ARRET N°290
CL/KP
N° RG 22/02493 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GUT4
Société HOIST FINANCE AB (PUBL)
C/
[G]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 20 JUIN 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/02493 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GUT4
Décision déférée à la Cour : jugement du 27 septembre 2022 rendu par le Juge de l’exécution de [Localité 5].
APPELANTE :
Société HOIST FINANCE AB , prise en la personne de son représentant légal en exercice.
Box 7848, 10399
STOCKHOLM – SUEDE
Ayant pour avocat postulant Me Bruno MAZAUDON de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS.
Ayant pour avocat plaidant Me Pierre SIROT, avocat au barreau de NANTES.
INTIME :
Monsieur [M] [G]
né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 4] (86)
Lieu dit LA PERCHEE
[Localité 6]
Ayant pour avocat plaidant Me Guy DIBANGUE de l’ASSOCIATION RODIER MBDT ASSOCIÉS, avocat au barreau de POITIERS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 02 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
Par acte authentique en date du 30 mars 2007, le Crédit Foncier de France a consenti à Monsieur [M] [G] et à Madame [T] [Y] épouse [G] un prêt immobilier prêt Immo Plus d’un montant de 192.820 euros en vue de financer l’acquisition d’un bien immobilier à usage locatif sis en [Adresse 3].
Le prêt, consenti au taux conventionnel de 3,60% l’an, devait faire l’objet d’un remboursement en 300 mensualités de 1.074,80 euros chacune.
Le 3 avril 2017, sur saisie immobilière engagée par le Crédit Foncier pour recouvrement de cette créance, un immeuble a été adjugé par le tribunal de grande instance de Tarascon au prix de 91 000 euros. Sur cette vente, le Crédit Foncier a obtenu 85 414,96 euros.
Par acte du 9 août 2017, le Crédit mutuel de Lussac les Châteaux a engagé une saisie immobilière devant le juge de l’exécution de [Localité 5], et l’immeuble saisi a été adjugé le 9 octobre 2018 au prix de 91 000 euros.
Par acte du 6 juillet 2018 la société Crédit Foncier de France a cédé sa créance à la société anonyme de droit suédois Hoist Finance Ab (la société Hoist).
Le 4 février 2022, la société Hoist a pratiqué une saisie-attribution entre les mains du Crédit Agricole sur les valeurs détenues pour le compte de Monsieur [G] pour recouvrement de la somme totale de 104 027,24 euros, et la mesure a abouti au blocage de 11 688,70 euros depuis cette date.
Par acte du 9 mars 2022, Monsieur [G] a assigné la société Hoist devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Poitiers.
Dans le dernier état de ses demandes, Monsieur [G] a demandé de :
– débouter la société Hoist de l’ensemble de ses demandes ;
– déclarer que la mesure d’exécution pratiquée par la société Hoist à son encontre était abusive et infondée ;
– déclarer que la société Hoist avait manqué à son devoir de mise en garde et lui avait ainsi causé un préjudice ;
– condamner la société Hoist à lui payer les sommes de :
– 146.887,96 euros à titre de dommages et intérêts pour son manquement au devoir de mise en garde ;
– 5000 euros au titre des dommages et intérêts pour indisponibilité des fonds pendant la saisie et au titre de son préjudice moral lié à cette indisponibilité et aux tensions en résultant ;
– à titre subsidiaire, lui accorder, pour la somme éventuelle restante due, un report de paiement de 2 ans et déclarer que, tant qu’il était respecté, cet échéancier suspendrait toute voie d’exécution ;
– à titre très subsidiaire, lui accorder de larges délais de paiement et ordonner que les paiements s’imputeraient d’abord sur le capital ;
– en toutes hypothèses, ordonner en conséquence et de plus fort la mainlevée de la saisie-attribution ;
– condamner la société Hoist aux entiers dépens ce compris les frais inutiles et injustifiés de la saisie, avec distraction au profit de son conseil, et à lui payer la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles.
En dernier lieu, la société Hoist a demandé de :
– juger mal fondées les demandes de mainlevée et d’indemnisation en raison du caractère prétendument abusif de la saisie-attribution ;
– juger, à titre principal, irrecevable la demande indemnitaire du demandeur fondée sur le manquement du Crédit Foncier à son devoir de mise en garde;
– à titre subsidiaire, la juger irrecevable comme prescrite ;
– à titre très subsidiaire, la juger mal fondée ;
– débouter le demandeur de ses demandes de report et délais de paiement;
– à titre subsidiaire, limiter leur durée à un an ;
– à titre très subsidiaire, l’autoriser à s’acquitter de sa dette en 24 mensualités équivalentes, la première le 10 du mois suivant la signification du jugement à intervenir, tous délais assortis d’une clause de déchéance ;
– débouter le demandeur du surplus de ses demandes et le condamner au paiement d’une somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles.
Par jugement contradictoire en date du 27 septembre 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Poitiers a :
– déclaré recevable l’action de Monsieur [G] ;
– ordonné la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 4 février 2022 par la société Hoist Finance entre les mains du Crédit Agricole sur les valeurs détenues pour le compte de Monsieur [G] ;
– condamné la société Hoist à régler à Monsieur [G] 500 euros à titre de dommages et intérêts suite à l’indisponibilité des fonds que cette saisie-attribution avaient bloqués ;
– déclaré irrecevable la demande indemnitaire de M. [G] à raison du manquement prétendu de l’auteur de la société Hoist à son devoir de mise en garde ;
– condamné la société Hoist :
– aux dépens, y inclus ceux inhérents à la saisie-attribution, et en a ordonné distraction au profit du conseil de Monsieur [G] ;
– à servir à [M] [G] 2000 euros aux titres combinés des articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 sous la condition que Maître [H] justifiât avoir renoncé à percevoir la part contributive de l’Etat.
Le 7 octobre 2022, la société Hoist a relevé appel de ce jugement, en intimant Monsieur [G].
Le 29 mars 2023, la société Hoist a demandé :
À titre principal,
– d’annuler le jugement déféré ;
– de juger Monsieur [G] mal fondé en l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions et de l’en débouter ;
– de juger régulière la saisie-attribution pratiquée le 4 février 2022 sur le compte détenu par Monsieur [G] dans les livres du Crédit Agricole de la Touraine ;
– de juger, à titre subsidiaire, et pour le cas où un report de paiement serait accordé à Monsieur [G], que la durée du report de paiement consenti sera limitée à un an ;
– de juger à titre très subsidiaire, et pour le cas où des délais de paiement seraient accordés à Monsieur [G] :
– autoriser M. [G] à s’acquitter de sa dette en procédant à 24 règlements mensuels d’un montant équivalent, le premier paiement devant intervenir le 10 du mois suivant la signification de l’arrêt à intervenir ;
– juger qu’à défaut de paiement d’une seule échéance à bonne date, l’intégralité de la dette deviendrait immédiatement exigible ;
À titre subsidiaire, et dans l’hypothèse où la cour n’annulerait pas le jugement dont appel,
– d’infirmer partiellement le jugement déféré en ce qu’il a :
– déclaré recevable l’action de Monsieur [G] ;
– ordonné la mainlevée de la saisie-attribution litigieuse qu’elle avait pratiquée entre les mains du Crédit Agricole sur les valeurs détenues pour le compte de Monsieur [G] ;
– l’a condamnée à régler à Monsieur [G] 500 euros à titre de dommages et intérêts suite à l’indisponibilité des fonds que cette saisie-attribution avait bloqués,
-l’a condamnée :
– aux dépens, y inclus ceux inhérents à la saisie-attribution, et en a ordonné distraction au profit de Maître [H], avocat à [Localité 5], aux conditions de l’article 699 du code de procédure civile :
– à servir à Monsieur [G] 2.000 euros aux titres combinés des articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 sous la condition que Maître [H] justifiât avoir renoncé à percevoir la part contributive de l’Etat ;
Statuant à nouveau, de :
– juger Monsieur [G] mal fondé en l’ensemble de ses demandes et l’en débouter ;
– juger régulière la saisie-attribution pratiquée le 4 février 2022 sur le compte détenu par Monsieur [G] dans les livres du Crédit agricole de la Touraine;
– juger à titre subsidiaire, et pour le cas où un report de paiement serait accordé à Monsieur [G], que la durée du report de paiement consenti serait limitée à un an ;
– juger à titre très subsidiaire, et pour le cas où des délais de paiement seraient accordés à Monsieur [G] :
– autoriser Monsieur [G] à s’acquitter de sa dette en procédant à 24 règlements mensuels d’un montant équivalent, le premier paiement devant intervenir le 10 du mois suivant la signification de l’arrêt à intervenir ;
– juger qu’à défaut de paiement d’une seule échéance à bonne date, l’intégralité de la dette deviendrait immédiatement exigible ;
En tout état de cause,
– condamner Monsieur [G] à lui payer la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.
Le 3 avril 2023 à 11 heures 40, Monsieur [G] a demandé :
A titre principal,
– de débouter la société Hoist de l’ensemble de ses demandes ;
– de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
-déclaré recevable son action ;
-condamné la société Hoist à lui régler 500 euros à titre de dommages et intérêts suite à l’indisponibilité des fonds que cette saisie-attribution avait bloqués,
– condamné la société Hoist :
– aux dépens, y inclus ceux inhérents à la saisie-attribution, et en a ordonné distraction au profit de son conseil ;
– à lui servir 2000 euros au titre combiné des articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 sous la condition que son conseil justifiât avoir renoncé à percevoir la part contributive de l’Etat;
– le recevoir en son appel incident ;
– le déclarer recevable et fondé ;
En conséquence,
– réformer le jugement déféré en ce qu’il a limité à 500 euros la condamnation de la société Hoist Finance à lui régler à titre de dommages et intérêts suite à l’indisponibilité des fonds que cette saisie-attribution avait bloqués ;
Statuant à nouveau sur ce point,
– condamner la société Hoist à lui régler la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts suite à l’indisponibilité des fonds que cette saisie-attribution avait bloqués ;
À titre subsidiaire, si par extraordinaire la juridiction de céans considérât que la saisie pratiquée par la société Hoist n’était pas abusive,
– lui accorder pour la somme éventuelle restante due un report de paiement de deux ans ;
– déclarer qu’en vertu des dispositions de l’article 1343-5 du code civil, la décision suspendrait toute voie d’exécution engagée par le créancier pendant le délai ainsi accordé, sous réserve du respect par le débiteur des modalités de paiement définies ;
À titre très subsidiaire, si par extraordinaire la juridiction le déboutât de toutes ses demandes sur les fondements précédents,
– lui accorder de larges délais de paiement ;
– ordonner que les paiements s’imputeraient d’abord sur le capital ;
En toutes hypothèses,
– condamner la société Hoist venant aux droits de la société Crédit Foncier de France à lui verser la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances dont distraction au profit de Maître Dibangue avocat au barreau de Poitiers faisant application de l’article 696 et suivants du Code civil ;
– condamner la société Hoist, venant aux droits de la société Crédit Foncier de France aux entiers dépens qui comprendraient les frais inutiles et injustifiés de la saisie avec faculté de recouvrement direct dont distraction au profit de son conseil.
Pour plus ample exposé, il sera expressément renvoyé aux écritures des parties déposées aux dates susdites.
Le 4 avril 2023 a été ordonnée la clôture de l’instruction de l’affaire.
MOTIVATION :
Sur l’annulation du jugement :
Selon l’article L. 111-2 du code des procédures civiles d’exécution,
Le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution.
Selon l’article L. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution,
Tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévues par le code du travail.
Il ressort de ces textes que l’exigibilité de la créance objet des poursuites constitue une des conditions de leur application.
L’article 16 du code de procédure civile fait interdiction au juge de retenir dans sa décision des moyens dont les parties n’auraient pas été mises à même de discuter contradictoirement.
Mais le juge n’est pas tenu d’inviter les parties à formuler leurs observations lorsqu’il vérifie de son propre mouvement l’absence ou la réunion des conditions d’application de la règle invoquée.
La société Hoist demande l’annulation du jugement, motif pris de la violation par le premier juge du principe du contradictoire.
Elle fait ainsi grief au premier juge :
– d’avoir retenu qu’elle n’avait pas justifié de la fixation de la créance de son auteur par jugement d’orientation préalable à l’adjudication du 3 avril 2017 ayant autorité de chose jugée, ni d’aucun titre exécutoire pour les postes de frais de procédure échus, frais de procédures, frais de gestion; ni des montants au titre de la prestation de recouvrement, et de signification de l’acquiescement total, et de lui avoir reproché de déduire des versements directs et des acomptes, sans tenir compte de leur date ni réduire en conséquence l’assiette des intérêts ;
– pour en conclure que contrairement à sa propre affirmation, il n’était pas établi que la créance mise en recouvrement était exigible.
Elle avance ainsi qu’en première instance, Monsieur [G] n’avait jamais invoqué de moyen relatif au caractère prétendument contestable du décompte mentionné sur l’acte de saisie, pour en déduire que le premier juge a soulevé d’office un tel moyen, sans l’avoir invitée à s’expliquer sur ce point, ni lors de l’audience du 28 juin 2022, ni par note en délibéré du 12 juillet 2022, ayant un autre objet.
Elle concède que si le juge de l’exécution était bien fondé à vérifier d’office le caractère exigible de sa créance, il aurait été tenu d’inviter les parties à faire valoir leurs observations sur les irrégularités supposées du décompte afférent à la saisie-attribution litigieuse.
Mais la motivation du premier juge, critiquée par l’appelante, s’est bornée à rechercher si la créance objet de la saisie était exigible, en application des textes susdits fondant les poursuites, de telle sorte que celui-ci n’a relevé d’office aucun moyen.
Ainsi, aucune violation du principe du contradictoire n’a été commise par le premier juge.
Il conviendra donc de dire qu’il n’y pas lieu à annuler le jugement déféré.
Sur la mainlevée de la saisie-conservatoire :
Sur l’exigibilité des sommes figurant au décompte de la saisie :
Le premier juge avait retenu que la société Hoist n’avait pas justifié de la fixation de la créance de son auteur par le jugement d’orientation préalable à l’adjudication du 3 avril 2017, qui a autorité de la chose jugée, et auquel ne saurait être substitué le décompte de l’huissier instrumentaire.
Mais à hauteur d’appel, la société Hoist a produit le jugement d’orientation du 9 janvier 2017 rendu par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Tarascon, retenant la créance du Crédit Foncier à la somme de 169 594,15 euros en principal, intérêts et frais arrêtée au 15 février 2016, sauf mémoire, erreur ou omission et sous réserve des sommes à devoir jusqu’au jour du remboursement définitif et sous réserve des intérêts postérieurs et des cotisations d’assurance, avec intérêts moratoires de 3,60 %.
Par la production d’un chèque Carpa en date du 8 février 2018, la société Hoist a démontré que dans le cadre de cette procédure, le Crédit Foncier avait reçu la somme de 85 414,96 euros.
Et par la production de la requête aux fins d’homologation du projet de distribution d’une vente forcée d’un autre bien immobilier du débiteur, homologuée le 2 septembre 2019, la société Hoist démontre que sa créance, arrêté au 17 juin 2019, était alors de 103 977,72 euros, outre intérêts au taux de 3,60 %.
Ainsi, dans le décompte afférent à la saisie, les sommes dues au titre du solde débiteur au 6 juin 2015, du capital restant dû à cette date, de l’indemnité d’exigibilité de 7 % sur le capital restant dû, des cotisations d’assurance et des intérêts contractuels correspond exactement à la créance retenue par le jugement d’orientation du 9 janvier 2017.
Le créancier poursuivant a ainsi justifié de la fixation de sa créance antérieure à l’adjudication du 3 avril 2017.
* * * * *
S’agissant du poste afférent aux frais de procédure échus, à hauteur de 1812,93 euros, le premier juge a retenu que la société Hoist n’avait justifié d’aucun titre exécutoire.
A hauteur de cour, l’appelante produit les factures correspondantes d’honoraires de son avocat et de l’huissier instrumentaire, ayant trait aux frais qu’elle a supportés dans le cadre de la procédure de saisie immobilière portant sur le bien sis [Adresse 2], objet du jugement d’adjudication rendu par le tribunal de grande instance de Poitiers le 9 octobre 2018.
Ce poste sera donc retenu.
S’agissant du poste afférent aux frais de procédure, à hauteur de 420 euros, le premier juge a retenu que la société Hoist n’avait justifié d’aucun titre exécutoire.
A hauteur de cour, la société Hoist expose que cette somme correspond au coût de la requête déposée le 1er juillet 2021 devant le tribunal judiciaire de Tarascon, aux fins d’obtention d’une copie exécutoire de l’acte notarié du 30 mars 2007.
Et dans la mesure où l’appelante a produit une copie exécutoire de l’acte notarié, il y aura lieu de retenir que la requête y afférent a nécessairement été déposée, de telle sorte que le coût afférent est justifié.
Ce poste sera donc retenu.
S’agissant du poste afférent aux frais de gestion, à hauteur de 15,28 euros, le premier juge a retenu que la société Hoist n’avait justifié d’aucun titre exécutoire.
L’appelante soutient que ce poste correspond aux émoluments perçus en application de l’article A. 444-44 du code de commerce, qui dispose qu’en cas de délais de paiements accordés à un débiteur, poursuivi en vertu d’une décision de justice ou d’un acte ou d’un titre en forme exécutoire, la prestation figurant au n° 204 du tableau 3-3 donne lieu à la perception par l’huissier de justice ayant reçu mandat de gérer le dossier, d’un émolument fixe de 6,37 euros par acompte versé, à l’exception du versement du solde.
Il sera ajouté que ce texte, modifié en dernier lieu par arrêté du 28 février 2020, entré en vigueur le 1er mars 2020, prévoit que :
– cet émolument, qui est à la charge du débiteur, n’est dû qu’à l’issue d’un délai de 6 mois à compter du premier versement effectué par le débiteur après la délivrance du titre ;
– pour la gestion d’un même dossier, le montant total des émoluments perçus en application du présent article ne peut excéder 32,74 euros.
Et eu égard aux divers acomptes réalisés par le débiteur, figurant au décompte, il y aura lieu de déduire le bien fondé de ce poste, qui sera retenu.
* * * * *
L’article A. 444-31 du code de commerce dispose que la prestation de recouvrement ou d’encaissement figurant au numéro 128 tableau 3-1 donne lieu à perception d’un émolument :
– fixe de 4,25 %, si le montant de la créance est inférieur ou égal à 44 euros;
– proportionnel, au-delà du seul de 44 euros, et dans la limite de 550 euros, aux sommes encaissées ou recouvrées au titre du principal de la créance ou du montant de la condamnation, à l’exclusion des dépens, selon un barème fixant un taux allant de 9,67 % (pour une tranche d’assiette de 0 à 125 euros) jusqu’à un taux de 0,29 % (pour une tranche d’assiette supérieure à 1525 euros).
S’agissant du poste afférent aux ‘prestations de recouvrement A. 444-31″, à hauteur de 474,30 euros, le premier juge a retenu que la société Hoist n’avait pas justifié en quoi ce poste différerait du poste afférent au coût du présent (procès-verbal de signification) à hauteur de 117,13 euros.
Mais le premier de ces postes correspond aux honoraires sur encaissement à la charge du débiteur, tel que prévu par le tarif des commissaires de justice, tandis que le second correspond uniquement au coût de l’acte de saisie-attribution, de telle sorte qu’il s’agit de deux émoluments différents.
Il y aura donc lieu de retenir le poste afférent aux prestations de recouvrement A. 444-31, à hauteur de 474,30 euros.
* * * * *
Le premier juge a retenu que les postes ‘signification de l’acquiescement total’, à hauteur de 77,99 euros, et ‘mainlevée quittance saisie-attribution (banque)’, à hauteur de 60,13 euros, sont dépourvus d’objet compte tenu de la contestation soulevée devant lui.
La société Hoist réplique que ces postes ne sont pas dépourvus d’objet dans la mesure où les sommes y afférentes sont réclamées au débiteur en prévision de la procédure de saisie-attribution.
Mais en l’état de la présente contestation, et en l’absence de tout acquiescement total par le débiteur ou de toute mainlevée ou de toute quittance de la saisie-attribution, les explications de la société Hoist sont inopérantes pour retenir que le coût des postes y afférent revêt un réel objet.
Il y aura donc lieu de retrancher du montant de la présente saisie-attribution les deux postes susdits.
* * * * *
Selon l’article 1343-1 du Code civil,
Lorsque l’obligation de somme d’argent porte intérêt, le débiteur se libère en versant le principal et les intérêts. Le paiement partiel s’impute d’abord sur les intérêts.
L’intérêt accordé par la loi stipulée dans le contrat. Le taux d’intérêt conventionnel doit être fixé par écrit. Il est réputé annuel par défaut.
Le premier juge a fait grief à la société d’avoir déduit des versements directs et acompte de 86 555,18 euros et 9800 euros, sans tenir compte de leurs dates ni réduire l’assiette des intérêts qu’elle n’a pas précisé, alors qu’en vertu des règles d’imputation légale, ces paiements ont nécessairement réduit l’assiette des intérêts.
Mais il résulte du décompte produit par l’huissier instrumentaire, relatif aux versements et acomptes, que les versements ont été exactement et à bonne date imputés sur les intérêts, conformément à la règle légale.
Il y aura donc lieu de retenir l’exactitude des intérêts figurant dans le décompte annexé à la saisie -attribution litigieuse.
Sur l’accord de règlement entre parties:
La charge de la preuve de l’exigibilité de la créance objet des poursuites appartient au créancier poursuivant.
Selon courrier en date du 30 avril 2021, l’huissier mandaté par la société Hoist a indiqué à Monsieur [G] qu’il acceptait ses propositions de règlement par versements mensuels de 400 euros payables le 15 de chaque mois, avec un premier règlement le 15 mai 2021 impérativement, chaque mois à la même date, et qu’à la moindre défaillance, il reprendrait les poursuites.
Ce courrier conclut que conformément à cet accord, les intéressés prendront contact au mois d’octobre pour règlement du mois de novembre, et son auteur a réclamé encore à Monsieur [G] de lui fournir le nom et les coordonnées de sa coopérative.
Par courrier en date du 19 août 2021, l’huissier instrumentaire a demandé au débiteur de lui faire parvenir un règlement important, d’au moins 7000 euros, avant la fin du mois d’août, à défaut de quoi il serait procédé à des poursuites sur les biens immobiliers et les récoltes du débiteur.
Il est constant entre parties que Monsieur [G] a réglé à la créancière la somme de 7000 euros le 24 septembre 2021, et a réalisé des versements de 400 euros les 9 novembre 2021, 1er décembre 2021, 22 décembre 2021, et 1er février 2022.
Par courrier en date du 13 décembre 2021, assorti de justificatifs, dont la teneur n’est pas critiquée par le débiteur, l’huissier instrumentaire a précisé que:
– le 6 décembre 2021, Monsieur [G] lui a indiqué que ses récoltes étaient moins importantes que prévues, ce à quoi il lui a été répliqué que d’éventuelles saisies seraient alors engagées ;
– le 7 décembre 2021, l’intéressé a réclamé un décompte de créance actualisé, qui lui a été adressé le 29 décembre suivant, avec une demande de présentation d’une proposition de règlement du solde, en indiquant que les saisies étaient prévues début janvier ;
– le 13 janvier 2022, Monsieur [G] a indiqué qu’il allait envoyer la preuve d’une mise en vente d’un bien immobilier, sans toutefois évoquer une proposition de règlement.
La société Hoist soutient que l’accord du 30 avril 2021 n’était que provisoire.
Monsieur [G] lui oppose que l’accord de règlement en date du 30 avril 2021, prévoyant des versements mensuels de 400 euros, serait permanent, de telle sorte que de ce dernier, qu’il indique avoir constamment respecté, aurait fait perdre toute exigibilité à la créance objet de la saisie-attribution pratiquée le 4 février 2022.
D’une part, il ressort du règlement de 7000 euros, réclamé à l’intéressé pour la fin du mois d’août 2021, et réalisé par ce dernier le 24 septembre suivant, que le débiteur a accepté de ne pas limiter ses paiements à la seule somme mensuelle de 400 euros.
De seconde part, il résulte des termes même de cet accord que le solde de la créance devrait être réglé au mois de novembre 2021, et les échanges entre parties au mois de décembre 2021 et janvier 2022 viennent conforter cette analyse, en ce que les récoltes dont les produits étaient attendus en fin d’année, permettraient à Monsieur [G] d’apurer sa créance, et à défaut de quoi l’intéressé a fait valoir de manière moratoire l’existence d’une vente immobilière en cours.
Il résulte de ces éléments que l’accord entre parties du 30 avril 2021 ne se limitait pas à des paiements mensuels de 400 euros, et en tout état de cause, avait pris fin au cours du mois de décembre 2021.
Et la circonstance que Monsieur [G] ait continué à payer les versements mensuels de 400 euros à la société Hoist, qui les a encaissés, en dernier lieu le 1er février 2022, n’est pas de nature à infléchir cette appréciation.
* * * * *
A l’issue de cette analyse, il y aura lieu de juger régulière la saisie attribution pratiquée le 4 février 2022 sur le compte détenu par Monsieur [G] dans les livres du Crédit Agricole, mais de la cantonner à la somme de 103 889,12 euros: le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur la demande de dommages-intérêts pour manquement du Crédit Foncier à son obligation de mise en garde :
Eu égard aux conclusions respectives des parties sur ce point, il y aura lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevable la demande indemnitaire présentée par Monsieur [G] à l’encontre de la société Hoist, s’agissant du manquement du Crédit Foncier à son obligation de mise en garde, ne ressortissant pas de la compétence du juge de l’exécution, limitée aux difficultés relatives aux titres d’exécution et aux contestations relatives à l’exécution forcée.
Sur la demande de dommages-intérêts pour abus de saisie:
Selon l’article L. 111-7 du code des procédures civiles d’exécution,
Le créancier a le choix des mesures propres à assurer l’exécution de la conservation de sa créance.
L’exécution de ces mesures ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation.
L’article L. 121-2 du code des procédures civiles donne au juge de l’exécution le pouvoir de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d’abus de saisie.
La saisie-attribution litigieuse, pratiquée le 4 février 2022, et justifiée à hauteur de 103 889,12 euros, a conduit au blocage sur le compte de Monsieur [G] d’une somme de 11 688,70 euros.
Il n’est ainsi justifié d’aucun abus de saisie.
Monsieur [G] sera débouté de sa demande indemnitaire consécutive à l’indisponibilité des fonds bloqués par la saisie attribution, et le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur les délais de paiement:
Selon l’article 1343-5 du Code civil, le juge peut, compte de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux ans, le paiement des sommes dues.
Monsieur [G] demande un report de paiement de deux ans.
Il soutient ne pas disposer de revenus suffisants ni de patrimoine lui permettant de faire face de manière immédiate au paiement d’une somme totale de 146 887,96 euros.
Il soutient que ce report lui laisserait le temps de vendre certains de ses biens afin de solder sa créance.
Mais l’intéressé n’a produit aucun justificatif actualisé de sa situation patrimoniale.
Et il sera observé qu’il avait, dès le mois de janvier 2022, évoqué auprès de l’huissier instrumentaire l’existence d’une vente immobilière à venir, mais dont aucun justificatif tangible n’a depuis été produit.
Enfin, l’état hypothécaire produit par la société Hoist, daté du 22 décembre 2022, met en évidence que Monsieur [G] :
– a vendu un bien immobilier le 2 juillet 2020 pour un prix de 96 000 euros;
– a vendu un bien immobilier le 12 novembre 2021 pour un prix de 514 247,50 euros :
– a acheté un bien immobilier le 22 novembre 2021 pour 100 000 euros;
– est propriétaire de plusieurs biens immobiliers à [Localité 6] et y loue des terrains.
Ainsi, la situation de Monsieur [G] ne justifie pas l’octroi du moindre délai de paiement.
Il y aura donc lieu de débouter Monsieur [G] de sa demande de délais de paiement.
* * * * *
Le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné la société Hoist aux dépens de première instance et à payer à Monsieur [G] une somme au titre des frais irrépétibles de première instance.
Monsieur [G] sera débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles des deux instances, et sera condamné aux entiers dépens des deux instances, ainsi qu’à payer à la société Hoist la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.
PAR CES MOTIFS:
La Cour,
statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a :
– déclaré recevable l’action de Monsieur [M] [G] ;
– déclaré irrecevable la demande indemnitaire de Monsieur [M] [G] à raison du manquement prétendu de l’auteur de la société anonyme Hoist Finance Ab à son devoir de mise en garde ;
Confirme le jugement déféré de ces seuls chefs ;
Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :
Valide la saisie attribution pratiquée le 4 février 2022 sur le compte détenu par Monsieur [M] [G] dans les livres du Crédit Agricole de Touraine, mais la cantonne à la somme de 103 889,12 euros ;
Déboute Monsieur [M] [G] de sa demande de dommages et intérêts consécutive à l’indisponibilité des fonds bloqués par la saisie-attribution ;
Déboute Monsieur [M] [G] de sa demande de délais de paiement ;
Rappelle que le présent arrêt vaut titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré ;
Déboute Monsieur [M] [G] de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel ;
Condamne Monsieur [M] [G] aux entiers dépens de première instance et d’appel, et à payer à la société anonyme de droit suédois Hoist Finance Ab la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,