COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT SUR DÉFÉRÉ
DU 11 MAI 2023
N° 2023/[Cadastre 1]
Rôle N° RG 22/14741 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BKIZS
[D] [C]
C/
Commune COMMUNE DE MALIJAI
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me GERARDOT
Me TARTANSON
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de la Présidente de la Chambre 1-9 de la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE en date du 18 Octobre 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 22/1566.
APPELANT- DEMANDEUR SUR DÉFÉRÉ
Monsieur [D] [C]
né le 15 Septembre 1967 à [Localité 9]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 11]
représenté par Me Marine GERARDOT, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE- DEFENDERESSE SUR DÉFÉRÉ
Commune COMMUNE DE MALIJAI, demeurant [Adresse 10]
représentée par Me Séverine TARTANSON, avocat au barreau des ALPES DE HAUTE-PROVENCE, substituée par Me Romain BONY-CISTERNES, avocat au barreau des ALPES DE HAUTE PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 16 Mars 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Agnès DENJOY, Présidente de Chambre, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Agnès DENJOY, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Monsieur Dominique TATOUEIX, Magistrat honoraire
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Ingrid LAVALLEE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023,
Signé par Madame Agnès DENJOY, Président et Madame Ingrid LAVALLEE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCEDURE
Vu l’arrêt rendu le 10 avril 2006 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence infirmant le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Digne-les-Bains le 1er juillet 2001 dont il résulte en substance que :
– les consorts [Z] sont propriétaires riverains d’un chemin prenant naissance sur le CD 8 et rejoignant le CD 12, chemin dit du Moulin de Chénerilles tel que figuré au cadastre ancien et, dans la partie du tronçon sur lequel le passage est revendiqué, soit du CD 8 à la propriété [Z] tel que figuré sur la carte d’état-major de 1952,
– ce chemin est un chemin d’exploitation
– les consorts [Z], riverains de ce chemin, ont le droit d’en user et d’y passer.
Le 15 juillet 2020, M. [D] [C] a fait citer le maire de la commune de Malijai devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Digne-les-Bains aux fins, en substance, de :
– constater la disparition du chemin d’exploitation ;
– constater la cession des parcelles anciennement communales acquises définitivement par M. [Z] tant par l’effet de son statut de légataire universel qu’à la suite de la renonciation à leur droit de propriété de l’ensemble des riverains de ce chemin ;
– condamner la commune à faire enregistrer à ses frais l’acte translatif de propriété des parcelles numéro [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] ;
– condamner les consorts [H] à rétablir à leurs frais le chemin d’exploitation sous astreinte de 200 € par jour de retard ;
– les condamner à lui verser la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts outre 3 500 € au titre des frais de justice.
La commune de Malijai a conclu au défaut de qualité à agir du demandeur, à l’incompétence du juge de l’exécution pour statuer sur les demandes, à leur rejet et à la condamnation du demandeur à lui verser la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi que 3 000 € au titre des frais de justice.
Une demande de récusation du juge de l’exécution formée par M. [C] a été rejetée par ordonnance du premier président de la cour d’appel du 27 novembre 2020.
Par jugement du 10 juin 2021, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Digne-les-Bains a :
– constaté qu’il n’entre pas dans les compétences du juge de l’exécution de connaître des revendications immobilières formées par M. [C] ;
– débouté ce dernier de l’ensemble de ses demandes ;
– condamné M. [C] à payer à la commune la somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
M. [C] a relevé appel de cette décision par déclaration électronique de son avocat du 2 février 2022.
La commune a déposé des conclusions d’incident le 11 avril 2022 selon lesquelles l’appel était tardif et irrecevable, la commune ayant fait signifier le jugement dont il s’agit par acte d’huissier du 27 juillet 2021.
Vu les conclusions en réponse sur l’incident notifiées par l’appelant le 22 juillet 2022 ;
Ce dernier conclut à la recevabilité de son appel il indique que le procès-verbal de signification est nul en vertu d’une jurisprudence constante dans la mesure où l’acte ne comporte aucune mention sur les diligences accomplies par l’huissier pour rechercher le lieu de travail du destinataire afin de parvenir à lui signifier l’acte à personne et que le délai d’appel n’a donc pas commencé à courir.
Il rappelle que le litige a pour origine des difficultés d’accès à sa propriété et ses difficultés pour recevoir son courrier, ce dont attestent les services postaux.
Il précise qu’il s’est vu accorder l’aide juridictionnelle par décision du 21 janvier 2022 et que sa déclaration d’appel est intervenue dans les 15 jours de cette décision.
Par ordonnance en date du 18 octobre 2022, la présidente de cette chambre a déclaré l’appel irrecevable.
Par requête déposée le 28 octobre 2022, M. [C] a déféré cette décision à la cour.
Suivant conclusions notifiées le 28 octobre 2022, M. [C] demande à la cour de :
– le recevoir en son déféré à l’encontre de l’ordonnance rendue le 18 octobre 2022,
– annuler l’ordonnance du 18 octobre 2022
– le déclarer recevable en son appel du jugement du 10 juin 2021 ;
– condamner la commune de Malijai à lui payer la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Suivant conclusions notifiées le 23 novembre 2022, la commune de Malijai demande à la cour de :
– confirmer l’ordonnance déférée du 18 octobre 2022
– condamner M. [Z] – [E] à lui payer la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
– condamner M. [Z] aux entiers dépens
La commune fait valoir en substance que le jugement n’a pas pu être porté à la connaissance de M. [C] par LRAR car il n’a pas retiré la lettre recommandée du greffe mais qu’en revanche elle a pris l’initiative de lui faire signifier le jugement par acte d’huissier le 27 juillet 2021 et que l’huissier a effectivement signifié le jugement à l’adresse de l’appelant qui est précisément celle à laquelle il se domicilie dans sa déclaration d’appel.
La commune précise que M. [C] vit reclus et refuse tout contact et que le chemin d’accès à sa maison est barré ; l’huissier a donc laissé un avis de passage dans la boîte aux lettres ;
Le délai d’appel était déjà expiré lorsqu’il a présenté une demande d’aide juridictionnelle.
MOTIFS DE LA DECISION
La requête en référé a été déposée dans le délai de 15 jours à compter de l’ordonnance et est recevable en la forme.
Sur son bien-fondé :
La commune de Malijai a entrepris de faire signifier le jugement dont appel par huissier, le 27 juillet 2022.
L’acte d’huissier en date du 27 juillet 2022 énonce les diligences effectuées par l’huissier pour parvenir à porter à la connaissance de M. [Z] le jugement dont il s’agit, étant noté que le domicile déclaré par le demandeur au greffe du tribunal judiciaire de Digne service du juge de l’exécution était : «BP 9038 Digne-les-Bains cedex 9» et qu’il s’agit d’une adresse de correspondance postale et non d’un domicile.
L’huissier a donc dû procéder à des recherches afin de déterminer le domicile de M. [Z].
La notion de domicile est une notion de pur fait ainsi qu’il résulte de l’article 102 du code civil.
L’huissier de justice s’est déplacé au [Adresse 7] où il n’a pas pu procéder à la signification du jugement à M. [Z] ; il ressort du procès-verbal que M. «[Z] [T] ne demeure pas au [Adresse 8] cela m’a été confirmé par les occupants de l’immeuble.»
Cette constatation est corroborée par les pièces de la procédure : en effet M. [Z] avait été convoqué devant le juge de l’exécution en vue du jugement dont appel le 14 janvier 2021 à l’adresse indiquée par lui du [Adresse 6] ; or, cette convocation a été retournée au greffe avec la mention : « destinataire inconnu à l’adresse ».
Corrélativement, dans sa déclaration d’appel M. [Z] se déclare domicilié : « [Adresse 12] » ce qui correspond à l’adresse du bien immobilier dont il est propriétaire dénommé [Adresse 12].
Ces différentes constatations permettent de corroborer le fait que l’appelant est domicilié au [Adresse 12].
Or, l’huissier de justice s’est ensuite rendu à l’adresse du bien immobilier, précitée.
Selon les constatations de l’huissier, la propriété est accessible par un chemin qui prend naissance sur la route du Chaffaut ; le chemin d’accès à la maison est barré par une barrière.
C’est donc à bon droit que l’huissier a laissé un avis de passage au niveau de cette barrière qu’il a doublé d’une lettre simple conformément à ce que prévoit l’article 658 du code de procédure civile.
Le requérant soutient que l’huissier de justice aurait dû rechercher son lieu de travail afin de lui signifier le jugement à personne.
Toutefois, il ne soutient pas pour autant qu’il exerce une activité professionnelle et ne s’explique pas sur un lieu de travail quel qu’il soit. D’ailleurs, la décision d’aide juridictionnelle retient qu’il perçoit des revenus mensuels de 82 € constitués par le RSA.
Il s’agit ainsi d’une argumentation de pure forme.
Ensuite,M. [Z] produit une facture de téléphone mobile mais par hypothèse une telle facture ne relie pas le titulaire de l’abonnement à un domicile.
Par conséquent l’acte de signification du jugement intervenu le 27 juillet 2021 a produit son effet et il en résulte que l’appel formé par M. [C] du jugement du 10 juin 2021 est tardif et irrecevable. L’ordonnance déférée sera confirmée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement,
Confirme l’ordonnance déférée ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne M. [D] [C] à payer à la commune de Malijai la somme de 1500 € dans les conditions de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle ;
Déboute M. [C] de sa demande d’indemnité de procédure ;
Condamne M. [C] aux dépens du déféré.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE