2ème Chambre
ARRÊT N°248
N° RG 22/03287
N° Portalis DBVL-V-B7G-SY6F
SARL ROSA DILA
C/
SCI HAWAI
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– Me LE BERRE BOIVIN
– Me ALLAIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 26 MAI 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 09 Mars 2023
devant Monsieur Jean-François POTHIER, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Mai 2023, après prorogation, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
SARL ROSA DILA
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
SCI HAWAI
[Adresse 1]
[Localité 3] / FRANCE
Représentée par Me Lucie ALLAIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
EXPOSE DU LITIGE
Sur assignation de la SCI Hawai (la SCI) du 22 mai 2020, se prévalant à l’égard de la société Rosa Dila d’un commandement de payer du 15 janvier 2020 visant la clause résolutoire, le juge des référés du tribunal judiciaire de Saint-Brieuc a, par ordonnance de référé du 19 novembre 2020 signifiée le 25 novembre suivant :
constaté la résiliation de plein droit du bail commercial par l’effet de la clause résolutoire à la date du 16 février 2020, du bail commercial conclu le 17 avril 2009 puis renouvelé,
condamné la société Rosa Dila à payer à la SCI la somme de 15 393 euros à titre de provision à valoir sur l’arriéré de loyers et charges,
dit que la dette de la société Rosa Dila sera rééchelonnée sur deux ans à compter de la décision à intervenir,
condamné la société Rosa Dila à payer à la SCI une indemnité d’occupation provisionnelle s’élevant chaque mois à compter du 16 février 2020, au montant du loyer mensuel contractuellement prévu, soit 1 965,45 euros HT, charges en supplément,
rejeté la demande de suspension des effets de la clause résolutoire du bail commercial,
condamné la société Rosa Dila à payer à la SCI la somme d’un euro symbolique au titre de la clause pénale,
condamné la société Rosa Dila aux dépens.
Sur recours de la société Rosa Dila, la cour d’appel de Rennes a, par arrêt du 29 septembre 2021,
confirmé l’ordonnance de référé, sauf en ce qu’elle a dit que la dette de la société Rosa Dila sera rééchelonnée sur deux ans à compter de la décision à intervenir,
rejeté la demande de délai,
ordonné l’expulsion de la société Rosa Dila,
condamné la société Rosa Dila à payer à la SCI la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles, et aux dépens.
Poursuivant l’exécution de ces décisions, la SCI a fait délivrer le 27 novembre 2020 un commandement de payer aux fins de saisie-vente, pour avoir paiement d’une somme de 23 108,15 euros.
Elle a ensuite fait procéder, selon procès-verbaux du 25 novembre 2020 à la saisie-attribution des comptes bancaires ouverts par la société Rosa Dila auprès du CMB et de la société LCL, pour avoir paiement d’une somme de 22 356,41 euros en principal, frais et incluant le montant de la taxe foncière, ces saisies ayant été dénoncées à la société Rosa Dila par actes du 27 novembre 2020.
Puis elle a fait procéder, selon procès-verbaux du 15 décembre 2020, à deux nouvelles saisies-attribution des comptes bancaires ouverts par la société Rosa Dila auprès du Crédit mutuel et de la société LCL, pour avoir paiement d’une somme de 22 993,11 euros en principal et frais, ces saisies ayant été dénoncées à la société Rosa Dila par actes du 18 décembre 2020.
Contestant la régularité de ces dernières saisies, la société Rosa Dila a, par acte du 18 janvier 2021, fait assigner la SCI devant le juge de l’exécution de Saint-Brieuc, en mainlevée des saisies pratiquées le 15 décembre 2020.
Par jugement du 4 mai 2022, le juge de l’exécution a :
dit que la société Rosa Dila reste devoir à la SCI la somme de 1 892,26 euros pour solde de sa dette à la date du 18 juin 2021,
débouté la société Rosa Dila de sa demande visant à dire que le montant de la dette s’élevait au mois de décembre 2020 à la somme de 10 460 euros,
débouté la société Rosa Dila de sa demande visant à constater qu’elle a intégralement réglé à la SCI sa dette tant au titre de son arriéré de loyers et charges, qu’au titre de ses indemnités d’occupation,
débouté la société Rosa Dila de sa demande visant à dire que la saisie-attribution du 15 décembre 2020 dénoncée le 18 décembre 2020 a perdu sa cause et quelle est donc devenue sans objet,
débouté la société Rosa Dila de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 15 décembre 2020 et dénoncée le 18 décembre 2020 à la société Rosa Dila,
débouté la société Rosa Dila de ses demandes plus amples ou contraires,
débouté la société Rosa Dila et la SCI de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,
condamné la société Rosa Dila aux dépens.
La société Rosa Dila a relevé appel de ce jugement le 24 mai 2022, et aux termes de ses dernières conclusions du 17 février 2023, elle demande à la cour de :
déclarer nul et de nul effet l’acte d’acquiescement opposé par la SCI,
déclarer irrecevable la SCI en son appel incident tendant à voir réformer le jugement déféré en ce qu’il a déclaré recevables les demandes de la société Rosa Dila,
en tout état de cause, confirmer le jugement déféré en ce qu’il a déclaré la société Rosa Dila recevable en ses contestations et demandes,
le réformer pour le surplus,
constater que la dette exigible de la société Rosa Dila et cause des saisies-attribution était intégralement réglée au 30 décembre 2020 et en tout état de cause au jour où le juge de l’exécution de Saint-Brieuc a statué,
ordonner en conséquence la mainlevée des deux saisies pratiquées suivant exploits en date du 14 décembre 2020 et dénoncées selon exploits en date du 18 décembre 2020,
débouter la SCI de sa demande tendant à dire que sa créance s’élève à la somme de 46 574,55 euros à la date de libération des lieux ainsi que de ses demandes au titre des frais irrépétibles d’instance et d’appel et au titre des dépens,
condamner la SCI à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel,
débouter la SCI de toutes ses demandes, fins et conclusions autres ou contraires aux présentes.
Aux termes de ses dernières conclusions du 9 février 2023, la SCI demande quant à elle à la cour de :
A titre principal,
réformer le jugement attaqué en ce qu’il a déclaré recevables les demandes de la société Rosa Dila,
déclarer la société Rosa Dila irrecevable en ses demandes, et, par voie de conséquence, la débouter de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
A titre subsidiaire,
si la cour considérait que la société Rosa Dila est recevable en ses demandes, confirmer le jugement en ce qu’il a :
débouté la société Rosa Dila de sa demande visant à dire que le montant de la dette s’élevait au mois de décembre 2020 à la somme de 10 460 euros,
débouté la société Rosa Dila de sa demande visant à constater qu’elle a intégralement réglé à la SCI sa dette tant au titre de son arriéré de loyers et charges, qu’au titre de ses indemnités d’occupation,
débouté la société Rosa Dila de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 15 décembre 2020 et dénoncée le 18 décembre 2020 à la société Rosa Dila,
débouté la société Rosa Dila de ses demandes plus amples ou contraires,
débouté la société Rosa Dila de sa demande au titre des frais irrépétibles,
condamné la société Rosa Dila aux entiers dépens,
Reconventionnellement,
réformer le jugement en ce qu’il a :
dit que la société Rosa Dila reste devoir à la SCI la somme de 1 892,26 euros pour solde de sa dette à la date du 18 juin 2021,
débouté la SCI de sa demande au titre des frais irrépétibles
débouté la SCI de ses demandes plus amples ou contraires,
dire que les créances nées des engagements du bail s’élèvent à la somme de 58 175,61 euros (hors indexation des bases de loyers et indemnités d’occupation des 5 dernières années non prescrites) à la date de la libération des lieux,
par voie de conséquence, condamner la société Rosa Dila à lui verser la somme de 58 175,61 euros en sus des intérêts conventionnels du bail pour solde de tous comptes relatifs aux engagements du bail,
condamner la société Rosa Dila à lui payer la somme mensuelle a minima de 297,16 euros à compter de janvier 2023 jusqu’à échéance de la créance située en novembre 2025 outre les intérêts contractuellement définis aux conditions du bail en son article XVIII,
débouter la société Rosa Dila de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
En tout état de cause,
condamner la société Rosa Dila à lui verser la somme 1 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, et la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées par les parties, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 23 février 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
La SCI soulève à titre principal l’irrecevabilité des contestations par la société Rosa Dila des saisies-attribution pratiquées le 15 décembre 2020, en faisant valoir, d’une part, que celle-ci aurait signé un acte d’acquiescement à ces saisies-attribution, et, d’autre part, qu’elle ne rapporterait pas la preuve que l’huissier qui a procédé aux saisies ait été destinataire de la lettre prévue à l’article R. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution.
Ainsi que l’a exactement analysé le juge de l’exécution, les saisies-attribution pratiquées le 25 novembre 2020 sont devenues définitives dans la mesure où elles n’ont pas été contestées dans le délai d’un mois, et la contestation ne porte en réalité que sur les deux saisies-attribution pratiquées le 15 décembre 2020.
Il résulte des dispositions de l’article R. 211-11 du code des procédures civiles d’exécution qu’à peine d’irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur, et sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie.
En application de l’article 123 du code de procédure civile, les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause de sorte qu’elles peuvent êtres soulevées pour la première fois devant la cour d’appel.
Or, ainsi que le soulève à juste titre la SCI, la société Rosa Dila ne rapporte pas la preuve de l’envoi par cette dernière, le jour même ou le jour ouvrable suivant, de l’acte de dénonciation faite à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie.
En effet, la société Rosa Dila se borne à produire la copie d’un accusé de réception dont la signature est attribuée à l’huissier instrumentaire qui ne permet pas d’établir la preuve que l’acte de dénonciation a été expédié le jour même de la contestation ou le jour ouvrable suivant, soit le vendredi 18 décembre ou le lundi 21 décembre 2020, dès lors que cet accusé de réception ne mentionne aucune date de distribution du courrier et ne contient en outre aucune indication sur la qualité de la personne ayant apposé sa signature, les cases prévues à cet effet n’étant ni cochées ni revêtues d’aucune mention.
La seule mention de la date du 19 janvier 2021 sur la lettre de dénonciation de l’assignation ne permet pas d’établir la preuve de son envoi à cette date, ni même au 21 janvier suivant, dès lors que la société Rosa Dila ne produit aucun bordereau de remise de courrier de départ portant mention de la date d’envoi, ni même de copie d’écran sur le site internet de la Poste permettant de connaître la date d’envoi et le suivi du courrier adressé en recommandé.
Après réformation du jugement, il convient donc de déclarer irrecevable la contestation par la société Rosa Dila des saisies-attribution pratiquées le 15 décembre 2020 sur ses comptes bancaires ouverts auprès du Crédit mutuel et de la société LCL.
Il s’ensuit que les demandes de la société Rosa Dila tendant à déclarer nul et de nul effet l’acte d’acquiescement opposé par la SCI, et irrecevable l’appel incident de la SCI visant à voir réformer le jugement déféré en ce qu’il a déclaré recevables les demandes de la société Rosa Dila, sont devenues sans objet.
La société Rosa Dila, qui succombe, supportera les dépens de première instance et d’appel.
Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge de la SCI l’intégralité des frais exposés par elle à l’occasion de la procédure et non compris dans les dépens, en sorte qu’il lui sera alloué une somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Infirme le jugement rendu le 4 mai 2022 par le juge de l’exécution de Saint-Brieuc, sauf en ce qu’il a débouté la société Rosa Dila de ses demandes au titre des frais irrépétibles et l’a condamnée aux dépens, ces dispositions étant confirmées ;
Déclare irrecevable la contestation par la société Rosa Dila des saisies-attribution pratiquées le 15 décembre 2020 sur ses comptes bancaires ouverts auprès du Crédit mutuel et de la société LCL.
Condamne la société Rosa Dila à payer à la SCI Hawai la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Rosa Dila aux dépens d’appel ;
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT