Travail temporaire : 28 février 2023 Cour d’appel de Nancy RG n° 22/01808

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Travail temporaire : 28 février 2023 Cour d’appel de Nancy RG n° 22/01808

ARRÊT N° /2023

SS

DU 28 FEVRIER 2023

N° RG 22/01808 – N° Portalis DBVR-V-B7G-FAW7

Pole social du TJ de TROYES

21/191

22 juillet 2022

COUR D’APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

SECTION 1

APPELANTE :

S.A.S. [6] prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Patricia LIME-JACQUES de la SELARL LIME & BARRAUD, substituée par Me ROUSSEL, avocats au barreau de NANCY

INTIMÉE :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE L’AUBE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Mme [E] [P], régulièrement munie d’un pouvoir de représentation

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties

Président : M. HENON

Siégeant en conseiller rapporteur

Greffier : Madame TRICHOT-BURTE (lors des débats)

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue en audience publique du 31 Janvier 2023 tenue par M. HENON, magistrat chargé d’instruire l’affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Guerric HENON, président, Dominique BRUNEAU et Catherine BUCHSER-MARTIN, conseillers, dans leur délibéré pour l’arrêt être rendu le 28 Février 2023 ;

Le 28 Février 2023, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :

Faits, procédure, prétentions et moyens :

M. [Y] [U] était salarié de la SAS [6], société de travail temporaire (ci-après dénommée la société) depuis le 22 février 2021, et mis à disposition de la société [5].

Le 24 mars 2021, la société a transmis à la caisse primaire d’assurance maladie de l’Aube (ci-après dénommée la caisse) une déclaration d’accident du travail sans réserve le concernant pour des « lésions de nature multiples du côté gauche » qui aurait été provoquée par la chute d’un pneu sur son bras gauche le 23 mars 2021 à 17h.

Le certificat médical initial du docteur [T] [B] du centre hospitalier de [Localité 1] du 24 mars 2021 fait mention d’une « fracture de la tête du radius non déplacée », avec arrêt de travail jusqu’au 7 avril 2021.

Par courrier du 13 avril 2021, la caisse a informé la SAS [6] de la prise en charge de cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le 11 juin 2021, la société a contesté la matérialité de cet accident devant la commission de recours amiable de la caisse et a sollicité l’inopposabilité à son égard de la décision de prise en charge de celui-ci au titre de la législation professionnelle. La caisse a accusé réception de son recours par courrier du 17 juin 2021.

Le 9 septembre 2021, la SAS [6] a contesté la décision implicite de rejet de ladite commission devant le pôle social du tribunal judiciaire de Troyes.

Par décision du 18 février 2022, la commission a rejeté sa demande.

Par jugement du 22 juillet 2022, le tribunal a :

– débouté la SAS [6] de sa demande d’inopposabilité de la décision de prise en charge de l’accident du travail de M. [Y] [U] en date du 23 mars 2021,

– condamné la SAS [6] à verser à la caisse primaire d’assurance maladie de l’Aube la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles,

– condamné la société [6] aux dépens.

Par acte du 29 juillet 2022, la SAS [6] a interjeté appel de l’ensemble des dispositions de ce jugement.

*

Suivant conclusions reçues au greffe le 13 décembre 2022, la SAS [6] demande à la Cour de :

– infirmer le jugement rendu le 22 juillet 2022 par le Tribunal Judiciaire Pôle Social de TROYES,

– juger que Monsieur [Y] [U] n’a pas été victime d’un accident du travail le 23 mars 2021,

En conséquence,

– lui déclarer inopposables la décision de prise en charge de l’accident du travail du 23 mars 2021 déclaré par M. [Y] [U], au titre de la législation sur les risques professionnels, ainsi que de l’ensemble des conséquences financières et médicales qui en découle,

– condamner la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’Aube aux entiers dépens de première instance et d’appel.

*

Suivant conclusions reçues au greffe le 23 janvier 2023, la caisse demande à la Cour de :

– confirmer le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Troyes du 22 juillet 2022 en toutes ses dispositions,

– juger que la décision de prise en charge de l’accident du travail déclaré est légalement fondée,

– juger que la décision de prise en charge est opposable à la société [6],

– condamner la société [6] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour l’exposé des moyens des parties, il convient de faire référence aux conclusions sus mentionnées, reprises oralement à l’audience.

Motifs :

Il résulte des dispositions de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale que constitue un accident du travail un événement ou une série d’événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l’occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d’apparition de celle-ci (Soc., 2 avril 2003, no 00-21.768, Bull. no132). Les juges du fond apprécient souverainement si un accident est survenu par le fait ou à l’occasion du travail (Soc., 20 décembre 2001, Bulletin civil 2001, V, n° 397).

En revanche, dès lors qu’il est établi la survenance d’un évènement dont il est résulté une lésion aux temps et lieu de travail, celui-ci est présumé imputable aux travail, sauf pour celui entend la contester de rapporter la preuve qu’il provient d’une cause totalement étrangère au travail.

Le salarié, respectivement la caisse en contentieux d’inopposabilité, doit ainsi « établir autrement que par ses propres affirmations les circonstances exactes de l’accident et son caractère professionnel » (Soc., 26 mai 1994, Bull. n° 181), il importe qu’elles soient corroborées par d’autres éléments (Soc., 11 mars 1999, no 97-17.149, civ.2e 28 mai 2014, no 13-16.968).

L’employeur à l’appui de sa demande se prévaut d’une déclaration tardive, d’une absence de témoin et d’une absence de constatation médicale le jour même et alors que le salarié ne pouvait continuer son travail compte tenu des manutentions manuelles inhérentes au poste.

La caisse expose que l’un des principaux motifs de contestation de l’employeur repose sur le caractère tardif de la déclaration du salarié dont le premier juge a justement rappelé le caractère indifférent et l’existence d’un laps de temps court entre la fin de travail et la déclaration compte tenu des circonstances. De plus la présence de témoin n’est pas exigée de l’article L. 411-1 du code de sécurité sociale et une telle n’absence ne saurait suffire en présence de présomptions graves et concordantes et aucun texte n’exige que des constatations médicales soient faites le jour des faits. Il appartient à l’employeur de renverser la présomption d’imputabilité.

Au cas présent, il convient de constater que selon la déclaration d’accident du travail, les faits invoqués par le salarié, constitués d’une chute de pneu agricole sur le bras gauche se sont déroulés le 23 mars 2021 à 17 h, ont été portées à la connaissance de l’employeur le 24 mars 2021 à 8h par la description qu’en a fait le salarié dont l’horaire de travail courait de 13 à 21 heures, sans qu’il ne soit fait état de témoins. Il résulte de cette déclaration que le salarié était affecté au sein de l’établissement de [Localité 4] de la société [5] en qualité d’ouvrier qualifié.

Le certificat médical initial faisant état d’une fracture de la tête du radius gauche non déplacée a été établi le 24 mars 2021.

Il résulte de ce qui précède que si le constat des lésions affectant le salarié concerné ne saurait être remis en cause au regard des énonciations figurant sur le certificat sus mentionné, étant relevé que l’employeur ne les conteste pas, il reste que l’origine professionnel de ces lésions ainsi que la matérialité du fait accidenté décrit n’apparait pas établie en l’absence de témoin de l’accident ainsi invoqué alors que le salarié terminait son travail à 21 heures soit quatre heures après, au sein des établissements de la société [5] de [Localité 4], et compte tenu du délai séparant de l’établissement de ce certificat des faits décrits qui, pour être réduit, n’en est pas moins exclusif de toute impossibilité de survenance dans un autre cadre.

Par ailleurs, la caisse ne saurait se prévaloir de la présomption dès lors que la matérialité même de faits accidentels survenus aux temps et lieu de travail n’est pas établie.

Il convient dans ces conditions de réformer le jugement entrepris et de dire inopposable à l’employeur la décision de prise en charge de la caisse.

La caisse qui succombe sera condamnée aux dépens

PAR CES MOTIFS,

La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Réforme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Troyes du 22 juillet 2022′;

Statuant à nouveau,

Déclare inopposable à la société [6] la décision de la caisse primaire d’assurance maladie de l’Aube de prise en charge de l’accident survenu 23 mars 2021 notifiée le 13 avril 2021 ;

Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de l’Aube aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Guerric Henon, Président de Chambre et par Madame Clara Trichot-Burté, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

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