Saisine du juge de l’exécution : 11 mai 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01590

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Saisine du juge de l’exécution : 11 mai 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01590

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 11/05/2023

N° de MINUTE : 23/472

N° RG 21/01590 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TQPM

Jugement (N° 20/000698) rendu le 04 Mars 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Béthune

APPELANTE

SA Compagnie Générale de Location et d’Equipement agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentée par Me Catherine Trognon Lernon, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉS

Madame [S] [L]

née le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 7] – de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/02/21/010146 du 05/10/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Douai)

Monsieur [P] [N]

né le [Date naissance 2] 1996 à [Localité 6] – de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 4]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 59178/02/21/009640 du 14/09/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Douai)

Représentés par Me Hortense Fontaine, avocat au barreau de Béthune, avocat constitué

DÉBATS à l’audience publique du 01 février 2023 tenue par Yves Benhamou magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Véronique Dellelis, président de chambre

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 11 mai 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 18 janvier 2023

– FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Selon offre préalable acceptée en date du 10 octobre 2016, la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS a consenti à Mme [S] [L] et M. [P] [N] un contrat de location avec option d’achat portant sur un véhicule de marque Kia d’un prix au comptant de 23.605 euros moyennant le paiement de 49 loyers mensuels représentant 1,102 % du prix TTC du véhicule hors assurance et 1,202 % du prix TTC du véhicule avec assurance.

Le véhicule a été livré le 19 octobre 2016.

Arguant du non paiement des loyers convenus la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS a par courrier recommandé avec demande d’avis de réception en date du 7 juin 2019, mis en demeure Mme [S] [L] et M. [P] [N] de lui payer la somme de 955,90 euros dans un délai de huit jours faute de quoi la résiliation définitive du contrat serait prononcée.

Par courrier recommandé en date du 3 septembre 2019, la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS a prononcé la résiliation du contrat tout en réclamant corrélativement à Mme [S] [L] et M. [P] [N] le paiement de la somme de 17.439,50 euros au titre du contrat de location avec option d’achat.

Par ordonnance en date du 3 octobre 2019, le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Béthune, a ordonné à Mme [S] [L] et M. [P] [N] de restituer le véhicule litigieux.

Par acte d’huissier en date du 28 août 2020, la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS a fait assigner en justice Mme [S] [L] et M. [P] [N] afin notamment d’obtenir leur condamnation solidaire à lui payer la somme de 11.803 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2019 avec capitalisation des intérêts.

Par jugement réputé contradictoire en date du 4 mars 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Béthune, a:

– dit la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS recevable en son action à l’égard de Mme [S] [L] et M. [P] [N],

– débouté la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS de sa demande en paiement et de sa demande subséquente de capitalisation d’intérêts,

– débouté la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS aux entiers dépens,

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 17 mars 2021, la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle a :

‘ débouté la SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS de ses demandes de condamnation solidaire contre M. [P] [N] et Mme [S] [L] à hauteur de la somme de 11.803 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2019 et 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de sa demande de capitalisation des intérêts,

‘ et condamné la SA COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions de la SA COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS en date du 11 novembre 2021, et tendant à voir:

– débouter purement et simplement Mme [S] [L] et M. [P] [N] de toutes leurs demandes,

– réformer la décision entreprise en ce qu’elle a d’une part prononcé la déchéance du droit aux intérêts et d’autre part débouté la société COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS de ses demandes de condamnation et l’a condamnée aux dépens,

En conséquence,

– condamner solidairement Mme [S] [L] et M. [P] [N] à payer à la société COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS la somme de 11.803,22 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2019,

– ordonner la capitalisation du droit aux intérêts,

– condamner solidairement Mme [S] [L] et M. [P] [N] à payer à la société COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance,

– condamner solidairement Mme [S] [L] et M. [P] [N] aux entiers dépens de la procédure de première instance en ce compris la somme de 553,26 euros correspondant aux frais relatifs à la saisie appréhension,

Y ajoutant en cause d’appel,

– condamner solidairement Mme [S] [L] et M. [P] [N] à payer à la société COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner solidairement Mme [S] [L] et M. [P] [N] aux entiers dépens de la procédure d’appel en ce compris la somme de 553,26 euros correspondant aux frais relatifs à la saisie appréhension.

Vu les dernières conclusions de M. [P] [N] et Mme [S] [L] en date du 17 novembre 2021, et tendant à voir:

– dire bien jugé, mal appelé,

– En conséquence confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire,

– réduire le montant de la clause pénale à 1 euro,

– accorder à M. [N] et Mme [L] les plus larges délais de paiement,

– En tout état de cause condamner la COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS à la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 18 janvier 2023.

***********

****

– MOTIFS DE LA COUR:

– SUR LA DÉCHÉANCE DU DROIT AUX INTÉRÊTS:

L’article L 312-18 du code de la consommation dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 prévoit en substance que l’offre de contrat de crédit est établie par écrit ou sur un autre support durable.

L’article R 312-10 du code de la consommation dans sa rédaction issue du décret n°2016-884 du 29 juin 2016 applicable au présent litige, prévoit en substance qu’un tel contrat de crédit est rédigé en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit.

De plus l’article L341-4 du code de la consommation dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 prévoit que prêteur qui accorde un crédit sans remettre à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 312-18, L. 312-21, L. 312-28, L. 312-29, L. 312-43 ainsi que, pour les opérations de découvert en compte, par les articles L. 312-85 à L. 312-87 et L. 312-92, est déchu du droit aux intérêts.

En matière d’imprimerie la hauteur du corps dite aussi force du corps, s’exprime en points typographiques d’une valeur unitaire de 0,375 millimètres ce qui donne pour le corps huit une hauteur de 8 x 0375 = 3 mm. La force du corps exprimée en points se mesure en partant de l’extrémité supérieure d’une lettre à hampe telle un b, un f, un 1 jusqu’à l’extrémité inférieure d’une lettre à jambage telle un g, un p, ou un y.

Or dans le cas présent l’objectivité commande de constater que les exigences relatives au corps huit n’ont pas été respectées plus particulièrement sur la première page du contrat litigieux.

Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a déchu la COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS en totalité de son droit aux intérêts.

– SUR LE BIEN FONDE DE LA CRÉANCE DONT DE PRÉVAUT L’APPELANTE:

Dans le cas présent la COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS chiffre le montant de sa créance selon les modalités suivantes:

– arriéré : 1.182,43 euros,

– indemnité de résiliation: 16.257,07 euros,

A déduire le montant

du prix de vente du véhicule en cause:- 5.341,19 euros,

A déduire l’acompte intervenu

après la déchéance du terme: – 294,99 euros.

Soit au total : 11.803,22 euros

Pour établir tout à la fois la réalité et le montant de sa créance, la COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS verse aux débats diverses pièces:

‘ l’offre préalable acceptée de crédit,

‘ le décompte précis des sommes dues,

‘ l’historique de compte (pièces n°3 et 3 bis),

‘ le tableau des valeurs de rachat,

‘ la fiche d’information pré-contractuelle,

‘ la fiche afférente à l’assurance,

‘ la fiche de consultation du FICP,

‘ les divers courriers recommandés AR adressés par la COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS à Mme [S] [L] et M. [P] [N].

Ces justificatifs complets et précis permettent d’établir dans son principe et dans son quantum la créance litigieuse. Toutefois il conviendra notamment de déterminer le sort de l’indemnité de résiliation.

– Sur le montant de l’indemnité de résiliation:

Au cas particulier les intimés demandent à titre subsidiaire que l’indemnité de résiliation qui s’analyse objectivement en une clause pénale, soit réduite à hauteur de 1 euro en arguant de son montant manifestement excessif.

L’article 1231-5 du code civil afférent à la clause pénale dispose:

‘Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d’office, à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l’application de l’alinéa précédent.

Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.

Sauf inexécution définitive, la pénalité n’est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.’

Il apparaît ainsi que même si la clause pénale a un fondement indemnitaire en ce sens qu’elle est assimilable à des dommages et intérêts, son quantum peut toutefois être corrélé à des considérations d’équité tirées des circonstances particulières de l’espèce.

Or, il apparaît que Mme [L] qui a trois enfants à charge et donc une famille nombreuse, perçoit des revenus étroits (de l’ordre de 1800 euros par mois avec des allocations de 842,86 euros) alors qu’en ce qui le concerne M. [P] [N] est sans ressources car il se trouve actuellement incarcéré en maison d’arrêt (pièce n°1 des intimés).

Il convient dès lors de réduire justement la clause pénale dont le montant de 16.257,07 euros est manifestement excessif , à hauteur de la somme de 7.000 euros.

– Sur l’exact montant de la créance:

Ainsi au regard des justificatifs fournis la créance s’établit de la manière suivante:

– arriéré : 1.182,43 euros,

– indemnité de résiliation: 7.000,00 euros,

A déduire le montant

du prix de vente du véhicule en cause:- 5.341,19 euros,

A déduire l’acompte intervenu

après la déchéance du terme: – 294,99 euros.

Soit au total : 2.546,28 euros

Du fait de la déchéance en totalité du prêteur du droit aux intérêts, ne sera due que la somme susmentionnée à l’exclusion de tous intérêts.

Par suite il convient après infirmation sur ce point du jugement querellé, de condamner M. [P] [N] et Mme [S] [L] à payer à la COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS la somme de 2.546,28 euros à l’exclusion de tous intérêts.

S’agissant des autres points déférés à la cour dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel à l’exclusion des dépens évoqués ci après, le premier juge ayant opéré une exacte application du droit aux faits, il y a lieu d’entrer en voie de confirmation.

– SUR LA DEMANDE DE DÉLAIS DE GRÂCE:

Les débiteurs au regard des justificatifs produits apparaissant comme des débiteurs malheureux et de bonne foi, il y a lieu de leur accorder 24 mois de délais de grâce pour apurer leur dette.

– SUR L’APPLICATION DES DISPOSITIONS DE L’ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE AU TITRE DE L’INSTANCE D’APPEL:

L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel.

– SUR LES DÉPENS D’APPEL:

Il y a lieu après infirmation du jugement déféré s’agissant des frais irrépétibles de première instance, de dire que chacune des parties succombant partiellement, de dire que chacune des parties supportera la charge des dépens tant de première instance que d’appel qu’il aura engagés.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, et par mise à disposition au greffe,

– Confirme le jugement querellé sauf en ce qu’il a:

‘ débouté la SA COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS de sa demande en paiement des sommes dues au titre de la location vente,

‘ condamné la SA COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS aux entiers dépens,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

– Condamne M. [P] [N] et Mme [S] [L] à payer à la COMPAGNIE GÉNÉRALE DE LOCATION D’EQUIPEMENTS la somme de 2.546,28 euros à l’exclusion de tous intérêts,

– Accorde à M. [P] [N] et Mme [S] [L] 24 mois de délais de grâce pour apurer leur dette,

– Dit qu’ils pourront s’en libérer en 24 mensualités d’un montant identique étant précisé qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité, l’ensemble de la créance deviendra immédiatement exigible 15 jours après l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception demeurée infructueuse,

– Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel,

– Laisse à chacune des parties la charge des dépens tant de première instance que d’appel qu’elle aura engagés.

Le greffier

Gaëlle PRZEDLACKI

Le président

Yves BENHAMOU

 


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