COUR D’APPEL
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 20 juin 2023
N° RG 21/01034 – N° Portalis DBVU-V-B7F-FS7G
-LB- Arrêt n°
[K] [M] / S.A. INTRUM DEBT FINANCE AG
Jugement au fond, origine Juge de l’exécution du tribunal judiciaire du PUY-EN-VELAY, décision attaquée en date du 29 Avril 2021, enregistrée sous le n° 20/00886
Arrêt rendu le MARDI VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
M. Daniel ACQUARONE, Conseiller
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
En présence de :
Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l’appel des causes et de Mme Céline DHOME, greffier lors du prononcé
ENTRE :
M. [K] [M]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle à 25% numéro 2021/006264 du 18/06/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de CLERMONT-FERRAND)
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Maître Christine ROUSSEL-SIMONIN de la SELARL DIAJURIS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANT
ET :
La société INTRUM DEBT FINANCE AG (représentée par INTRUM, venant aux droits de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE)
[Adresse 4]
[Localité 3] SUISSE
Représentée par Maître Laurie FURLANINI, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND et par Maître Olivier LE GAILLARD de la SELARL BLG AVOCATS, avocat au barreau de ROANNE
Timbre fiscal acquitté
INTIMEE
DÉBATS :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 février 2023, en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme BEDOS, rapporteur.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 20 juin 2023, après prorogé du délibéré initiallement prévu le 25 avril 2023 puis le 13 juin 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme DHOME, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par acte sous-seing privé en date du 5 octobre 2010, la société Facet, devenue BNP Paribas Personal Finance, a consenti à M. [K] [M] un crédit renouvelable utilisable par fractions. L’emprunteur n’ayant pas respecté ses engagements, la déchéance du terme de ce crédit a été prononcée.
Par ordonnance en date du 10 octobre 2011, le président du tribunal d’instance des Sables-d’Olonne a enjoint à M. [M] de payer à la société Facet la somme de 1941,79 euros en principal, avec intérêts au taux légal.
Cette ordonnance, signifiée à M. [M] le 2 mars 2012, a été revêtue de la formule exécutoire le 13 avril 2012.
Sur le fondement de ce titre exécutoire, la SA Intrum Debt Finance AG, venant aux droits de la société BNP Paribas Personal Finance, a fait signifier à M. [M] le 17 juin 2020 un commandement de payer aux fins de saisie-vente, l’informant par le même acte de la cession de créances intervenue entre elle-même et cette dernière par acte sous-seing privé en date du 10 décembre 2019.
Par acte d’huissier signifié le 9 novembre 2020, la SA Intrum Debt Finance AG, venant aux droits de la société BNP Paribas Personal Finance, a fait procéder entre les mains de la société Banque Postale à une mesure de saisie-attribution des sommes détenues pour le compte de M. [M] pour obtenir paiement de la somme de 3424,87 euros en principal, frais et intérêts.
Cette mesure a été dénoncée à M. [M] par acte d’huissier en date du 10 septembre 2020, rappelant la cession de créances intervenue par acte sous-seing privé du 10 décembre 2019.
Par acte d’huissier signifié le 17 septembre 2020, M. [K] [M] a fait assigner devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay la SA Intrum Debt Finance AG pour obtenir le prononcé de la nullité de la mesure de saisie-attribution et sa mainlevée.
Par jugement du 29 avril 2021, le juge de l’exécution a statué en ces termes :
-Rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir ;
– Fixe et limite le montant de la saisie-attribution diligentée par la SA Intrum Debt Finance AG à la somme de 2603,38 euros ;
– Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
– Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.
M. [M] a relevé appel de cette décision par déclaration électronique du 5 mai 2021.
La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 4 décembre 2022.
Vu les conclusions en date du 23 juillet 2021 aux termes desquelles M. [K] [M] demande à la cour de :
-Constater que la société Intrum Debt Finance AG ne justifie pas de sa qualité à agir lors de la régularisation du procès-verbal de saisie-attribution en date du 9 novembre 2020 ;
En conséquence,
-Prononcer la nullité de la saisie-attribution ;
À titre subsidiaire,
-Débouter la SA Intrum Debt Finance AG de toutes ses demandes à son encontre ;
-Prononcer la mainlevée de la saisie-attribution dénoncée en date du 17 décembre 2020 ;
-Condamner la société Intrum Debt Finance AG à lui payer la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
-Condamner la société Intrum Debt Finance AG aux dépens.
Vu les conclusions en date du 17 septembre 2021 aux termes desquelles la SA Intrum Debt Finance AG demande à la cour de :
-Confirmer le jugement rendu le 29 avril 2021 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir et fixé le montant de la saisie-attribution à la somme de 2603,38 euros ;
-Débouter par conséquent M. [K] [M] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
-Condamner M. [K] [M] à lui payer la somme de 1000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
-Le condamner en tous les dépens.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées pour l’exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Il sera rappelé, à titre liminaire, qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile « la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif » et que les demandes de « constater que… » ou de « dire et juger que…», ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions, au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du code de procédure civile, mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions.
-Sur la qualité de créancier de la SA Intrum Debt Finance AG :
En application de l’article L211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail.
La SA Intrum Debt Finance AG a fait procéder entre les mains de la société Banque Postale à une mesure de saisie-attribution des sommes détenues pour le compte de M. [M] en se prévalant du titre exécutoire obtenu par la société Facet à l’encontre de ce dernier et de la cession de créance intervenue le 10 décembre 2019 avec la société BNP Personal Finance, venant aux droits de la société Facet suite à une opération de fusion absorption menée en 2014.
M. [M] soutient toutefois que la SA Intrum Debt Finance AG ne rapporte pas la preuve que la créance litigieuse figurait bien au rang des 10’677 créances cédées à cette dernière par la société BNP Personal Finance le 10 décembre 2019 et ainsi ne justifie pas de sa qualité de cessionnaire de la créance lui permettant d’exercer une mesure d’exécution.
Il souligne d’une part que le document produit par l’intimée et présenté comme un extrait de l’annexe au contrat de cession du 10 décembre 2019 n’est pas contresigné par la société BNP Personal Finance, d’autre part que la valeur faciale de la créance mentionnée sur cette pièce ne correspond pas au décompte présenté par la société Intrum Debt Finance AG.
Pour justifier de sa qualité de cessionnaire de la créance revendiquée, la SA Intrum Debt Finance AG produit les éléments suivants :
-L’offre de crédit renouvelable émise par la société Facet et signée au nom de M. [M] le 5 octobre 2010 ;
-L’ordonnance portant injonction de payer rendue par le président du tribunal d’instance des Sables -d’Olonne le 10 octobre 2011 sur requête de la société Facet ;
-L’acte de signification à M. [M], à l’initiative de la société Facet, de l’ordonnance portant injonction de payer rendue le 10 octobre 2011 ;
-L’avis publié au BODDAC (Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales) le 10 décembre 2014 relatif au projet d’opération de fusion absorption entre la société Facet et la SA BNP Personal Finance, celle-ci étant société absorbante ;
-Un extrait du contrat de cession de créances intervenu le 10 décembre 2019 entre la société BNP Personal Finance et la SA Intrum Debt Finance AG, cessionnaire de 10’677 créances pour un montant total des solde dus de 53’788 287,60 euros, portant la signature des deux parties ;
-Un document à l’en-tête de « Intrum », intitulé « extrait de l’annexe au contrat de cession du 10 décembre 2019 portant la liste des créances cédées », limité aux informations concernant la créance réclamée à M. [M] et comportant les éléments suivants :
-Les noms et prénom du débiteur à savoir M. [K] [M], et sa date de naissance, le 28 janvier 1975 ;
-Le type de produit et le « libellé apporteur », à savoir un crédit renouvelable souscrit auprès de la société Facet ;
-Le numéro de référence du contrat (44084645402100) pour la société Facet, correspondant précisément au numéro de référence figurant sur la requête en injonction de payer présentée par cet organisme.
Ces pièces confirment la détention d’une créance par la société Facet à l’encontre de M. [M] en vertu du contrat de crédit souscrit le 5 octobre 2010 et du titre exécutoire obtenu par cette dernière constitué par l’ordonnance portant injonction de payer rendue le 10 octobre 2011 et devenue exécutoire le 13 avril 2012, le transfert de cette créance de la société Facet à la société BNP Personal Finance suite à l’opération de fusion absorption intervenue en 2014 et l’existence d’un acte de cession de créances entre la société BNP Personal Finance et la SA Intrum Debt Finance AG le 10 décembre 2019.
M. [M] a été valablement avisé de la cession de créances intervenue entre la société BNP Personal Finance et la SA Intrum Debt Finance AG par les actes d’huissier qui lui ont été signifiés les 17 juin 2020 et 9 novembre 2020, conformément aux dispositions de l’article 1324 du code civil.
Contrairement à ce que soutient l’appelant, les pièces communiquées suffisent à démontrer en outre que la créance revendiquée figurait bien au rang des créances cédées le 10 décembre 2019 alors d’une part qu’elle contiennent des informations détaillées et se recoupant permettant d’identifier très précisément la créance revendiquée, d’autre part que la SA Intrum Debt Finance AG détient les éléments essentiels relatifs à cette créance, à savoir le titre exécutoire obtenu par la société Facet, transféré à la société BNP Personal Finance, et l’acte de signification de cette décision par la société Facet au débiteur.
Par ailleurs, ainsi que le fait justement valoir la SA Intrum Debt Finance AG, il importe peu que l’extrait de l’annexe au contrat de cession de créances mentionne une valeur faciale de la créance ne correspondant pas au décompte présenté par cette dernière, alors d’une part que la notion de valeur faciale correspond uniquement à la valeur comptable de la créance dans les comptes du cédant à la date de la cession, d’autre part que le montant de la créance permettant l’exercice d’une mesure d’exécution est celui mentionné dans le titre exécutoire en vertu duquel la mesure est mise en ‘uvre.
Enfin, le premier juge a exactement calculé le montant de la créance en principal, frais et intérêts pour cantonner à la somme de 2603,38 euros les effets de la saisie-attribution.
En considération de l’ensemble de ces explications, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
M. [M] sera condamné aux dépens d’appel. Pour des raisons tirées de l’équité et de la situation économique des parties, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur de la SA Intrum Debt Finance AG.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [K] [M] aux dépens d’appel.
Le greffier Le président