Saisine du juge de l’exécution : 6 juillet 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/11906

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Saisine du juge de l’exécution : 6 juillet 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/11906

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 10

ARRÊT DU 06 JUILLET 2023

(n° , 4 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général

N° RG 22/11906 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGA47

Décision déférée à la cour

Jugement du 16 juin 2022-Juge de l’exécution de PARIS-RG n° 22/80348

APPELANT

Monsieur [L] [C]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

ayant pour avocat plaidant Me Charles GUEUNIER, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

COMPTABLE RECOUVREMENT SIP [Localité 3] PORTE DAUPHINE

[Adresse 1]

[Localité 3]

n’a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 8 juin 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Catherine LEFORT, conseiller, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT

-réputé contradictoire

-par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon trois procès-verbaux du 20 septembre 2021, le comptable Recouvrement du SIP de [Localité 3] Porte Dauphine a fait pratiquer des saisies de droits d’associés, respectivement entre les mains de la Sarl Auditeurs Associés Conseils, de la Sarl Full Access Réseaux et de la Sarl Infosystem, au préjudice de M. [L] [C], pour avoir paiement d’un montant total de 583.852,40 euros. Les trois saisies ont été dénoncées au débiteur le même jour.

Le 20 octobre 2021, M. [C] a fait opposition aux poursuites auprès de l’administration fiscale.

Par acte d’huissier du 16 février 2022, M. [C], autorisé à assigner à jour fixe par ordonnance du même jour, a fait citer le comptable Recouvrement du SIP de [Localité 3] Porte Dauphine devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris aux fins d’annulation des saisies.

Par jugement du 16 juin 2022, le juge de l’exécution a :

dit irrecevable la contestation des trois saisies de droits incorporels du 20 septembre 2021,

condamné M. [C] à verser au comptable du SIP de [Localité 3] secteur Nord la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens,

condamné M. [C] à une amende civile de 4.000 euros.

Pour statuer ainsi, le juge de l’exécution a retenu qu’aucune dénonciation de l’assignation à l’huissier instrumentaire n’était produite en application de l’article R.232-7 du code des procédures civiles d’exécution, de sorte que la contestation était irrecevable, et que l’action était manifestement mal fondée au point de constituer un abus du droit d’agir en justice devant être sanctionné par une amende civile.

Par déclaration du 24 juin 2022, M. [C] a formé appel de ce jugement.

Par dernières conclusions du 6 octobre 2022, signifiées par acte d’huissier du 11 octobre 2022, M. [C] demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

dire l’action recevable,

dire entachées de nullité les saisies de droits d’associé pratiquées par l’huissier des finances publiques le 20 septembre 2021 entre les mains des sociétés Auditeurs Associés Conseils, Full Access Réseaux et Infosystem,

ordonner l’annulation des saisies litigieuses,

annuler l’amende civile de 4.000 euros,

condamner le comptable public responsable du SIP du 16ème arrondissement secteur Nord aux entiers dépens, ainsi qu’au paiement d’une somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’appelant soutient :

sur la recevabilité de sa contestation : que le juge de l’exécution s’est mépris sur les règles dérogatoires applicables en matière fiscale, que la contestation étant en l’espèce formalisée par un mémoire préalable, c’est cette contestation et non l’assignation devant le juge de l’exécution qui devait être dénoncée, laquelle ne constitue pas une contestation au sens de l’article R.232-7 du livre des procédures fiscales, étant rappelé que l’article R.232-7 du code des procédures civiles d’exécution vise précisément la contestation et non l’assignation ;

sur la nullité des saisies : que les dispositions des articles R.232-5 et R.232-6 du code des procédures civiles d’exécution n’ont pas été respectées puisque les procès-verbaux ne portent pas l’indication du titre exécutoire, aucun numéro de rôle n’étant mentionné, ne comportent pas le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus avec le taux des intérêts, étant précisé qu’aucun bordereau de situation n’était joint à ces actes ; et que les actes de dénonciation ne contiennent pas la reproduction des articles R.221-30 à R.221-32 et R.233-3 du code des procédures civiles d’exécution, ce qui l’a privé de la faculté de pouvoir procéder à une vente amiable ;

sur l’amende civile : qu’il était contraint de saisir le juge de l’exécution dans un délai de deux mois à peine de forclusion en application de l’article R.281-4 du livre des procédures fiscales ; qu’il a développé des moyens sérieux relatifs à la nullité des saisies ; que cette décision inique est incompatible avec les principes fondamentaux de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen et de la convention européenne des droits de l’homme, notamment le droit d’accès à un juge, de faire entendre et examiner sa cause par un juge indépendant et impartial.

Bien qu’ayant régulièrement reçu signification de la déclaration d’appel, le comptable recouvrement du SIP de [Localité 3] Porte Dauphine n’a pas constitué avocat devant la cour.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de la contestation de la saisie

Il résulte de l’article R.232-7 alinéa 1er du code des procédures civiles d’exécution que la contestation relative à la saisie de droits d’associé et de valeurs mobilières doit être, à peine d’irrecevabilité, dénoncée le jour même ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec accusé de réception, à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie.

Il est exact que s’agissant en l’espèce d’une créance fiscale, M. [C] était tenu, avant de saisir le juge de l’exécution, de former un recours gracieux auprès de l’administration fiscale. Il justifie avoir dénoncé ses oppositions à poursuites à l’huissier instrumentaire par courriers datés du même jour, sans pour autant justifier de la date d’envoi des lettres.

En revanche, il est constant qu’il n’a pas dénoncé son assignation devant le juge de l’exécution à l’huissier instrumentaire.

C’est en vain que M. [C] se prévaut d’une règle dérogatoire en la matière. L’article R.281-5 du livre des procédures fiscales, qu’il invoque, prévoit seulement que le contribuable ne peut soumettre au juge de nouvelles pièces ou de nouveaux moyens et doit, si le juge de l’exécution est compétent, suivre les règles de la procédure à jour fixe. Mais il ne déroge pas aux dispositions de l’article R.232-7.

Ainsi, la contestation portée devant le juge de l’exécution doit également être dénoncée à l’huissier instrumentaire.

En outre, ce dernier étant chargé de délivrer le certificat de non-contestation pour obtenir le paiement du tiers saisi, il est logique de l’informer de ce que la contestation a été portée devant le juge de l’exécution et n’est donc toujours pas tranchée.

Dès lors, la cour approuve le juge de l’exécution d’avoir déclaré la contestation de M. [C] irrecevable, faute de dénonciation à l’huissier instrumentaire.

Il convient donc de confirmer le jugement sur ce point.

Sur l’amende civile

Aux termes de l’article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d’un maximum de 10.000 euros.

Le droit d’agir en justice ne dégénère en abus qu’en cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière, équipollente au dol, de sorte que la condamnation à une amende civile doit se fonder sur la démonstration de l’intention malicieuse et de la conscience d’une procédure vouée à l’échec, sans autre but que de retarder ou de décourager le recouvrement des sommes dues par la partie adverse. Le caractère non fondé des prétentions ne suffit pas à caractériser l’abus dans l’exercice du droit d’agir.

Pour condamner M. [C] à une amende civile, le premier juge retient que l’argumentation de ce dernier consiste à remettre en cause les mentions des actes authentiques de saisie et à soutenir que ces actes ne lui permettent pas de comprendre le calcul des sommes visées, alors que ces sommes lui sont réclamées au titre de l’impôt sur le revenu 1999, 2000 et 2001 et sont pour partie en recouvrement depuis 2012, et que l’action de M. [C] est manifestement mal fondée au point de constituer un abus du droit d’agir en justice.

Or il ressort des conclusions de M. [C] que celui-ci ne conteste pas l’authenticité des actes de saisie, mais reproche à l’huissier d’avoir omis certaines mentions obligatoires, ce qui aurait nui à sa compréhension.

La lecture des actes d’exécution ne permet pas de déduire que ses contestations seraient manifestement mal fondées au point de constituer un abus du droit d’agir en justice, et ce d’autant plus que l’administration fiscale n’a jamais répondu à ses oppositions à poursuites.

La cour considère que M. [C] a pu contester la régularité des actes d’exécution dans des conditions qui ne caractérisent pas un abus de procédure.

Il convient donc d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. [C] à une amende civile et de dire n’y avoir lieu au prononcé d’une telle sanction.

Sur les demandes accessoires

Au vu de la présente décision, il convient de confirmer les condamnations accessoires de M. [C], de le condamner aux dépens d’appel et de le débouter de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

INFIRME le jugement rendu le 16 juin 2022 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il a condamné M. [C] à une amende civile de 4.000 euros,

Statuant à nouveau de ce seul chef,

DIT n’y avoir lieu au prononcé d’une amende civile,

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus,

Y ajoutant,

DEBOUTE M. [L] [C] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [L] [C] aux dépens d’appel.

Le greffier, Le président,

 


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