République Française
Au nom du Peuple Français
C O U R D ‘ A P P E L D E D O U A I
RÉFÉRÉ DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 13 JUILLET 2023
N° de Minute :93/23
N° RG 23/00063 – N° Portalis DBVT-V-B7H-U5KT
DEMANDEUR :
Madame [P] [U] [K]
née le 20 décembre 1978 à [Localité 9]
demeurant [Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 3]
ayant pour avocat Me Laura MAHIEU, avocate au barreau de Lille substituée par Me Anne-Sophie GARCIA-MORA
DÉFENDERESSES :
[7] immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro [N° SIREN/SIRET 2]
dont le siège est situé [Adresse 1]
[Localité 5]
S.A. [7] immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro [N° SIREN/SIRET 4]
dont le siège est situé [Adresse 1]
[Localité 5]
ayant pour avocat Me Jérôme LESTOILLE, avocat au barreau de Lille
PRÉSIDENTE : Hélène CHÂTEAU, première présidente de chambre désignée par ordonnance du premier président de la cour d’appel de Douai du 21 décembre 2022
GREFFIER : Estelle DIDIO à l’audience
Christian BERQUET au prononcé
DÉBATS : à l’audience publique du 3 juillet 2023
Les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’ordonnance serait prononcée par sa mise à disposition au greffe
ORDONNANCE : contradictoire, prononcée publiquement par mise à disposition au greffe le treize juillet deux mille vingt-trois, date indiquée à l’issue des débats, par Hélène CHÂTEAU, Présidente, ayant signé la minute avec Christian BERQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire
EXPOSE DU LITIGE
Par déclaration enregistrée le 12 août 2022 au secrétariat de la commission d’examen des situations de surendettement des particuliers du Nord, Mme [P] [U] [K] a demandé l’ouverture d’une procédure de traitement de sa situation de surendettement.
Par décision du 31 août 2022, la commission a déclaré sa demande recevable.
Le 16 novembre 2022, la commission a imposé la suspension de l’exigibilité des créances pendant une durée de 24 mois au taux de 0% afin de permettre à Mme [U] [K], auxiliaire de vie, séparée et assumant la charge de trois enfants, de retrouver un emploi à plein temps.
La SA [7] a contesté les mesures imposées par la commission d’examen des situations de surendettement des particuliers du Nord, au motif que la commission ne pouvait ordonner un tel moratoire sans avoir au préalable exigé de Mme [U] [K] qu’elle lui restitue le véhicule Renault Captur Zen TCE 100 cv immatriculé [Immatriculation 8].
Par jugement du 18 avril 2023, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille a notamment :
– ordonné la suspension de l’exigibilité des créances dues par Mme [U] [K] reprises dans l’état des créances établi par la commission de surendettement des particuliers du Nord le 13 décembre 2022 pendant une durée de 24 mois,
– subordonné cette mesure à la restitution par Mme [U] [K] à la SA [7] du véhicule Renault Captur Zen TCE 100 cv immatriculé [Immatriculation 8], financé par elle, selon offre de contrat de crédit affecté acceptée le 24 juin 2020,
– rappelé que la décision était immédiatement exécutoire.
Par lettre avec avis de réception du 24 avril 2023, Mme [U] [K] a interjeté appel de ce jugement en ce qu’il lui ordonne de restituer son véhicule automobile.
Par acte du 24 mai 2023, Mme [U] [K] a fait assigner la société [7] devant le premier président de la cour d’appel de Douai, pour l’audience du 12 juin 2023, au visa des articles 514-3, 517-1 et suivants du code de procédure civile, L. 733-7 du code de consommation, afin de voir arrêter l’exécution provisoire dont est assorti le jugement du 18 avril 2023 et de dire que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.
A l’audience du 12 juin 2023, l’affaire a été renvoyée à celle du 3 juillet 2023.
Par acte du 16 juin 2023, Mme [U] [K] a fait assigner la société [7] devant le premier président de la cour d’appel de Douai, pour l’audience du 3 juillet 2023, au visa des articles 514-3, 517-1 et suivants du code de procédure civile, L. 733-7 du code de consommation, afin de voir arrêter l’exécution provisoire dont est assorti le jugement du 18 avril 2023 et de dire que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.
A l’audience du 3 juillet 2023,
Mme [U] [K] représentée par son avocate a maintenu ses demandes uniquement vis à vis de la SA [7], se désistant de son action à l’encontre de la SA [7]. Elle expose que ce véhicule est son outil de travail dès lors qu’elle est auxiliaire de vie pour des personnes handicapées en fauteuil roulant et que ce véhicule lui est indispensable pour exercer l’activité professionnelle qui est la sienne à ce jour. Elle fait valoir que grâce aux heures supplémentaires, son salaire est d’environ 1900 euros, auquel s’ajoutent les prestations familiales de 1029 euros pour ses trois enfants mineurs et la bourse pour sa fille [Y] étudiante, sa fille aînée étudiante résidant également avec elle.
La SA [7], qui a fait déposer son dossier, a, au visa des articles 524 et suivants du code de procédure civile, conclu qu’il n’y avait lieu à ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire et a demandé de condamner Mme [U] [K] aux dépens. Elle précise que la demande est sans objet dans la mesure où l’article L 722-3 du code de la consommation précise que la recevabilité de la demande emporte suspension et interdiction des procédures d’exécution diligentées à l’encontre des biens du débiteur.
Par note du 5 juillet 2023, il a été fait part aux avocats des parties que la présente juridiction soulevait l’application des dispositions de l’article R 713-8 du code de la consommation comme fondement juridique de la demande d’arrêt d’exécution provisoire de la décision du 18 avril 2023, les avocats des parties pouvant faire part de leurs observations jusqu’au 10 juillet 2023 au plus tard.
MOTIFS DE LA DÉCISION
In limine litis, il sera constaté que Mme [U] [K] se désiste de l’instance en arrêt d’exécution provisoire de la décision du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille en date du 18 avril 2013 engagée à l’encontre de la société [7].
Dans la mesure où les deux assignations successivement délivrées à la SA [7], puis à la SA [7] ont été enrôlées sous le même numéro de répertoire général, il n’y a pas lieu de prononcer une quelconque jonction.
1. Sur le fondement juridique de la demande d’arrêt d’exécution provisoire à l’encontre de la SA [7]
L’article L 722-3 du code de la consommation qui prévoit que la recevabilité de la demande emporte suspension et interdiction des procédures d’exécution diligentées à l’encontre des biens du débiteur, ne peut trouver application en l’espèce, dès lors que depuis la décision de recevabilité prise par la commission de surendettement le 31 août 2022, est intervenue la décision du juge des contentieux de la protection de Lille en date du 18 avril 2023, laquelle est exécutoire par provision.
Les dispositions des articles 514-3 et suivants, 517-1 et suivants du code de procédure civile sont également inapplicables, dès lors qu’il existe des dispositions spécifiques dérogatoires à ces dispositions générales.
L’article R. 713-8 du code de la consommation dispose qu’en cas d’appel, un sursis à exécution peut être demandé au premier président de la cour d’appel par assignation en référé. Jusqu’au jour du prononcé de l’ordonnance par le premier président, la demande suspend les effets de la décision du juge, à l’exception de celle prévoyant la suspension d’une mesure d’expulsion. Le sursis à exécution n’est accordé que si l’exécution immédiate de la décision risque d’avoir des conséquences manifestement excessives.
2. Sur le bien fondé de la demande
Mme [U] [K] justifie que :
– son contrat de travail auprès de l’association des paralysés de France prévoit en son article 11 que la salariée doit justifier d’un permis de conduire adéquat en cours de validité, justifier de la possession d’un véhicule par la production de la carte grise et avoir souscrit une police d’assurance couvrant le risque d’utilisation professionnelle de son véhicule,
– son employeur a attesté dès le 20 juin 2022 que l’utilisation par Mme [U] [K] de son véhicule personnel est indispensable pour la réalisation de ses missions et notamment le transport de personnes en situation de handicap moteur.
Ainsi la possession d’un véhicule aussi grand que celui qui a fait l’objet du contrat conclu avec la SA [7] s’explique par la nécessité de pouvoir accueillir un fauteuil roulant et une personne handicapée moteur.
L’obligation faite à Mme [U] [K] de restituer ce véhicule aurait pour conséquence de lui faire perdre son emploi, alors même qu’elle a trois enfants mineurs à charge et deux filles majeures étudiantes vivant à nouveau chez elle depuis décembre 2022. Sa situation de surendettement ne lui permettrait pas d’obtenir un autre contrat de crédit pour financer l’achat d’un autre véhicule.
Par ailleurs, Mme [U] [K] justifie qu’alors qu’elle travaillait à temps très partiel à hauteur de 60 heures par mois, elle a signé un avenant à son contrat de travail à hauteur de 130 heures par mois et qu’elle fait régulièrement des heures supplémentaires et que le fait de quitter ainsi son emploi mettrait en difficultés les personnes handicapées moteur dont elle s’occupent à ce jour.
Tous ces éléments constituent des conséquences manifestement excessives à l’arrêt de l’exécution provisoire de la décision du juge des contentieux de la protection de Lille en date du 18 avril 2023.
3. Sur les dépens
Chaque partie conservera à sa charge les frais et dépens engagés dans la présente instance.
PAR CES MOTIFS
Constate que Mme [P] [U] [K] se désiste de l’instance en arrêt d’exécution provisoire de la décision du juge de l’exécution de Lille en date du 18 avril 2013 engagée à l’encontre de la société [7],
Dit n’y a voir lieu à ordonner une jonction,
Ordonne l’arrêt de l’exécution provisoire de la disposition du jugement rendu le 18 avril 2023 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille dans l’instance opposant Mme [P] [U] [K] à l’ensemble de ses créanciers et notamment à la SA [7], par laquelle le juge a ordonné la restitution par Mme [U] [K] à la SA [7] du véhicule Renault Captur Zen TCE 100 cv immatriculé [Immatriculation 8], financé par elle, selon offre de contrat de crédit affecté acceptée le 24 juin 2020,
Dit que chaque partie conservera à sa charge les frais et dépens engagés dans la présente instance.
La présente décision est signée par Hélène CHÂTEAU première présidente de chambre et Christian BERQUET greffier.
LE GREFFIER LA PREMIÈRE PRÉSIDENTE DE CHAMBRE
C. BERQUET H. CHÂTEAU