger que le legs du véhicule Renaud Megane immatriculé [Immatriculation 7] à Mme [H] [Z] est caduc,

– condamner Mme [H] [Z] à verser à Mme [K] [C] la somme de 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture est datée du 25 avril 2023.

Pour un plus ample exposé des moyens, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le recel successoral portant sur la somme de 56.090 euros

Aux termes des dispositions de l’article 778 du code civil, sans préjudice de dommages et intérêts, l’héritier qui a recelé des biens ou des droits d’une succession ou dissimulé l’existence d’un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l’héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

Le recel vise toutes les fraudes au moyen desquelles un héritier cherche à rompre l’équilibre du partage, au détriment de ses cohéritiers, soit qu’il divertisse des effets de la succession en se les appropriant indument, soit qu’il dissimule sa possession dans les circonstances où il serait, selon la loi, tenu de la declarer.

Il appartient en l’espèce à l’appelante de rapporter la preuve d’un acte matériel et d’une intention de l’intimée de porter atteinte aux droits de sa soeur.

Mme [H] [Z] soutient que :

– Mme [K] [C] a convaincu leur mère de vendre l’immeuble situé à [Localité 11] et de réemployer le prix de vente dans l’acquisition du autre bien, situé à [Adresse 6], sans lui verser sa part d’usufruit, dont la valeur selon l’âge de Mme [F], s’élève à la somme de 56.090 euros,

– Mme [F] a en réalité été trompée par des manoeuvres de la part de Mme [C] afin de lui concéder un avantage indirect d’une valeur de 56.090 euros,

– cette donation a été dissimulée à l’appelante qui n’a été révélée que lors du décès de leur mère,

– ce faisant sa soeur a entendu fausser les opérations de partage.

Mme [K] [Z] épouse [C] réplique que les éléments constitutifs du recel successoral ne sont pas rapportés dès lors que :

– le bien de [Localité 11] a été vendu d’un commun accord entre Mme [C] et Mme [F],

– Mme [F] avait connaissance du montant lui revenant sur le prix de vente mais qu’elle n’a jamais réclamé cette somme et a ainsi abandonné la valeur de son usufruit,

– sa soeur, [H] [Z] était au courant de cette donation du vivant de leur mère puisqu’elle a été instituée légataire à titre universel par le testament d’avril 2013 lequel portait mention de cet avantage,

– elle en a eu connaissance au plus tard lors du décès de leur mère, tel que cela ressort de ses conclusions,

– cette connaissance s’évince également du protocole d’accord transactionnel que verse Mme [H] [Z] elle même lequel porte mention de l’existence de cet avantage indirect dont a profité sa soeur, laquelle n’a jamais contesté devoir rapporter la somme de 56.900 euros au titre de cet usufruit non réclamé.

La cour, retenant en cela le jugement entrepris, écarte l’existence du recel reproché faute pour l’appelante de rapporter la preuve d’une quelconque dissimulation ou détournement commis par l’intimée. Mme [H] [Z] a été en effet affranchie de l’existence de cette possible donation déguisée bien avant le décès de sa mère et au plus tard au jour de la signature de l’acte de notoriété dressé suivant le décès de Mme [D] [F] faisant mention du testament établi en avril 2013 qui l’a institué légataire à titre universel des liquidités de la succession en faisant mention de la donation dont s’agit. Par ce testament, la de cujus a indiqué considérant avoir gâté suffisamment sa fille [K], elle faisait le choix de gratifier son autre fille [H] par ce legs.

Par ailleurs, comme le rappelle l’appelante elle même, elle a envisagé par protocole transactionnel, de percevoir la somme de 20 000 euros de la part de sa soeur en contrepartie de la somme de 56.900 euros que celle-ci avait perçu ‘indument’, selon son expression (pièce 27) suite au non paiement des droits d’usufruit de leur mère lors de la vente du bien de [Localité 11]. Elle n’ignorait donc rien du sort des immeubles de [Localité 11] puis de [Localité 5] et des rapports entre sa mère et sa soeur.

Par ailleurs aucune des pièces produites n’établit que dans le cadre des échanges avant l’introduction de l’action en partage, Mme [K] [C] se soit opposée au rapport de cette donation.

Le jugement est donc confirmé, les éléments du recel successoral reproché n’étant pas établis.

Sur l’avantage indirect en raison de la mise à disposition gratuite des biens donnés en nue-propriété

L’appelante soutient que le bien sis à [Localité 11], lotissement [Adresse 15], donné en nue propriété à sa soeur [K] [C], a été utilisé comme domicile familial par celle-ci et son mari pendant vingt cinq années privant ainsi leur mère de sa réserve d’usufruit. Celle-ci n’a par ailleurs jamais réclamé de loyers à sa fille en contrepartie de cette occupation du bien.

Elle considère que cette mise à disposition gratuite à sa soeur [K] et son époux constitue un avantage indirect rapportable à la succession, leur mère en ne percevant aucun loyer sur ledit immeuble s’étant appauvrie et Mme [C] s’étant enrichie.

En réplique l’intimée soutient d’une part l’irrecevabilité de la demande pour ne pas être chiffrée et d’autre part l’absence de tout fondement, affirmant qu’elle n’a bénéficié d’aucun avantage indirect dès lors qu’elle a jamais résidé dans le bien donné en nue propriété et que sa soeur échoue à établir un quelconque appauvrissement de leur mère en sa qualité d’usufruitière.

En application de l’article 843 du code civil, tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l’actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement : il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu’ils ne lui aient fait expressément hors part successorale. Seule une libéralité, qui suppose un appauvrissement du disposant dans l’intention de gratifier son héritier, est rapportable à la succession.

Les premiers juges ont rejeté la demande de Mme [H] [Z] en considérant qu’elle ne rapportait pas l’appauvrissement de feue Mme [F] et ne chiffrait pas le montant du rapport auquel serait tenue sa soeur [K] pour l’occupation du bien dont s’agit. Sa demande restant théorique elle échouait dans la preuve qui lui incombait de rapporter l’intention libérale qui aurait découler de l’occupation sans contrepartie par sa soeur de la maison de [Localité 11] dont leur mère était usufruitière.

Elle échoue tout autant en cause d’appel, en affirmant seulement que la mise à disposition de l’immeuble de [Localité 11] implique ‘de facto’ l’absence de contrepartie et donc implicitement un manque à gagner alors que la preuve lui incombe.

En tout état de cause l’appelante ne démontre par aucune pièce probante une jouissance constante et totale par sa soeur [K] du bien dont leur mère avait l’usufruit. Cette occupation est par ailleurs démentie en réplique par l’intimée qui justifie par la production de pièces fiscales (pièce 10) que le couple qu’elle forme avec son époux M. [C], a entre 1985 et 2010 vécu à différentes adresses, [Localité 12], [Localité 8], [Localité 17], [Localité 5] mais aussi à [Localité 11], mais non pas dans la maison issue de la donation sise lotissement [Adresse 15], mais dans celle qu’ils y avaient fait construire à l’adresse [Adresse 3]. Ils démontrent par ailleurs résider à [Localité 4] depuis 2010.

Ainsi s’ils ont pu séjourner dans le bien qui fait litige ce n’était que de manière occasionnelle de sorte qu’il n’a pu y avoir ni appauvrissement subi par leur mère, dont preuve n’est pas rapportée qu’elle ne pouvait plus jouir du bien durant la période considérée, ni enrichissement par Mme [C].

La décision est donc confirmée.

Sur la créance de Mme [C] à l’encontre de la succession

Mme [K] [C] entend se voir reconnaître créancière de la succession au titre des dépenses qu’elle a supporté en lieu et place de l’usufruitière sur le bien dont elle était nue-propriétaire et fixé le montant de sa créance à la somme de 27.847,64 euros qu’elle ventile ainsi :

Une première somme de 19.767,64 euros au titre de :

– L’intégralité des taxes foncières, d’habitation et redevance audiovisuelle de l’appartement [Adresse 6] à [Localité 5] depuis son acquisition en 2001 et jusqu’à sa vente en 2008,

– Les factures d’électricité et de gaz concernant ce bien dans lequel Madame [D] veuve [Z] venait de temps en temps,

– Les divers appels de fonds demandés par le Syndic de copropriété de l’immeuble situé [Adresse 6] à [Localité 5],

– Divers travaux correspondant à de l’entretien comme la pose de store ou de serrure dans le bien de [Localité 11].

Une deuxième somme de 8 080 euros (53.000 francs d’alors) pour l’installation d’une cuisine dans le bien situé [Adresse 6] à [Localité 5], selon devis de Novembre 2001, tel que cela ressort d’un duplicata de facture établi le 16 juillet 2016 (pièce 13 de l’intimée).

Le tribunal a fait droit à ces demandes en rejetant notamment la fin de non recevoir pour prescription opposée par Mme [H] [Z] au motif que celle-ci n’invoquait aucune prescription particulière et que la juridiction saisie ne pouvait se substituer à elle en soulevant d’office une fin de non-recevoir tirée d’une prescription particulière.

En cause d’appel, Mme [Z] oppose à cette demande la prescription quinquennale de droit commun. Cette fin de non recevoir est recevable car nouvelle en son fondement et pouvant être opposée en tout état de cause en application des articles 123 et 564 du code de procédure civile.

Aux termes de l’article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent pas cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait du connaitre les faits lui permettant de l’exercer.

Il ressort des dires de l’intimée et de pièce produites (pièces 6 à 9, et 13) que sa créance porte sur des sommes dont aurait du s’acquitter sa mère en qualité d’usufruitière entre l’année 2001 et l’année 2008. Ces sommes pouvaient être réclamées dès leur règlement. Compte tenu des date avancées et justifiées par les pièces produites (factures mais également avis d’impositions et contributions), il y a donc lieu d’affirmer prescrite la créance revendiquée qui ne pouvait l’être pour les sommes les plus récentes que jusqu’à l’année 2013.

Le jugement est donc infirmé de ce chef.

Sur les donations reçues par Mme [H] [Z] relative à l’acquisition de la voiture

Sur la demande de rapport de la somme de 25 600 euros

En application de l’article 843 du code civil, tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l’actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement : il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu’ils ne lui aient fait expressément hors part successorale.

Les legs faits à un héritier sont réputés faits hors part successorale, à moins que le testateur n’ait exprimé la volonté contraire, auquel cas le légataire ne peut réclamer son legs qu’en moins prenant.

Mme [D] [F] veuve [Z] a indiqué dans son codicille daté du mois d’avril 2013, qu’elle a versé pendant quatre ans la somme de 400 euros par mois à sa fille Mme [H] [Z], soit au total la somme de 19.200 euros (4 x 12 x 400) en compensation de son occupation exclusive et gratuite de l’appartement situé à [Localité 5] dont elle lui avait fait donation mais conservé l’usufruit.

Elle a précisé qu’à compter d’avril 2013, elle paierait le financement d’un véhicule, de marque Renault, pour sa fille Mme [H] [Z] d’un même montant mensuel de 400 € par mois. Il s’agissait clairement pour Mme [F] de la continuation du don manuel mensuel de 400 € versé désormais directement entre les mains de l’organisme de financement du dit véhicule, dont la de cujus a pris le soin de dire que la carte grise serait aux deux noms.

Mme [D] [F] étant décédée en août 2014, elle a donc financé 16 mensualités (avril 2013 ‘ août 2014) pour l’achat du dit véhicule, soit 6.400 euros.

L’intention libérale de la donatrice résulte du libellé même du codicille faisant mention de la première donation d’un montant de 19.200 euros.

Il s’agit en conséquence d’un don manuel rapportable tel que l’a analysé le jugement entrepris.

Cette qualification n’est pas contestée par l’appelante dans la mesure où elle ne demande à la cour que de dire que la somme de 6.400 euros lui a été faite hors part successorale. Elle admet donc implicitement le caractère rapportable des sommes versées antérieurement.

S’agissant de cette somme correspondant au paiement des échéances du crédit pour l’achat du véhicule, c’est vainement que l’appelante tente de faire juger que ces paiements qualifiés de donation ne peuvent être rapportés dès lors que ce véhicule a fait l’objet d’un accord amiable de restitution le 11 février 2015, faute pour elle de pouvoir continuer à régler les mensualités au décès de sa mère. C ‘est tout aussi vainement qui’elle soutient qu’ils auraient été faits hors parts.

C’est en effet à bon droit que le jugement a qualifié le versement des mensualités pour l’acquisition d’un véhicule pour sa fille de donation indirecte tout autant rapportable que les versements antérieurs et par ailleurs, le codicille ne précisant pas que ces paiements effectués à titre de don l’ont été hors part, les sommes dont s’agit doivent être rapportées en application de l’article 843 du code civil qui dispose que le caractère non rapportable du don doit être expresse.

Le jugement est donc confirmé de ce chef.

Sur la créance sollicitée par Mme [H] [Z] au titre de la voiture

Mme [Z] prétend avoir été instituée légataire à titre particulier du véhicule Renault financé en partie par sa mère. Elle a cependant du restituer ce véhicule faute de pouvoir le financer. Considérant qu’elle avait été instituée légataire à titre particulier de ce bien elle réclame une créance à ce titre.

Mme [C] soutient que la demande est à la fois irrecevable car nouvelle en cause d’appel et non fondée au visa de l’article 1042 du code civil.

En application de l’article 564 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

Mais en matière de partage de succession, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse.

Cette demande est donc recevable.

Mme [C] soutient que cette demande est caduque faute d’objet compte tenu du fait que la défunte ne pouvait léguer un bien qui ne lui appartenait pas et que le véhicule a été restitué le 11 février 2015.

Aux termes de l’article 1042 du code civil, ‘le legs sera caduc si la chose léguée a totalement péri pendant la vie du testateur. Il en sera de même si elle a péri depuis sa mort, sans le fait et la faute de l’héritier, quoique celui-ci ait été mis en retard de la délivrer, lorsqu’elle eût également dû périr entre les mains du légataire’.

Il résulte des débats et pièce produites que d’une part Mme [D] [F] ne pouvait pas léguer un bien dont elle n’était pas propriétaire et que d’autre part Mme [H] [Z] ne peut se prévaloir d’un legs qui est devenu caduc dès lors que ledit véhicule Renault a été restitué le 11 février 2015.

Cette demande est rejetée.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

En considération de la solution apportée au litige, chaque partie conservera la charge de ses dépens.

Il n’y a pas lieu de faire droit aux demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour ;

Confirme le jugement rendu le 27 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Bordeaux, sauf s’agissant de la demande de créance de la part de Mme [K] [C] ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Déboute Mme [K] [C] de sa demande de créance à l’égard de la succession pour prescription de celle-ci ;

Y ajoutant,

Déboute Mme [H] [Z] de sa demande de créance à titre de légataire du véhicule restitué ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens exposés en cause d’appel ;

Dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Hélène MORNET, présidente, et par Véronique DUPHIL, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

 


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