COUR D’APPEL DE BORDEAUX
2ème CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 22 JUIN 2023
N° RG 22/05229 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-M7IH
[B] [M]
c/
CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU SUD OUEST
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 octobre 2022 par le Juge de l’exécution d’ANGOULEME (RG : 22/00151) suivant déclaration d’appel du 16 novembre 2022
APPELANT :
[B] [M]
né le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 7] (Autriche)
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 1]
Représenté par Me Victor DOTAL de la SELARL SELARL PIPAT – DE MENDITTE – DELAIRE – DOTAL, avocat au barreau de PERIGUEUX
INTIMÉE :
CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU SUD OUEST venant aux droits de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Chartons
[Adresse 3]
Représentée par Me Caroline PECHIER de la SELARL JURICA, avocat au barreau de CHARENTE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 mai 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Christine DEFOY, Conseillère, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Madame Paule POIREL
Conseiller : Monsieur Alain DESALBRES
Conseiller : Madame Christine DEFOY
Greffier : Mme Chantal BUREAU
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
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FAITS ET PROCÉDURE :
Le 12 décembre 2002, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Chartrons a consenti à la société la Taverne des quais un prêt d’un montant de 914 700 euros sur 10 ans au taux effectif global de 6,77 % l’an.
Le 17 juillet 2003, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Chartrons a consenti à la société civile immobilière SCI TMK [Localité 6], un prêt d’un montant de 297 500 euros au taux effectif global de 6,08 % l’an, amortissable en 180 échéances constantes de 2672,02 euros.
M. [B] [M], président des sociétés et son épouse Mme [J] [M] se sont portés cautions solidaires jusqu’à complet remboursement des emprunts.
Par jugement du 5 août 2004 du tribunal de commerce d’Angoulême, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l’encontre des sociétés du groupe [M], dont la société Taverne des quais et la SCI TMK [Localité 6]. Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 29 janvier 2008.
Par acte du 18 mars 2008, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Chartrons a assigné M. et Mme [M] aux fins de condamnation solidaire au paiement des sommes de 686 623,42 euros et de 354 435,12 euros en leur qualité de cautions solidaires des sociétés Taverne des quais et SCI TMK [Localité 6].
Par jugement du 12 juin 2008, le tribunal de grande instance d’Angoulême a notamment condamné solidairement M. et Mme [M], es-qualité de cautions solidaires, à verser à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Chartrons la somme de 686 623,42 euros, ainsi que la somme de 354 435,12 euros, outre 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.
Par acte du 10 décembre 2021, la Caisse Régionale de Crédit Mutuel du Sud-Ouest, venant aux droits de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Chartrons, a dressé un procès verbal de saisie attribution entre les mains de la SA HSBC et à l’encontre de M. et Mme [M] [B] et [J], pour avoir paiement de la somme de 301 535,60 euros. Cette mesure a été dénoncée à M. [M] le 17 décembre 2021.
Par acte du 17 janvier 2022, M. et Mme [M] ont assigné la Caisse Régionale de Crédit Mutuel du Sud-Ouest, venant aux droits de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 6] Chartrons, devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Angoulême aux fins de contestation du décompte des sommes dues mentionnées dans l’acte de saisie attribution du 10 décembre 2021 et de mainlevée de celle-ci.
Par jugement du 24 octobre 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Angoulême a :
– débouté M. [M] de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution en date du 10 décembre 2021 qui lui a été dénoncée le 17 décembre 2021,
– débouté M. [M] de sa demande reconventionnelle au titre du trop perçu,
– validé la saisie à hauteur de la somme de 18 526,49 euros,
– rappelé qu’en application des dispositions de l’article R 211-13 du code des procédures civiles d’exécution, après la notification aux parties en cause de la décision rejetant la contestation le tiers saisi paie le créancier, en l’occurrence la société HSBC Continental Europe sur présentation de cette décision,
– laissé à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles,
– condamné M. [M] aux entiers dépens, qui comprendront les frais de la saisie-attribution,
– rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
M. [M] a relevé appel du jugement le 16 novembre 2022 en ce qu’il :
– l’a débouté de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution en date du 10 décembre 2021 qui lui a été dénoncée le 17 décembre 2021,
– l’a débouté de sa demande reconventionnelle au titre du trop perçu,
– a validé la saisie à hauteur de la somme de 18 526,49 euros
– l’a condamné aux entiers dépens, qui comprendront les frais de la saisie-attribution.
L’ordonnance du 19 décembre 2022 a fixé l’affaire à l’audience des plaidoiries au 3 mai 2023, avec clôture de la procédure à la date du 19 avril 2023.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 13 avril 2023, M. [M] demande à la cour de :
– infirmer le jugement en date du 24 octobre 2022 en toutes ses dispositions,
Statuant de nouveau,
– juger recevable et bien fondée son action,
– juger manifestement erroné le décompte des sommes dues mentionné dans l’acte de saisie-attribution en tant qu’il ne prend pas en compte la totalité des versements réalisés par les sociétés mises en liquidation en qualité de débitrices principales,
– prononcer, en conséquence, la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée sur les comptes de M. et Mme [M] en date du 10 décembre 2021,
A titre reconventionnel,
– condamner la Banque Crédit Mutuel du Sud-ouest à lui payer la somme de 224 141,09 euros à titre de trop-perçu, accompagnée des taux d’intérêt au taux légal depuis le 9 janvier 2009, date d’encaissement de la vente de la résidence de [Localité 5],
En tout état de cause,
– condamner la Banque Crédit Mutuel du Sud-Ouest à verser à M. et Mme [M] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 18 avril 2023, la Caisse Régionale de Crédit Mutuel du Sud-Ouest demande à la cour de :
– confirmer le jugement rendu le 24 octobre 2022 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Angoulême en toutes ses dispositions,
En conséquence,
-débouter M. [M] de sa demande de mainlevée de saisie-attribution en date du 10 décembre 2021, dénoncée le 17 décembre 2021,
-débouter M. [M] de sa demande reconventionnelle au titre du trop-perçu,
-valider la saisie à hauteur de 18 526, 49 euros et donc la créance du Crédit Mutuel à hauteur de 180 204, 52 euros,
Y ajoutant,
– condamner M. [M] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions des parties pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.
L’affaire a été évoquée à l’audience du 3 mai 2023 et mise en délibéré au 22 juin 2023.
MOTIFS :
Sur la contestation de la mesure de saisie-attribution litigieuse,
Dans le cadre de son appel, M. [B] [M] persiste à solliciter la mainlevée de la mesure de saisie-attribution pratiquée à son encontre au motif que le décompte produit par la banque comporte plusieurs erreurs.
Il soutient tout d’abord que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel n’a pas tenu compte d’un versement qui a été effectué le 29 décembre 2008, d’un montant de 523 299, 34 euros, suite à la vente d’un bien immobilier situé à [Localité 5] le 24 décembre 2008.
Toutefois, ce moyen ne pourra qu’être écarté par la cour dès lors qu’il ressort des nouveaux décomptes produits par l’intimée et constituant ses pièces 10 et 11 que la somme de 523 229, 34 euros a bien été comptabilisée et soustraite des sommes réclamées, selon l’affectation suivante :
-425 845, 64 euros venant en déduction du prêt souscrit en faveur de la Taverne des quais,
-97 383, 70 euros pour le prêt consenti à la SCI TMK [Localité 6].
Par ailleurs, l’appelant considère de plus fort, au vu du procès-verbal de saisie-attribution du 4 novembre 2009, constituant sa pièce n°18, que la somme de 523 229, 34 euros issue de la vente du bien immobilier d'[Localité 4] n’a pas été prise en compte, car si tel avait le cas, la somme réclamée aurait dû être de 517 828, 68 euros et non de 581 900, 20 euros, comme visé au présent procès-verbal, d’où un delta de 64 000 euros inexpliqué.
Ce moyen sera également considéré comme inopérant dès lors que la saisie-attribution susvisée n’a jamais été contestée, alors qu’elle a été pratiquée en 2009 et qu’en tout état de cause l’existence d’une evéntuelle erreur dans le décompte ne pourrait être sanctionnée par la nullité de la saisie, mais par un éventuel cantonnement à concurrence des sommes dûment justifiées.
De plus, ce procès-vebal n’est pas de nature à remettre en cause les sommes aujourd’hui réclamées par le Crédit Mutuel à l’appelant.
En outre, il ne pourra être fait droit à la demande de l’appelant tendant à faire injonction à la Caisse Régionale de Crédit Mutuel du Sud-Ouest de produire de nouvelles pièces distinctes des décomptes susvisés pour justifier de la déduction de la somme de 523 299, 34 euros sur les créances réclamées, dès lors que les pièces 10 et 11 précitées ne laissent aucun doute sur la soustraction ainsi opérée.
M. [M] soutient ensuite que la somme de 404 345,67 euros, provenant de la vente d’actifs d’autres de ses sociétés, également placées en procédure de liquidation judiciaire en 2008, en l’espèce les sociétés Hôtel Moderne et la SCI [M], n’a pas correctement été pris en compte dans le décompte de la banque.
Toutefois ce moyen sera également rejeté dans la mesure où M. [M] ne démontre pas comment et à quel titre des sociétés étrangères au jugement de condamnation des cautions auraient pu s’acquitter du passif des autres sociétés et ne produit aucun élément probant de nature à établir la matéralité du versement allégué.
Enfin, l’appelant fait valoir que la dette de la SCI TMK [Localité 6] aurait été entièrement soldée, comme en atteste le courrier en date du 19 juillet 2019 envoyé par le Crédit Mutuel à Maître [N], par lequel la banque confirme son accord pour un règlement de sa créance à hauteur de 54 000 euros pour solde de tout compte.
Toutefois, il convient de rappeler que ce versement de 54 000 euros a été effectué par la SELARL [N] dans le cadre des opérations de liquidation de la SCI TMK [Localité 6] qui a fait l’objet d’une clôture pour insufissance d’actifs.
Or dans une telle hypothèse, si l’article L643-11 du code de commerce indique qu’en principe, le jugement de clôture de la liquidation judiciaire ne fait pas recouvrer aux créanciers l’exercice individuel de leurs actions contre le débiteur, cette absence de reprise des poursuites individuelles ne vaut pas pour la caution.
Il est en effet acquis que la caution ne peut se prévaloir dans ces circonstances des remises effectuées par le créancier dans le cadre du plan ainsi que des accords intervenus entre le créancier et les organes de la procédure collective, afin d’aménager les modalités de paiement de la dette.
Il s’ensuit que M. [M] ne peut se prévaloir de ce paiement intervenu à hauteur de 54 000 euros pour solde de tout compte au profit de la SCI TMK [Localité 6] pour considérer qu’il est déchargé de toute obligation à l’égard du Crédit Mutuel en sa qualité de caution, l’accord ainsi conclu ne valant qu’entre le créancier et le débiteur.
De plus, il résulte des diverses pièces versées aux débats que M. [M] reste débiteur à l’égard de la Caisse Régionale de Crédit Mutuel du Sud Ouest de la somme de 180 204, 52 euros, telle que retenue par le jugement déféré.
Ainsi, contrairement à ce que soutient à tort l’appelant, la banque n’a nullement reçu de trop-perçu, le versement de la somme de 523 229, 34 euros, consécutive à la vente du bien immobileir d'[Localité 4] n’ayant nullement permis de solder les dettes des sociétés La Taverne des Quais et de la SCI TMK [Localité 6].
Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a validé la saisie-attribution partiquée le 10 décembre 2021 par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel à l’encontre de M. [M] à hauteur de 18 526, 49 euros.
Sur les autres demandes,
Il ne paraît pas inéquitable de condamner M. [M], qui succombe en son appel, à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel la somme de 2000 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l’instance.
M. [M] sera pour sa part débouté de ses demandes formées à ces titres.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, par décision mise à disposition au grreffe et en dernier ressort,
Dans les limites de l’appel,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne M. [B] [M] à payer à la Caisse Régionale de Crédit Mutuel du Sud Ouest la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M [B] [M] aux entiers dépens de la procédure,
Déboute M. [B] [M] de ses demandes formées à ces titres.
Le présent arrêt a été signé par Mme Paule POIREL, président, et par Mme Chantal BUREAU, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,