ARRET
N°
Association [6]
C/
CRAMIF
COUR D’APPEL D’AMIENS
TARIFICATION
ARRET DU 08 JUILLET 2022
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N° RG 21/05272 – N° Portalis DBV4-V-B7F-IINO
DECISION DE LA CRAMIF EN DATE DU 20 août 2021
PARTIES EN CAUSE :
DEMANDEUR
Association [6] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée et plaidant par Me Julien MONTCEL de l’AARPI CHANGO AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
ET :
DÉFENDEUR
CRAMIF agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée et plaidant par Mme [L] [V] dûment mandatée
DÉBATS :
A l’audience publique du 01 Avril 2022, devant Mme Jocelyne RUBANTEL, Président assisté de M. DONGNY et M. LANGLET, assesseurs, nommés par ordonnances rendues par Madame la Première Présidente de la Cour d’appel d’Amiens les 03 mars 2022, 07 mars 2022, 30 mars 2022 et 27 avril 2022.
Jocelyne RUBANTEL a avisé les parties que l’arrêt sera prononcé le 08 Juillet 2022 par mise à disposition au greffe de la copie dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Audrey VANHUSE
PRONONCÉ :
Le 08 Juillet 2022, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Jocelyne RUBANTEL, Président et Blanche THARAUD, Greffier.
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DECISION
L’association [6] est une association créée le 11 août 2005 qui a pour objet de délivrer un accompagnement scolaire à des enfants et des adolescents handicapés cognitifs de moins de18 ans à leur domicile.
Elle se voyait jusqu’alors appliquer le code risque 913EA « Associations culturelles et socio-éducatives ne gérant pas d’équipements ».
A ce titre, le 11 janvier 2021, l’association [6] a reçu la notification de son taux annuel de cotisation AT/MP de 1,30 %.
Le 11 mai 2021, à la suite d’un transfert de son siège social, l’association [6] a reçu une nouvelle notification de taux de cotisation AT/MP annule de 3,50 %. Ce taux correspond au code risque 853AB « Services d’aide sociale à domicile ».
Par courrier du 7 juillet 2021, l’association [6] a contesté ce classement auprès de la caisse régional d’assurance maladie d’Ile-de-France (ci-après la CRAMIF ou la caisse).
Le 20 août 2021, la CRAMIF a rejeté le recours de l’association [6] et a maintenu l’application du code risque 853AB.
Par acte d’huissier de justice délivré le 19 octobre 2021, l’association [6] a fait assigner la CRAMIF d’avoir à comparaître devant la cour d’appel à l’audience du 1er avril 2022.
Par conclusions visées par le greffe le25 octobre 2021, l’association [6] prie la cour de :
– annuler le nouveau taux de cotisation annuel « accident du travail/maladie professionnelle (AT/MP) » de 3,50 % correspondant au code risque 853 AB « Service d’aide sociale à domicile (auxiliaires de vie, aides ménagères…) » appliqué à son établissement sis [Adresse 3] (Siret n°[N° SIREN/SIRET 2]) suivant notification de la CRAMIF du 11 mai 2021 ;
– constater que le taux annuel de cotisation AT/MP de son établissement sis [Adresse 3] (Siret n°[N° SIREN/SIRET 2]) est de 1,30 % correspondant au code risque 913EA « Associations culturelles et socio-éducatives ne gérant pas d’équipements » ou à défaut, selon l’appréciation de la cour, au code risque 801 ZA « Personnel enseignant et administratif des établissements d’enseignements privés et des organismes de formation » et de prononcer, en conséquence, le remboursement de toutes les cotisations AT/MP acquittées par cette dernière de façon indue à raison du taux de cotisation infondé de 3,50 % correspondant au code risque 853 AB « Services d’aide sociale à domicile (auxiliaires de vie, aides ménagères…) ;
– condamner la CRAMIF à lui payer une indemnité de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Au soutien de ses demandes, l’association [6] fait valoir que son activité n’a aucunement été modifiée. Elle indique que son activité principale consiste à effectuer des prestations d’enseignements à domicile. Ainsi, la requérante souligne que son activité est davantage en lien avec le libellé de son ancienne classification et est sans rapport avec une activité d’auxiliaire de vie ou d’aide-ménagère.
En outre, l’association demanderesse indique que son code APE est le 85.59B « Autres enseignements » dont la liste des activités ne correspond pas au code risque qui lui a été appliqué.
De plus, l’association [6] fait valoir qu’aucun des élèves n’est actuellement pris en charge au titre de l’agrément accordé par le département du Val-de-Marne. Elle souligne qu’il est donc faux d’affirmer que l’activité principale est le soutien scolaire avec agrément.
Elle souligne que le risque d’accident du travail afférent à une activé de soutien scolaire est moindre que celui des auxiliaires de vie ou aides ménagères.
Enfin, l’association [6] indique que la rétroactivité du nouveau du taux qui lui a été appliqué n’est permise par aucun texte.
Aux termes de ses conclusions visées par le greffe le 29 mars 2022, la CRAMIF demande à la cour de :
– confirmer que le classement de l’association n° 1 scolarité sous le code risque 85,3 AB « services d’aide sociale à domicile (auxiliaires de vie, aides ménagères…) au taux de 3,5% à effet du 15 mars 2021,
– rejeter le recours de l’association.
Au soutien de ses demandes, la CRAMIF expose que si l’association soutient que son activité n’a pas de rapport avec les prestations des auxiliaires de vie ou d’aides ménagères, le libellé du code retenu ne se limite pas à ces activités.
L’Association est agrée pour le service à la personne, et les services à la personne doivent être classés sous le code risque 85.3AB regroupant les activités liées à l’assistance des personnes dans leurs tâches quotidiennes, dont le soutien scolaire.
Se fondant sur les dispositions de l’article L 7232-1 du code du travail, définissant les activités qualifiées d’aide à la personne, elle soutient que le code appliqué correspond à l’activité exercée.
D’autre part, elle soutient que le code APE, soit autres enseignements, en l’occurrence n’a pas d’incidence sur le code risque, et que de même, la classification de d’autres établissements de l’association est sans incidence sur le litige.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des demandes des parties et des moyens qui les fondent.
Motifs
En vertu de l’article D 242-6-1 du code de la sécurité sociale, le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé par établissement.
Toutefois, l’entreprise qui relève d’une tarification individuelle ou mixte en application de l’article D 242-6-2 peut demander, selon des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, à bénéficier d’un taux unique pour l’ensemble de ses établissements appartenant à la même catégorie de risque. Cette option de calcul est définitive pour la catégorie de risque concernée.
Le classement d’un établissement dans une catégorie de risque est effectué en fonction de l’activité exercée selon une nomenclature des risques et des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.
Selon l’arrêté du 17 octobre 1995, en ce qui concerne les activités relevant des secteurs autres que celui du bâtiment et des travaux publics :
1°) le classement d’un établissement est effectué en fonction de l’activité exercée dans ledit établissement.
En cas de pluralité d’activités au sein d’un même établissement, le classement est effectué en fonction de son activité principale, qui est celle exercée par le plus grand nombre de salariés.
Si les activités existant dans l’établissement sont exercées par un nombre égal de salariés, le classement est effectué en fonction de l’activité qui engendre le risque le plus important. Toutefois, sont considérés comme constituant des établissements distincts les chantiers ou ateliers dont l’activité relève du comité technique national des industries du bâtiment et des travaux publics ; la tarification de ces établissements est déterminée d’après les règles fixées pour les établissements rattachés audit comité ;
Selon ses statuts du 8 octobre 2020, l’Association N°1 Scolarité a pour objet la délivrance d’un accompagnement scolaire à des enfants et des adolescents handicapés cognitifs (dyslexie, dyscalculie, autisme…) de moins de 18 ans à leur domicile.
Elle était classée sous le code risque 913EA, associations culturelles et socio-éducatives ne gérant pas d’équipements.
Elle a fait l’objet d’un reclassement sous le code risque 853AB services d’aide à domicile avec effet rétroactif au 15 mars 2021, et son taux de cotisation est passé de 1,30 % à 3,50 %, après qu’elle ait modifié son siège social.
L’Association soutient que ce changement de code risque est sans fondement dès lors que son activité est restée strictement identique, à savoir une activité d’enseignement à domicile en faveur d’un public handicapé cognitif.
La CRAMIF se prévaut de l’agrément obtenu de la préfecture du Val d’Oise le 11 janvier 2021 par l’Association pour le service à la personne et fait valoir qu’ainsi, elle est qualifiée d’organisme de services à la personne, ce qui justifie sa classification sous le code risque 85.3AB.
L’agrément exprime l’autorisation donnée par l’autorité préfectorale à une entité aux fins d’exercer une activité en lien avec notamment des personnes handicapées, sous réserve qu’elle réponde aux exigences posées par les textes, réglementant ce secteur d’activité.
Pour autant, l’agrément a été délivré pour deux activités, soit les cours particuliers à domicile et le soutien scolaire à domicile.
La CARSAT souligne à juste titre que le code APE attribué par l’INSEE n’a pas d’incidence sur le l’attribution du code risque, puisqu’il est lié à des critères économiques.
Il en est de même pour l’agrément délivré par l’autorité administrative aux structures intervenant dans le secteur de l’aide à domicile auprès d’enfants de moins de trois ans, de personnes âgées ou de personnes handicapées. L’agrément impose notamment l’adhésion à un cahier des charges défini par l’arrêté du 1er octobre 2018, et vise à assurer le respect par l’entité de règles éthiques liées à l’intervention auprès de publics fragilisés, mais aussi à assurer la qualité des interventions à domicile.
Cet agrément n’a dès lors pas d’incidence sur le litige, le code risque devant être défini selon la nature des risques professionnels auxquels sont exposés les salariés de l’association.
Le code risque 85.3AB s’applique aux « services d’aide sociale à domicile (auxiliaires de vie, aides ménagères…).
Il s’agit de salariés intervenant auprès d’un public défini pour l’aider dans les tâches du quotidien, entretien du logement, préparation des repas, toilette, déplacements.
Ces personnes sont particulièrement exposées aux troubles musculo-squelettiques et aux risques de chute.
Tel n’est pas le cas du personnel de l’association N°1 scolarité, lequel est exposé aux risques liés aux déplacements, lorsqu’ils se rendent au domicile de leurs élèves, mais ne sont pas soumis aux risques affectant le personnel d’aide à domicile, soumis à des contraintes physiques, lors des travaux de ménage, de l’aide à la toilette par exemple.
Ce code risque ne correspond donc pas aux risques auxquels sont exposés les salariés.
L’activité de l’association est l’enseignement à domicile et le soutien scolaire.
Le code 91.3EA s’applique aux « associations culturelles et socio-éducatives ne gérant pas d’équipements ».
Enfin, le code risque 80.1ZA concerne le « personnel enseignant et administratif des établissements d’enseignement privés et des organismes de formation ».
Les salariés sont donc exposés aux risques auxquels sont exposés les salariés relevant des activités d’enseignement. Dès lors, il convient de dire que sera appliqué le code risque 80.1 ZA, dont la définition correspond à l’activité strictement exercée par l’association [6], tandis que le code risque 91.3EA est moins précis quant aux activités exercés par les structures en relevant, et répond donc moins aux risques réels de l’activité en question.
La caisse d’assurance retraite et de la santé au travail qui succombe en ses demandes est condamnée aux dépens de l’instance.
L’équité ne justifie pas de faire droit à la demande de l’association au regard de la nature du litige.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt rendu par mise à disposition, après débats publics, en premier et dernier ressort,
Déclare recevable et bien fondée la demande de l’Association [6],
Dit non fondée l’attribution à l’Association Numéro 1 Scolarité du code risque 85.3AB à compter du 15 mars 2021 pour son établissement sis à [Adresse 3],
Dit que doit lui être appliqué le code risque 80.1ZA, « personnel enseignant et administratif des établissements d’enseignement privés et des organismes de formation,
Ordonne en conséquence à la CRAMIF de recalculer les cotisations réellement dues et de rembourser les éventuels trop-perçus,
Condamne la CRAMIF aux dépens,
Déboute l’association [6] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier,Le Président,