COUR D’APPEL DE BORDEAUX
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 13 JUILLET 2023
N° RG 23/02038 – N° Portalis DBVJ-V-B7H-NHT7
Madame [C] [X] épouse divorcée [E]
c/
Monsieur [W] [E]
S.A. CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT
Etablissement Public COMPTABLE PUBLIC DU SIP DE [Localité 10]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 16 mars 2023 (R.G. 22/00084) par le Juge de l’exécution de bordeaux suivant déclaration d’appel du 24 avril 2023
APPELANTE :
[C] [X] épouse divorcée [E]
née le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 9] (17)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 7]
Représentée par Me Sylvie BOCHE-ANNIC de la SELARL CABINET FORZY – BOCHE-ANNIC – MICHON, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉS :
[W] [E]
né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 11] (33)
de nationalité Française
Profession : Sans emploi, demeurant [Adresse 4]
Représenté par Me Philippe MILANI de la SELARL MILANI – WIART, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A. CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT
Le CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT,
Société anonyme à Conseil d’administration, au capital de 124.821.703,00 €, immatriculée au RCS de Paris sous le n°379 502 644, dont le siège social est [Adresse 6], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Venant aux droits de :
Le CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE SUD OUEST,
Société Anonyme au capital de 212566742,76 €, ayant son siège social [Adresse 3], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BORDEAUX sous le N° B 391 761 137 représentée aux fins des présentes par son représentant légal ayant tous pouvoirs à cet effet, à la suite d’une fusion absorption en date du 1er mai 2016.
Venant aux droits de :
LA FINANCIERE DE L’IMMOBILIER SUD ATLANTIQUE,
Société Anonyme au capital de 141411716,16 €, ayant son siège social [Adresse 3], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BORDEAUX sous le N° B 391 761 137, à la suite d’une fusion absorption aux termes des dé
libérations de l’Assemblée Générale Extraordinaire en date du 10/07/2009
demeurant [Adresse 5]
Représentée par Me Laurent BABIN de la SELARL ABR & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX
Etablissement Public COMPTABLE PUBLIC DU SIP DE [Localité 10]
assignée à jour fixe selon acte d’huissier en date du 26.04.23 délivré à personne morale
demeurant [Adresse 8]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 juin 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Christine DEFOY, Conseiller chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Paule POIREL, Président,
Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,
Madame Christine DEFOY, Conseiller,
Greffier lors des débats : Mme Chantal BUREAU
Greffier lors du prononcé : Mme Mélody VIGNOLLE-DELTI
ARRÊT :
– réputé contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE :
Agissant en vertu de la copie exécutoire d’un prêt notarié en date du 11 mai 2017, la SA Crédit Immobilier de France Développement (la banque) a, par actes d’huissiers en date du 23 juin et 4 du juillet 2022 fait délivrer à Mme [C] [X], divorcée [E], et à M. [W] [E] un commandement de payer valant saisie immobilière portant sur des biens et droits immobiliers situés [Adresse 7] à [Localité 10].
La banque a par la suite fait assigner Mme [X], M. [E] et le Comptable public responsable du service des impôts des particuliers de [Localité 10] (le Comptable public), créancier inscrit, à l’audience d’orientation du 10 novembre 2022 du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux pour voir fixer sa créance et ordonner la vente forcée de l’immeuble saisi sur la mise à prix de 132 400 €.
Mme [X] a demandé au juge de l’exécution d’ordonner la mainlevée du commandement de saisie vente immobilière et de lui accorder un délai de quatre mois pour procéder au règlement de la somme due.
M.[E] a déclaré s’en rapporter à justice sur les demandes de la banque.
Le Comptable public n’a pas comparu ni personne pour lui.
Par jugement d’orientation du 16 mars 2023, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux a :
– constaté que les conditions des articles L.311-2, L.311-4 et L.31-6 du code des procédures civiles d’exécution sont réunies,
– fixé la créance de la SA Crédit Immobilier de France Développement à la somme de 234 154,27 euros arrêtée au 19 mai 2022 en principal, intérêts, frais et autres accessoires,
– ordonné la poursuite de la procédure de vente forcée de l’immeuble saisi,
– fixé la vente aux enchères publiques de l’immeuble saisi à l’audience du 1er juin 2023 à 15 heures sur une mise à prix de 132 400 euros selon les stipulations du cahier des conditions de vente,
– dit que le créancier poursuivant pourra désigner une personne habilitée aux fins d’assurer ou de faire assurer par son mandataire la visite des biens saisis jusqu’au jour de la vente définitive à raison de deux heures pendant trois jours,
– dit que Mme [X], M. [E] ou tout occupant de leur chef seront tenus de laisser visiter les lieux sous son contrôle et qu’à défaut il pourra être, si besoin, procédé à l’ouverture des portes par tout huissier de justice de son choix avec l’assistance d’un serrurier le cas échéant, assisté de deux témoins, en application des dispositions de l’article L.142-1 du code des procédures civiles d’exécution ou l’assistance de la force publique,
– dit que le mandataire désigné se fera également assister lors de l’une des visites d’un expert chargé d’établir les constats : amiante, état parasitaire, risque d’exposition au plomb, diagnostic de performance énergétique, ainsi que l’attestation Loi Carrez, tous les constats nécessaires pour la réalisation de la vente,
– dit qu’en cas de difficulté il pourra en être référé au juge de l’exécution sur requête,
– dit que les dépens seront compris dans les frais de vente soumis à taxe.
Mme [X] a relevé appel de ce jugement le 7 avril 2023.
Par ordonnance sur requête en date du 17 avril 2023 la première présidente de cette cour l’a autorisée à assigner les intimés à jour fixe à l’audience du 7 juin 2023 .
Par actes de commissaire de justice des 24 et 26 avril 2023, Mme [X] a assigné M. [E] , la SA Crédit Immobilier de France Développement et le Comptable public, à l’audience du 7 juin 2023 de cette cour d’appel.
La procédure sur déclaration d’appel enrôlée sous le N°23/01723 et la procédure à jour fixe, enrôlée sous le n° 23/2038, ont été jointes.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 5 mai 2023, Mme [X] demande à la cour de :
– la dire et juger recevable en son appel,
y faisant droit,
– réformer le jugement d’orientation rendu le 16 mars 2023 par le juge de l’exécution en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
– fixer la créance du Crédit Immobilier de France Développement à la somme de 201 181,82 euros au 14 avril 2023 en rejetant l’indemnité de 15 505,35 euros demandée par le CIFD et qui correspond à une clause pénale injustifiée et totalement excessive,
– lui accorder un délai de quatre mois pour s’acquitter de la somme de 201 181,82 euros arrêtée au 14 avril 2023 au moyen d’un rachat de prêt qui lui est consenti par le Crédit Lyonnais,
– suspendre la procédure de saisie immobilière pendant ce délai,
– statuer ce que de droit sur les frais et dépens de la procédure.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 16 mai 2023, M. [E] demande à la cour de :
– lui accorder le bénéfice de l’aide juridictionnelle,
– lui donner acte de ce qu’il s’en rapporte à justice,
– condamner la partie défaillante aux dépens de l’instance d’appel.
Par ses dernières conclusions notifiées le 16 mai 2023, la SA Crédit immobilier de France Développement demande à la cour de :
– déclarer irrecevable la demande de fixation de la créance du Crédit Immobilier à la somme de 201 181,82 euros formulée par Mme [X],
– rejeter l’ensemble des demandes, fins et conclusions formulées par Mme [X],
– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
– renvoyer le dossier devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins d’adjudication.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions des parties pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.
L’affaire a été évoquée à l’audience du 7 juin 2023 et mise en délibéré au 13 juillet 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le Comptable public responsable du service des impôts des particuliers de [Localité 10], créancier inscrit, qui a été assigné à personne par acte de commissaire de justice du 26 avril 2023, n’a pas constitué avocat. Il sera statué par arrêt réputé contradictoire en application de l’article 474 du code de procédure civile.
Sur le montant de la créance,
Mme [X] fait valoir que la banque ne peut prétendre à aucun préjudice lié à l’exigibilité anticipée du prêt du fait de sa défaillance pendant le COVID, dans la mesure ou elle a continué ensuite à régler les échéances mensuelles, puis la somme de 10 000 €, de sorte qu’il n’y a pas lieu de faire application de la clause pénale relative à l’exigibilité anticipée du prêt, et que sa créance doit être réduite à 201 181,82 €.
M. [E] maintient qu’il souhaite sortir de l’indivision avec Mme [X] et recevoir le montant de ses droits, et qu’il lui est indifférent que ce bien immobilier soit conservé par Mme [X] ou qu’il soit vendu à l’amiable ou aux enchères publiques.
La banque soutient néanmoins à juste titre que la demande de rejet de l’indemnité conventionnelle et la demande de fixation de la créance à 201 181,82 €, n’ont pas été formulées en première instance et que cette dernière est irrecevable, en application des dispositions de l’article 311-5 du code des procédures civiles d’exécution.
Il résulte en effet de ce texte qu’à peine d’irrecevabilité, prononcée d’office, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut, sauf dispositions contraires , être formée après l’audience d’orientation prévue à l’article R322-15, à moins qu’elle porte sur des actes de procédure postérieurs à celle-ci.
Il en résulte qu’aucune prétention et même aucun moyen de fait ou de droit ne peut être formulé , pour la première fois devant la cour d’appel, ce qui est le cas de la demande de Mme [X] concernant la contestation de la clause pénale et le réduction du montant de la créance, qui n’avaient pas été formulées par elle devant le premier juge, lequel a d’ailleurs expressément constaté que le montant de la créance n’était pas contesté.
La demande formée par Mme [X] par laquelle elle conteste le montant de la créance est donc irrecevable.
Sur la demande de délai de règlement,
Mme [X] maintient à ce titre qu’elle a obtenu l’accord du Crédit Lyonnais LCL pour le rachat du prêt, que la banque dont le prêt doit être racheté doit s’engager à donner mainlevée de l’inscription et à donner ensuite contre le paiement de la créance mainlevée de ses garanties hypothécaires, et que le délai qu’elle sollicite pour parvenir au règlement de la dette doit lui être accordé.
La banque soutient cependant à juste titre que Mme [X] ne justifie pas de l’accord du Crédit Lyonnais pour régler la dette et qu’il n’est pas justifié de ce que sa créance pourra être réglée dans un délai de 4 mois.
Par lettre en date du 28 février 2023 le Crédit Lyonnais a fait connaître à Mme [X] qu’il ne pouvait étudier, en l’état actuel, la demande de rachat du prêt du Crédit immobilier de France, compte tenu des inscriptions enregistrées et qu’il se tenait à sa disposition afin d’étudier sa demande, dés lors que ces inscriptions seront intégralement levées.
Pour étudier la demande de Mme [X], le Crédit Lyonnais impose donc que le Crédit immobilier de France donne, au préalable, mainlevée des inscriptions d’hypothèques c’est à dire qu’il renonce, sans contrepartie, à la garantie de remboursement dont il dispose .Cette exigence priverait le Crédit immobilier du droit d’être payé par priorité. Son refus de faire droit à la demande de délais sollicitée par Mme [X], qui est parfaitement justifié, ne peut dés lors être considéré comme abusif.
La demande de délai, sollicitée par Mme [X], qui repose sur un engagement conditionnel du Crédit Lyonnais, lequel ne promet en outre pas, même si cette condition de mainlevée de l’hypothéque était remplie, de rembourser le prêt, mais seulement d’étudier cette possibilité, n’est donc pas fondée.
Le jugement attaqué, qui n’a pas fait droit à cette demande de délai formulée par Mme [X], sera donc confirmé.
Il convient d’ordonner le renvoi de l’affaire devant le juge de l’exécution pour fixer les autres modalités de la vente.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision réputée contradictoire, mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Accorde à M. [E] le bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire ;
Déclare irrecevable la demande de fixation de la créance du Crédit Immobilier à la somme de 201 181,82 euros formulée par Mme [X],
Déboute Mme [X] de ses autres demandes,
Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
Renvoie la cause et les parties devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux afin de voir fixer les autres modalités de la vente.
Condamne Mme [X] aux dépens de la procédure d’appel.
La présente décision a été signée par Madame Paule POIREL, présidente, et Madame Mélody VIGNOLLE-DELTI, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE