N° de minute : 25/2022
COUR D’APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 05 Mai 2022
Chambre sociale
Numéro R.G. : N° RG 20/00087 – N° Portalis DBWF-V-B7E-RKU
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Août 2020 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG n° :19/20)
Saisine de la cour : 11 Septembre 2020
APPELANT
Mme [A] [J]
née le 20 Octobre 1970 à DUMBEA (98839)
demeurant 18 rue de la Marconnaise – Dumbéa – BP 1515 – 98830 KOUTIO
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/1797 du 30/10/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de NOUMEA)
Représentée par Me Nicolas MILLION membre de la SELARL SOCIETE D’AVOCATS MILLIARD MILLION, avocat au barreau de NOUMEA
INTIMÉ
S.A.R.L. LA FLEUR DE L’AGE, représentée par son gérant en exercice
Siège social : 106 lotissement Maillet – BP 4413 – 98839 DUMBEA
Représentée par Me Charlotte ROLIN, avocat au barreau de NOUMEA
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 24 Mars 2022, en audience publique, devant la cour composée de Monsieur Philippe DORCET, Président de chambre, président, M. François BILLON, Conseiller, M. Thibaud SOUBEYRAN, Conseiller, qui en ont délibéré, sur le rapport de M. François BILLON.
Greffier lors des débats et de la mise à disposition : Mme Isabelle VALLEE
ARRÊT contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie, signé par Monsieur Philippe DORCET, président, et par Mme Isabelle VALLEE, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
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PROCÉDURE DE PREMIÈRE INSTANCE
Mme [A] [J] a été embauchée en qualité d’aide à domicile, niveau 1, échelon 1, catégorie employé, par la SARL LA FLEUR DE L’AGE, société de services à la personne, par contrat de travail à durée déterminée à compter du 26 septembre 2016 et jusqu’au 31 décembre 2016, afin de faire face à un surcroît temporaire et exceptionnel d’activité, moyennant un salaire mensuel brut de base de 77 126 F CFP pour 84.5 heures (convention collective commerce). Par avenant n°1 daté du 31 décembre 2016, son contrat de travail à durée déterminée a été prolongé jusqu’au 31 mars 2017, puis jusqu’au 30 juin 2017 par avenant n°2. A cette date, elle a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2017 dans des conditions identiques.
Par courrier remis en main propre le 29 novembre 2018, Mme [J] a été convoquée à un entretien préalable à une mesure de licenciement pour faute grave, fixé au 6 décembre suivant.
Mme [J] a été placée en arrêt maladie du 29 novembre 2018 au 5 décembre 2018 puis jusqu’au 9 décembre 2018.
Par courrier daté du 14 décembre 2018 adressé en recommandé avec accusé de réception non délivré, puis remis en main propre le 11 janvier 2019, Mme [J] a été licenciée pour faute grave en raison de violences verbales, abandon de poste, mise en danger des bénéficiaires et non-respect du secret professionnel. Le 18 janvier 2019, Mme [J] a été destinataire de son solde de tout compte.
Le 6 mai 2019, M. et Mme [P], gérants de la SARL, ont déposé une main courante à la police municipale de DUMBEA, afin de dénoncer les agressions et injures commises par Mme [J] à leur encontre depuis son licenciement.
‘ Mme [J], par requête introductíve d’instance reçue le 28 janvier 2019 a fait convoquer la SARL LA FLEUR DE L’AGE, afin notamment de :
– dire et juger que son licenciement pour faute grave était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
– condamner en conséquence la société défenderesse à lui payer les sommes suivantes, majorées des intérêts au taux légal à compter du dépôt de la requête :
– 169 761 F CFP à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 29 038 F CFP au titre des congés payés sur préavis,
– 1 161 520 F CFP de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– 200 000 F CFP de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire.
Lors de l’audience de conciliation du 18 avril 2019, les parties ne sont pas parvenues à un accord.
Mme [J] a fait valoir que des désaccords étaient progressivement apparus avec son employeur mais que, dans l’intérêt des bénéficiaires, elle avait souhaité prendre rendez-vous avec lui pour évoquer le fonctionnement de l’entreprise, notamment les plannings et attirer son attention sur un défaut d’organisation lors de son absence et suggérer des améliorations, ce qui avait agacé la gérante, Mme [P], laquelle avait voulu l’écarter de l’entreprise.
‘ La société LA FLEUR DE L’AGE a conclu au débouté de ses demandes en expliquant que la faute grave reprochée à Mme [J] était caractérisée et que son licenciement était en conséquence parfaitement fondé. La SARL a ainsi fait valoir que Mme [J] avait commis divers manquements à ses obligations professionnelles et, suite aux nombreuses remarques orales qui lui avaient été faites, elle avait décidé de la convoquer un entretien préalable au cours duquel mme [J] avait menacé de se mettre en arrêt maladie. Elle a indiqué qu’à plusieurs reprises Mme [J] avait proféré des propos injurieux et calomnieux à l’encontre de ses collègues et des deux gérants, notamment lorsqu’ils étaient absents. Elle a ajouté que Mme [J] avait également adopté une attitude de défiance et d’agressivité envers sa hiérarchie nuisant au bon fonctionnement du service.
‘ Par jugement du 28 août 2020, le tribunal du travail de Nouméa a statué ainsi qu’il suit :
DEBOUTE Mme [A] [J] de l’intégralité de ses demandes ;
DIT que chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles ;
CONDAMNE Mme [A] [J] aux entiers dépens ;
FIXE à quatre (4) unités de valeur, le coefficient de base servant au calcul de la rémunération de Maître Nicolas MILLION, avocat au barreau de Nouméa, désigné au titre de l’aide judiciaire par la décision N°20l9/3 12 du 29 mars 2019.
PROCÉDURE D’APPEL
Mme [J], par requête en date du 11 septembre 2020, a interjeté appel de la décision.
Son mémoire ampliatif a été enregistré au RPVA le 14 décembre 2020.
Dans ses conclusions récapitulatives enregistrées au RPVA le 11 août 2020, elle fait valoir pour l’essentiel :
– que force est de constater que la lettre de licenciement a été notifiée à Mme [J] le 11 janvier 2019, soit plus d’un mois après l’entretien préalable fixé au 6 décembre 2018, en violation des dispositions de l’article Lp.132-4 du code du travail de Nouvelle-Calédonie ; qu’en conséquence le licenciement doit être considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
– que si le tribunal a pu justement écarter le grief tenant à la mise en danger des bénéficiaires et le grief tenant au non-respect de la vie privée au motif que l’employeur ne fournissait aucun élément de preuve corroborant ses dires, elle conteste la décision rendue sur les deux autres griefs tenant à sa prétendue violence verbale et l’abandon de poste ;
– qu’ainsi, dans la lettre de licenciement l’employeur allègue que Mme [J] a proféré des propos injurieux et calomnieux à l’égard de Mme [P] sans jamais les préciser et les dater et qu’ils ne peuvent donc être retenus pour justifier une faute grave ; qu’elle n’a jamais accusé Mme [P] de maltraitance à l’égard de sa mère mais s’est contentée de rapporter un sentiment au fils de Mme [P] dont lui avait fait part sa belle-s’ur [G] qui travaillait chez la mère de Mme [P] ; ces prétendues ‘accusations mensongères’ reprochées à Mme [J] ne figurent en outre aucunement dans la lettre de licenciement ;
– que les violences verbales qu’on lui reproche ne sont pas précisées, ni datées, ce qui équivaut à une absence de motifs ;
– que l’abandon de poste est imprécis dans la lettre de licenciement en ce qu’il ne mentionne aucune date ; qu’au vu des conclusions adverses, il est au surplus établi que le planning concernant le mardi 6 novembre 2018 n’est pas signé et n’indique pas qu’elle ne s’est pas rendue chez le bénéficiaire concerné ; que l’absence du lundi 26 novembre 2018 n’est pas précisée dans la lettre de licenciement qui ne parle que d’un abandon de poste et non de deux abandons, et que cet abandon fait l’objet au surplus d’une attestation qui ne remplit pas les conditions légales et qui est imprécise ; que l’employeur admet que Mme [J] avait oublié de récupérer le planning modifié et, qu’en tout état de cause, il ne s’agissait donc pas d’un refus d’obéissance caractérisé de déférer aux ordres de la hiérarchie mais d’un oubli tout au plus constitutif d’une faute simple et de ce fait insuffisant pour justifier un licenciement.
‘ En conséquence, Mme [J] demande à la cour de statuer ainsi qu’il suit :
INFIRMER en toutes ses dispositions le jugement déféré ;
DIRE ET JUGER que Mme [J] a fait l’objet d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
DIRE ET JUGER que la société LA FLEUR DE L’AGE n’a pas payé à tort les salaires des mois de novembre 2018, décembre 2018 et janvier 2019 à Mme [J] ;
En conséquence,
CONDAMNER la société LA FLEUR DE L’AGE à payer à Mme [J] les sommes suivantes :
– Indemnité compensatrice de préavis : 169 761 F CFP, outre la somme de 29 038 F CFP au titre de l’indemnisation des congés payés dus sur cette période,
– Dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse : 1 161 520 F CFP,
– Dommages et intérêts pour licenciement vexatoire / abusif : 200 000 F CFP,
– Créances salariales de Mme [J] :
* Novembre 2018 : 162 296 F CFP,
* Décembre 2018 : 103 827 F CFP,
*Janvier 2019 (du 1 er au 11 janvier) : 51 519 F CFP,
* Congés payés sur ces deux périodes : 15 534 F CFP,
* Solde salaire juin 2018 : 11 750 F CFP ;
FIXER les unités de valeurs dues à Maître Nicolas MILLION avocat agissant au titre de l’aide judiciaire.
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Par conclusions enregistrées au RPVA le 15 octobre 2021, la SARL LA FLEUR DE L’AGE fait valoir, pour l’essentiel :
– que le grief qui lui est fait de ne pas avoir respecté le délai d’un mois de notification du licenciement est infondé car le défaut de remise imputable au salarié n’entache pas la validité du licenciement ; qu’il convient ainsi de rappeler que la SARL LA FLEUR DE L’ÂGE a adressé à Mme [J] sa lettre de licenciement en date du 14 décembre 2018 mais que, bien qu’avisée, elle ne s’est cependant pas rendue au bureau de poste afin de réclamer ladite lettre recommandée, qui a donc été retournée à son expéditeur conduisant ainsi l’employeur au retour de Mme [J] dans l’entreprise le 11 janvier 2019, à lui remettre en main propre sa lettre de licenciement, qu’elle a contresignée ;
– que les faits de violences verbales commis par Mme [J] sont parfaitement établis ; qu’ainsi, les attestations de Mmes [K] et [Z] versées aux débats témoignent bel et bien du comportement de défiance et d’agressivité qu’adoptait Mme [J] envers sa hiérarchie, constitutif de violences verbales ;
– que les les faits d’abandon de poste commis les 6 et 26 novembre sont établis ainsi que l’établissent le planning et les attestations versées ;
– que les faits de mise en danger des bénéficiaires sont démontrés par le dénigrement par Mme [J] du travail de ses collègues et par la communication d’informations erronées à caractère médical à ses supérieurs et collègues concernant les bénéficiaires ; que, plus précisément en date du 6 décembre 2018, Mme [J] a appelé ses supérieurs afin de leur indiquer que sa collègue, Mme [T] [Z], n’avait pas hydraté Mme [B] et qu’une plainte allait par conséquent être déposée contre la SARL LA FLEUR DE L’ÂGE pour des faits de maltraitance ;
– qu’enfin, le non-respect de secret professionnel prévu à l’article 2 de l’annexe à la délibération n° 35/CP du 7 octobre 2010 par Mme [J] est patent et s’est traduit par la divulgation d’informations confidentielles concernant M. [I], l’un de ses bénéficiaires aujourd’hui décédé, à un autre de ses bénéficiaires, M. [B], ainsi qu’à sa fille, Mme [N].
‘ En conséquence, la SARL LA FLEUR DE L’ÂGE demande à la cour de statuer ainsi qu’il suit :
Vu l’article Lp. 122-3 du code du travail,
Vu les pièces versées aux débats,
CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Par conséquent,
DEBOUTER Mme [A] [J] de sa demande tendant à voir son licenciement pour faute requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
DEBOUTER Mme [A] [J] de la demande indemnitaire qu’elle formule pour licenciement abusif,
DEBOUTER Mme [A] [J] de sa demande tendant au versement d’un complément de salaire de 11 750 F CFP pour le mois de juin 2018,
DEBOUTER Mme [A] [J] de sa demande tendant au versement de son salaire pour la période de décembre à janvier 2019,
CONDAMNER Mme [A] [J] au paiement de la somme de 450 000 F CFP au titre de l’article 700 du Code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie,
CONDAMNER Mme [A] [J] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Charlotte ROLIN, avocat aux offres de droit.
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L’ordonnance de fixation de la date de l’audience a été rendue le 15 février 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Du respect de délai légal de notification du licenciement disciplinaire
Attendu que l’article Lp 132-4 du code du travail de Nouvelle-Calédonie prévoit que :
‘La sanction ne peut intervenir moins d’un jour franc, ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien. Elle fait l’objet d’une décision écrite et motivée. Elle est notifiée à l’intéressé’ ;
Attendu que la SARL LA FLEUR DE L’ÂGE justifie par les pièces produites au débat qu’elle a adressé à Mme [J] sa lettre de licenciement dès le 14 décembre 2018 mais que bien qu’avisée le 17 décembre 2018, Mme [J] ne s’est cependant pas rendue au bureau de poste réclamer ladite lettre recommandée qui a donc été retournée à son expéditeur, comme en témoigne le justificatif produit aux débats mentionnant ‘non réclamé, retour à l’expéditeur’ ;
Attendu qu’il convient de rappeler la jurisprudence constante en vertu de laquelle, ‘il ne peut dépendre du destinataire d’une lettre d’empêcher, par son refus de la recevoir ou par sa négligence, le déroulement normal de la procédure’ (Cass. Soc., 23 juillet 1980, 80-60.233), et qu’ainsi bien que ‘la lettre de licenciement pour motif disciplinaire doit être notifiée au salarié dans le délai d’un mois à partir de la date de l’entretien préalable et qu’à défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, lorsque le licenciement est notifié par lettre recommandée, il convient, pour déterminer la date de la notification, de se placer à la date de l’envoi de la lettre’ (Cass. Soc., 30 novembre 2010, n° 09-68.174) ;
Attendu qu’en l’espèce, il est établi que l’entretien préalable au licenciement est intervenu le 6 décembre 2018 et que la lettre de licenciement datée du 14 décembre 2018 a été postée à l’Office des postes et télécommunications (OPT) à cette même date, en lettre recommandée avec accusé de réception, soit dans le délai d’un mois, peu importe que l’employeur ait jugé opportun au retour de Mme [J] dans l’entreprise le 11 janvier 2019 dans un but de parfaite information de lui remettre en main propre la lettre de licenciement qu’elle a contresignée ; qu’ainsi, Mme [J] doit être déboutée de sa demande tendant à voir requalifier son licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse pour non-respect du délai d’un mois entre l’entretien préalable et la notification du licenciement ;
De la cause réelle et sérieuse du licenciement
Attendu que l’employeur qui prend l’initiative de rompre le contrat de travail doit énoncer son ou ses motifs dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ;
Attendu que les motifs avancés doivent être précis et matériellement vérifiables, des motifs imprécis équivalant à une absence de motif ;
Attendu que la faute grave, dont la preuve incombe à l’employeur et à lui seul, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et situe nécessairement le débat sur le terrain disciplinaire mais le licenciement peut être légitime même si la faute n’est pas qualifiée de grave : il faut et il suffit qu’elle ne permette plus la poursuite de la relation de travail ;
Attendu que la jurisprudence définit la faute grave comme un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis ; que depuis sa décision du 27 septembre 2007, la Chambre sociale de la Cour de cassation juge que : « la faute grave, qui peut seule justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise », ainsi la référence au préavis a été supprimée mais la faute grave reste nécessairement associée à la rupture immédiate des relations de travail ;
Attendu en l’espèce, que la lettre de licenciement pour faute grave datée du 14 décembre 2018 est ainsi rédigée :
« Comme indiqué lors de notre entretien du jeudi 6 décembre 2018, nous vous informons de notre décision de vous licencier pour faute grave aux motifs suivants :
– Violences verbales :
Vous avez proféré à l’encontre de votre direction et surtout auprès de Mme [P] [W] des propos injurieux et calomnieux. Ces propos ont été exprimés directement par vous auprès de M. [P] [E] à différentes reprises mais aussi auprès de l’une de vos collègues qui nous en a averti.
Vous avez rapporté à M. [P] [E] des propos diffamatoires envers son associée et les référentes qualité. Ces propos étaient de nature à discréditer leur travail et leurs implications durant l’absence hors territoire de M. [P] [E].
Vous optez pour un comportement de défiance et d’agressivité envers votre hiérarchie nuisant au bon fonctionnement du service.
Vous avez accusé la direction d’avoir eu des propos violents envers la fille de l’un de vos bénéficiaires, fait démenti par cette dernière.
Vous avez envers certaines de vos collègues des propos diffamatoires qui sont remontés jusqu’à nous par l’un de vos bénéficiaires.
– Abandon de poste :
Vous ne vous êtes pas présentée au domicile de l’un de vos bénéficiaires alors que vous y étiez prévue et prévenue. Au- delà de l’abandon de poste, cette absence aurait pu causer de graves conséquences sur la santé du bénéficiaire.
– Mise en danger de vos bénéficiaires :
Dénigrement du travail de vos collègues par communication d’informations erronées à caractère médical à vos supérieurs et collègues concernant vos bénéficiaires. Ce comportement nuit également à l’image de la société mais aussi aux rapports que nous avons avec les différents intervenants tels que les infirmiers.
Vous avez directement mêlé vos bénéficiaires à la présente situation ayant conduit à votre licenciement afin qu’ils prennent votre partie. Vous n’êtes pas sans savoir que ces derniers sont extrêmement fragiles et âgés. Rajouter le stress de cette situation dans le but de vous défendre est inacceptable.
– Non-respect du secret professionnel :
Afin de respecter la vie privée des personnes aidées, nous avons un devoir de discrétion. Or, vous avez auprès de l’un de vos foyers pour lequel vous interveniez ainsi qu’à l’une de leur fille ,divulgué des informations concernant vos interventions chez un autre bénéficiaire. Faits remontés par le bénéficiaire lui-même et sa fille.
Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés et votre refus de prolonger notre rendez- vous du 06/I2/2018, votre maintien dans l’entreprise s’avère impossible. Le licenciement prend donc effet immédiatement.
Nous vous laissons prendre rendez-vous avec le bureau pour la récupération de votre solde de tout compte et attestation de travail. »
Attendu qu’il convient d’étudier successivement ces quatre griefs pour voir s’ils sont de nature à constituer la faute grave ou, à tout le moins, si ces faits sont constitutifs d’une faute de nature à conférer au licenciement une cause réelle et sérieuse ;
1. Des violences verbales
Attendu que ce grief est décomposé en plusieurs branches qu’il convient de reprendre ;
1.1- Attendu qu’il est en premier lieu reproché à Mme [J] d’avoir ‘proféré à l’encontre de votre direction et surtout auprès de Mme [P] [W] des propos injurieux le calomnieux. Ces propos ont été exprimés directement par vous auprès de M. [P] [E] à différentes reprises mais aussi auprès de l’une de vos collègues qui nous en a avertie’ ;
Attendu que Mme [J] soutient que les ‘propos injurieux et calomnieux’ qu’on lui reproche ne sont ni cités ni datés dans la lettre de licenciement et qu’ainsi leur imprécision équivaut à une absence de motif ;
Attendu cependant que la jurisprudence a pu rappeler, d’une part, que les juges du fond ne peuvent se fonder sur l’absence de précision quant à la date des griefs allégués par l’employeur pour en conclure à une absence de cause réelle et sérieuse (Cass. Soc., 17 mars 1995 n°93-43.415 et n°93-43.596 et 5 janv. 1995, n° 93-42.190) et que, d’autre part, il était indifférent que des attestations permettant de justifier le licenciement aient été établies après le licenciement, dès lors qu’elles pouvaient permettre de vérifier la réalité des griefs (Cass. Soc., 31 mai 2006, n° 05-43.197) ;
Attendu qu’en l’espèce l’employeur produit une attestation d’une salariée de l’entreprise, Mme [K], faisant état qu’à l’occasion d’une communication téléphonique entre les gérants de la société et Mme [J] celle-ci aurait eu ‘des paroles insultantes et irrespectueuses à l’encontre de M. et Mme [P]’ ; que l’employeur produit également une seconde attestation d’une autre salariée de l’entreprise, Mme [Z], qui fait part d’insultes que Mme [J] aurait proféré à son encontre ;
Attendu que ces attestations permettent à la juridiction de retenir ce grief qui à lui seul pourrait être de nature à retenir la cause réelle et sérieuse ; que les autres griefs méritent cependant d’être analysés notamment pour permettre de retenir si la faute grave reprochée à Mme [J] est constituée ;
1.2- Attendu qu’il est en second lieu reproché à Mme [J] d’avoir ‘rapporté à M. [P] [E] des propos diffamatoires envers son associée et les référentes qualité. Ces propos étaient de nature à discréditer leur travail et leurs implications durant l’absence hors territoire de M. [P] [E] ;
Attendu que les ‘propos diffamatoires’ ne sont ni cités ni datés dans la lettre de licenciement et que l’employeur fait valoir dans ses écritures que Mme [J] lui aurait dit à l’occasion d’une de ses absences ‘quand le chat n’est pas là, les souris dansent’ dans le but de lui faire comprendre qu’en son absence, sa cogérante et les coordinatrices n’accomplissaient pas leurs missions respectives ;
Attendu que ces faits ne sont pas de nature à permettre à la juridiction de les retenir comme motif de licenciement ;
1.3- Attendu qu’en troisième lieu, il est reproché à Mme [J] d’avoir ‘ opté pour un comportement de défiance et d’agressivité envers votre hiérarchie nuisant au bon fonctionnement du service’ ;
Attendu que ce motif général ne permet pas d’imputer de faits précis à Mme [J] et ne saurait caractériser la faute ;
1.4 – Attendu qu’en quatrième lieu, il est reproché à Mme [J] d’avoir ‘accusé la direction d’avoir eu des propos violents envers la fille de l’un de vos bénéficiaires, fait démenti par cette dernière’ ;
Attendu que pour comprendre la nature de ce grief, la SARL LA FLEUR DE L’AGE fait valoir que Mme [J] manifestait un mépris total à l’égard de sa direction, allant jusqu’à porter des accusations mensongères à l’encontre de Mme [P] en lui reprochant tout d’abord d’avoir tenu des propos violents envers la fille de l’un de ses bénéficiaires, fait par ailleurs démenti par cette dernière ; que l’employeur ajoute, qu’à la suite de l’entretien préalable au licenciement du 6 décembre 2018, agissant par vengeance à l’égard de la direction, Mme [J] a accusé la co-gérante, Mme [W] [P] d’avoir commis des actes de maltraitance sur sa propre mère, [D] [Y], alors que celle-ci venait de décéder des suites d’une maladie ;
Attendu que l’appelante est fondée à relever que l’employeur ne fournit aucune preuve de ce qu’il avance, qu’il ne prouve ni l’accusation supposément faite par Mme [J], ni le démenti de la fille du bénéficiaire ; que les ‘propos violents’ ne sont ni cités, ni datés dans la lettre de licenciement, ni établis par les pièces versées au débat et qu’ainsi leur imprécision équivaut à une absence de motif ;
1.5- Attendu enfin, qu’il est reproché à Mme [J] d’avoir ‘envers certaines de vos collègues des propos diffamatoires qui sont remontés jusqu’à nous par l’un de vos bénéficiaires’ ;
Attendu que Mme [J] est fondée à relever que son employeur ne fournit aucun renseignement quant à la teneur des propos diffamatoires supposément tenus, pas plus qu’il ne produit de preuve que ces faite aient été ‘remontés’ par l’un des bénéficiaires dont s’occupait Mme [J], de sorte que les juges ne peuvent pas être en mesure de les retenir comme étant de nature à rendre impossible le maintien de Mme [J] dans l’entreprise ;
Attendu que par ses écritures, la SARL LA FLEUR DE L’AGE fait également valoir que l’attitude de la salariée se serait poursuivi après son licenciement sous forme de provocations ce qui l’a conduite à devoir déposer des mains courantes les 6 et 20 mai 2019 ; que cet argument est cependant sans emport s’agissant de faits postérieurs au licenciement, la lettre de licenciement ayant fixé les limites du litige ;
2/ De l’abandon de poste
Attendu que ce grief est ainsi libellé : ‘Vous ne vous êtes pas présentée au domicile de l’un de vos bénéficiaires alors que vous y étiez prévue et prévenue. Au-delà de l’abandon de poste, cette absence aurait pu causer de graves conséquences sur la santé du bénéficiaire’ ;
Attendu que si Mme [J] fait justement observer que l’employeur n’est pas fondé à faire état dans ses conclusions de deux absences traduisant des abandons de poste les mardi 6 et lundi 26 novembre 2018, alors qu’une seule absence non datée était visée dans le lettre de licenciement, il convient toutefois d’analyser si un abandon de poste est démontré pour une de ces deux dates ; que les pièces et attestations produites permettent de retenir que l’absence visée dans la lettre de licenciement est celle du lundi 26 novembre qui concernait le bénéficiaire [M] [I] lequel devait être pris en charge par Mme [Z] qui en arrêt maladie devait être remplacée par Mme [J] laquelle n’ayant pas récupéré son planning modifié et bien que prévenue de ce changement, ne s’était pas présentée le 26 novembre chez le bénéficiaire ;
Attendu qu’en tout état de cause, Mme [J] est fondée à relever qu’il ne s’agit pas d’un refus d’obéissance caractérisé de déférer aux ordres de sa hiérarchie mais d’un oubli tout au plus constitutif d’une faute simple et quoi qu’il en soit insuffisant pour justifier un licenciement ;.
3/ Mise en danger de vos bénéficiaires
Attendu qu’il est reproché à Mme [J] le ‘dénigrement du travail de vos collègues par communication d’informations erronées à caractère médical à vos supérieurs et collègues concernant vos bénéficiaires. Ce comportement nuit également à l’image de la société mais aussi aux rapports que nous avons avec les différents intervenants tels que les infirmiers.
Vous avez directement mêlé vos bénéficiaires à la présente situation ayant conduit à votre licenciement afin qu’ils prennent votre partie. Vous n’êtes pas sans savoir que ces derniers sont extrêmement fragiles et âgés. Rajouter le stress de cette situation dans le but de vous défendre est inacceptable ;
Attendu que l’employeur explicite ce grief en précisant que le 6 décembre 2018, Mme [J] avait appelé ses supérieurs afin de leur indiquer que sa collègue, Mme [T] [Z], n’avait pas hydraté Mme [B] et qu’une plainte allait par conséquent être déposée contre la SARL LA FLEUR DE L’ÂGE pour des faits de maltraitance ; que la SARL ajoute que ces informations ont été vérifiées auprès des infirmiers et se sont avérés fausses ;
Attendu que c’est pas une juste motivation, non réellement combattue en appel, que la cour entend se réapproprier, que le premier juge a relevé que la société ne fournissait aucun élément de preuve corroborant ses dires selon lesquels elle aurait fourni à ses supérieurs hiérarchiques et à ses collègues des informations à caractère médical erronées concernant les bénéficiaires, et qu’ainsi ce grief ne pouvait donc être retenu ;
4/ Non-respect du secret professionnel
Attendu qu’il est enfin reproché à Mme [J] d’avoir ‘auprès de l’un de vos foyers pour lequel vous interveniez ainsi qu’à l’une de leur fille, divulgué des informations concernant vos interventions chez un autre bénéficiaire. Faits remontés par le bénéficiaire lui-même et sa fille’ ;
Attendu que l’employeur détaille ce grief en précisant que Mme [J] a manqué à son devoir de discrétion en divulguant des informations confidentielles concernant M. [I], l’un de ses bénéficiaires, aujourd’hui décédé, à un autre de ses bénéficiaires, M. [B], ainsi qu’à sa fille, Mme [N], et que cette dernière confirme dans une attestation versée aux débats que ces propos particuliers lui ont bien été rapportés par Mme [J] ;
Attendu que la cour constate que l’attestation de Mme [N] ne permet aucunement d’établir le grief fait à Mme [J] ; que c’est ainsi par une juste motivation que la cour entend se réapproprier, que le premier juge a relevé que la SARL LA FLEUR DE L’AGE ne produisait aucune pièce justificative à ce sujet et qu’il était impossible de savoir quelles étaient les personnes concernées, pour conclure au fait que ce grief n’était pas caractérisé ;
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Attendu que la jurisprudence rappelle régulièrement que :
‘en matière de licenciement disciplinaire, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l’encontre du salarié et les conséquences que l’employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués’ (Cass.Soc. 22.02.05 , n° 03-41.474) ;
Attendu qu’en l’espèce, si l’ensemble des faits reprochés à Mme [J] ne peuvent pas être retenus, les violences verbales tant envers la direction que d’un salarié de l’entreprise qui sont établies excédent manifestement la liberté d’expression inhérente à tout salarié ; que si elles sont insuffisantes pour qualifier à elles seules la faute grave, elles constituent bien une faute de nature à conférer au licenciement une cause réelle et sérieuse ; que le jugement entrepris sera ainsi confirmé en ce qu’il a débouté Mme [J] de ses prétentions portant sur l’absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement ;
Des demandes financières de Mme [J]
Attendu que Mme [J] dont la cause réelle et sérieuse du licenciement a été établie doit être déboutée de ses demandes formées au titre des dommages et intérêts ;
1. Indemnité compensatrice de préavis
Attendu que l’article Lp.122-22 du code du travail de Nouvelle-Calédonie prévoit que lorsque le licenciement d’un salarié n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis de deux mois s’il justifie d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans ; que l’article Lp.122-24 du code du travail ajoute qu’en cas de licenciement, l’inobservation du préavis ouvre droit, sauf faute grave du salarié, à une indemnité compensatrice qui ne se confond ni avec l’indemnité de licenciement de l’article Lp.122-27, ni avec l’indemnité prévue à l’article Lp.122-35 ;
Attendu qu’en l’espèce Mme [J] qui disposait d’une ancienneté supérieure à deux ans, est fondée à demander que lui soit versée une indemnité de 290 380 F CFP en raison d’un salaire de référence de 145 190 F CFP ; que l’employeur lui ayant déjà versé la somme de 120 619 F CFP sur son salaire du mois de décembre 2018 afin de compenser la non-exécution de son préavis, il conviendra de condamner l’employeur à lui verser la somme de 169 761 F CFP (290 380-120 619), outre la somme de 29 038 F CFP (290 380/10), au titre de l’indemnisation des congés payés ;
2. Des autres créances salariales de Mme [J]
2.1 De la demande relative au versement du salaire de novembre 2018
Attendu que Mme [J] soutient que son salaire du mois de novembre 2018 ne lui a pas été versé bien que le bulletin de paye mentionne un versement par virement bancaire du 10 décembre 2018 et conteste avoir été pour ce mois en congés les 29 et 30 novembre comme le bulletin l’indique, alors qu’à ces dates elle était en arrêt de travail ; qu’elle demande à ce titre le versement de la somme de 162 296 F CFP ;
Attendu que l’employeur ne fournit aucune explication, ni justificatif pour s’opposer à cette demande et démontrer que ce salaire du mois de novembre lui a bien été versé ; que si un solde de tout compte d’un montant de 330 699 F CFP a bien été délivré le 11 janvier 2019 à Mme [J], l’article Lp.122-32 du code du travail précise que le reçu ainsi délivré ‘n’a que la valeur d’un simple reçu des sommes qui y figurent’ et que si un délai de forclusion de deux mois peut être opposé au salarié, encore faut-il que la mention ‘pour solde de tout compte’ soit entièrement écrite de sa main (art.R.122-6 dudit code) ce qui n’est pas le cas en l’espèce ; qu’un document intitulé ‘reçu pour solde de tout compte’ visant une somme globale, sans précision sur les éléments de rémunération et d’indemnisation qu’elle concerne, ne constitue pas un reçu pour solde de tout compte mais un simple reçu de la somme qui y figure (Cass.Soc., 16 juin 1999, n°97-40723) ; qu’ainsi, le reçu de solde pour tout compte ne dispose d’effet libératoire qu’à l’égard des sommes qui y sont précisément indiquées et qu’un tel reçu rédigé en termes généraux n’a pas de valeur libératoire pour les rappels de salaire dont la somme n’a pas été détaillée ; qu’en l’espèce, le solde de tout compte remis à Mme [J] ne détaille aucunement les sommes et se limite à mentionner la somme de 330 699 F CFP ; qu’enfin, il est par ailleurs établi que la mention sur le bulletin de paie de novembre 2018 tenant à la déduction de deux jours de congés du 29 au 30/11/2018 est erronée, Mme [J] justifiant qu’elle était à cette date placée en arrêt maladie et non en congés ; que cependant l’étude de la fiche de paie de novembre 2018 permet de relever que cette mention erronée n’a entraîné en réalité aucune perte salariale ;
Attendu en conséquence, qu’il convient de condamner l’employeur à payer la somme figurant sur le bulletin de paie, soit celle de 112 392 F CFP ;
2.2 De la demande relative au versement d’un complément de salaire de 11 750 F CFP pour le mois de juin 2018
Attendu que Mme [J] soutient qu’elle a perçu en juin 2018 un salaire de 92 500 F CFP dont elle justifie par son relevé de compte alors qu’elle aurait dû toucher 104 250 F CFP, somme figurant sur son bulletin de salaire et sollicite en conséquence le versement de la différence, soit la somme de 11 750 F CFP ; que l’employeur fait valoir que le bulletin de paie du mois de juin 2018 est erroné et que le net à payer à Mme [J] pour le mois de juin 2018 était bien de 92 500 F CFP pour un salaire de base de 77 848 F CFP comme prévu aux termes du contrat de travail en date du 26 septembre 2016, modifié par avenants des 31 décembre 2016, et 31 mars 2017 ;
Attendu que la cour constate cependant que l’employeur n’a pas fait corriger entre le mois de juin 2018 et le licenciement de Mme [J] qu’il a initié le 29 novembre 2018, ce qu’il considère aujourd’hui comme une mention erronée ; que, par ailleurs, les fiches de paie de Mme [J] variaient en fonction des heures complémentaires accomplies et que si son salaire de base était effectivement les mois précédant le mois de juin d’un montant de 77 848 F CFP, à compter du mois de juin mais également les mois suivants son salaire de base était bien de 84 500 F CFP ; que si l’employeur fait grief à Mme [J] de ne produire aucun avenant justifiant cette augmentation, il ne s’étonne pour autant pas que cette même somme de 84 500 F CFP ait été portée sur les mois suivants le mois de juin, ce qui est de nature à établir que Mme [J] a bien bénéficié d’une augmentation dont son employeur a manifestement tardé à tenir compte quant au virement opéré ; que, dans ces conditions, Mme [J] est fondée à réclamer que lui soit versée la somme de 11 750 F CFP à laquelle son employeur sera condamné ;
2.3 Des demandes relatives aux mois de décembre 2018 et janvier 2019
Attendu que Mme [J] soutient enfin qu’il lui serait dû la somme de 103 827 F CFP pour le mois de décembre 2018 et celle de 51 519 F CFP jusqu’au 11 janvier 2019 ;
Attendu que l’employeur rappelle que s’agissant d’un licenciement pour faute grave, la rupture de son contrat de travail a pris effet à la date d’envoi de la lettre recommandée, sans préavis et avec mise à pied immédiate de Mme [J] ;
Attendu que la présente décision, qui n’a pas retenu la faute grave, a déjà accordé à Mme [J] l’indemnité compensatrice de préavis pour une durée de deux mois correspondant aux mois de décembre 2018 et janvier 2019 ; qu’elle n’est donc pas fondée à solliciter le versement de son salaire pour la période postérieure à son licenciement, soit du 15 décembre au 11 janvier 2018 ; qu’elle doit être déboutée de cette demande ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt déposé au greffe,
Déclare l’appel recevable ;
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [A] [J] de sa demande tendant à voir son licenciement pour faute requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
L’infirme pour le surplus, et :
Statuant à nouveau :
Dit que les faits dénoncés dans la lettre de licenciement de Mme [J] ne sont pas constitutifs d’une faute grave mais sont cependant de nature à conférer au licenciement prononcée par la SARL LA FLEUR DE L’AGE une cause réelle et sérieuse ;
En conséquence,
Condamne la société LA FLEUR DE L’AGE à payer à Mme [A] [J] les sommes suivantes :
– 169 761 F CFP au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre :
– 29 038 F CFP au titre de l’indemnisation des congés payés dus au titre du préavis ;
– 112 392 F CFP au titre du versement du salaire du mois de novembre 2018 ;
– 11 750 F CFP au titre d’un complément de salaire pour le mois de juin 2018 ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
Laisse la charge des frais irrépétibles à la charge de chaque partie pour l’entière procédure ;
Dit que chaque partie supportera les dépens pour l’entière procédure ;
Fixe à 4 unités de valeur, le coefficient de base servant au calcul de la rémunération de Maître Nicolas MILLION, avocat au barreau de Nouméa, désigné au titre de l’aide judiciaire.
Le greffier,Le président.