COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-6
ARRÊT AU FOND
DU 06 OCTOBRE 2022
N° 2022/345
N° RG 21/06457
N° Portalis DBVB-V-B7F-BHLZ2
Association COMITE DES FETES DE MOURIES
C/
[F] [N]
S.A. SWISS LIFE
Organisme CPAM DU PUY DE DOME
Organisme CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
-SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH
-Me Philippe MAIRIN
– SELARL CABINET CERMOLACCE-GUEDON
-SCP BBLM
Décision déférée à la Cour :
Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TARASCON en date du 08 Avril 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 19/01492.
APPELANTE
Association COMITE DES FETES DE MOURIES,
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, postulant et assisté par Me Patrick GONTARD, avocat au barreau d’AVIGNON substitué par Me Pierre PAMARD, avocat au barreau d’AVIGNON, plaidant.
INTIMES
Monsieur [F] [N]
né le [Date naissance 1] 1979 à [Localité 5],
demeurant [Adresse 6]
représenté et assisté par Me Philippe MAIRIN, avocat au barreau de TARASCON, postulant et plaidant.
S.A. SWISS LIFE La société SWISS LIFE,
Société anonyme au capital de 80.000.000 Euros, dont le siège social est à [Adresse 4], poursuites et diligences de son Président Directeur Général y domicilié, ladite société inscrite au RCS de PARIS sous le n° B 391 277 878,
demeurant [Adresse 4]
représentée et assistée par Me Pascal CERMOLACCE de la SELARL CABINET CERMOLACCE-GUEDON, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Agnès ERMENEUX, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE.
Organisme CPAM DU PUY DE DOME LA CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME,
Vient aux droits et obligations, depuis le 1er janvier 2020, de la Caisse Locale Déléguée pour la Sécurité Sociale des Travailleurs Indépendants qui, en vertu de l’article 15 de la loi N° 2017-1836 de financement de la Sécurité Sociale pour 2018, agissait au lieu et place des Caisses Régionales du Régime Social des Indépendants (RSI), et agissant en qualité de pôle national en charge de l’activité de recours contre tiers relatif aux travailleurs indépendants et leurs ayants droit et/ou bénéficiaires affiliés au sein d’une caisse de France métropolitaine ou des départements et régions d’outre-mer, en vertu d’une décision du Directeur Général de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie du 1er janvier 2020, relative à l’organisation en matière d’exercice des recours ubrogatoires prévus aux articles L. 376-1 et suivants et L. 454-1 du Code de la Sécurité Sociale, prise en application de l’article L. 221-3-1 du Code de la Sécurité Sociale, et publiée au bulletin officiel santé, protection sociale, solidarité n° 2020/01 du 15 février 2020,
demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Gilles MARTHA de la SCP BBLM, avocat au barreau de MARSEILLE.
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE
Assignation le 13/07/2021, à personne habilitée. Signification le 10/09/2021, à personne habilitée. Signification des conclusions le 10/09/2021, à personne habilitée,
demeurant [Adresse 7]
Défaillante.
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 28 Juin 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président
Madame Anne VELLA, Conseillère
Madame Fabienne ALLARD, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Octobre 2022.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Octobre 2022,
Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS & PROCÉDURE
Le comité des fêtes de la commune de Mouriès (Bouches-du-Rhône) a organisé le 21/08/2018 un abrivado (lâcher de taureaux) à laquelle M. [N] participait à cheval en qualité de gardian.
Au plus fort de la course, alors que les bêtes étaient lancées sur le parcours que délimitaient des barrières déployées conformément aux instructions du comité des fêtes, les chevaux se sont rabattus à droite et ont serré les barrières de sécurité. Ce faisant, la jambe droite de M. [N] a été transpercée par une tige qui dépassait de la bride de fixation réunissant deux barrières ‘ ce dont il est résulté une fracture ouverte de la diaphyse du péroné.
Par acte d’huissier de justice des 04 et 11/10/2019, M. [N] a saisi le tribunal de grande instance de Tarascon d’une action aux fins de réparation de son préjudice corporel, sur le fondement de l’article 1242 du code civil, dirigée contre le comité des fêtes de Mouriès, au contradictoire la caisse primaire d’assurance-maladie des Bouches-du-Rhône.
Par assignation du 06/11/2019, M. [N] a appelé en cause le RSI.
Par ordonnance du 27/10/2019, le juge de la mise en état ordonné la jonction des instances.
La SA Swiss Life est volontairement intervenue à l’instance, en qualité d’assureur responsabilité civile du comité des fêtes de Mouriès.
Par jugement réputé contradictoire du 08/04/2021, le tribunal judiciaire de Tarascon a’:
– reçu la SA Swiss Life en son intervention volontaire,
– déclaré le comité des fêtes de Mouriès responsable de l’accident survenu le 21/08/2018 dont a été victime M. [N],
– dit que le comité des fêtes de Mouriès et son assureur, la SA Swiss Life, seront tenus à réparation des conséquences dommageables de cet accident,
– ordonné une expertise médicale avec mission d’usage, et commis pour y procéder le docteur [G] [D],
– condamné solidairement le comité des fêtes de Mouriès et la SA Swiss Life à payer à M. [N] les sommes de’:
‘ 10.000,00 € de provision à valoir sur la réparation future de son préjudice corporel,
‘ 1.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné le comité des fêtes de Mouriès à payer à la caisse primaire d’assurance-maladie du Puy-de-Dôme les sommes de’:
‘ 5.923,21 € à valoir sur la réparation future de son préjudice corporel,
‘ 1.091,00 € au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion,
‘ 700,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes,
– condamné le comité des fêtes de Mouriès aux entiers dépens,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
Pour statuer ainsi, le premier juge a considéré les éléments suivants’:
– l’anormalité de la bride d’attachement des deux barrières est caractérisée par plusieurs attestations,
– le comité des fêtes est organisateur de la manifestation, il est responsable a ce titre de la sécurité’pendant toute la durée de l’abrivado : il est donc gardien des barrières qui appartiennent à la mairie,
– le fait que le parcours ait fait l’objet d’une reconnaissance préalabe par les services chargés de la sécurité et des représentants des participants n’emporte aucun effet exonératoire en soi’;
– le défaut de maîtrise de sa monture par M. [N] n’est pas caractérisé ; s’il l’était, il ne constituerait pas un cas de force majeure en tout état de cause.
Par déclaration du 29/04/2021 dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, le comité des fêtes de Mouriès a interjeté appel du jugement du tribunal judiciaire de Tarascon en visant tous les chefs de la décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions responsives n°III notifiées par RPVA le 08/02/2022, auxquelles il est renvoyé par application de l’article 455 du code de procédure civile pour un plus ample exposé des moyens et sur l’évaluation des préjudices, l’association Comité des Fêtes de Mouriès demande à la cour de’:
– le réformer en ce qu’il l’a déclaré entièrement responsable des conséquences du sinistre subi par M. [N],
Et, statuant à nouveau,
– juger que M. [N] a accepté le risque lié à la participation a cette manifestation,
– juger que le comportement de M. [N] l’exonère de sa responsabilité,
À titre subsidiaire,
– juger que M. [N] supportera une partie de la responsabilité,
– juger que dans l’hypothèse d’une responsabilité même partielle de l’association, celle-ci sera relevée et garantie de toutes condamnations à intervenir par la SA Swiss Life,
– condamner M. [N] au paiement d’une somme de 3.000,00 € de dommages-intérêts pour procédure abusive, outre 4.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, l’association Comité des Fêtes de Mouriès fait valoir les éléments suivants :
– lorsque des jeunes du village ont déployé une bâche en travers de la route, ce qui a eu pour effet d’effrayer les chevaux qui se sont tous rabattus contre les barrières, M. [N] a pris peur et décidé de mettre pied à terre, ainsi qu’il résulte de l’attestation de M. [A]’: c’est alors que M. [N] a heurté une bride reliant deux barrières de sécurité’;
– la fonction assignée aux barrières est de protéger la foule massée à l’extérieur du parcours’; en tout état de cause, le gardian participe lui aussi à sécuriser la course’: aussi attend-t-on de lui qu’il ait un pouvoir propre de direction de son cheval’; or, plusieurs témoins attestent de ce que M. [N] ne maîtrisait pas sa monture’;
– en participant à une abrivado, M. [N] a nécessairement accepté les risques inhérents à ce spectacle de rue.
* * *
Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives notifiées par RPVA le 29/04/2022, auxquelles il est renvoyé par application de l’article 455 du code de procédure civile pour un plus ample exposé des moyens et sur l’évaluation des préjudices, M. [N] demande à la cour de’:
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré le comité des fêtes de Mouriès responsable de l’accident advenu le 21/08/2018 à M. [N], et dit que le comité des fêtes de Mouriès et son assureur, la SA Swiss Life, seront tenus à réparation,
En conséquence,
– condamner le comité des fêtes de la commune de Mouriès solidairement avec son assureur la SA Swiss Life à réparer les conséquences dommageables de l’accident advenu le 21/08/2018 à M. [N],
À cet effet,
– confirmer le jugement en ce qu’il a désigné le docteur [T] en qualité d’expert médical,
– condamner le comité des fêtes de la commune de Mouriès solidairement avec son assureur, la SA Swiss Life, à lui payer la somme provisionnelle de 10.000,00 € à valoir sur la réparation future de son préjudice corporel,
– condamner le comité des fêtes de la commune de Mouriès avec son assureur, la SA Swiss Life, au règlement à son profit d’une somme de 5.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, M. [N] développe les moyens suivants :
– sa jambe droite est entrée en contact avec la partie saillante et non protégée de la bride de fixation des deux barrières de sécurité, qui était tournée vers l’intérieur du parcours de l’abrivado’;
– les photographies produites et les attestations de Mme [S], M. [Y], Mme [B] et Mme [A] caractérisent la matérialité de l’accident’et l’anormalité de la bride d’attachement des deux barrières ;
– le Comité des Fêtes est responsable non seulement en qualité de gardien de la bride’;
– la meilleure preuve de ce que comité des fêtes de Mouriès est conscient de la dangerosité de la bride telle qu’elle était positionnée est que la bride a précisément été modifiée l’année d’après afin qu’elle ne présente plus aucune partie saillante’;
– la véhémence des attestations produites par le comité des fêtes de Mouriès trois ans après l’abrivado ne manque pas de surprendre’; en tout état de cause, le comité des fêtes de Mouriès est lui-même en tort puisqu’il a donné le signal du départ alors que des jeunes avaient déployé des bâches en travers du parcours, dont il était prévisible qu’elles effraieraient les chevaux et/ou les taureaux’;
– évoquer l’acceptation des risques n’a pas de sens’: l’accident de M. [N] n’a rien à voir avec la maîtrise de sa monture, ni même avec la dangerosité des taureaux’;
– en outre, la faute de la victime ne fait obstacle à l’engagement de la responsabilité du gardien de la chose que si elle est à l’origine exclusive du dommage (Civ. 2, 07/04/2022, 20-19.746).
* * *
Aux termes de ses dernières conclusions d’intimé n°2 et d’appel incident notifiées par RPVA le 13/06/2022, auxquelles il est renvoyé par application de l’article 455 du code de procédure civile pour un plus ample exposé des moyens et sur l’évaluation des préjudices, la SA Swiss Life demande à la cour de’:
– rejeter toutes prétentions contraires,
– juger recevable son appel incident.
En conséquence,
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :
‘ déclaré le comité des fêtes de Mouriès responsable de l’accident advenu le 21/08/2018 à M. [N],
‘ dit que le comité des fêtes de Mouriès et son assureur, la SA Swiss Life, sont tenus à réparation des conséquences dommageables de cet accident,
‘ ordonné une expertise médicale confiée au docteur [D], avec mission d’usage,
‘ condamné solidairement le comité des fêtes de Mouriès et son assureur, la SA Swiss Life, à payer à M. [N] les sommes de 10.000,00 € à titre d’indemnité provisionnelle à valoir sur l’indemnisation de son préjudice et de 1.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ et ainsi débouté la SA Swiss Life de demande de mise hors de cause en sa qualité d’assureur du comité des fêtes de la commune de Mouriès, faute de lien de causalité entre le dommage et la faute et le rejet des demandes de M. [N], outre la condamnation de M. [N] à payer à la SA Swiss Life la somme de 1.500,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l’instance,
Statuant à nouveau,
– juger que seule la faute de la victime par son mauvais positionnement de la course mais aussi par sa mauvaise maîtrise du cheval, est à l’origine de l’accident,
En conséquence,
– juger que M. [N] ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une faute du comité des fêtes de Mouriès,
– juger que M. [N] ne rapporte pas la preuve d’un lien de causalité entre le dommage et une faute du comité des fêtes de Mouriès,
– mettre hors de cause le comité des fêtes de Mouriès,
– mettre hors de cause la SA Swiss Life en sa qualité d’assureur du comité des fêtes de Mouriès,
– débouter purement et simplement M. [N] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– condamner tout succombant à payer à la SA Swiss Life la somme de 1.500,00 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, la SA Swiss Life développe les moyens suivants :
‘ l’anormalité de la chose instrument du dommage n’est pas caractérisée’:
– l’abrivado a été autorisée par arrêté du maire du 12/07/2018, et le constat de conformité du parcours effectué le 21/08/2018 atteste de ce que le trajet de l’abrivado a été vérifié au préalable au contradictoire de la mairie de Mouriès, de la manade [H], de la police municipale, du responsable des services techniques et du président de l’association du comité des fêtes de Mouriès’;
– les barrières protègent le public des taureaux’: leur mise en place est nécessaire’;
– le boulon de la bride de fixation dépasse nécessairement d’un côté ou de l’autre, c’est-à-dire à l’intérieur ou à l’extérieur du parcours où se masse le public’;
‘ M. [N] a commis une faute à l’origine de son préjudice :
– il maîtrisait mal sa monture, ce dont attestent plusieurs témoins.
* * *
Aux termes de ses dernières conclusions d’intimée notifiées par RPVA le 20/07/2021, auxquelles il est renvoyé par application de l’article 455 du code de procédure civile pour un plus ample exposé des moyens et sur l’évaluation des préjudices, la caisse primaire d’assurance-maladie du Puy-de-Dôme demande à la cour de’:
– confirmer le jugement entrepris,
– condamner l’association du comité des fêtes de Mouriès à lui verser la somme de 500,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner l’association du comité des fêtes de Mouriès aux entiers dépens de l’instance.
* * *
La clôture a été prononcée le 14/06/2022.
Le dossier a été plaidé le 28/06/2022 et mis en délibéré au 06/10/2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la nature de la décision rendue’:
L’arrêt rendu sera réputé contradictoire, conformément à l’article 474 du code de procédure civile.
Sur la responsabilité du comité des fêtes de Mouriès en qualité de gardien’de la bride :
L’article 1242 alinéa 1er du code civil institue une responsabilité de plein droit, objective, en dehors de toute notion de faute qui pèse sur le gardien de la chose intervenue dans la réalisation du dommage, sauf à prouver qu’il n’a fait que subir l’action d’une cause étrangère, le fait d’un tiers imprévisible et irrésistible ou la faute de la victime ; lorsque la chose est par nature immobile, la preuve qu’elle a participé de façon incontestable et déterminante à la production du préjudice incombe à la victime qui doit démontrer que la chose, malgré son inertie, a eu un rôle causal et a été l’instrument du dommage par une anormalité dans son fonctionnement, son état, sa fabrication, sa solidité ou sa position.
En revanche, c’est au gardien qu’il revient le échéant de démontrer qu’une faute imputable à la victime a participé partiellement ou totalement à ce dommage.
La présomption de garde s’attachant à la qualité de propriétaire de la chose peut être combattue par la preuve contraire. Il n’est pas contesté que la commune de Mouriès soit propriétaire des barrières litigieuses. Pour autant, le transfert contractuel au comité des fêtes des pouvoirs d’usage, de contrôle et de direction de la bride de fixation résulte de façon non équivoque du croisement :
– de l’arrêté du 12/07/2018 pris par le maire, «’vu la demande présentée par le comité des fêtes (l’organisateur) tendant à organiser une manifestation taurine (bandido) le mardi 21/08/2018 à l’occasion de la fête Votive’», selon lequel «’les barrières et les panneaux de signalisation nécessaires seront apposés le jour même avant chaque manifestation pour permettre l’application des présentes dispositions par l’organisateur’» (article 16 de l’arrêté municipal), et,
– de l’article 5 de la convention pour l’organisation de spectacles taurins de rue signée le 30/03/2018 entre le comité des fêtes, organisateur attitré, et la manade [H], dont l’article 5 § 1 stipule que «’l’organisateur s’engage à respecter l’arrêté municipal pris pour l’organisation de l’événement dans ses moindres détails’», et dont l’article 6 § 2 confère expressément à l’organisateur la responsabilité du déploiement des barrières de protection.
Le témoignage de Mmes [M] [S], [E] [B] et [L] [A] ainsi que celui de M. [U] [Y], que M. [N] a produits dès 2018, s’accordent pour admettre’:
– que la monture de M. [N] a été déportée sur la droite par le flux des taureaux qui cherchaient à éviter un obstacle au sol que des jeunes du village avaient cru oppportun de déployer,
– que la bride de fixation réunissant deux barrières dépassait à l’intérieur du parcours de la manifestation taurine n’était pas protégée, et,
– que c’est après avoir été blessé que M. [N] est descendu de cheval et non l’inverse (soutenu par le comité des fêtes de Mouriès en page 12 de ses dernières conclusions).
L’anormalité du dépassement de la bride de fixation à l’intérieur du parcours résulte du fait qu’elle se trouvait à hauteur des membres inférieurs des gardians à cheval, ceux-ci étant susceptibles de frôler les barrières pour canaliser le flux taurin à l’intérieur du parcours.
La responsabilité du comité des fêtes de Mouriès est engagée et, partant, la garantie de la SA Swiss Life est due.
Pour tenter de s’exonérer de sa responsabilité de gardien, le comité des fêtes de Mouriès soutient que M. [N] était un piètre cavalier et produit en ce sens le témoignage, établi en 2021, de MM. [I] [H], [R] [P], [K] [W], [J] [V] ainsi que de Mme [O] [C]. Ces pièces n’emportent pas la conviction’: elles reflètent un jugement de valeur plus qu’elles ne comportent une description précise des circonstances dans lesquelles le comportement de M. [N] aurait contribué à provoquer sa blessure.
En outre, les témoignages produits attestent de ce que le changement de direction des taureaux a été dû à la présence de bâches au sol, et de ce que le départ de l’abrivado a été donné malgré la présence de la bâche au sol, c’est-à-dire en méconnaissance des obligations incombant au comité des fêtes en qualité d’organisateur. Par suite, même en admettant que M. [N] ait laissé sa monture prendre le dessus, sa faute ne satisfait aucunement au critère d’exclusivité requis par la jurisprudence pour exonérer le gardien.
Le jugement entrepris sera confirmé, y compris en ce qu’il a ordonné une expertise médicale pour évaluer le préjudice corporel de M. [N] et en ce qu’il a condamné le comité des fêtes de Mouriès et la SA Swiss Life à lui allouer une provision de 10.000,00 €.
Sur la demande du comité des fêtes de Mouriès pour procédure abusive’:
La jugement étant confirmé, la demande du comité des fêtes de Mouriès est sans objet. Le comité des fêtes est débouté de sa demande.
Sur les demandes de la caisse primaire d’assurance-maladie du Puy-de-Dôme’:
Une expertise médicale ayant été ordonnée par le premier juge, il n’y a pas lieu de statuer en l’état sur les demandes de la caisse. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.
Sur les demandes annexes’:
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime doivent être confirmées.
Le comité des fêtes de Mouriès et la SA Swiss Life qui succombent dans leurs prétentions supporteront la charge des entiers dépens d’appel et ne peuvent, de ce fait, bénéficier des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité justifie de condamner in solidum le comité des fêtes de Mouriès et la SA Swiss Life à payer à M. [N] une indemnité de 1.000,00 € au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement entrepris, hormis en ce qu’il a statué sur les demandes de la caisse primaire d’assurance-maladie du Puy-de-Dôme.
Statuant sur les points infirmés et y ajoutant,
Déboute le comité des fêtes de Mouriès de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Condamne in solidum le comité des fêtes de Mouriès et la SA Swiss Life à payer la somme de 1.000,00 € (mille euros) à M. [N] au titre des frais irrépétibles qu’il a engagés en cause d’appel.
Condamne in solidum le comité des fêtes de Mouriès et la SA Swiss Life aux entiers dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT