AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE
RAPPORTEUR
R.G : N° RG 21/00878 – N° Portalis DBVX-V-B7F-NMKY
Société [4]
C/
CPAM DE LA LOIRE
APPEL D’UNE DÉCISION DU :
Pole social du TJ de SAINT ETIENNE
du 07 Janvier 2021
RG : 15/00483
AU NOM DU PEUPLE FRAN’AIS
COUR D’APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE D
PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU 28 MARS 2023
APPELANTE :
SAS [4]
[Adresse 6]
[Localité 2]
représentée par Me Nicolas FANGET de la SELARL VEBER ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substituée par Me Lola GENET, avocat au barreau de LYON
Accident du travail de M. [D]
INTIMEE :
CPAM DE LA LOIRE
[Adresse 5]
[Localité 1]
représentée par Me Nicolas ROGNERUD de la SELARL AXIOME AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Anne-laure CHAUFOUR, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 22 Novembre 2022
Présidée par Nathalie PALLE, Présidente, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de eMalika CHINOUNE, Greffier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
– Nathalie PALLE, présidente
– Thierry GAUTHIER, conseiller
– Vincent CASTELLI, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 28 Mars 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Nathalie PALLE, Présidente, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [D] (la victime) a été embauché par la société [4] (l’employeur).
Le 15 décembre 2014, l’employeur a renseigné une déclaration d’accident du travail pour un accident survenu le 12 décembre 2014 à 16h05, dans les circonstances suivantes: «(la victime) a ressenti une douleur alors qu’il tirait un rolls pour le stocker en chambre froide. Nature de l’accident : étirement. Siège des lésions : épaule gauche. Nature des lésions : douleur», accompagnée d’un certificat médical initial du 13 décembre 2014, prescrivant un arrêt de travail, ensuite prolongé jusqu’au 18 mai 2016, date de la consolidation.
Par décision du 18 décembre 2014, notifiée le 30 décembre 2014 à la victime, la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire (la caisse) a reconnu le caractère professionnel de l’accident.
Après avoir saisi la commission de recours amiable, laquelle a rejeté sa contestation par décision du 6 juillet 2015, l’employeur a saisi d’un recours le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Etienne, devenu le tribunal judiciaire de Saint-Etienne le 1er janvier 2020.
L’affaire a été enregistrée sous le numéro 15/483.
Le 18 juillet 2016, la victime a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Par décision du 29 juillet 2016, la caisse a attribué à la victime un taux d’incapacité permanente partielle de 17%, dont 5% pour le taux professionnel, à la date de consolidation du 18 mai 2016 pour des « séquelles algiques (nocturnes, port de charges), fonctionnelles avec mouvements en hauteur atteignant l’horizontale en passif (inférieurs en actif), déficit des rotations et de la force sans amyotrophie significative».
La caisse a informé l’employeur de la réception d’un certificat médical de rechute et par courrier du 18 novembre 2016, elle l’a informé de la prise en charge de la rechute au titre de l’accident du travail du 12 décembre 2014.
Le 15 décembre 2016, l’employeur a saisi la commission de recours amiable d’une contestation.
Le 28 décembre 2016, le service de contrôle gestion du risque fraudes de la caisse a déposé une plainte auprès du procureur de la République de [Localité 1] pour fausse déclaration afin d’obtenir des prestations sociales au titre de la législation du travail.
Par décision du 13 janvier 2017, la commission de recours amiable a dit la rechute imputable à l’accident du travail du 12 décembre 2014 et a informé l’employeur que la décision de prise en charge de la rechute est sans conséquence sur son compte employeur.
Le 13 mars 2017, l’employeur a saisi d’un recours le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Etienne en contestation de cette décision.
L’affaire a été enregistrée sous le numéro 17/156.
Par deux jugements du 1er avril 2019 (n°15/483 et n°17/156), le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Etienne a ordonné un sursis à statuer dans l’attente de la décision du tribunal correctionnel de Saint-Etienne.
Par jugement du 30 avril 2019, le tribunal correctionnel a relaxé la victime des chefs d’escroquerie et de fausses déclarations commis au préjudice de la caisse.
Par jugement du 7 janvier 2021, le pôle social du tribunal judiciaire a :
– ordonné la jonction des procédures enrôlées sous les numéros RG 15/483 et 17/156, sous l’unique numéro 15/483,
– déclaré irrecevable la demande de l’employeur introduite le 15 juillet 2015, tendant à ce que la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l’accident survenu le 12 décembre 2014 dont a été victime l’assuré lui soit déclarée inopposable,
– déclaré irrecevable la demande de l’employeur introduite le 10 mars 2017, tendant à ce que la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la rechute déclarée par l’assuré le 21 octobre 2016 lui soit déclarée inopposable,
Avant-dire droit
– déclaré recevable la demande de l’employeur introduite le 15 juillet 2015, tendant à ce que la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, des arrêts de travail prescrits à l’assuré pour la période du 11 janvier 2015 au 4 mai 2016 lui soit déclarée inopposable,
– ordonné une expertise judiciaire sur pièces, confiée au docteur [P] [M],
– enjoint à la caisse et/ou son service médical de communiquer l’entier dossier médical de l’assuré dès l’acceptation de sa mission par l’expert,
– dit que la caisse devra faire l’avance des frais d’expertise,
– dit que les parties seront à nouveau convoquées à l’audience par les soins du greffe du tribunal pour qu’il soit statué sur l’opposabilité des soins et des arrêts de travail prescrits à l’employeur,
– dit n’y avoir lieu à statuer sur les dépens,
– réserve le surplus des demandes.
Le 5 février 2021, l’employeur a fait appel de ce jugement.
Dans ses conclusions déposées le 15 novembre 2022, oralement soutenues à l’audience des débats, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses moyens, l’employeur demande à la cour de réformer le jugement en ce qu’il a :
– déclaré irrecevable sa demande introduite le 15 juillet 2015 tendant à ce que la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l’accident survenu le 13 décembre 2014 lui soit déclarée inopposable,
– déclaré irrecevable sa demande introduite le 10 mars 2017 tendant à ce que la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la rechute déclarée par l’assuré le 21 octobre 2016 lui soit déclarée inopposable.
Statuant à nouveau,
– déclarer recevable sa demande relative à l’accident du travail du 12 décembre 2014,
– déclarer recevable sa demande relative à la rechute du 21 octobre 2016,
– réformer la décision prise par la caisse le 18 décembre 2014 et la décision de la commission de recours amiable du 6 juillet 2015 relatives à l’accident du travail du 12 décembre 2014,
– annuler la prise en charge de l’accident du travail du 12 décembre 2014 au titre de la législation sur les accidents du travail,
– réformer la décision prise par la caisse le 18 novembre 2016 et la décision de la commission de recours amiable du 13 janvier 2017 relatives à la prise en charge de la rechute du 21 octobre 2016,
– annuler la prise en charge de cette rechute au titre de la législation sur les accidents du travail,
– condamner la caisse au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code procédure civile outre aux dépens de l’instance.
Dans ses conclusions déposées par voie électronique le 8 novembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses moyens, et les observations formulées à l’audience des débats, la caisse demande à la cour de :
– confirmer la décision,
– débouter l’employeur de ses autres demandes notamment relative à la durée des arrêts de travail,
– condamner l’employeur à payer à la caisse la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1 – Sur la recevabilité des actions de l’employeur
1-1 Sur la recevabilité de la contestation de la prise en charge de l’accident du travail du 12 décembre 2014
Il résulte de l’article R 142-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n°2012-1032 du 7 septembre 2012, que la saisine de la commission de recours amiable d’un organisme de sécurité sociale doit, à peine de forclusion, être effectuée dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision de cet organisme dès lors que cette notification mentionne ce délai.
En l’espèce, le 18 février 2015, l’employeur a déclaré saisir la commission de recours amiable de la caisse «à la suite de la décision de prise en charge rendue par le service des risques professionnels le 18 décembre 2014 au titre de l’accident du travail dont a été victime M. [D] le 12 décembre 2014» (pièce n°2 de l’employeur). L’employeur y rappelle les faits en indiquant qu’il n’y a pas eu de témoin, sans toutefois remettre en cause la matérialité de la survenance de l’accident aux temps et lieu de travail, en se référant exclusivement et expressément à la durée des arrêts de travail prescrits, relevant selon lui d’une cause totalement étrangère à la lésion initiale, tout en estimant que celle-ci évolue en dehors de toute relation avec le travail en raison d’un état pathologique préexistant et il conclut par la phrase dactylographiée en caractères gras suivante : « nous contestons, en conséquence, la durée des arrêts de travail délivrés à l’assuré», ajoutant se réserver la possibilité de solliciter une expertise médicale judiciaire afin de vérifier l’origine exacte des lésions justifiant les arrêts de travail et le bien fondé de leur durée.
Il résulte de l’analyse de ce courrier peu clair que, nonobstant la nécessaire référence à la décision du 18 décembre 2014 de prise en charge au titre de l’accident du travail du 12 décembre 2014, comme fondant l’application de la présomption d’imputabilité à l’accident de l’arrêt de travail et des soins initialement prescrits et prolongés jusqu’à la consolidation, l’employeur n’a pas saisi la commission de recours amiable d’une contestation de la reconnaissance du caractère professionnel de l’accident mais de la seule prise en charge au titre de la législation professionnelle des arrêts de travail et des soins prescrits à la suite de l’accident du travail du 12 décembre 2014.
Par conséquent, le jugement est confirmé en ce qu’il a déclaré irrecevable la demande de l’employeur tendant à ce que la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l’accident survenu le 12 décembre 2014 lui soit déclaré inopposable.
1-2 Sur la recevabilité de la contestation de la prise en charge de la rechute
Selon l’article 31 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
Et il est de principe que l’employeur est en droit de contester, dans ses rapports avec la caisse, le caractère professionnel de la rechute devant la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale, seule compétente pour se prononcer sur une telle contestation, peu important qu’il y ait une incidence ou pas sur le calcul de son taux de cotisation accident du travail.
En l’espèce, par courrier du 18 novembre 2016, la caisse a notifié à l’employeur sa décision de prise en charge de la rechute, déclarée le 21 octobre 2016, imputable à l’accident du travail du 12 décembre 2014, tout en mentionnant les voies et délais de recours dont ce dernier dispose pour la contester.
L’employeur a saisi la commission de recours amiable le 15 décembre 2016 en contestation de cette décision.
La commission de recours amiable a, par décision du 13 janvier 2017, dit que la rechute du 21 octobre 2016 de l’assuré est imputable à l’accident du travail du 12 décembre 2014 et informe l’employeur que la décision de prise en charge de celle-ci est sans conséquence sur son compte employeur, tout en précisant que cette décision peut être contestée.
Il en résulte que même si la décision de prise en charge de la rechute n’est pas imputée sur son compte employeur et n’a donc pas d’incidence sur son taux de cotisation, l’employeur a intérêt à pouvoir faire établir que cette décision, qui porte sur les conditions de travail et les risques professionnels au sein de son entreprise qui n’ont pas été prises conformément aux dispositions du code de la sécurité sociale.
Par conséquent, par infirmation du jugement, la demande de l’employeur tendant à ce que la prise en charge au titre de la législation professionnelle de la rechute déclarée le 21 octobre 2016 lui soit déclarée inopposable est recevable.
2 – Sur le non-respect du principe du contradictoire de la décision de prise en charge de la rechute
En application de l’article R. 441-10, alinéas 1 et 2, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n°2016-756 du 7 juin 2016, la caisse dispose d’un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d’accident et le certificat médical initial ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial et le résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prescrits par les tableaux de maladies professionnelles pour statuer sur le caractère professionnel de l’accident ou de la maladie. Il en est de même lorsque, sans préjudice de l’application des dispositions du chapitre Ier du titre IV du livre Ier et de l’article L. 432-6, il est fait état pour la première fois d’une lésion ou maladie présentée comme se rattachant à un accident du travail ou maladie professionnelle.
Selon l’article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n°2009-938 du 29 juillet 2009 :
I. – (…) En cas de rechute d’un accident du travail, le double de la demande de reconnaissance de la rechute de l’accident du travail déposé par la victime est envoyé par la caisse primaire à l’employeur qui a déclaré l’accident dont la rechute est la conséquence par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L’employeur peut alors émettre des réserves motivées.
III. – En cas de réserves motivées de la part de l’employeur ou si elle l’estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l’employeur et à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l’accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés.
En application de l’article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n°2009-938 du 29 juillet 2009, lorsqu’il y a nécessité d’examen ou d’enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime ou ses ayants droit et l’employeur avant l’expiration du délai prévu au premier alinéa de l’article R. 441-10 par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
Et il résulte de l’article R. 441-16 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n°85-1353 du 21 décembre 1985, que les dispositions de la section relatives à la procédure de reconnaissance du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie par les caisses (articles R. 441-10 à R. 441-17) sont applicables en ce qui concerne la contestation du caractère professionnel des rechutes.
En l’espèce, il ressort des pièces produites aux débats que, par courrier daté du 16 novembre 2016, la caisse a informé l’employeur de la réception le 8 novembre 2016 d’un certificat médical de rechute concernant son salarié. Elle l’informe, d’une part, qu’un avis médical est nécessaire pour qu’elle puisse se prononcer sur le rattachement de cette rechute à l’accident survenu le 12 décembre 2014, d’autre part, que l’instruction de cette demande est en cours, enfin, qu’une décision devrait être prise à cet égard dans le délai de trente jours à compter de la date mentionnée ci-dessus [ 8 novembre 2016].
Par courrier du 18 novembre 2016, la caisse a informé l’employeur de sa décision de prendre en charge la rechute du 21 octobre 2016 en retenant son imputabilité à l’accident du travail du 12 décembre 2014.
Alors que l’employeur fait valoir que la caisse lui a envoyé le 18 novembre 2016 le double de la demande de reconnaissance de la rechute de l’accident du travail déposé par la victime et il joint à cet effet une enveloppe à l’entête de la caisse portant le cachet de la poste du 18 novembre 2016, soit le même jour que la décision de prise en charge de la rechute, la cour observe que la caisse ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la date à laquelle l’employeur a reçu le double de la demande de reconnaissance de la rechute.
Des éléments produits il résulte qu’en communiquant à l’employeur sa décision de prise en charge de la rechute le même jour que le double de la demande de reconnaissance de la rechute, la caisse a privé l’employeur de la possibilité de connaître l’intégralité des éléments susceptibles de lui faire grief et de pouvoir présenter des réserves avant que la caisse ne prenne sa décision, de sorte que le principe du contradictoire n’a pas été respecté.
Il y a donc lieu de déclarer inopposable à l’employeur la décision de prise en charge de la rechute.
3 – Sur la contestation de la prise en charge de la durée totale des arrêts de travail prescrits à la suite de l’accident du travail du 12 décembre 2014 jusqu’à la date de la consolidation du 18 mai 2016
En application des dispositions de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée, ou travaillant à quelque titre que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.
La présomption d’imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d’un accident du travail s’étend pendant toute la durée d’incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l’état de la victime.
L’absence de remise en cause du caractère professionnel de l’accident initial ne fait pas obstacle à ce que l’employeur conteste l’imputabilité à l’accident du travail initialement reconnu de tout ou partie des soins et arrêts de travail pris en charge ultérieurement par la caisse primaire d’assurance maladie, mais lui impose alors de rapporter la preuve contraire, c’est-à-dire d’établir que les arrêts de travail et les soins prescrits résultent d’une cause totalement étrangère au travail.
La relation de causalité entre l’accident et la lésion à l’origine des arrêts de travail et entre l’accident et la totalité de l’incapacité de travail reste suffisante même lorsque l’accident a seulement précipité l’évolution ou l’aggravation d’un état pathologique antérieur qui jusqu’alors n’entraînait pas en lui-même une incapacité.
En l’espèce, l’employeur conteste, en substance, la durée des arrêts de travail et des soins prescrits à la victime ensuite de l’accident du travail survenu le 12 décembre 2014 et pris en charge par la caisse au titre de la législation professionnelle, jusqu’à la date de consolidation, au regard de la participation de la victime à des concours hippiques pendant son arrêt de travail.
Au soutien de ses prétentions, la cour constate que l’employeur produit les pièces suivantes:
– des listing des compétitions hippiques de saut d’obstacles auxquelles a participé la victime au cours des années 2014 à 2016 (pièces n°6 et n°7),
– un procès-verbal de constat d’huissier du 19 mars 2016 aux termes duquel il est constaté que « le terrain sur lequel se déroule le concours se situe en bordure de la route. Je me suis donc placé en bordure de la route. Le speaker a annoncé le cheval [3] monté par [la victime] à 17 heures 19. J’ai constaté que le cheval [3] et son cavalier ont réalisé le parcours d’obstacles. A la fin du parcours le cheval et son cavalier ont quitté le terrain et emprunté la route qui conduit aux étables j’ai interpellé son cavalier, j’ai décliné mes nom, prénom et qualité et l’objet de ma présence, ce dernier a reconnu être [la victime]. Je lui ai indiqué avoir constaté qu’il participait à un concours hippique de sauts d’obstacles» (pièce n°5),
– un rapport médical établi par le docteur [F], praticien conseil du service du contrôle médical, le 17 avril 2019, dans lequel il énonce que la victime’est resté[e] en arrêt de travail du 13 décembre 2014 au 19 mai 2016″ ; que « [la victime] était licencié[e] en équitation, en compétition de saut d’obstacle » ; qu’elle ‘a poursuivi l’entraînement et les compétitions pendant toute la durée de l’arrêt de travail ». Il ajoute que « la prise en charge nécessite un repos au moins relatif, c’est-à-dire évitant les mouvements nécessitant la mise en jeu de l’articulation acromio-claviculaire avec abduction ou adduction du bras, gestes inévitable lors de la pratique de l’équitation ». Il a conclu qu’il « apparaît que le traitement classique est l’infiltration mais qu’elle nécessite un certain repos articulaire ce que le patient n’a manifestement pas respecté, ce qui tendrait à expliquer l’absence d’efficacité de ce traitement relatée par le patient au cours des consultations et pour partie la durée de l’arrêt de travail ».
Dans le rapport médical précité, le praticien conseil du service du contrôle médical rappelle que le certificat médical du 13 décembre 2014 établi à la clinique des mutualistes fait état d’une «douleur musculo-tendineuse de l’épaule gauche sur efforts de traction», le certificat de prolongation du 13 décembre 2014 établi par le docteur [Z] de «PASH gauche, canal carpien gauche» mais que «les syndromes du canal carpien gauche et droit» n’ont pas été imputés à l’accident du travail (pièce n°4 de la caisse).
De ces éléments, il ressort que la victime a participé à plusieurs concours hippiques entre le 11 janvier 2015 et le 3 avril 2016, soit durant la période durant laquelle elle se trouvait en arrêt de travail ; que selon le praticien conseil du service du contrôle médical, la victime n’a pas respecté un repos articulaire durant son arrêt de travail ce qui tendrait, selon lui, à expliquer l’absence d’efficacité du traitement par infiltration et pour partie, la durée de l’arrêt de travail ; que l’analyse ainsi faite par le praticien conseil du service du contrôle médical permet sérieusement d’envisager que les arrêts de travail et soins ont au moins pour partie une origine étrangère au travail, de sorte comme l’ont retenu les premiers juges, le recours à une expertise médicale judiciaire sur pièces est justifiée dans son principe comme dans la mission confiée au médecin expert.
4 – Sur les frais irrépétibles et les dépens
La décision déférée est confirmée en sa disposition relative aux frais irrépétibles et les dépens.
L’employeur succombant partiellement en ses demandes supporte la charge des dépens et sa demande au titre des frais irrépétibles est rejetée.
L’équité ne commande pas de faire droit à la demande de la caisse au titre des frais non compris dans les dépens qu’elle a pu exposer dans la présente procédure.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a déclaré irrecevable la demande de la société [4] introduite le 10 mars 2017, tendant à ce que la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la rechute déclarée par M. [D] le 21 octobre 2016 lui soit déclarée inopposable,
Statuant à nouveau sur ce chef infirmé et y ajoutant,
DÉCLARE recevable la demande de la société [4] introduite le 10 mars 2017, tendant à ce que la prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la rechute déclarée par M. [D] le 21 octobre 2016 lui soit déclarée inopposable,
DÉCLARE inopposable à la société [4] la décision du 18 novembre 2016 de la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire de prise en charge de la rechute de M. [D] déclarée le 21 octobre 2016,
REJETTE les demandes des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société [4] aux dépens d’appel.
La greffière, La Présidente,