Saisine du juge de l’exécution : 11 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/03463

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Saisine du juge de l’exécution : 11 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/03463

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 11 MAI 2023

N° 2023/ 345

Rôle N° RG 22/03463 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJAB5

[R] [F]

[W] [X]

[P] [F]

[C] [K]

[Y] [F]

[O] [F]

C/

[S] [H]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Thimothée JOLY

Me Thierry TROIN

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par le Président du TGI de NICE en date du 11 Février 2016 enregistrée au répertoire général sous le n°16/00022 .

APPELANTS

Monsieur [R] [F]

ès qualité d’héritier de feu Monsieur [Z] [F]

né le 15 Décembre 1985 à [Localité 15],demeurant [Adresse 10]

Madame [W] [X]

ès qualité d’héritier de feu Monsieur [Z] [F]

née le 24 avril 1954 à [Localité 15], demeurant [Adresse 6]

Madame [P] [F]

ès qualité d’héritier de feu Monsieur [Z] [F]

née le 07 juin 1969 à [Localité 15], demeurant [Adresse 12]

Madame [C] [K] es qualité d’héritier de feu Monsieur [Z] [F]

née le 08 Janvier 1977 à [Localité 15], demeurant [Adresse 9]

Monsieur [Y] [F]

ès qualité d’héritier de feu Monsieur [Z] [F]

né le 05 novembre 1987 à [Localité 15], demeurant [Adresse 2]

Madame [O] [F]

demeurant [Adresse 1]

représentés par Me Thimothée JOLY de la SCP CABINET PIETRA & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Amandine WEBER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

et assistés de Me Olivier TAFANELLI, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

Madame [S] [H]

née le 16 Janvier 1938 à [Localité 15], demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Thierry TROIN, de la SELARL BENSA et TROIN avocat au barreau de NICE

et assistée de Me Magali LEROY, avocat au barreau de PARIS, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 21 mars 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Mme NETO, Conseillère, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Gilles PACAUD, Président

Mme Catherine OUVREL, Conseillère

Mme Angélique NETO, Conseillère rapporteur

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 mai 2023,

Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Julie DESHAYE, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par ordonnance réputée contradictoire en date du 11 février 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nice a :

– constaté la résiliation au 8 septembre 2015 du bail commercial liant les parties relativement au local principal situé [Adresse 11] à [Localité 15] ;

– constaté la résiliation au 8 septembre 2015 du bail commercial liant les parties relativement au local à usage d’entrepôt situé [Adresse 11] à [Localité 15] ;

– dit, qu’à défaut pour M. [Z] [F] d’avoir, ainsi que toute personne de son chef, quitté les lieux dans le mois de la signification de l’ordonnance, il pourrait être procédé à son expulsion avec, si nécessaire, l’assistance de la force publique ;

– condamné solidairement M. [Z] [F] et Mme [O] [F], en sa qualité de caution, à payer à Mme [S] [H] une provision de 9 669,60 euros à valoir sur les loyers, charges et indemnités d’occupation du local principal arrêtés au mois de décembre 2015 inclus avec intérêts au taux légal à compter du 7 août 2015, date de la signification du commandement de payer sur montant des loyers du commandement et à compter de ladite pour le surplus ;

– condamné solidairement M. [Z] [F] à payer à Mme [S] [H] une provision de 4 477,40 euros à valoir sur les loyers, charges et indemnités d’occupation du local à usage d’entrepôt arrêtés au mois de décembre 2015 inclus avec intérêts au taux légal à compter du 7 août 2015, date de la signification du commandement de payer sur montant des loyers du commandement et à compter de ladite pour le surplus ;

– fixé, à titre provisionnel, à la charge de M. [Z] [F] et Mme [O] [F], en sa qualité de caution, à compter du 8 septembre 2015, une indemnité d’occupation mensuelle de 537,20 euros correspondant au montant du dernier loyer du local principal, en sus de laquelle devront être payés les charges et accessoires du loyer, exigible, jour par jour, jusqu’à la remise effective des lieux, avec intérêts au taux légal ;

– condamné solidairement en tant que de besoin M. [Z] [F] et Mme [O] [F], en sa qualité de caution, à payer l’indemnité d’occupation précitée jusqu’à la libération effective des lieux ;

– fixé, à titre provisionnel, à la charge de M. [Z] [F], à compter du 8 septembre 2015, une indemnité d’occupation mensuelle de 268,90 euros correspondant au montant du dernier loyer du local à usage d’entrepôt, en sus de laquelle devront être payés les charges et accessoires du loyer, exigible, jour par jour, jusqu’à la remise effective des lieux, avec intérêts au taux légal ;

– condamné en tant que de besoin M. [Z] [F] à payer l’indemnité d’occupation précitée jusqu’à la libération effective des lieux ;

– rejeté le surplus des demandes ;

– condamné solidairement M. [Z] [F] et Mme [O] [F], en sa qualité de caution, à payer à Mme [S] [H] la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné solidairement M. [Z] [F] et Mme [O] [F], en sa qualité de caution, aux dépens de l’instance, en ce compris les coûts des commandements de payer et de sa dénonce à caution.

Par jugement en date du 4 juille 2016, le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Nice a dit abandonnés les biens laissés dans les locaux susvisés et a condamné M. [Z] [F] à verser à Mme [H] la somme de 300 euros au titre des frais irrépétibles.

Suivant déclaration transmise au greffe le 8 mars 2022, M. [R] [F], Mme [W] [X], Mme [P] [F], Mme [C] [K], M. [Y] [F] et Mme [O] [F] ont interjeté appel de l’ordonnance susvisée en toutes ses dispositions dûment reprises.

Aux termes de leurs premières conclusions de fond transmises le 12 avril 2022 avec 16 pièces, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus amples des prétentions et moyens pour les raisons qui seront développées dans les motifs de la décision, ils demandent à la cour de :

– les recevoir en leur appel en leur qualité d’héritiers de feu M. [Z] [F] ;

– réformer l’ordonnance en toutes ses dispositions ;

– prononcer, à titre principal, la nullité des actes de signification de l’ordonnance de référé du 11 février 2016 et du jugement du 4 juillet 2016 et, dès lors, juger non avenus l’ordonnance entreprise et les actes subséquentes ;

– débouter, à titre subsidiaire, Mme [H] de ses demandes en l’état de contestations sérieuses ;

– condamner, en toute hypothèse, Mme [H] à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Concernant la recevabilité de leur appel, ils exposent que M. [Z] [F] a été assigné devant le juge des référés et le juge de l’exécution à l’adresse du [Adresse 6] à [Localité 15] où il ne résidait plus, puisque son domicile, comme son lieu de travail, se trouvaient [Adresse 3] à [Localité 13], de sorte qu’il n’en a jamais eu connaissance, de même qu’il n’a pas pu interjeter appel à l’encontre des décisions qui ont été prononcées comem lui ayant été, là encore, signifiées à la mauvaise adresse. Ils relèvent que M. [Z] [F] est décédé le 14 août 2020 en laissant pour lui succéder M. [Y] [F], Mme [P] [F], M. [R] [F] et Mme [C] [I]. Ils indiquent avoir interjeté appel lorsque les deux décisions litigieuses ont été signifiées à M. [R] [F] le 25 février 2022 et à Mme [C] [I] le 28 février 2022 ainsi qu’un commandement de payer aux fins de saisie-vente, chacun pour la somme de 4 977,12 euros, signifié à M. [R] [F] le 7 mars 2022 et à Mme [C] [I] le 10 mars 2022.

Concernant la nullité de la signification de l’ordonnance entreprise à M. [Z] [F], ils considèrent que cette décision, réputée contradictoire, est caduque pour ne pas avoir été valablement signifiée à feu M. [Z] [F] dans les six mois de sa date, en application de l’article 478 du code de procédure civile. Ils insistent sur le fait que, lorsque Mme [H], a engagé sa procédure devant le juge des référés, elle connaissait la véritable adresse de M. [Z] [F], à savoir [Adresse 4] à [Localité 13], tel que cela résulte des courriers qu’ils ont échangés en avril et mai 2015 portant sur le montant de l’arriéré locatif dû, mais également du site Infogreffe. Ils indiquent que le fait que le nom de [F] figurait sur la boîte aux lettres de l’adresse à laquelle s’est rendue l’huissier de justice s’explique par le fait que l’épouse de M. [Z] [F], Mme [W] [X], avec laquelle il était séparée de corps, y résidait toujours. Ils estiment donc que la signification de l’ordonnance entreprise n’obéit pas aux prescriptions des articles 654 et 655 du code de procédure civile, les diligences entreprises par l’huissier de justice, qui n’a même pas consulté Infogreffe, étant insuffisantes pour rechercher M. [Z] [F]. Ils indiquent que l’ordonnance entreprise n’ayant pas été régulièrement signifiée dans les six mois, elle doit être annulée, de sorte qu’elle ne peut produire aucun effet juridique à leur encontre.

Concernant la nullité de la signification de l’ordonnance entreprise à Mme [O] [F], ils affirment que l’ordonnance ne lui a jamais été signifiée. Ils considèrent donc qu’elle doit être jugée non avenue.

Sur le fond, ils se prévalent de contestations sérieuses dès lors que M. [Z] [F] a indiqué à Mme [H], dans un courrier en date du 7 mai 2015, qu’il avait déjà rendu les clés du local, à la suite de quoi Mme [H] a fait le choix de l’assigner, ainsi que la caution, à des mauvaises adresses. Ils soulignent en outre que l’intimée ne produit pas les baux et les commandements de payer sur la base desquels l’ordonnance entreprise a été rendue.

Aux termes de ses premières conclusions de fond transmises le 23 mai 2022 avec 9 pièces, auxquelles il convient de se référer pour un exposé plus amples des prétentions et moyens pour les raisons qui seront développées dans les motifs de la décision, Mme [H] demande à la cour de :

– débouter les appelants de leurs demandes ;

– les condamner in solidum à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– les condamner aux dépens.

Concernant la nullité de la signification de l’ordonnance entreprise à M. [Z] [F], elle indique que cette décision lui a été signifiée le 10 mars 2016 à son domicile, [Adresse 5], à [Localité 15], suivant acte remis à étude en son absence, le domicile ayant été certifié par le nom de M. [F] figurant sur la boîte aux lettres et l’interphone, faisant observer que c’est à cette adresse que l’assignation a été signifiée à domicile le 9 décembre 2015, son épouse ayant confirmé son domicile et accepté de recevoir l’acte. Elle relève qu’il s’agit de l’adresse du seul domicile connu et déclaré par [Z] [F]. Elle indique que ce n’est qu’en novembre 2016 que ce dernier s’est domicilé à [Localité 13], son lieu de travail. Elle estime donc que l’ordonnance entreprise est définitive à l’égard de [Z] [F] et de ses ayants droit.

Concernant la nullité de la signification de l’ordonnance entreprise à Mme [O] [F], elle indique que cette décision lui a été régulièrement signifiée le 10 mars 2016 selon procès-verbal de recherches infructueuses.

Elle en conclut au fait que les appelants sont prescrits en leur appel.

Sur le fond, elle expose avoir pu récupérer ses biens le 4 avril 2016 après la procédure en expulsion menée par un huissier de justice. Elle dément les allégations de M. [Z] [F] dans son courrier du mois d’avril 2015 selon lesquelles il aurait remis les clés du local, lequel a été récupéré avec des objets laissés sur place. Elle expose que la dette s’élèvait en février 2021 à la somme de 21 332,95 euros, telle que déclarée au passif successoral.

La clôture de l’instruction a été prononcée suivant ordonnance en date du 7 mars 2023.

Le 2 mars 2023, l’intimée a transmis de nouvelles écritures ainsi qu’une pièce complémentaire n° 10, auxquelles les appelants y ont répliqué par des conclusions transmises le 6 mars 2023 en y joignant 7 pièces supplémentaires n° 17 à 23.

L’intimée y a répondu en transmettant des conclusions le 17 mars 2023 avec une pièce complémentaire n° 11 et demande de report de la clôture au jour de l’audience de plaidoirie compte tenu des conclusions tradives des appelants.

Les appelants s’opposent à la demande de révocation de l’ordonnance de clôture aux termes de conclusions de procédure transmises le 17 mars 2023 et sollicite le rejet des conclusions transmises par l’intimée le 17 mars 2023 ainsi que la pièce n° 11 qui y est annexée.

Par soit-transmis en date du 30 mars 2023, la cour relève, qu’alors même que l’intimée, qui se prononce pour la régularité et l’existence des actes de signification de l’ordonnance entreprise, tant à l’égard de feu M. [Z] [F] que de Mme [O] [F], en tire comme conséquence juridique, dans le corps de ses conclusions en page 6 in fine, qu’aucun recours ne peut plus être exercé contre la décision et que les appelants sont prescrits en leur appel, elle ne sollicite pas, dans son dispositif, l’irrecevabilité de l’appel interjeté par les appelants en application des dispositions de l’article 490 du code de procédure civile. S’agissant d’une irrecevabilité qui découle des moyens soutenus par les parties et qui peut être soulevée en application de l’article 125 alinéa 1 du même code, les parties ont été invitées à faire valoir leurs éventuelles observations sur ce point par une note en délibéré avant le lundi 11 avril 2023 minuit.

Par une note en délibéré transmise le 7 avril 2023, les consorts [F] relèvent que si, Mme [H] indique dans le corps de ses écritures que les appelants sont prescrits et donc irrecevables, ils soulignent que le moyen tiré de la prescription n’est pas repris dans le dispositif, de sorte que la cour ne peut soulever d’office ce moyen en application de l’article 2247 du code civil. Par ailleurs, ils indiquent que, compte tenu des irrégularités affectant la signification de l’ordonnance du 11 février 2016 et du jugement du 4 juillet 2016, l’ordonnance de référé du 11 février 2016 doit être considérée comme étant non avenue, de sorte que la cour ne peut constater l’irrecevabilité de l’appel après avoir relevé d’office ce moyen.

Par une note en délibéré transmise le 11 avril 2023, Mme [H] indique que, compte tenu de la signification de la décision intervenue les 10 et 16 mars 2016 à M. [Z] [F] et Mme [O] [F], aucun recours ne peut plus être exercé contre la décision depuis le 26 mars 2016 s’agissant de M. [Z] [F] et ses ayants droit et le 1er avril 2016 en ce qui concerne Mme [O] [F]. Elle considère donc que les appelants sont prescrits en leur appel et irrecevables en application de l’article 490 du code de procédure civile. Elle demande à la cour de juger les appelants irrecevables en leur appel et demandes.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de révocation de l’ordonnance de clôture et le rejet de conclusions

Il résulte de l’article 802 du code de procédure civile, qu’après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office : sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et accessoires échus, aux débours faits jusqu’à l’ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l’objet d’aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes en révocation de l’ordonnance de clôture.

L’article 803 du code de procédure civile dispose que l’ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue. Elle peut être révoquée, d’office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l’ouverture des débats sur décision du tribunal.

Par ailleurs, l’article 15 du code de procédure civile énonce que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, aifn que chacun soit à même d’organiser sa défense.

Enfin, aux termes de l’article 16 du même code, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.

Il est admis que le juge dispose d’un pouvoir souverain pour apprécier si des conclusions et/ou des pièces ont été déposées en temps utile. Ainsi, s’il estime qu’elles ont été déposées peu de temps avant le moment prévu pour l’ordonnance de clôture, le juge doit veiller au respect des droits de la défense et, éventuellement, les écarter des débats en caractérisant les circonstances particulières qui l’ont conduit à se prononcer en ce sens.

En l’espèce, alors même que les parties avaient échangé des conclusions les 12 avril et 23 mai 2022, l’intimée, qui avait conclu en dernier, a transmis de nouvelles écritures le jeudi 2 mars 2023 en y joignant une pièce complémentaire n° 10, à savoir une décision du juge de l’exécution en date du 5 septembre 2022. Or, l’intimée, qui ne s’est pas contentée de produire cette pièce, a développé, dans le corps de ses conclusions, de nouveux moyens en reproduisant et s’appropriant les motifs du jugement du juge de l’exécution afin d’établir qu’aucune nullite ou caractère non-avenu n’entache la validité des décisions des 11 février et 4 juillet 2016.

Ces conclusions, transmis 4 jours avant l’ordonnance de clôture prononcée le mardi 7 mars 2023, ont appelé une réplique de la part des appelants le lundi 6 mars 2023, soit la veille de la clôture. Or, tout en reprenant leurs moyens développés devant le juge de l’exécution portant sur l’insuffisance des diligences accomplies par l’huissier de justice lors de la signification des assignations délivrées à l’encontre, non seulement de [Z] [F], mais également de Mme [O] [F], en transmettant 7 pièces complémentaires n° 17 à 23, les appelants se prévalent d’un moyen nouveau tiré de l’absence de preuve de l’envoi à Mme [O] [F] du courrier recommandé exigé, à peine de nullité, par l’alinée 2 de l’article 659 du code de procédure civile.

Ce dernier moyen a conduit l’intimée à y répondre par de nouvelles conclusions transmises le 17 mars 2023, soit après l’ordonnance de clôture, auxquelles ont été jointes une pièce complémentaire n° 11, à savoir le courrier recommandé adressé à Mme [O] [F] par l’huissier de justice le 17 mars 2016.

Les appelants, qui s’opposent à la demande de révocation de l’ordonnance de clôture, sollicitent le rejet des conclusions transmises par la partie adverse le 17 mars 2023 ainsi que la pièce n° 11 qui y est annexée.

Le fait que ces éléments ont été transmis en réponse à un moyen nouveau soulevé par les appelants dans leurs conclusions transmises la veille de l’ordonnance de clôture ne constitue pas une cause grave depuis que l’ordonnance de clôture a été rendue.

Il n’y a donc pas lieu de révoquer l’ordonnance de clôture, de sorte que les conclusions de l’intimée transmises le 17 mars 2023, soit après clôture, ainsi que la pièce n°11 qui y est annexée, seront rejetées.

S’agissant en outre des conclusions et nouvelles pièces n° 17 à 23 transmises par les appelants le 6 mars 2023, soit la veille de la clôture, s’il apparaît qu’elles l’ont été en réponse à des conclusions adverses transmises le 2 mars 2023, lesquelles ont relancé le débat, tel qu’il l’a été devant le juge de l’exécution, les appelants y soulèvent un moyen nouveau auquel l’intimée ne pouvait matériellement répondre que postérieurement à l’ordonnance de clôture en ce que des démarches devaient nécessairement être entreprises pour obtenir la pièce n° 11.

Dès lors qu’il ne s’agit pas que de simples conclusions en réplique, elles sont contraires au principe du contradictoire.

Ces éléments caractèrisent des circonstances particulières justifiant de les écarter des débats ainsi que les nouvelles pièces n° 17 à 23 qui y sont annexées.

S’agissant enfin des conclusions et de la nouvelle pièce n° 10 transmise par l’intimée le 2 mars 2023, il convient de relever que cette transmission a été faite pour soumettre un jugement rendu par le juge de l’exécution le 5 septembre 2022, soit six mois avant la clôture, et ce, alors même que cette clôture était connue des parties depuis l’ordonnance de fixation du 16 mars 2022, soit depuis plus d’un an, et que l’intimée avait été la dernière à conclure le 23 mai 2022 en réplique à des conclusions transmises par les appelants le 12 avril 2022.

Si les appelants ont eu matériellement le temps de répondre à ces conclusions la veille de la clôture, ces dernières ainsi que les nouvelles qui y sont annexées ont été écartées des débats comme comportant un moyen nouveau auquel l’intimée n’a pas été en mesure de répondre avant l’ordonnance de clôture.

Dans ces conditions, les conclusions transmises tardivement le 2 mars 2023 étant contraires au principe du contradictoire, il y a lieu de les écarter des débats ainsi que la nouvelle pièce n° 10 qui y est annexée.

En conséquence, s’il n’y a pas lieu de rabattre l’ordonnance de clôture du 7 mars 2023, de sorte que les conclusions transmises par l’intimée le 17 mars 2023 et la pièce n° 11 seront écartées des débats, les conclusions et pièce n° 10 transmises tardivement par l’intimée le 2 mars 2023 et les conclusions et pièces n° 17 à 23 transmises en méconnaissance du principe du contradictoire par les appelants le 6 mars 2023 seront également écartées des débats.

Sur la régularité des actes de signification du jugement rendu le 4 juillet 2016 par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Nice

Dès lors qu’il n’appartient pas à la cour, saisie d’un appel formé contre une ordonnance de référé, de se prononcer sur la régularité des actes de signification d’un jugement du juge de l’exécution, comme n’étant pas saisie de l’appel d’un tel jugement, il n’y a pas lieu à référé sur la demande formée par les appelants tendant à la nullité de tels actes.

Sur la régularité des actes de signification de l’ordonnance enrteprise et, dès lors, sur la recevabilité de l’appel qui a été interjeté

L’article 490 du code de procédure civile énonce que l’ordonnance de référé peut être frappée d’appel à moins qu’elle n’émane du premier président de la cour d’appel ou qu’elle n’ait été rendue en dernier ressort en raison du montant ou de l’objet de la demande. L’ordonnance rendue en dernier ressort par défaut est susceptible d’opposition. Le délai d’appel ou d’opposition est de quinze jours.

Le délai court de la signification de l’ordonnance et non du jour de son prononcé à la condition pour la signification d’être régulière.

Il résulte de l’article 641 alinéa 1 du même code que lorsqu’un délai est exprimé en jours, celui de l’acte, de l’évènement, de la décision ou de la notification qui le fait courir ne compte pas.

L’article 642 alinéa 2 du même code énonce que le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

En outre, il résulte de l’article 125 alinéa 1 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir doivent être relevées d’office lorsqu’elles ont un caractère d’ordre public, notamment lorsqu’elles résultent de l’inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l’absence d’ouverture d’une voie de recours.

En l’espèce, relevant des irrégularités lors de la signification de l’ordonnance entreprise, par acte d’huissier en date du 10 mars 2016 pour M. [Z] [F], aux droits duquel interviennent ses enfants et son épouse, et l’absence de signification de l’ordonnance entreprise pour Mme [O] [F], les consorts [F] se prévalent de l’absence d’irrecevabilité manifeste de leur appel interjeté le 8 mars 2022 à l’encontre de l’ordonnance entreprise en date du 11 février 2016.

Sur l’absence de signification de l’ordonnance entreprise concernant Mme [O] [F]

Le délai d’appel court à compter du jour de la signification de l’ordonnance.

En application des dispositions de l’article 659 du code de procédure civile, lorsque la personne à qui l’acte doit être signifié n’a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l’huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu’il a accomplies pour rechercher le destinataire de l’acte.

Le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, l’huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, une copie du procès-verbal, à laquelle est jointe une copie de l’acte objet de la signification.

Le jour même, l’huissier de justice avise le destinataire, par lettre simple, de l’accomplissement de cette formalité.

Les dispositions du présent article sont applicables à la signification d’un acte concernant une personne morale qui n’a plus d’établissement connu au lieu indiqué comme siège social par le registre du commerce et des sociétés.

En l’espèce, Mme [H] démontre que l’ordonnance entreprise a bien été signifiée à Mme [O] [F] par acte d’huissier transformé en procès-verbal de recherches infructueuses le 16 mars 2016. Plus précisément, l’huissier de justice énonce s’être rendu au [Adresse 8], à [Localité 14] le 16 mars 2016 et avoir constaté que son nom ne figurait pas sur une boîte aux lettres nominatives, que toutes les recherches entreprises pour retrouver le destinaire de l’acte étaient restées infructueuses, et notamment la vérification du service des listes électorales, la consultation de l’annuaire téléphonique où Mme [F] n’apparaît pas dans les pages blanches dans le Var et que M. [Z] [F] lui a confirmé, lors d’une précédente signification, que sa soeur ne demeurait plus à l’adresse susvisée depuis des années mais qu’il ne connaissait pas son domicile actuel, n’ayant plus de contact avec elle, à la suite de quoi il a dressé un procès-verbal de recherches infructueuses.

La régularité des diligences accomplies par l’huissier de justice pour rechercher Mme [O] [F] et le respect du formalisme prescrit par les dispositions de l’article 659 du code de procédure civile ne sont pas discutés par les appelants dans leurs conclusions transmises le 12 avril 2022 retenues par la cour.

Il en résulte que l’appel interjeté par Mme [O] [F], par déclaration transmise au greffe le 8 mars 2022, l’a été au-delà du délai de 15 jours qui lui était imparti à compter de cette signification intervenue le 16 mars 2016 pour former appel.

L’appel interjeté par Mme [O] [F] doit donc être déclaré irrecevable comme tardif.

Sur la régularité de la signification de l’ordonnance entreprise concernant M. [Z] [F] à domicile par remise à étude

L’article 655 du code de procédure civile énonce que, si la signification à personne s’avère impossible, l’acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence. L’huissier de justice doit relater dans l’acte les diligences qu’il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l’impossibilité d’une telle signification. La copie peut être remise à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire. La copie ne peut être laissée qu’à condition que la personne présente l’accepte et déclare ses nom, prénoms et qualité. L’huissier de justice doit laisser, dans tous les cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l’avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l’acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie de l’acte a été remise.

Il résulte de l’article 656 du même code que si la personne ne veut recevoir la copie de l’acte et qu’il résulte des vérifications faites par l’huissier de justice, dont il sera fait mention dans l’acte de signification, que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée, la signification est faite à domicile, l’huissier de justice doit laisser au domicile ou à la résidence du destinataire un avis de passage daté l’avertissant de la remise de la copie de l’acte en l’étude et que cette dernière doit être retirée dans le plus bref délai à l’étude de l’huissier, contre récépissé ou émargement, par l’intéressé ou par toute personne spécialement mandatée. La copie de l’acte est conservée à l’étude du destinataire pendant trois mois. Il peut, à la demande du destinataire, transmettre la copie de l’acte à une autre étude où celui-ci pourra le retirer dans les mêmes conditions.

L’huissier de justice doit s’assurer de la réalité du domicile ou de la résidence du destinataire de l’acte. A ce titre, il doit résulter des vérifications faites par l’huissier de justice, dont il sera fait mention dans l’acte de signification, que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée, sous peine de nullité de l’acte.

En l’espèce, aux termes de l’acte de signification de l’ordonnance entreprise destiné à [Z] [F], l’huissier de justice énonce s’être rendu [Adresse 6] à [Localité 15] le 10 mars 2016 et que la signification à personne ou à personne présente s’est avérée impossible au motif de l’absence de destinataire, et ce, alors même que l’adresse du destinataire est confirmée par son nom inscrit sur la boîte aux lettres et sur la sonnette, à la suite de quoi il a procédé à une remise de l’acte en son étude.

Les appelants, qui affirment qu’il ne s’agissait pas de la bonne adresse, versent aux débats un extrait K-bis à jour au 27 janvier 2021 faisant ressortir que la société à responsabilité à associé unique C’Sibon, qui a été immatriculée le 5 décembre 2012 et commencé son activité de restauration rapide le 1er janvier 2013 à l’adresse de son siège social au [Adresse 4], à [Localité 13], a fait l’objet d’une dissolution avec cessation d’activité à compter du 7 novembre 2016 suivant procès-verbal d’assemblée générale en date du même jour publié le 18 novembre 2016. M. [Z] [F] a été désigné en tant que liquidateur, l’extrait K-bis précisant que les correspondances doivent être adressées chez le liquidateur Mr [F] [Z] [Adresse 4].

Outre le fait que le bail litigieux ne concerne pas la société C’Sibon mais [Z] [F], qui peut avoir un domicile personnel différent de celui de son lieu de travail, les mentions résultant de l’extrait K-bis à jour au 27 janvier 2021 font apparaître que les correspondances de la société C’Sibon doivent être adressées à [Z] [F], agissant en tant que liquidateur à l’adresse située à [Localité 13], à compter du 7 novembre 2016, soit postérieurement à la signification de l’ordonnance entreprise le 10 mars 2016.

Cela est d’autant plus vrai que l’extrait K-Bis à jour au 27 mai 2015 produit par l’intimée indique que le domicile personnel de M. [Z] [F], alors gérant de la société C’Sibon, est situé [Adresse 6] à [Localité 15].

Par ailleurs, Mme [W] [X] veuve [F], qui est partie à la procédure en tant qu’héritière de [Z] [F] au même titre que ses enfants, se prévaut de sa propre attestation aux termes de laquelle elle affirme que [Z] [F] ne vivait pas avec elle au moment de la signification de l’ordonnance entreprise mais dans la commune de [Localité 13] où se trouvait le restaurant qu’il gérait, et ce, depuis 2012.

Or, alors même que les époux [F] n’ont jamais divorcé, il apparaît que l’assignation délivrée à [Z] [F] le 9 décembre 2015 a été remis à Mme [W] [F], son épouse, qui a accepté de recevoir la copie de l’acte tout en refusant de donner à l’huissier de justice de plus amples précisions sur le lieu où il pouvait rencontrer le destinataire de l’acte, et notamment sur son lieu de travail.

En tout état de cause, les allégations de Mme [W] [X] veuve [F], selon lesquelles son défunt époux était domicilié à [Localité 13] depuis 2012, sont démenties par l’extrait K-Bis à jour au 27 mai 2015.

Enfin, s’il apparaît que [Z] [F] et Mme [H] ont échangé, les 24 avril et 7 mai 2015, des courriers en mentionnant l’adresse de [Localité 13], ces éléments n’établissent aucunement qu’il s’agissait de son domicile personnel, tel que cela résulte de l’extrait K-Bis à jour au 27 mai 2015, soit postérieurement aux courriers en question.

Dans ces conditions, les appelants ne démontrent aucune irrégularité affectant la validité de la signification de l’acte d’huissier en date du 10 mars 2016 à [Z] [F].

Il en résulte que l’appel interjeté par les consorts [F], agissant en tant qu’héritiers de [Z] [F], par déclaration transmise au greffe le 8 mars 2022, l’a été au-delà du délai de 15 jours qui était imparti à [Z] [F] à compter de cette signification intervenue le 10 mars 2016 pour former appel.

L’appel interjeté par les consorts [F] doit donc être déclaré irrecevable comme tardif.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

L’appel interjeté par les appelants étant irrecevable, il y a lieu de les condamner in solidum au dépens de la procédure d’appel.

En outre, l’équité commande de les condamner in solidum à verser à Mme [H] la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Dit n’y avoir lieu de rabattre l’ordonnance de clôture du 7 mars 2023 ;

Rejette en conséquence les conclusions et la pièce n° 11 transmises par Mme [S] [H] le 17 mars 2023 ;

Rejette les conclusions et pièces n° 17 à 23 transmises le 6 mars 2023 en méconnaissance du principe du contradictoire par M. [R] [F], Mme [W] [X], Mme [P] [F], Mme [C] [K], M. [Y] [F] et Mme [O] [F] ;

Rejette les conclusions et la pièce n° 10 transmises tardivement le 2 mars 2023 par Mme [S] [H] ;

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande formée par M. [R] [F], Mme [W] [X], Mme [P] [F], Mme [C] [K], M. [Y] [F] et Mme [O] [F] tendant à la nullité des actes de signification du jugement en date du 4 juillet 2016 rendu par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Nice ;

Déclare irrecevable comme tardif l’appel interjeté à l’encontre de l’ordonnance rendue le 11 février 2016 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice, suivant déclaration transmise au greffe le 8 mars 2022, par M. [R] [F], Mme [W] [X], Mme [P] [F], Mme [C] [K], M. [Y] [F] et Mme [O] [F] ;

Condamne in solidum M. [R] [F], Mme [W] [X], Mme [P] [F], Mme [C] [K], M. [Y] [F] et Mme [O] [F] à verser à Mme [S] [H] la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens ;

Condamne in solidum M. [R] [F], Mme [W] [X], Mme [P] [F], Mme [C] [K], M. [Y] [F] et Mme [O] [F] aux dépens de la procédure d’appel.

La greffière Le président

 


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