Droits des héritiers : 13 juillet 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 23/00894

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Droits des héritiers : 13 juillet 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 23/00894

13 juillet 2023
Cour d’appel de Poitiers
RG n°
23/00894

Ordonnance n 33

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13 Juillet 2023

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N° RG 23/00894 –

N° Portalis DBV5-V-B7H-GY4T

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[B] [E]

C/

[G] [I], membre de la SELARL ACTE JURIS

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Ordonnance notifiée aux parties le :

R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT

Contestation d’honoraires d’avocat

Rendue le treize juillet deux mille vingt trois

Dans l’affaire qui a été examinée en audience publique le vingt deux juin deux mille vingt trois par Madame Estelle LAFOND, conseillère, agissant sur délégation de la première présidente de la cour d’appel de POITIERS, conformément à son ordonnance en date du 1er décembre 2022, assistée de Madame Inès BELLIN, greffière, lors des débats.

ENTRE :

Madame [B] [E]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par sa fille, Mme [V] [U], en vertu d’un pouvoir spécial

DEMANDEUR en contestation d’honoraires,

D’UNE PART,

ET :

Maître [G] [I], membre de la SELARL ACTE JURIS

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS, substitué par Me Amélie GUILLOT, avocat au barreau de POITIERS

DEFENDEUR en contestation d’honoraires,

D’AUTRE PART,

ORDONNANCE :

– Contradictoire

– Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

– Signée par Madame Estelle LAFOND, conseillère agissant sur délégation de la première présidente et par Madame Inès BELLIN, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

Par lettre réceptionnée le 15 novembre 2022, Madame [B] [E] a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Saintes d’une contestation des honoraires facturés par Maître [G] [I], membre de la SELARL ACTE JURIS.

Par décision du 13 mars 2023, le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Saintes a taxé les honoraires de Maître [G] [I] à la somme de 1 538 euros hors taxes, soit 1 845,60 euros toutes taxes comprises.

La décision du bâtonnier a été notifiée à Madame [B] [E] le 31 mars 2023, laquelle a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d’appel de Poitiers le 18 avril 2023.

L’affaire, appelée une première fois à l’audience du 25 mai 2023, a été renvoyée à l’audience du 22 juin 2023.

Madame [B] [E] expose avoir sollicité avec son frère, Maître [G] [I], dans le cadre du règlement de la succession de leurs parents.

Elle indique que cette démarche a été entreprise à la demande du notaire en charge de la succession, pour le compte de l’ensemble des héritiers.

Elle déplore que la convention d’honoraires ait été établie en son seul nom et celui de son frère, alors que selon elle, elle aurait dû être établie au nom de l’ensemble des héritiers et adressée au notaire dans le cadre du règlement de la succession.

Madame [B] [E] soutient que Maître [G] [I] ne les aurait pas informés du montant de ses honoraires avant de leur adresser sa convention 19 mois après le premier rendez-vous.

Elle indique avoir refusé de signer la convention d’honoraires adressée par son avocat.

Madame [B] [E] déplore par ailleurs que la demande de provision ait été établie à son seul nom et indique ne pas avoir donné mandat seule à Maître [G] [I].

Elle conteste en outre le détail des diligences figurant sur la facture récapitulative qui lui a été adressée, estimant que son avocat ne justifierait pas de certaines des diligences mentionnées.

Madame [B] [E] fait valoir que la tarification d’un avocat doit tenir compte de la situation de fortune du client et qu’au regard de ses capacités financières, elle n’aurait pu donner mandat seule à son avocat.

Elle soutient que les honoraires de Maître [G] [I] devraient être partagés entre l’ensemble des héritiers de la succession et qu’elle ne serait redevable que de sa seule quote-part.

Elle sollicite la condamnation de Maître [G] [I] à lui payer la somme de 400 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Maître [G] [I], membre de la SELARL ACTE JURIS, indique avoir reçu Madame [B] [E] et son frère, Monsieur [M] [E], lors d’un rendez-vous d’1h30 dans le cadre de la succession de leurs parents pour permettre une liquidation amiable ou à défaut judiciaire.

Il soutient avoir indiqué que les honoraires seraient facturés au temps passé et en fonction du caractère amiable ou judiciaire de la liquidation.

Maître [G] [I] indique qu’une lettre de mission aurait été adressée à Madame [B] [E], accompagnée d’une demande de provision d’un montant de 978 euros.

Il fait valoir que cette facture n’aurait pas été contestée par Madame [B] [E], laquelle aurait continué de solliciter ses services.

Maître [G] [I] soutient avoir consacré 5h15 au traitement du dossier de Madame [B] [E].

Il indique que Madame [B] [E] a, dans un premier temps, déposé une plainte à son encontre auprès du bâtonnier de l’ordre des avocats dans un cadre disciplinaire, lequel a rendu une décision le 26 octobre 2022, l’informant qu’aucune procédure ne serait engagée.

Il fait valoir que les griefs de Madame [B] [E] seraient les mêmes que ceux objets de la présente contestation d’honoraires et que ce ne serait qu’à la suite de la décision du bâtonnier que Madame [B] [E] aurait à nouveau saisi ce dernier d’une contestation de ses honoraires.

Maître [G] [I] soutient être intervenu pour Madame [B] [E] qui l’aurait seule confirmée dans son mandat et que tous les éléments utiles relatifs à la procédure aurait été communiqués à Madame [B] [E] selon courrier en date du 23 septembre 2021.

Il expose qu’après envoi d’une mise en demeure le 12 juillet 2022, cette dernière lui aurait adressé de nouveaux éléments relatifs à la procédure, sans contester le montant de la provision sollicitée.

Maître [G] [I] indique avoir mis fin à son mandat, le 22 août 2022, à la suite du courrier de Madame [B] [E] en date du 3 août 2022, l’informant d’un changement de notaire.

Il soutient que Madame [B] [E] ne se serait jamais plainte de la qualité de son intervention et que les diligences accomplies justifieraient les honoraires facturés.

Il sollicite la condamnation de Madame [B] [E] à lui payer la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la recevabilité :

Selon l’article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel qui est saisi par l’avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d’un mois à compter de la notification de la décision.

En l’espèce, la décision du bâtonnier a été notifiée à Madame [B] [E] le 31 mars 2023, laquelle a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d’appel de Poitiers le 18 avril 2023.

Le recours de Madame [B] [E] est donc recevable et régulier en la forme.

Sur le fond :

Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.

Il résulte de l’article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.

A défaut de convention, les honoraires sont fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l’article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.

Il sera rappelé qu’il n’entre pas dans les pouvoirs du juge de l’honoraire de se prononcer sur l’éventuelle responsabilité civile de l’avocat à l’égard de son client, liée au manquement à son devoir de conseil et d’information, ou à une exécution défectueuse de sa prestation. De tels griefs relèvent de la responsabilité professionnelle de l’avocat et non de l’évaluation des honoraires et ils ne peuvent pas non plus justifier une réduction de sa rémunération.

Sur le mandat de Maître [I] :

En l’espèce, Madame [B] [E] conteste avoir donné seule mandat à Maître [I].

Elle estime que l’ensemble des héritiers étant intéressé par la procédure engagée, il devrait être considéré que l’ensemble des héritiers a donné mandat à Maître [I].

Si Madame [B] [E] a été reçue en rendez-vous par Maître [I] en présence de son frère, Monsieur [M] [E], il n’en demeure pas moins que seule cette dernière a confirmé le mandat de son avocat, à l’exception de tout autre héritier, tel que cela ressort des éléments versés au débats.

Il en résulte que Madame [B] [E], unique cliente de Maître [G] [I], doit être considérée comme la seule débitrice des honoraires facturés par son avocat au titre des diligences accomplies.

Sur la rémunération de l’avocat :

Aucune convention d’honoraires signée par les parties n’est versée aux débats, de sorte qu’il y a lieu de considérer qu’aucune convention d’honoraires n’a été régularisée.

Il résulte des pièces produites et des explications données par les parties que Maître [G] [I] a :

reçu Madame [B] [E] lors d’un rendez-vous d’1h45 à son cabinet le 4 juin 2020.

analysé les documents, étudié le dossier et effectué des recherches. Le temps passé au titre de ses diligences, évalué par Maître [I] à 2 heures, apparaît justifié au regard de la complexité de l’affaire et de la prestation accomplie ;

la rédaction d’une consultation écrite. Le temps passé au titre de ses diligences, évalué par Maître [I] à 1h30, apparaît également justifié au regard de la complexité de l’affaire et de la prestation accomplie.

Les honoraires réclamés par Maître [G] [I] s’établissent à la somme de 1 538 euros hors taxes, soit 1 845,60 euros toutes taxes comprises, correspondant à 5h15 de travail sur la base d’un taux horaire de 180 euros hors taxes pour le rendez-vous et l’étude du dossier et 220 euros hors taxes pour la rédaction de la consultation, outre 533 euros hors taxes, soit 639,60 euros au titre des frais en ce compris l’ouverture du dossier, internet et téléphone, le traitement des correspondances et mails reçus, l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception, l’envoi de correspondances et mails simples et un forfait photocopies.

Il suit que la facture réclamée, pour un montant de 1 538 euros hors taxes, soit 1 845,60 euros toutes taxes comprises apparaît justifiée au regard des éléments de la cause et conforme aux dispositions de l’article 10 alinéa 2 de la loi du 31 décembre 1971.

La décision du bâtonnier est confirmée et les honoraires de Maître [G] [I] sont taxés à la somme de 1 538 euros hors taxes, soit 1 845,60 euros toutes taxes comprises.

Succombant à la présente instance, Madame [B] [E] sera condamnée à payer à Maître [G] [I] la somme de 400 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’au dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS :

Nous, Estelle LAFOND, conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence, statuant par délégation de la première présidente, par mise à disposition au greffe et par ordonnance contradictoire,

Déclarons le recours de Madame [B] [E] recevable et régulier en la forme,

Confirmons l’ordonnance du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Saintes en date du 13 mars 2023 ;

En conséquence,

Taxons les honoraires de Maître [G] [I] à la somme de 1 538 euros hors taxes, soit 1 845,60 euros toutes taxes comprises ;

Enjoignons à Madame [B] [E] de régler à Maître [G] [I] la somme de 1 845,60 euros toutes taxes comprises ;

Condamnons Madame [B] [E] à payer à Maître [G] [I] une indemnité de 400 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons Madame [B] [E] aux dépens.

La greffière, La déléguée de la première présidente,

 


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