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15 septembre 2022
Cour d’appel de Nîmes
RG n°
21/01985
ARRÊT N°
N° RG 21/01985 – N°Portalis DBVH-V-B7F-IBV6
ET- NR
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES
03 mai 2021
RG:19/02174
Syndicat FNAIM
Organisme CHAMBRE FNAIM DE L’IMMOBILIER DU GARD-LOZERE
C/
S.C.P. GERBET HUGUET LE HOYE
Grosse délivrée
le 15/09/2022
à Me Nicolas JONQUET
à Me Jean-michel DIVISIA
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère chambre
ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022
APPELANTES :
Syndicat FNAIM (SIREN 775 698 087)
agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège social sis
[Adresse 6]
[Adresse 3]
Organisme CHAMBRE FNAIM DE L’IMMOBILIER DU GARD-LOZERE (SIREN 311 624 126)
agissant poursuites et diligences de son Président, domicilié en cette qualité audit siège sis
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentées par Me Nicolas JONQUET de la SCP SVA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
S.C.P. GERBET HUGUET LE HOYE
prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Jean-michel DIVISIA de la SCP COULOMB DIVISIA CHIARINI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre,
Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère,
Mme Séverine LEGER, Conseillère,
GREFFIER :
Mme Audrey BACHIMONT, Greffière, lors des débats, et Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors du prononcé,
DÉBATS :
À l’audience publique du 14 Juin 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 15 Septembre 2022,
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel ;
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 15 Septembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Les 15 et 18 décembre 2018, Maître [I] [G], huissier de justice à [Localité 5], requis par la Fnaim, a dressé un procès-verbal afin de constater la présence d’annonces immobilières dans des locaux appartenant à la SCP Gerbet Huguet Le Hoye (SCP GHD), société de notaires. Les locaux concernés par la présente procédure sont situés dans un immeuble appelé l’Arche Botti à [Localité 5].
Suite à la réalisation de ce constat et considérant que cette société civile professionnelle avait enfreint les articles 3 et 5 de l’annexe au règlement national du conseil supérieur du notariat approuvés par l’arrêté du Garde des Sceaux le 25 mai 1982 ainsi que l’article 31 du règlement national du conseil supérieur du notariat approuvé par arrêté de Mme le Garde des Sceaux du 22 mai 2018, la Fnaim et la chambre Fnaim Gard-Lozère ont, par acte du 17 avril 2019, assigné la SCP GHD afin de la faire condamner à supprimer les panneaux publicitaires et les vitrines de l’immeuble l’Arche Botti sous astreinte ainsi que d’obtenir sa condamnation au paiement de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 10 000 euros chacun.
Retenant notamment que les panneaux publicitaires sont positionnés dans des emplacements adéquats et licites et qu’il n’est pas démontré que les devantures vitrées forment boutique, le tribunal judiciaire de Nîmes, par jugement contradictoire du 3 mai 2021, a :
– rejeté la demande de retrait des panneaux publicitaires sous astreinte formulée par la Fnaim et la chambre Fnaim de l’immobilier du Gard-Lozère ;
– rejeté la demande de suppression des vitrines formulée par la Fnaim et la chambre Fnaim de l’immobilier du Gard-Lozère ;
– rejeté les demandes en dommages et intérêts formulées par la Fnaim et la chambre Fnaim de l’immobilier du Gard-Lozère ;
– condamné la Fnaim et la chambre Fnaim de l’immobilier du Gard-Lozère aux dépens ;
– condamné la Fnaim et la chambre Fnaim de l’immobilier du Gard-Lozère à payer à la société civile professionnelle GHD la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– ordonné l’exécution provisoire.
Par déclaration du 21 mai 2021, la Fnaim et la chambre Fnaim de l’immobilier du Gard-Lozère ont interjeté appel de cette décision.
La clôture de l’instruction est en date du 31 mai 2022.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS
Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 mai 2022, les appelants demandent à la cour de :
infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Ce faisant,
juger que l’affichage et la publicité relatifs à des biens immobiliers à négocier, réalisés par la SCP GHD ne sont pas conformes aux réglementations en vigueur ;
condamner la SCP GHD à retirer les panneaux publicitaires portant sur les biens proposés à la vente placés dans les vitrines tel que résultant des constatations de la SCP RMS et Associés, en date des 15 et 18 décembre 2018 ;
condamner la SCP GHD à supprimer la présence de vitrines, situées en rez-de-chaussée de l’immeuble Arche Botti [Adresse 2] portant les numéros 116 et 115, distincte de l’Etude notariale située au deuxième étage de l’immeuble ;
juger que ces condamnations seront assorties d’une astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de quinze jours à compter de la signification de la décision à intervenir ;
condamner la SCP GHD à payer :
à la Fnaim du Gard, la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
à la Fnaim, Fédération nationale de l’immobilier, la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
s’entendre condamner à payer à la Fnaim du Gard la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à la Fnaim, Fédération nationale de l’immobilier, la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; s’entendre condamner aux entiers dépens.
Elles font essentiellement valoir que l’affichage et la publicité relatifs à des biens immobiliers à négocier, réalisés par la SCP GHD, ne sont pas conformes aux réglementations en vigueur. Elles indiquent qu’il s’agit d’un affichage dans une vitrine formant une devanture de boutique, cette notion ne nécessitant pas que l’on puisse distinguer l’intérieur du local, à partir de l’extérieur, contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges. Elles ajoutent qu’il importe peu que la clientèle soit ou non reçue dans le local situé au rez-de-chaussée, dès lors que l’on est en présence d’une vitrine. De plus, elles considèrent que l’article 3 de l’annexe au règlement national du conseil supérieur du notariat est méconnu en présence d’un local distinct de l’office proprement dit, ayant été constaté par huissier que ce local était garni d’un canapé devant un escalier avec une table basse ainsi qu’un tabouret et une table haute. Elles estiment que la seule présence d’un affichage illicite leur ouvre droit à réparation et qu’il existe une distorsion de concurrence leur portant préjudice.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 septembre 2021, la SCP Gerbet Huguet Le Hoye demande à la cour de :
confirmer le jugement en ce qui concerne le rejet de toutes les demandes présentées par les sociétés Fnaim et la condamnation de celles-ci à l’application de l’article 700 du code de procédure civile en sa faveur ;
Statuant au niveau de la cour sur l’article 700 du code de procédure civile,
condamner solidairement les sociétés Fnaim à lui payer la somme de 3 000 euros ;
condamner les appelantes aux dépens de première instance et d’appel.
Elle soutient notamment qu’il n’y a eu aucun manquement aux obligations réglementaires invoquées par les parties demanderesses, dès lors que le local objet du présent litige est occupé pour des besoins de travail intérieur, pour des réunions entre collaborateurs. Il est aucunement utilisé pour la réception de la clientèle, ce qui écarte la notion de vitrine formant devanture d’une boutique en ce qui concerne les affichages.
Elle précise qu’il résulte des constats d’huissier profuits qu’une publication est affichée sur la porte du local du rez-de-chaussée demandant aux clients de s’adresser à l’accueil de l’étude située au deuxième étage de l’immeuble Arche Botti, et que les clients ne sont pas admis dans le local du rez-de-chaussée.
Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la responsabilité de l’office notarial
Aux termes de l’article 5 de l’annexe au règlement national du Conseil Supérieur du Notariat, approuvé par l’arrêté du Garde des sceaux le 27 mai 1982, la publicité sur les biens à vendre ou à louer, peut être faite, dans le respect de l’article 31 du règlement national, soit pour un seul bien par un ou plusieurs notaires, soit pour plusieurs biens par un même notaire, soit pour plusieurs biens par plusieurs notaires sur la même annonce à la condition que chaque offre puisse être attribuée au notaire détenteur du mandat.
La reproduction dans les publicités du panonceau notarial est autorisée.
L’affichage dans une vitrine formant devanture de boutique est interdit.
1- Sur la violation de l’article 5 de l’arrêté du 27 mai 1982
Les appelants font grief aux premiers juges d’avoir considéré que les affichages constatés par huissiers à l’office notarial intimé, ne constituaient pas une violation des dispositions de l’article 5 de l’arrêté du 27 mai 1982 alors même que la vitrine d’annonces publicitaires de ventes immobilières formant devanture est interdit dans le cadre de l’activité notariale et que les deux constats d’huissiers produits aux débats témoignent que tel est bien la situation s’agissant de la SCP GHD.
Pour retenir que les panneaux publicitaires dont les appelants demandaient la suppression sous astreinte, étaient positionnés dans des emplacements adéquats et licites, le tribunal a constaté d’une part, que les photographies du constat d’huissier font apparaître des vitrines présentant effectivement des panneaux publicitaires mais dernières lesquelles il est impossible de voir à l’interieur de la pièce, les vitrines étant obstruées par la pose de revêtement opaque, et d’autre part, que les panneaux publicitaires portant des annonces immobilières sont au rez-de-chaussée et que la porte du rez-de-chaussée ne mène pas à l’office notarial, de sorte qu’il ne peut s’agir selon lui d’une devanture de boutique.
Or, l’expression ‘vitrine formant devanture de boutique’ doit s’entendre de toute partie de boutique qui n’est séparée de la rue que par un vitrage qui a pour fonction essentielle d’exposer des objets ou services à vendre à la vue des passants.
Par voie de conséquence, il importe peu qu’un revêtement ait été posé derrière les vitres pour masquer la vue sur l’office notarial située derrière (bureaux et salle de visioconférence selon l’intimée) ni que la porte située au rez-de-chaussée ne soit pas accessible au public, dès lors que les biens immobiliers donnés à vendre sont visibles de l’extérieur, sont positionnés dans des parties faisant partie intégrante de l’office notarial fussent-elles au rez-de-chaussée et enfin, dés lors que la vitrine forme la limite entre l’intérieur de l’étude et la voie publique permettant ainsi la vue des panneaux publicitaires par le public.
La SCP GHD a donc commis une faute en violant le texte sus-visé qui s’impose à elle en vertu de l’article 31 du règlement national du Conseil supérieur des notaires, et engage sa responsabilité.
Il en résulte que c’est à tort que les premiers juges ont considéré que la SCP GHD n’avait pas violé l’interdiction édictée par le texte rappelé ci-dessus et a débouté les appelants de leur demande de retrait des panneaux publicitaires sous astreinte.
2- Sur la suppression des panneaux publicitaires et des vitrines
L’affichage litigieux ne respectant pas les dispositions règlementaires, les appelants sont fondés à en obtenir le retrait.
Il y a lieu ainsi de condamner la SCP GHD à retirer l’ensemble des panneaux publicitaires placés dans les vitrines de l’office notarial au rez-de-chaussée de l’immeuble Arche Botti [Adresse 2] et constatés par la SCP d’huissiers RMS et associés les 15 et 18 décembre 2018.
Afin d’assurer l’exécution de cette condamnation, elle sera prononcée sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours après la signification de la présente décision.
En revanche, il ne sera pas fait droit à la demande de suppression des vitrines situées au rez-de-chaussée du bâtiment Arche Botti n° 115 et [Cadastre 1], l’office notarial pouvant en disposer dans le cadre de son activité principale et pour une utilisation non illicite.
3- Sur le préjudice moral
L’affichage illicite instaurant une concurrence déloyale à la profession des agents immobiliers, les instances réunissant ces professionnels et oeuvrant pour le respect de la loi au sein de cette profession règlementée, subissent un préjudice moral qu’il convient d’évaluer à la somme de 500 euros chacune que la SCP GHD sera condamnée à leur payer.
Ainsi, le jugement sera ainsi infirmé en toutes ses dispositions soumises à la cour
Sur les mesures accessoires
Partie perdante, la SCP GHD supportera la charge des dépens de première instance et d’appel et sera nécessairement déboutée de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’équité commande d’allouer au syndicat FNAIM et à la chambre FNAIM de l’immobilier du Gard et de la Lozère la somme de 2 000 euros chacun que la SCP GHD sera condamnée à leur verser.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Infime le jugement déféré en toutes ses dispositions soumises à la cour ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la SCP GHD à retirer l’ensemble les panneaux publicitaires placés dans les vitrines de l’office notarial au rez-de-chaussée de l’immeuble Arche Botti [Adresse 2] et dont la présence a été constatée par la SCP d’huissiers RMS et associés les 15 et 18 décembre 2018 ;
Afin d’assurer l’exécution de cette condamnation, la prononce sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours après la signification de la présente décision ;
Déboute le syndicat FNAIM et la chambre FNAIM de l’immobilier Gard-Lozère de sa demande de suppression des vitrines situées au rez-de-chaussée du bâtiment Arche Botti n° 115 et 116 ;
Condamne la SCP GHD à payer au syndicat FNAIM et la chambre FNAIM de l’immobilier Gard-Lozère la somme de 500 euros chacun de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;
La condamne à supporter la charge des dépens de première insatnce et d’appel ;
La condamne à payer au syndicat FNAIM et la chambre FNAIM de l’immobilier Gard-Lozère la somme de 2 000 euros chacun sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;
Déboute les parties de toutes autres demandes.
Arrêt signé par Mme FOURNIER, Présidente de chambre et par Mme RODRIGUES, Greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,