Saisine du juge de l’exécution : 1 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/16167

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Saisine du juge de l’exécution : 1 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/16167

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 1 – CHAMBRE 10

ARRÊT DU 01 JUIN 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 22/16167 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGM43

Décision déférée à la cour :

Jugement du 1 septembre 2022-Tribunal de proximité de Villejuif-RG n° 11-22-000215

APPELANT

Monsieur [F] [E]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Pierre ELLUL de la SCP ELLUL-GREFF-ELLUL, avocat au barreau d’ESSONNE

INTIMÉE

Madame [X] [B] divorcée [E]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Isabelle MARAND de la SELARL GAS-MARAND, avocat au barreau d’ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 19 avril 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT

-contradictoire

-par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

Par jugement en date du 5 octobre 2018, le tribunal de grande instance d’Evry a prononcé le divorce entre les époux [E] / [B] et, notamment, condamné M. [F] [E] à payer à son épouse, Mme [X] [B], une somme de 100.000 euros à titre de prestation compensatoire.

Par requête adressée le 28 juillet 2021 au tribunal de proximité d’Evry, Mme [B] a sollicité l’autorisation de pratiquer une mesure de saisie des rémunérations à l’encontre de M. [E] pour obtenir paiement de la somme de 100.000 euros, outre les intérêts au taux légal.

Par jugement du 1er septembre 2022, le juge de l’exécution a notamment :

rejeté la contestation soulevée par M. [E] ;

fixé la créance de M. [E] à la somme de 100.000 euros ;

ordonné la saisie sur les rémunérations de M. [E] à hauteur de cette somme entre les mains des services des organismes ARGIRC, ARRCO et de la CNAV ;

débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

condamné M. [E] aux dépens.

Pour statuer ainsi, le juge de l’exécution a rappelé que, par application des articles R. 3252-11 du code du travail et R. 121-1 du code des procédures civiles d’exécution, il ne pouvait revenir sur le montant des condamnations prononcées par le titre exécutoire, devenu définitif en l’absence d’exercice des voies de recours dans les délais légaux ; que le bien commun avait été attribué à Mme [B], sans que le paiement de la prestation compensatoire soit subordonné à sa vente ; qu’il n’était pas suffisamment établi que M. [E] ait versé indûment des sommes au titre des pensions alimentaires.

Par déclaration du 15 septembre 2022, M. [E] a fait appel de ce jugement.

Par dernières conclusions du 29 mars 2023, M. [E] demande à la cour de :

infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

débouter Mme [B] de l’intégralité de ses prétentions ;

condamner Mme [B] à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamner Mme [B] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

In limine litis, l’appelant oppose à la demande tendant à voir prononcer la nullité de la déclaration d’appel les dispositions de l’article 905-1 du code de procédure civile, l’acte de constitution du conseil de l’intimée étant intervenu le 8 novembre 2022, de sorte que c’est valablement qu’il a fait notifier la déclaration d’appel à avocat le 14 novembre suivant.

A titre subsidiaire, sur le fond, il soulève la tardiveté de la requête aux fins de saisie des rémunérations, qui s’explique par le fait que, malgré plusieurs demandes auprès de son avocat pour liquider la communauté et notamment le bien commun, Mme [B] reste taisante, étant attributaire du bien. Il soutient que celle-ci lui est redevable d’une soulte qui sera supérieure au montant de la prestation compensatoire, de même que de pensions alimentaires indûment perçues, dès lors que le jugement du 24 mai 2019 le condamnant à payer une pension alimentaire mensuelle de 150 euros par enfant majeur subordonnait l’exigibilité de celle-ci à la justification de la situation de scolarité ou de formation de chacun d’eux au 1er octobre de chaque année, ce à quoi l’intimée n’a pas satisfait.

Quant à l’appel incident, il relève que la demande n’est pas précédée d’une prétention tendant à l’infirmation du jugement, de sorte que la cour pourrait ne pas se considérer comme saisie dudit appel incident.

Par dernières conclusions du 12 avril 2023, Mme [B] demande à la cour de :

prononcer la révocation de l’ordonnance de clôture ;

ordonner la réouverture des débats ;

in limine litis,

prononcer la nullité de la déclaration d’appel de M. [E] ;

à titre subsidiaire,

dire et juger M. [E] recevable mais mal fondé en son appel principal et l’en débouter ;

la dire et juger recevable et bien fondée en son appel incident ;

infirmer le jugement entrepris sur le montant de la créance fixée ;

statuant à nouveau,

fixer la créance due M. [E] à la somme de 100.000 euros en principal, outre les intérêts légaux à compter du 5 avril 2018 ;

en tout état de cause,

confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions non contraires ;

débouter M. [E] de l’ensemble de ses demandes contraires à ses conclusions ;

débouter M. [E] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

condamner M. [E] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamner M. [E] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

A titre préliminaire, Mme [B] sollicite la révocation de l’ordonnance de clôture et la réouverture des débats pour violation par M. [E] du principe du contradictoire, celui-ci ayant conclu la veille de l’ordonnance de clôture à 22 heures.

In limine litis, elle soulève la nullité de la déclaration d’appel au motif que l’appelant s’est borné à communiquer la déclaration d’appel par le RPVA sans joindre d’acte de signification mentionnant les dispositions de l’article 905-1 du code de procédure civile indiquant à l’intimé que, faute par lui de conclure dans le délai d’un mois, il s’expose à ce que ses écritures soient déclarées d’office irrecevables.

Au fond, elle fait valoir que, en ce qui concerne la liquidation de la communauté à l’amiable, au mois de juillet 2020, alors qu’un accord avait été trouvé entre les parties, M. [E] a subitement fait volte-face et posé de nouvelles conditions inacceptables ; que s’agissant de la pension alimentaire pour leurs deux enfants majeurs, M. [E] la leur avait versée directement depuis juillet 2019, de sorte que s’il estime être en droit d’agir en restitution, c’est auprès de ceux-ci qu’il lui appartient de le faire. Elle fournit des précisions sur l’achèvement de leurs formations et diplômes et leur situation d’emploi.

MOTIFS

Sur la révocation de l’ordonnance de clôture et la réouverture des débats

A l’audience de plaidoirie, la cour a révoqué l’ordonnance de clôture et admis les conclusions de M. [E], déposées tardivement la veille de l’ordonnance de clôture, et celles de Mme [B] déposées en réplique le 12 avril dernier postérieurement à l’ordonnance de clôture. Elle a ensuite prononcé à nouveau la clôture.

Sur la nullité de la déclaration d’appel

Aux termes de l’article 905-1 du code de procédure civile, lorsque l’affaire est fixée à bref délai par le président de la chambre, l’appelant signifie la déclaration d’appel dans les dix jours de la réception de l’avis de fixation qui lui est adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d’appel relevée d’office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président ; cependant, si, entretemps, l’intimé a constitué avocat avant signification de la déclaration d’appel, il est procédé par voie de notification à son avocat.

A peine de nullité, l’acte de signification indique à l’intimé que, faute pour lui de constituer avocat dans un délai de quinze jours à compter de celle-ci, il s’expose à ce qu’un arrêt soit rendu contre lui sur les seuls élément fournis par son adversaire et que, faute de conclure dans le délai mentionné à l’article 905-2, il s’expose à ce que ses écritures soient déclarées d’office irrecevables.

En l’occurrence, l’avis de fixation de l’affaire à bref délai date du 8 novembre 2022, la constitution de l’avocat de l’intimée du 8 novembre également, et la notification de la déclaration d’appel et de l’avis de fixation à l’intimée par l’appelant datent du 14 novembre suivant, soit d’une date antérieure à l’expiration du délai de dix jours suivant l’avis de fixation. Dans ces conditions, les prescriptions de l’article 905-1 alinéa 1er du code de procédure civile ont été respectées par l’appelant.

Quant à celles de l’alinéa 2 du même texte, la signification simultanée de l’avis de fixation, contenant les dispositions de l’article 905-1, vaut nécessairement information de l’intimée quant au délai qui lui était imparti pour conclure.

Par conséquent il n’y a pas lieu de déclarer nulle la notification de la déclaration d’appel, en tous points conforme aux prescriptions de l’article 905-1 du code de procédure civile.

Au fond

Sur l’appel principal

Les moyens de l’appelant s’analysent en une exception de compensation entre d’une part, les sommes dues au titre de la prestation compensatoire, d’autre part, celles dues au titre de la soulte que lui devra son épouse pour l’occupation du bien commun au terme de la liquidation de leur communauté, étant rappelé que le bien a été attribué à l’épouse, et des termes de pension alimentaire qu’il aurait versés pour leurs enfants majeurs sans justification de leur scolarité ou formation.

Or selon la jurisprudence de la Cour de cassation prise pour l’application de l’article 1393 3° ancien du code civil, la prestation compensatoire ayant, pour partie, un caractère alimentaire, une compensation ne peut être opérée, même par voie judiciaire, entre cette prestation et le versement d’une autre somme, à quelque titre que ce soit. (Civ. 2ème, 9 juil. 1997, n°95-21.038 ; 2 oct. 1997, n°95-19.358 ; Civ. 2ème, 2 déc. 1998, n°97-15.650)

L’article 1347-2 nouveau du code civil, en sa rédaction issue de l’ordonnance du n°2016-131 du 10 février 2016, apporte certes une exception en ce qu’il dispose que les créances insaisissables ne sont compensables que si le créancier y consent. Mais tel n’est pas le cas en l’espèce, Mme [B] s’y opposant au contraire.

Les arguments développés par M. [E] quant à son état de santé et au caractère modeste de ses pensions de retraites sont inopérants, la saisie des rémunérations permettant précisément une exécution étalée dans le temps et proportionnée aux ressources du débiteur.

Par conséquent, c’est à bon droit que le premier juge a rejeté les contestations de M. [E].

Sur l’appel incident

C’est à tort que M. [E] a fait observer que la cour pourrait s’estimer non saisie de l’appel incident, au motif que Mme [B] n’aurait pas fait précéder sa demande à ce titre de la mention « infirmer le jugement ». En effet dans le dispositif de ses conclusions initiales du 6 janvier 2023, portant appel incident, Mme [B] demandait à la cour de « réformer le jugement entrepris en ce qu’il a fixé la créance due par Monsieur [E] à la somme de 100.000 euros en principal ». Or les termes « infirmer » et « réformer » sont synonymes, et saisissent la cour de prétentions au sens de l’article 954 du code de procédure civile.

Au fond, il ne ressort pas du jugement entrepris que la requête en saisie des rémunérations, qui n’est d’ailleurs pas produite par Mme [B], ait comporté une somme liquide au titre des intérêts au taux légal sur la somme de 100.000 euros, due en principal. L’appelante à titre incident ne propose pas davantage, à hauteur d’appel, de calcul desdits intérêts. Or il appartient au requérant à une saisie des rémunérations de liquider le montant des intérêts (et des frais le cas échéant), dont il sollicite du juge de l’exécution la prise en considération pour voir autoriser la mesure. Par conséquent, l’appel incident doit être rejeté.

Il appartiendra le cas échéant à la créancière de pratiquer une intervention à la saisie des rémunérations pour le recouvrement des intérêts, liquidés.

Sur les demandes accessoires

Il y a lieu de condamner M. [E], qui succombe principalement en ses prétentions, aux dépens d’appel, ainsi qu’au paiement à Mme [B] d’une indemnité de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Rejette l’exception de nullité de la déclaration d’appel ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Et y ajoutant,

Condamne M. [F] [E] à payer à Mme [X] [B] la somme de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [F] [E] aux dépens d’appel ;

Dit que les parties devront remettre au greffe du juge de l’exécution du tribunal tribunal de proximité de Villejuif une copie du présent arrêt et de son acte de signification.

Le greffier, Le président,

 


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