COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-2
ARRÊT AU FOND
DU 15 JUIN 2023
N°2023/203
Rôle N° RG 22/04818 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJE7E
Société DE PARTICIPATIONS HOTELIERE PARIS ASTOR
C/
S.C.P. AJILINK [O]-BONETTO
Société INDEVHO
S.A.S. COLSUN HISTO FRANCE
S.C.A. HOTEL ASTOR
S.E.L.A.R.L. [L] & ASSOCIES
S.E.L.A.S. AJ ASSOCIES
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Roselyne SIMON-THIBAUD
Me Romain CHERFILS
Me Françoise BOULAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de Marseille en date du 23 Mars 2022 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2021P00628.
APPELANTE
SOCIETE DE PARTICIPATIONS HOTELIERE PARIS ASTOR
Anciennement dénommée SAS PARIS ASTOR IMMO, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 423 375 773 dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualité audit siège
représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Frédéric ROMETTI, avocat au barreau de NICE
INTIMEES
Société INDEVHO
dont le siège social est [Adresse 8], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualité audit siège
représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
assistée de Me Clément PHALIPPOU, avocat au barreau de PARIS, plaidant
S.A.S. COLSUN HISTO FRANCE
immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 843 057 654 dont le siège social est sis [Adresse 7], prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualité audit siège
représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
assistée de Me Clément PHALIPPOU, avocat au barreau de PARIS, plaidant
S.C.P. AJILINK AVAZERI-BONETTO
représenté par Maître [Z] [O], administrateur judiciaire , ès qualités de conciliateur de la Société HOTEL ASTOR, désigné à cette fonction par ordonnance du 14/12/2021, domicilié [Adresse 4]
représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Marie ANGLADE, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
S.C.A. HOTEL ASTOR
au capital de 37.000,00 € immatriculée au RCS de Marseille sous le n° 803 348 853 dont le siège social est sis en l’étude du liquidateur amiable Maître [K] [D], désigné à cette fonction par ordonnance du 23 octore 2017, et dont la mission a été renouvelée par ordonnances présidentielles dont le cabinet est sis [Adresse 6]
représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Marie ANGLADE, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
S.E.L.A.R.L. [L] & ASSOCIES
prise en la personne de Maître [K] [L], agissant en sa qualité de co-commissaire à l’exécution du plan de la SCA HOTEL ASTOR désigné à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 15 mai 2019, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Marie ANGLADE, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
S.E.L.A.S. AJ ASSOCIES
prise en la personne de Maître [G] [P], agissant en sa qualité de co-commissaire à l’exécution du plan de la SCA HOTEL ASTOR désigné à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 15 mai 2019, domicilié [Adresse 5]
représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, Me Marie ANGLADE, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Mars 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre, et Madame Muriel VASSAIL, Conseiller, chargés du rapport.
Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre
Madame Muriel VASSAIL, Conseiller
Madame Agnès VADROT, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Juin 2023..
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Juin 2023.
Signé par Madame Gwenael KEROMES, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
La SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor a cédé à la société en commandite SCA Hôtel Astor dont le capital était détenu par le groupe Maranatha, groupe hôtelier fondé en 2007, son fonds de commerce d’hôtel 4 étoiles dénommé ‘Hôtel Astor Saint Honoré’ au prix de 6 290 000 euros, suivant acte en date du 31 juillet 2014.
Concomitamment, les parties ont conclu un bail commercial portant sur l’immeuble dans lequel est exploité le fonds, immeuble composé de 8 étages, d’une superficie de 6 291 m² situé [Adresse 3], d’une durée de 12 ans, commençant à courir au 1er août 2014 pour un loyer mensuel de 243 375 euros (ou 2 920 000 euros annuels), assorti d’une garantie correspondant à deux mois de loyer et la constitution d’une caution bancaire.
A la caution bancaire s’est substituée la constitution d’une garantie à première demande d’un montant égal à 6 mois de loyers hors taxes et hors charges à la charge du preneur, suivant avenant au bail du 12 novembre 2019 .
En 2017, la société Maranatha SAS, associée commanditée de la société Hôtel Astor a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire devant le tribunal de commerce de Marseille.
Par application des articles L 222-11 et 237-2 du code de commerce et des ordonnances des 16 et 17 octobre 2017, la société Hôtel Astor a été dissoute et Me [K] [D] a été désigné comme liquidateur amiable.
Par jugement en date du 25 octobre 2017, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l’égard de la société Hôtel Astor par le tribunal de commerce de Marseille.
Le tribunal de commerce de Marseille a ordonné la cession des titres de participation de l’ensemble des sociétés du groupe Maranatha au profit de la société Colony Capital, importante firme international de fonds d’investissements privés, à savoir:
– les titres des associés commanditaires et commandités dans les sociétés propriétaires des hôtels,
– l’intégralité du capital des sociétés de gestion du groupe Maranatha,
afin de poursuivre l’exploitation des hôtels.
Les actions détenues par la société Maranatha dans le capital de la société Hôtel Astor ont été cédées à la société Colony Capital, substituée par sa filiale, la société Colsun Histo France (au capital social de 1 €).
Par jugement du 15 mai 2019, le tribunal de commerce de Marseille a arrêté le plan de redressement de la société Hôtel Astor, et autorisé la substitution de la SAS Colsun Histo France dans les engagements pris par Colony Capital en sa qualité de repreneur.
Par jugement du 12 janvier 2022, le tribunal de commerce a constaté l’inexécution par la société Colony Capital du plan de redressement et reporté la date limite de réalisation des opérations de fusion initialement fixée au 31 décembre 2021, au 30 juin 2022.
En raison de la pandémie liée au Covid 19, la société Astor a cessé de régler les loyers à compter du mois de mars 2020, mettant en avant le bouleversement économique des conditions du bail.
Le bailleur a mis en oeuvre le 11 juin 2020 la garantie à première demande consentie par la société Hôtel Astor, garantie qui n’a pas été reconstituée par la suite, en dépit des délais qui lui ont été accordés judiciairement.
La société Hôtel Astor a bénéficié à compter du 30 juillet 2020 d’une première procédure de conciliation ordonnée par le président du tribunal de commerce de Paris, qui lui a permis de bénéficier des mesures mises en place par les ordonnances des 27 mars, 20 mai et 25 novembre 2020 liées à la crise sanitaire du Covid 19 lui permettant de suspendre le paiement des loyers et d’un délai de 9 mois (soit jusqu’au 16 septembre 2021) pour reconstituer la garantie à première demande.
S’est constitué un arriéré locatif de 10 mois soit 2 920 649,10 euros, qui a donné lieu à des reports (jusqu’au 31 décembre 2022) et des délais à compter de janvier 2023 et février 2023 (10 %), mars et avril 2023 (20 %) et mai 2012 (40%).
La mesure de conciliation a pris fin le 30 mai 2021.
La société Hôtel Astor n’ayant pas repris le paiement des loyers courants à compter de juin 2021, a saisi le juge des loyers commerciaux aux fins de révision du loyer.
C’est dans ce contexte que la société de Participations Hôtelière Paris Astor a fait citer par actes d’huissiers de justice en date des 4 et 9 août 2021, la SCA Hôtel Astor, la SAS Colsun Histo France, la Selarl [L] et Associés, et la Selas AJAssociés, devant le tribunal de commerce de Marseille aux fins de résolution du plan de redressement en faisant valoir que la société Hôtel Astor était bien en état de cessation des paiements à la date du 4 août 2021.
La société Hôtel Astor a bénéficié d’une nouvelle procédure de conciliation par ordonnance du 14 décembre 2021.
Le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris a, par jugement du 10 janvier 2022 accordé des délais de paiement de 24 mois pour que la débitrice se libère de sa dette de loyers des mois de juillet à septembre 2021.
Le juge des loyers commerciaux a par jugement avant dire droit du 27 janvier 2022 fixé le loyer provisionnel pour la durée de l’instance à 1 800 000 euros HT outre les taxes et les charges.
Ces décisions ont eu pour effet de reporter l’exigibilité de trois mois de loyers (juillet, août et septembre 2021) à compter du 1er juillet 2022 et de diminuer de manière provisoire le montant du loyer mensuel, celui-ci passant de 243 375 euros à 180 000 euros TTC
Au 4 mars 2022, un décompte des sommes dues était établi dont il ressortait un solde débiteur de 100 324,36 euros TTC. La société Hôtel Astor, réglait une somme de 180 000 euros correspondant au loyer du mois de mars 2022 et une somme de 9 000 euros au titre de sa condamnation à payer une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ce règlement éteignait la dette locative de la société Hôtel Astor. Toutefois demeurait non reconstituée la garantie à première demande fixée provisoirement à 900 000 euros, raison pour laquelle la société de Participations Hôtelière Paris Astor maintenait sa demande de résolution du plan de redressement devant le tribunal de commerce de Marseille qui a rendu le jugement dont appel.
Par jugement du 23 mars 2022, le tribunal de commerce a :
– rejeté la demande de sursis à statuer jusqu’à la fin de la procédure de conciliation formée par la société de Participation Hôtelière Paris Astor ;
– pris acte de ce que la société Hôtel Astor est à jour de ses loyers à la date des débats (9 mars 2022)
– constaté que la créance de garantie à première demande dont se prévaut la société de Participations Hôtelière Paris Astor n’est pas certaine, liquide et exigible, en raison de plusieurs instances en cours devant le tribunal judiciaire de Paris ayant pour finalité de la déterminer précisément ;
– constaté que l’état de cessation des paiements de la SCA Hôtel Astor n’est pas démontré au 9 mars 2022 par la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor ;
– débouté intégralement la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor de toutes ses demandes ;
– condamné la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor à payer la SCA Hôtel Astor la somme de 5 000 euros et à la SAS Colsun Histo France la somme de 50 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– dit que la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor succombant principalement à l’instance en supportera les entiers dépens ;
– rejeté tout surplus des demandes comme non fondé et non justifié.
La SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor a interjeté appel, suivant déclaration du 31 mars 2022.
La société Hôtel Astor SCA, la SCP [L] & Associés, prise en la personne de Me [K] [L] ès qualités de co-commissaire à l’exécution du plan de continuation de la SCA Hôtel Astor, la Selarl AJ Associés, en la personne de Me [G] [P], ès qualités de co-commissaire à l’exécution du plan de continuation de la SCA Hôtel Astor, et la SCP Ajilink [O]- Bonetto, prise en la personne de Me [Z] [O], ès qualités de conciliateur désigné par ordonnance du 14 décembre 2021 ont fait appel incident par voie de conclusions signifiées le 30 juin 2022.
La SAS Colsun Histo France et la société Indevho ont fait appel incident par voie de conclusions signifiées le 30 juin 2022.
***
Aux termes de ses dernières conclusions d’appelante déposées et notifiées par RPVA le 21 février 2023, la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor demande à la cour de :
– débouter les intimés de leurs demandes formées dans le cadre de leur appel incident,
– confirmer le jugement rendu le 23 mars 2022 par le tribunal de commerce de Marseille en ce qu’il a déclaré la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor recevable en sa demande,
– l’infirmer en ce qu’il a constaté que la créance de garantie à première demande dont se prévaut la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor n’est pas certaine, liquide et exigible, constaté que l’état de cessation des paiements de la société Hôtel Astor n’est pas démontré au 9 mars 2022 et condamné la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor à payer à la société Hôtel Astor la somme de 5 000 euros et à la SAS Colsun Histo France la somme de 50 000 euros
et statuant à nouveau,
– juger que la société Hôtel Astor est en état de cessation des paiements au 9 mars 2022;
en tout état de cause,
– débouter les intimés de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
– condamner solidairement la société Hôtel Astor et la société Colsun Histo France au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Elle soutient contrairement à ce qui est invoqué par les parties intimées, que son action devant le tribunal de commerce était recevable à la date de l’assignation, la procédure de conciliation, n’ayant été ouverte que le 14 décembre 2021, soit plus de quatre mois après la délivrance de l’assignation.
Elle prétend :
– que l’état de cessation des paiements de la société Hôtel Astor est caractérisé en l’absence de constitution de la garantie à première demande prévue à l’article 15 bis du bail ;
– qu’aucune des procédures actuellement en cours devant le tribunal judiciaire de Paris ne fait obstacle à la détermination de la garantie à première demande ;
– que la condamnation prononcée à son encontre à payer à la société Colsun Histo France la somme de 50 000 euros est disproportionnée et non justifiée.
***
Par conclusions d’intimées et d’appel incident n°2 déposées et notifiées par RPVA le 13 février 2023, la SAS Colsun Histo France et la société INDEVHO demandent à la cour d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré recevables les demandes de la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor et statuant à nouveau, de constater qu’au jour où le tribunal de commerce a statué, une conciliation au bénéfice de la société Hôtel Astor était ouverte par ordonnance du 14 décembre 2021, de constater que la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor n’est titulaire d’aucune créance certaine, liquide et exigible à l’encontre de la société Hôtel Astor, et de confirmer par conséquent le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor de sa demande en résolution du plan de continuation.
Elles font valoir d’une part que selon l’article L 640-5 du code de commerce, dès lors qu’une conciliation est en cours au jour où le tribunal statue, aucune procédure collective ne peut être ouverte sur assignation d’un créancier.
Elle soutient que la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor n’est pas titulaire d’une créance certaine, liquide et exigible à l’encontre de la société Hôtel Astor, laquelle était à jour du paiement du loyer à la date à laquelle le tribunal de commerce a statué et l’obligation de reconstituer la garantie à première demande faisait l’objet de trois instances pendantes opposant la société Hôtel Astor à la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor devant le tribunal judiciaire de Paris et la demande de reconstitution avait été reportée à la fin de la conciliation, soit jusqu’au 14 mai 2022, de sorte qu’elle n’était pas exigible.
Enfin, elles considèrent que l’état de cessation des paiements à la date où le tribunal a statué n’est pas démontré par la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor, le cabinet Deloitte ayant sans équivoque attesté dans son rapport, de l’absence d’état de cessation des paiements.
Elles estiment que la condamnation au paiement d’une somme de 50 000 euros eu égard au comportement du bailleur qui a maintenu abusivement la procédure alors même qu’une conciliation avait été ouverte et que par ordonnance du président du tribunal de commerce rendue le 23 décembre 2021, il avait été fait interdiction de poursuivre la société Hôtel Astor, alors à jour de ses loyers et qui avait bénéficié d’un report pour la reconstitution de la garantie bancaire, révélant ainsi chez le bailleur une réelle intention de nuire à la société locataire et à la société Colsun Histo France qui a investi 13 millions d’euros dans la restructuration de l’hôtel, pour faire échec au plan et au maintien des 80 emplois.
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Aux termes de leurs conclusions d’intimés et d’appel incident n°2 déposées et signifiées par RPVA le 14 février 2023, la SCA Hôtel Astor, la SCP [L] et associés, la Selarl AJ Associés et la SCP Ajilink Avazeri-Bonetto ont demandé conclu aux mêmes fins, à savoir à l’infirmation du jugement en ce qu’il a déclaré les demandes de la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor recevables et statuant à nouveau, les déclarer irrecevables, et sur le fond, de déclarer mal fondées les demandes de la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor et confirmer le jugement en ce qu’il les a rejetées et enfin, de confirmer le jugement sur l’indemnité de 50 000 euros mise à la charge de la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor ainsi qu’aux entiers dépens de première instance.
Elles sollicitent en outre la condamnation de la SAS Société de Participations Hôtelière Paris Astor à verser à la société Hôtel Astor la somme de 10 000 euros ainsi que la somme de 5000 euros à la SCP [L] & Associés, à la SCP Ajilink Avazeri-Bonetto et à la Selarl AJ Associés, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel, dont distraction au profit de Me Françoise Boulan, membre de la Selarl Lexavoué Aix-en-Provence avocats aux offres de droit.
Elles invoquent à l’appui du moyen tiré de l’irrecevabilité, d’une part, l’ouverture d’une procédure de conciliation toujours en cours à la date à laquelle le tribunal a statué, qui fait obstacle à l’action en résolution du plan de continuation, d’autre part, l’ordonnance du président du tribunal de commerce de Marseille du 23 décembre 2021 ordonnant l’interruption des poursuites, enfin, en ce que le bailleur n’établit pas être titulaire d’une créance certaine, liquide et exigible au jour où le tribunal statue.
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Par un avis déposé le 21 février 2023, le ministère public demande l’infirmation du jugement considérant qu’en application de l’article L 640-5 du code de commerce l’assignation du créancier en résolution du plan et à l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre de la société Hôtel Astor était irrecevable contrairement à ce qu’a retenu le tribunal de commerce et que par ailleurs, la créance du bailleur n’était pas certaine, liquide et exigible et sur ce point, demande la confirmation du jugement.
L’affaire a été fixée à l’audience du 22 mars 2023 à 8h40 et l’ordonnance de clôture a été rendue le 23 février 2023.
Il sera renvoyé, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens respectifs.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1- Sur la recevabilité :
L’article L 631-1 du code de commerce pose comme principe que l’état de cessation des paiements est caractérisé par l’impossibilité de faire face au passif exigible avec
l’actif disponible ; le créancier qui assigne son débiteur en résolution du plan de sauvegarde et en ouverture d’une procédure collective, doit justifier de l’existence d’une créance certaine, liquide et exigible.
En l’espèce, si à la date à laquelle le tribunal de commerce de Marseille a statué, l’ouverture d’une procédure de conciliation depuis le mois de décembre 2021 devant le président du tribunal de commerce de Paris, faisait obstacle à ce que la SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor maintienne sa demande en résolution du plan et en ouverture d’une procédure collective à l’encontre de la société Hôtel Astor, la cour étant saisie du litige dans les termes de la déclaration d’appel et des appels incidents des parties, doit se prononcer sur la recevabilité de la demande de la SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor à la date à laquelle elle statue.
La procédure de conciliation ayant pris fin le 14 avril 2022, ne fait plus obstacle à ce que la SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor poursuive la procédure en ouverture d’une procédure collective à l’encontre de la société Hôtel Astor.
Il est acquis et non contesté que la dette locative de la société Hôtel Astor qui a existé à une certaine période et pour laquelle la société Hôtel Astor a bénéficié d’un échéancier et des délais de paiements accordés judiciairement, est à ce jour éteinte. La SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor n’en fait, à cet égard, plus état devant la cour.
Pour caractériser l’état de cessation des paiements comme l’existence d’une créance certaine, liquide et exigible, la SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor invoque la non reconstitution par la société Hôtel Astor de la garantie à première demande prévue au contrat de bail (article 15.1) qui selon elle, représente une somme de 900 000 euros en exécution du jugement rendu par le juge du loyer qui a fixé le montant provisoire du loyer annuel à 1 800 000 euros, pendant la durée de l’instance.
Cette créance que constitue la garantie à première demande est certaine puisque prévue expressément par le bail, de même qu’elle est liquide dès lors qu’elle se fonde sur le jugement rendu le 27 janvier 2022 par le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris qui a fixé provisoirement le montant annuel dû par la société Hôtel Astor à 1 800 000 euros, durant le temps de la procédure.
En revanche, cette créance n’est pas exigible dès lors que :
– par décision du président du tribunal de commerce de Marseille en date du 13 mai 2022, rendue au visa des articles L 611-7 et R. 611-35 du code de commerce , a été autorisée le report de l’obligation de reconstitution de la garantie bancaire de 12 mois à compter de la date de la décision, telle que prévue à l’article ’15 bis – Caution bancaire’ du bail et incombant à la société Hôtel Astor, délai expirant le 13 mai 2023,
– il ressort de la comparaison de la situation active/passive de la société arrêtée au 31 janvier 2022 communiquée à la cour (pièce n° 12 de l’intimée) que l’actif disponible (banque et disponibilités) est de 861 000 euros, et permet de faire face à son passif exigible (regroupant les dettes bailleur, dettes fiscales, arrhes versées, dettes fournisseurs hors groupe, banques, dettes salariales) s’élevant à 502 000 euros.
La demande de la SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor tendant au prononcé de la résolution du plan de sauvegarde et à l’ouverture d’une procédure collective à l’encontre de la société Hôtel Paris Astor, fondée sur la non reconstitution de la garantie à première demande sus-visée est par conséquent irrecevable.
2 – Sur les demandes accessoires :
Les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, permettent au juge qui a statué sur la demande de la partie qui obtient gain de cause, de mettre à la charge de la partie qui succombe la totalité ou une fraction des frais non compris dans les dépens, mais n’ont pas vocation à sanctionner une partie à raison de l’exercice d’une action en justice ou l’exercice d’un recours supposé abusif ou dilatoire.
En conséquence, à défaut d’éléments circonstanciés , il sera fait droit à la demande de la société Colsun Histo France et de la société Hôtel Astor dirigée contre la SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, dans de plus justes proportions.
Au vu des circonstances de la cause, il sera fait droit à la demande fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile de la Société Colsun Histo France, à hauteur de 5 000 euros et à celle de la société Hôtel Astor, à hauteur de 2 000 euros, au titre de la première instance ;
La SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor sera par ailleurs condamnée à payer au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel :
– la somme de 1 500 euros à la Société Colsun Histo France ;
– la somme de 1 500 euros à la société Indevho ;
– la somme de 1 500 euros à la société Hôtel Astor ;
– la somme de 1 500 euros à la SCP [L] & Associés ès qualités ;
– la somme de 1 500 euros à la Selarl Ajassociés ès qualités ;
– la somme de 1 500 euros à la SCP Ajilink [O] Bonetto ès qualités ;
– la somme de 1 500 euros à la société Paris Astor.
La SAS Société de Participation Hôtelière Paris Astor sera enfin condamnée aux entiers dépens de la procédure d’appel, dont distraction au profit de Me Françoise Boulan et de Me Cherfils de la Selarl Lexavoué Aix-en-Provence, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Marseille le 23 mars 2022 (2021P00628) en ce qu’il a déclaré la SAS société de participations Hôtelières Paris Astor recevable en ses demandes et en ce qu’il l’a condamnée à payer à la SAS Colsun Histo la somme de 50 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau des seuls chefs d’infirmation,
Déclare la SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor irrecevable en sa demande tendant à voir constater l’état de cessation des paiements de la société Hôtel Astor ;
Condamne la SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor à payer à la société Colsun Histo France la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour l’instance devant le tribunal de commerce de Marseille ;
Condamne la SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor à payer à la société HOTEL ASTOR la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, pour l’instance devant le Tribunal de commerce de Marseille.
Condamne la SAS Société de Participations Hôtelières Paris Astor à payer au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel :
– la somme de 1 500 euros à la Société Colsun Histo France ;
– la somme de 1 500 euros à la société Indevho ;
– la somme de 1 500 euros à la société Hôtel Astor ;
– la somme de 1 500 euros à la SCP [L] & Associés ès qualités;
– la somme de 1 500 euros à la Selarl Ajassociés ès qualités ;
– la somme de 1 500 euros à la SCP Ajilink [O] Bonetto ès qualités ;
– la somme de 1 500 euros à la société Paris Astor.
Condamne la SAS Société de Participation Hôtelière Paris Astor aux entiers dépens de la procédure d’appel, dont distraction au profit de Me Françoise Boulan et de Me Cherfils de la Selarl Lexavoué Aix-en-Provence, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE