COUR D’APPEL DE BORDEAUX
2ème CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 01 JUIN 2023
N° RG 23/01034 – N° Portalis DBVJ-V-B7H-NEOB
S.A. CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT
c/
[P] [J]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/002078 du 16/02/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BORDEAUX)
[W] [M]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 17 janvier 2023 par le Juge de l’exécution de PERIGUEUX (RG : 19/00047) suivant déclaration d’appel du 02 février 2023 et sur assignations à jour fixe délivrées les 23 et 27 février 2023
APPELANTE :
S.A. CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT (CIFD),
Société anonyme au capital de 124 821 703,00 € immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 379.502.644, dont le siège social est [Adresse 3], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
venant aux droits du CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE SUD-OUEST, qui vient lui-même aux droits de la société FINANCIERE DE L’IMMOBILIER SUD-ATLANTIQUE.
Représentée par Me DEMAR substituant Me Mathieu RAFFY de la SELARL MATHIEU RAFFY – MICHEL PUYBARAUD, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistée de Me Guillaume DEGLANE de la SCP DE LAPOYADE-DEGLANE-JEAUNAUD, avocat au barreau de PERIGUEUX
et demanderesse à l’assignation à jour fixe
INTIMÉS :
[P] [J]
né le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 8]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 7]
Représenté par Me CHAUVET substituant Me Rose MARTINS DA SILVA de la SELAS NUNEZ-LAGARDE COUDERT-MARTINS DA SILVA, avocat au barreau de PERIGUEUX
[W] [M]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 4]
non représentée, assignée selon acte d’huissier en date du 27.02.23 délivré à domicile
et défendeurs à l’assignation à jour fixe
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 avril 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Christine DEFOY, Conseillère, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Madame Paule POIREL
Conseiller : M. Alain DESALBRES
Conseiller : Mme Christine DEFOY
Greffier lors des débats : Mme Mélody VIGNOLLE-DELTI
Greffier lors du prononcé : Mme Audrey COLLIN
ARRÊT :
– par défaut
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
* * *
FAITS ET PROCÉDURE :
Par acte authentique des 7 et 9 juillet 2009, la société Financière de l’immobilier Sud Atlantique, aux droits de laquelle vient la société Crédit immobilier de France Développement (la banque) a consenti à M. [P] [J] et à Mme [W] [S], un prêt à l’habitat à taux fixe d’un montant de 83 389 euros et un prêt à taux zéro d’un montant de 30 900 euros.
Ces prêts ont été garantis par deux hypothèques conventionnelles prises sur un terrain et sur les constructions à venir devant être réalisées sur une parcelle appartenant à M. [J], située commune de [Localité 6] ([Localité 6]), lieu-dit ‘[Adresse 7]’, cadastrée section B n° [Cadastre 5], d’une contenance de 57a 64ca.
Par une lettre recommandée du 22 janvier 2019, la banque à mis M.[J] en demeure de payer la somme de 8 128,54 € restant due au titre du prêt à taux fixe.
Par 2 lettres recommandées en date du 20 mars 2019, elle lui a notifié la déchéance du terme du même prêt à taux fixe, mais également celle du prêt à taux zéro.
Le 18 juin 2022 , la banque a fait délivrer à M.[J] un commandement de saisie immobilière portant sur la parcelle hypothéquée, avant de le faire assigner , par acte d’huissier du 8 octobre 2019, devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Périgueux afin de voir ordonner la vente forcée du bien saisi.
Par jugement du 17 janvier 2023, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Périgueux a :
– constaté que la SA Crédit immobilier de France Développement ne justifie pas d’une créance liquide et exigible,
– débouté, en conséquence, la SA Crédit immobilier de France Développement de l’ensemble de ses demandes,
– prononcé la nullité du commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 18 juin 2019 à M. [J],
– ordonné la radiation dudit commandement de payer au service de la publicité foncière de [Localité 8],
– ordonné la radiation de l’affaire et sa mise hors du rôle,
– dit que chaque partie conservera la charge de ses frais engagés au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens demeureront à la charge de la SA Crédit immobilier de France Développement, en ce compris les frais de poursuite et de radiation du commandement de payer.
Le 2 février 2023, la SA crédit immobilier de France Développement a relevé appel de ce jugement en précisant les différentes dispositions de ce dernier sur lesquelles porte sa demande d’infirmation, et en intimant M.[J] et Mme [S].
Par ordonnance du 10 février 2023, la première présidente a fait droit à la requête de la banque par laquelle elle a sollicité l’autorisation d’assigner à jour fixe les intimés, et l’a autorisée les assigner à l’audience du 5 avril 2023.
Par acte d’huissier du 23 février 2023, la banque a fait assigner M.[J] et Mme [S] à l’audience sus-mentionnée, au cours de laquelle l’affaire elle a été retenue.
Par avis du 2 mars 2023, la procédure par déclaration d’appel enrôlée sous le N° RG 23/1034 et la procédure à jour fixe enrôlée sous le N° RG 23/00581 ont été jointes.
Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées le 8 février 2023, la banque demande à la cour, sur le fondement des articles 2191 et 2193 du code civil et R 322-15 à R 322-29 du code des procédures civiles d’exécution, de :
– la juger recevable et bien fondée en son appel,
Y faisant droit,
– infirmer en toutes ses disposions le jugement du juge de l’exécution de Périgueux en date du 17 janvier 2023,
– rejeter l’intégralité des moyens de défense développés par M. [J] comme irrecevables ou mal fondés,
– juger que le créancier poursuivant est titulaire d’une créance liquide et exigible et qu’il agit en vertu d’un titre exécutoire, comme il est dit à l’article 2191 du code civil,
– juger que la saisie pratiquée porte sur des droits saisissables au sens de l’article 2193 du code civil,
– déterminer les modalités de poursuite de la procédure,
– mentionner le montant de la créance du créancier poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires, au jour de l’arrêt à intervenir, soit selon décompte arrêté au 1er février 2023:
Prêt n°600500117031001 :
-Capital restant dû au 26/03/2019 : 78 014,78 euros
-Echéances Impayées au 26/03/2019 : 6462,27 euros.
-Frais pour échéances impayées échus : 2373,51 euros.
-Indemnité d’exigibilité 7 % : 6118,40 euros.
-Frais de poursuite (à parfaire) : Mémoire,
-Intérêts échus du 27/03/2019 au 01/02/2023 : 16 401,49 euros.
(Taux de 5,45 %)
-Les intérêts à courir jusqu’à parfait paiement au taux de 5,45 %.
Total dû : 109 370,45 euros.
Prêt à taux zéro n°600500117031002
-Capital restant dû au 26/03/2019 : 30 900 euros.
Total Général : 140 270,45 euros.
– orienter le dossier en vente forcée et fixer la date de l’audience de vente sur la mise à prix de 51 000 euros (cinquante et un mille euros),
– déterminer les modalités de visite de l’immeuble et désigner pour y procéder la SCP Rodriguez et Payssi, huissier de justice à [Localité 8], y demeurant [Adresse 2], préalablement à l’audience de vente qui sera fixée par le juge, avec le concours de la force publique et d’un serrurier si nécessaire,
– autoriser tous diagnostiqueurs à procéder aux diagnostics obligatoires en matière de ventes immobilières, préalablement à l’audience d’adjudication qui sera fixée par le juge,
– juger que l’immeuble dont s’agit devra être vidé de tout occupant au moment où les diagnostiqueurs procèderont à leurs investigations,
– ordonner l’emploi des dépens en frais privilégiés de vente.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 10 mars 2023, M. [J] demande à la cour, sur le fondement des articles R.321-4 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, des articles L.311-2 et L.218-12 du code de la consommation, des articles R.321-6 et R.322-4 du code des procédures civiles d’exécution et de l’article 1907 alinéa 2 du code civil ainsi que de l’article L.314-1 du code de la consommation, de :
– déclarer recevable mais non fondé l’appel interjeté par le Crédit immobilier de France Développement à l’égard du jugement d’orientation rendu le 17 janvier 2023 par le juge de l’exécution en charge des saisies immobilières près le tribunal judiciaire de Périgueux,
A titre principal,
– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
– constater que le Crédit immobilier de France Développement ne justifie pas d’une créance liquide certaine et exigible,
En conséquence,
– prononcer la nullité du commandement de saisie immobilière délivré le 18 juin 2019,
A titre subsidiaire,
– constater que la prescription édictée à l’article L.218-2 du code de la consommation est applicable au prêt immobilier souscrit par M. [J],
En conséquence,
– constater que l’action du Crédit immobilier de France Développement est prescrite,
– prononcer la caducité du commandement de payer aux fins de saisie immobilière délivré à M. [J] le 8 octobre 2019 et ordonner sa radiation au service de la publicité foncière,
– constater que le créancier poursuivant ne peut solliciter le règlement d’intérêts, frais et pénalités contractuelles,
– constater que le paiement des intérêts effectué par l’emprunteur devra être imputé sur le capital,
– débouter le Crédit immobilier de France Développement de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
– le condamner à payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonner l’orientation du dossier en vente amiable,
– condamner le Crédit immobilier de France Développement aux dépens, de première instance et d’appel incluant l’intégralité des frais de saisie immobilière.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Mme [S], qui n’a pas été assignée à personne, n’a pas constitué avocat.
Il sera statué par arrêt par défaut en application de l’article 474 du code de procédure civile.
Sur l’exigibilité de la créance au titre du prêt à taux zéro,
La banque fait notamment valoir que les deux offres de prêt sont interdépendantes en vertu de l’article 1 des conditions générales, que les deux prêts constituaient un même financement dans le cadre d’une opération indivisible; qu’il y a lieu d’appliquer la règle selon laquelle ‘le principal suit l’accessoire’, de telle sorte que la non régularisation d’échéances impayées concernant le prêt à taux fixe, entraîne la déchéance de ce prêt, mais également de la totalité du financement et que sa créance est donc certaine, liquide et exigible.
Elle souligne que les conditions générale des prêts annexées à l’acte notarié (annexe 1 page 4) prévoient l’exigibilité anticipée des prêts en cas de défaillance de l’emprunteur .
M.[J] maintient néanmoins, à juste titre, que le prêt à taux zéro a un différé d’amortissement de 216 mois soit 18 ans et que l’exigibilité de la première échéance a été fixée au 31 août 2029 ; que la déchéance du terme ne peut être prononcée pour ce prêt à taux zéro dans la mesure ou l’exigibilité de celui-ci, qui nécessite un défaut de paiement de tout ou partie des échéances à leur date, n’est pas effective .
Les dispositions du contrat de prêt concernant le prêt à taux zéro prévoient, en effet, expressément que celui-ci est d’une durée de 26 ans avec un différé d’amortissement de 18 ans soit 216 mois, la dernière échéance devant être réglée le 31 juillet 2037.
Le tableau d’amortissement du prêt à taux zéro confirme qu’aucun remboursement n’est prévu pendant les 18 premières années suivant la signature du prêt intervenue en juillet 2009 de sorte qu’aucun remboursement n’était prévu pour ce prêt jusqu’en 2027.
La banque ne pouvait donc prononcer la déchéance du terme de ce contrat, le 20 mars 2019, pour défaut de remboursement des échéances de celui-ci, aucune somme n’étant due pour ce prêt à cette date .
M.[J] souligne en outre à juste titre que le paragraphe XI des conditions particulières des contrats, qui concerne l’exigibilité anticipé des prêts, exclut ouvertement le prêt à taux zéro
Si les conditions générales des prêts annexées à l’acte notarié (annexe 1 page 4 paragraphe XI ) prévoient, en effet, l’exigibilité anticipée des prêts susceptibles d’être accordés (prêts conventionnées, nouveaux prêts à taux zéro, prêts relais…) au gré du prêteur en cas de défaillance de l’emprunteur pour toute somme avancée par le prêteur, quel que soit le type de prêt, il est néanmoins précisé, sans ambiguïté, que cette disposition ne s’applique pas au ‘Nouveau Prêt à 0%’.
C’est donc de manière inopérante que la banque invoque cette disposition pour soutenir que le non remboursement des échéances du prêt à taux fixe entraîne l’exigibilité du prêt à taux zéro.
M.[J] maintient en outre à juste titre que la déchéance du terme du prêt à taux zéro ne pouvait intervenir qu’en cas d’échéances impayées de ce prêt, et que la banque ne peut se prévaloir de la règle selon laquelle ‘le principal suit l’accessoire’.
Il importe peu, à ce titre, que les deux contrats de prêt concernent la réalisation de la même opération présentant un caractère indivisible, la déchéance du terme du contrat de prêt à taux zéro, qui obéit à ses règles propres, ne pouvant intervenir pour une cause qui lui est étrangère.
La déchéance du terme du contrat de prêt à taux fixe n’a donc pas entraîné l’exigibilité anticipée du prêt à taux zéro .
La banque ne dispose dès lors pas d’une créance exigible en ce qui concerne tout au moins le prêt à taux zéro.
Sur l’exigibilité de la créance au titre du prêt à taux fixe,
La banque soutient que si par impossible, la cour venait à considérer que la créance du prêt à taux zéro n’est pas exigible, il n’en demeurerait pas moins qu’elle est titulaire d’une créance certaine liquide et exigible concernant le prêt à l’habitat et que la créance devrait être cantonnée aux sommes exigibles au titre de cette créance.
M.[J] maintient pour sa part que la banque ne rapporte pas la preuve d’un incident de paiement caractérisé concernant notamment le prêt à taux zéro. Il se réfère au jugement attaqué, qui a retenu que la banque ne verse pas aux débats les conditions générales du prêt, ce qui ne lui permet pas de déterminer si les conditions de la déchéance du terme ont bien été respectées.
Les contrats de prêt intervenus entre les parties comportent l’existence d’une clause résolutoire figurant au paragraphe XI (Exigibilité anticipée-Défaillance de l’EMPRUNTEUR-Clause pénale) qui prévoit la résiliation du contrat et l’exigibilité immédiate et intégrale des sommes prêtées en cas de défaillance de l’emprunteur , huit jours après une simple mise en demeure adressée à l’emprunteur par lettre recommandée avec avis de réception mentionnant l’intention du prêteur de se prévaloir de celle-ci.
Les conditions de la déchéance du terme sont par conséquent clairement précisées par les conditions générales du contrat.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 janvier 2019, la banque a satisfait à la première de ces obligations en adressant à M.[J] une lettre recommandée, le mettant en demeure de lui payer la somme de 8 128,54 € restant due, à cette date, au titre du prêt à taux fixe, par laquelle elle lui demande de régler ce montant dans un délai de 8 jours, à défaut de quoi, elle se verra contrainte de prononcer la déchéance du terme du prêt.
M.[J] ne soutient pas et fortiori ne justifie pas avoir versé la somme qui lui était réclamée, ni dans le délai de 8 jours, ni même ultérieurement.
Contrairement à ce que soutient M.[J], il ya donc bien eu un incident de paiement justifiant la mise en oeuvre de la déchéance du terme du prêt à taux fixe.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 mars 2019, adressée à M.[J], la banque a en outre notifié à l’intéressé la déchéance du terme de ce prêt.
Si la déchéance du terme ne pouvait être prononcée en ce qui concerne le prêt à taux zéro pour lequel aucune échéance n’était due , la déchéance du terme du prêt à taux fixe pouvait donc être prononcée, les conditions prévues au contrat à ce titre étant réunies.
A la suite de cette déchéance du terme ainsi intervenue la totalité du prêt à taux fixe est devenue exigible.
La banque justifie de ce fait pour ce prêt d’une créance certaine liquide et exigible .M. [J] sera donc débouté de la demande de nullité du commandement qu’il formule à ce titre.
Sur la prescription de l’action de la banque,
M.[J] maintient que l’action en remboursement d’un prêt d’un organisme de crédit est soumise à un délai de prescription de deux ans ; que le point de départ de ce délai se situe à la date du premier incident de paiement non régularisé; que la déchéance du terme a été ‘probablement’ prononcée à la 51eme échéance, le 30 novembre 2015, alors que l’assignation a été délivrée le 8 octobre 2019, et que la banque est forclose au sens de l’article L218-1 du code de la consommation.
La banque soutient cependant exactement qu’en raison des paiements intervenus et des actes interruptifs de la prescription réalisés, sa créance n’est pas prescrite.
A l’égard d’une dette payable par termes successifs , la prescription se divise comme la dette elle même, et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que si l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs échéances successives , l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme qui emporte son exigibilité.
Il résulte du relevé de position du compte de l’emprunteur, produit en pièce 5 par la banque, et du relevé de compte du 27 octobre 2020 annexé au commandement de saisie immobilière, qu’à la date du 19 juin 2017 le compte bancaire de M.[J] présentait un solde nul à la suite des versements par lui effectués.C’est donc à compter de cette date que peut se situer le premier incident de paiement non régularisé.
Le commandement de saisie vente signifié le 21 décembre 2017 à M.[J] et les différents versements qu’il a effectués, tels que figurant dans la pièce annexée au commandement de saisie immobilière , et notamment le règlement de la somme de 2000 € intervenu par virement le 12 octobre 2017, ont interrompu la prescription concernant les échéances impayées.
Le montant de chaque échéance mensuelle du prêt à taux fixe est par ailleurs de 534,09 € .La somme de 9 391 € réclamée dans le commandement de saisie immobilière, par la banque au titre du solde des échéances impayées ne représente donc que l’équivalent de 19 échéances mensuelles, inférieur par conséquent à deux ans d’impayés. M.[J] ne peut donc en tirer argument pour démontrer que la créance concernant les échéances impayées serait prescrite.
Il en va de même de la créance due au titre du capital restant dû, qui n’est pas non plus prescrite puisque la déchéance du terme a été notifiée à M.[J] le 20 mars 2019, que le commandement de saisie immobilière est intervenu le 18 juin 2019, et que l’assignation devant le juge de l’exécution a été délivrée à M.[J] le 8 octobre 2019 moins de 2ans après la déchéance du terme.
La créance de la banque n’est donc pas prescrite.
M.[J] sera, dés lors , débouté des demandes qu’il formule au titre de la caducité du commandement du 8 octobre 2019 et de la radiation de celui-ci .
Sur la demande de nullité de la clause d’intérêts,
M.[J] fait valoir que le taux effectif global annuel du prêt à taux fixe, qui a été fixé à 6,01 %, assurance comprise, ne comprend pas les frais notariaux, pourtant connus, qui doivent être intégrés à son assiette, ce qui emporte la nullité de la clause d’intérêts.
La banque maintient néanmoins exactement que la demande de M. [J] tendant à la nullité de la clause prévoyant le taux conventionnel et sa substitution par le taux légal est prescrite, en application de l’article 2224 du code civil.
Il résulte de ce texte que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour ou le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
S’agissant d’un prêt à taux fixe consenti à un consommateur, le point de départ de la prescription est la date du contrat de prêt, lorsque l’examen de sa teneur permet de constater l’erreur.
En l’espèce l’acte de prêt à taux fixe mentionne le taux d’intérêt nominal (5,45%), le taux d’intérêt intercalaire(5,65%) , le taux effectif global assurance comprise (6,01%) sans mentionner le taux d’intérêt calculé en incluant les frais notariaux.
La simple lecture du contrat de prêt permettait donc à M.[J] de constater l’erreur qu’il invoque.
La prescription, qui a commencé à courir à compter de l’acte de prêt du 9 juillet 2009, qui a été exécuté, a donc produit ses effets.
M.[J] est en conséquence irrecevable à invoquer la nullité de la stipulation d’intérêts.
Il sera donc également débouté de sa contestation concernant le paiement des intérêts, frais et pénalité contractuelles.
Sur la demande d’orientation en vente amiable,
M.[J] ne peut demander que la vente amiable de l’immeuble saisi soit ordonnée, alors que, comme le souligne la banque , il ne justifie pas avoir accompli une quelconque diligence à ce titre et qu’il ne justifie d’aucun engagement d’un acquéreur permettant de considérer qu’une vente amiable soit susceptible d’intervenir .
Il sera donc fait droit à la demande de vente forcée formulée par la banque sur la mise à prix de 51 000 €, qui ne fait pas l’objet d’une contestation quant à ce montant de la part de M.[J].
Sur les autres demandes des parties,
Les règlements effectués par M.[J] concernant les échéances impayées du prêt ont été imputés sur ces dernières .En l’absence d’explication ou de justification particulière, il ne peut donc demander que ces paiements soient imputés sur le capital.
M.[J] sera dés lors débouté de l’ensemble des demandes qu’il a formées en cause d’appel au titre du prêt à taux fixe.
La banque justifie de ce que la saisie immobilière délivrée à M. [J] a été régulièrement publiée et enregistrée auprès du service de la publicité foncière.
La caducité du commandement n’est donc pas encourue.
Les décomptes arrêtés au 1er février 2023, produits par la banque concernant le prêt à taux fixe n°600500117031001 tels que résultant de ses dernières conclusions, qui reprennent, en les décomposant et en les actualisant, les éléments figurant dans le commandement de saisie immobilière du 18 juin 2019, établissent qu’il lui reste dû en principal, frais, intérêts et autres accessoires, les sommes suivantes :
-Capital restant dû au 26/03/2019 : 78 014,78 euros
-Echéances Impayées au 26/03/2019 : 6462,27 euros.
-Frais pour échéances impayées échus : 2373,51 euros.
-Indemnité d’exigibilité 7 % : 6118,40 euros.
-Frais de poursuite (à parfaire) : Mémoire,
-Intérêts échus du 27/03/2019 au 01/02/2023 : 16 401,49 euros.
(Taux de 5,45 %)
-Les intérêts à courir jusqu’à parfait paiement au taux de 5,45 %.
Total dû : 109 370,45 euros
En l’absence de contestation de M.[J] du décompte ainsi effectué , il convient donc de mentionner que la créance de la banque s’élève à cette somme de 109 370,45€.
Il ne sera pas fait application au profit de M.[J] des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Les frais de poursuite , dûment justifiés par le créancier poursuivant, qui sont relatifs à une phase obligatoire de la procédure de saisie immobilière, seront employés en frais privilégiés de poursuite de vente soumis à taxe, alors que ceux d’appel, qui ne peuvent être mis à la charge de l’adjudicataire, seront supportés par M.[J].
PAR CES MOTIFS
La cour
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Périgueux le 17 janvier 2023.
Statuant à nouveau,
Dit que la société Credit Immobilier de France Developpement (CIFD) ne dispose pas, à ce jour, d’une créance certaine liquide et exigible en ce qui concerne le prêt à taux zéro n°600500117031002, et qu’elle ne peut poursuivre la procédure de saisie immobilière sur le fondement de ce prêt.
Dit que la société Credit Immobilier de France Developpement bénéficie par contre d’une créance certaine liquide et exigible pour le prêt à taux fixe n°600500117031001.
Déclare M.[J] irrecevable à invoquer la nullité de la stipulation d’intérêts.
Le déboute de ses demandes concernant ce prêt à taux fixe.
Mentionne que le montant de la créance du créancier poursuivant en principal, frais, intérêts et accessoires, selon le décompte arrêté au 1er février 2023 pour le prêt à taux fixe n°600500117031001, est au total de 109 370,45 euros.
Oriente le dossier en vente forcée et fixe le montant de la mise à prix à 51 000 €.
Désigne la SCP Rodriguez et Payssi, huissier de justice à [Localité 8], y demeurant [Adresse 2], pour déterminer les modalités de visite de l’immeuble avec le concours de la force publique et d’un serrurier si nécessaire, préalablement à l’audience de vente qui sera fixée par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Périgueux,
Autorise tous diagnostiqueurs à procéder aux diagnostics obligatoires en matière de ventes immobilières, préalablement à l’audience d’adjudication qui sera fixée par le juge de l’exécution,
Dit que l’immeuble dont s’agit devra être vidé de tout occupant au moment où les diagnostiqueurs précéderont à leurs investigations,
Renvoie la cause et les parties devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Périgueux afin notamment de voir fixer les autres modalités de la vente.
Dit que les frais de poursuite de saisie immobilière, dûment justifiés par le créancier poursuivant, seront employés en frais privilégiés de vente soumis à taxe, alors que les dépens de la procédure d’appel, seront supportés par M.[J].
Le présent arrêt a été signé par Mme Paule POIREL, président, et par Mme Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,