Production musicale : 12 mai 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 20/02733

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Production musicale : 12 mai 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 20/02733

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 12/05/2022

****

N° de MINUTE :

N° RG 20/02733 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TDCF

Ordonnance (N° 18/04111) rendue le 07 février 2019

par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Lille

et jugement (N° 1804111) rendu le 26 mars 2020

par le tribunal de grande instance de Lille

APPELANT

Monsieur [Y] [L]

demeurant 30 rue Feydeau

75002 Paris

représenté par Me Etienne Charbonnel, avocat au barreau de Lille

assisté de Me Patricia Compère, avocat au barreau de Paris, de Me Ignacio Diez et de Me Budes-Hilaire de la Roche, avocats au barreau de Paris

INTIMÉE

La SC Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la Communication au Public des Phonogrammes du Commerce – SPRE – prise en la personne de ses co-gérants

ayant son siège social, 27, rue de Berry

75008 Paris

représentée par Me Loïc Le Roy, membre de la SELARL Lexavoué, avocat au barreau de Douai

assistée de Me Pierre Lubet, membre de la SELARL Altana, avocat au barreau de Paris

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Catherine Bolteau-Serre, président de chambre

Sophie Tuffreau, conseiller

Jean-François Le Pouliquen, conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Anaïs Millescamps

DÉBATS à l’audience publique du 24 janvier 2022 tenue en double rapporteur par Catherine Bolteau-Serre et Jean-François Le Pouliquen, après accord des parties et après rapport oral de l’affaire par Jean-François Le Pouliquen.

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 mai 2022 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Catherine Bolteau-Serre, président, et Anaïs Millescamps, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 13 décembre 2021

****

Vu l’ordonnance d’incident du tribunal de grande instance de Lille du 7 février 2019 ;

Vu le jugement du tribunal judiciaire de Lille du 26 mars 2020 ;

Vu les conclusions de Monsieur [Y] [L] déposées au greffe le 4 novembre 2021 ;

Vu les conclusions de la société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE) déposées au greffe le 26 octobre 2021 ;

Vu l’ordonnance de clôture prise le 13 décembre 2021 ;

EXPOSÉ DU LITIGE

La société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce, ci-après la SPRE, expose être une société civile de gestion collective constituée en application des articles L214-5 et L321-1 du code de la propriété intellectuelle.

Elle précise être chargée de percevoir, sous le contrôle du ministère de la culture, la rémunération due aux artistes interprètes et aux producteurs de phonogrammes au titre de l’article L214-1 du code de la propriété intellectuelle dite « rémunération équitable », en contrepartie notamment de la communication directe dans les lieux publics des phonogrammes publiés à des fins de commerce (notamment discothèques, services de radiodiffusion sonore, par ambiance’).

Elle indique utiliser depuis 1986, date de sa création, comme nom commercial dans le cadre des activités le signe SPRE et revendique des droits d’auteur sur son logo.

La SPRE ajoute être titulaire :

‘du nom de domaine « spre.fr »

‘de la marque française verbale « SPRE » n° 4284783 déposée le 4 juillet 2016 en classe 35, 36 et 45

‘de la marque française semi figurative « SPRE » n° 4284792 déposée le 4 juillet 2016 en classe 35, 36 et 42.

Ces classes visent les produits et services suivants :

’35 : gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; conseils en organisation et direction des affaires ; comptabilité ; compilation d’informations dans des bases de données informatiques ; gestion de fichiers informatiques ; relations publiques ;

’36 : service de perception et de répartition de rémunération ; gestion financière ; information financière ; information financière par le biais de sites Web ; traitement de paiement par carte de crédit ; recouvrement de créances ;

’45 : services juridiques ; services d’élaboration de documents juridiques ; médiation ; services extrajudiciaires de résolution de différends ; recherche légale (recherche judiciaire) ; conseils en propriété intellectuelle.

Monsieur [Y] [L] est avocat au barreau de Paris et édite notamment un site internet accessible depuis l’url www. [L].com et une page facebook.

Monsieur [Y] [L] expose avoir engagé depuis 2016 plusieurs contentieux pour le compte de clients au travers desquels il soutient que la SPRE n’est pas un organisme de gestion collective et n’a aucun droit à percevoir et répartir la rémunération équitable, ajoutant que l’ensemble de la réglementation sur laquelle elle se fonde est susceptible d’être qualifiée d’inexistante et inopposable aux usagers, la qualifiant de société privée créée spécialement dans le but de commettre les infractions au profit de ses associés et des responsables du ministère de la culture.

*

* *

Estimant que Monsieur [Y] [L] faisait un usage illicite sur son site internet et sur sa page Facebook des marques SPRE dont elle est titulaire ainsi que de son logo et dénonçant des propos dénigrants, la SPRE, après avoir mis en demeure ce dernier de cesser les agissements en cause le 23 novembre 2016, l’a assigné en référé le 15 décembre 2016 devant le tribunal de grande instance de Paris.

Suivant ordonnance du 16 mars 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a notamment dit que Monsieur [Y] [L] avait commis une atteinte vraisemblable à la marque semi figurative SPRE et lui a enjoint sous astreinte de cesser de reproduire la marque et de faire figurer des propos qualifiés de dénigrement sur son site Internet et sur sa page Facebook, outre une condamnation provisionnelle à des dommages-intérêts.

Les astreintes provisoires ayant été assorties à cette ordonnance ont fait l’objet d’une décision du 8 février 2018 ordonnant leur liquidation.

Suivant appel interjeté par Monsieur [L], dans un arrêt du 18 mai 2018, la cour d’appel de Paris a notamment confirmé l’ordonnance et estimé que ce dernier avait en outre commis une atteinte vraisemblable à la marque verbale SPRE.

Par acte d’huissier du 14 avril 2017, la SPRE a assigné au fond Monsieur [Y] [L] devant le tribunal de grande instance de Paris sur le fondement de la contrefaçon de marques et de droit d’auteur, du dénigrement et de la concurrence déloyale et parasitaire.

À la demande de Monsieur [L] sur le fondement de l’article 47 du code de procédure civile, l’examen de l’affaire a été renvoyé au tribunal de grande instance de Lille, suivant ordonnance du juge de la mise en état du 6 avril 2018.

Par ordonnance du 7 février 2019, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Lille, saisi d’un incident par Monsieur [L], a notamment :

‘dit n’y avoir lieu, au stade de la mise en état, à l’annulation de l’assignation délivrée par la SPRE à l’encontre de Monsieur [L], s’agissant de seuls faits de dénigrement invoqués ne nécessitant pas de respecter le formalisme édicté par la loi du 29 juillet 1881

‘débouté Monsieur [L] de sa demande en nullité de l’assignation pour défaut de capacité à agir de la SPRE

‘débouté Monsieur [L] de sa demande de dommages et intérêts

‘débouté les parties de leurs demandes formulées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

*

* *

Par deux décisions du 14 octobre 2019, le Conseil d’État a rejeté les requêtes présentées par Monsieur [L] lui-même d’une part et par certains de ses clients d’autre part, visant à voir constater l’inexistence de la SPRE pour irrégularité des décisions la fondant.

S’agissant du recours formé par Monsieur [L], le Conseil d’État a retenu qu’il « ne justifie pas, en sa qualité d’avocat ayant vocation à défendre les intérêts d’entreprises utilisatrices de phonogrammes et donc redevables de la rémunération équitable, d’un intérêt suffisamment direct et certain pour demander l’annulation du refus d’abrogation des dispositions précisant le barème de cette rémunération et ses modalités de versement [‘] ».

Puis, s’agissant des sociétés clientes de Monsieur [L], le Conseil d’État a jugé que les moyens invoqués « ne sont, en tout état de cause, pas de nature à affecter l’existence même des décisions attaquées. Dès lors, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que ces décisions sont des actes inexistants dont le juge administratif pourrait constater la nullité sans condition de délais. »

*

* *

Dans son jugement du 26 mars 2020, le tribunal judiciaire de Lille a :

– dit que le tribunal de grande instance de Lille n’est pas compétent pour statuer sur les demandes formulées par la SPRE s’agissant des faits de publicité trompeuse imputée à Monsieur [L]

– renvoyé la SPRE à mieux se pourvoir sur ce point,

– dit que les propos suivants mentionnés dans les écritures de la SPRE ne sont pas diffamatoires :

À la page 14 de ses conclusions du 25 octobre 2019 « non content de véhiculer de tels propos sur son site internet, appelant ouvertement à cesser de régler des redevances à une société de gestion collective instituée par la loi, et donc à enfreindre la loi, Me [Y] [L] (‘) »

A la page 68 de ses conclusions « Ainsi, malgré les très nombreuses occasions qu’il a eues de régulariser la situation, et de cesser de porter atteinte aux intérêts de la SPRE, Monsieur [Y] [L], continue de véhiculer des propos mensongers et dénigrants sur son site Internet et sur la page Facebook susmentionnée, outre la reproduction de la marque semi-figurative « SPRE ».

A la page 24 de ses conclusions « Monsieur [L] va même jusqu’à soutenir que toute décision de justice qui ne lui donne pas raison (et il n’en existe pas qui fassent droit à ses demandes) constitue un faux en écriture publique ».

À la page 26 de ses conclusions « Par un raisonnement qui ne permet que de constater qu’il a pleinement connaissance du caractère critiquable de ses propos, Monsieur  [L] énonce lui-même que ses affirmations concernant la SPRE constitueraient « des faits portant atteinte à l’honneur et à la considération et constituent une diffamation publique (…) ». Ainsi, en qualifiant lui-même ses propos de diffamant, Monsieur [L] ‘ »

À la page 54 de ses conclusions « Maître [Y] [L] fait ici la publicité de ses services en tant qu’avocat, de façon totalement trompeuse » . « En affirmant que les argumentaires qu’il aurait développés, « permettent de ne pas payer les sommes réclamées par la SPRE, il se rend coupable de publicité trompeuse au détriment de la SPRE ; en effet aucune décision judiciaire n’a été rendue donnant droits à ces prétendus argumentaires. »

À la page 55 de ses conclusions « Monsieur [L] va même jusqu’à alléguer que la SPRE serait passible de sanctions pénales de ce fait, au mépris des règles de prudence les plus élémentaires. »

À la page 69 de ses conclusions ‘ De plus Monsieur [L] a adopté, depuis le début de la procédure, une attitude dilatoire (l’assignation au fond dont la nullité est aujourd’hui demandée date pour mémoire du 14 avril 2017, soit il y a plus de deux) et il provoque tout type d’incident pour retarder l’issue de la procédure. »

– débouté en conséquence M. [Y] [L] de sa demande de dommages et intérêts formulée sur ce point,

– dit que les propos suivants ‘ C’est au contraire la SPRE qui pourrait être pénalement poursuivie sur le fondement de la contrefaçon puisqu’elle prélève des sommes qu’elle ne redistribue que partiellement aux artistes et aux producteurs et une part minime de ces sommes va aux vrais producteurs et artistes pour lesquels cette rémunération a été créée,’ mentionnés par la SPRE dans son assignation sont susceptible de constituer à la fois une diffamation et un dénigrement,

– annulé en conséquence l’assignation délivrée par la SPRE contre M. [Y] [L] le 14 avril 2017 mais uniquement en ce qu’elle porte sur ces propos, sans avoir repris notamment l’ensemble des mentions requises par la loi du 29 juillet 1881,

– dit n’y avoir lieu à statuer sur la fin de recevoir tirée de la prescription prévue en matière de diffamation,

-débouté M. [Y] [L] de sa demande de communication de pièces portant sur les documents prouvant l’existence des membres de la commission prévue à l’article 24 de la loi du 3 juillet 1985 (article L.214-4 du code de la propriété intellectuelle) et le fait que la commission ait pu valablement délibérer conformément aux dispositions de l’article 5 du décret n° 86-537 du 14 mars 1986 (article R.214-5 du code de la propriété intellectuelle),

-rejeté l’exception de nullité de l’assignation délivrée par la SPRE tirée de son défaut de capacité à agir,

-rejeté la fin de non recevoir soulevée par M. [Y] [L] tirée du défaut d’intérêt et de qualité à agir de la SPRE,

-constaté que la SPRE n’agit pas sur le fondement de la rémunération équitable,

-dit en conséquence sans objet l’exception d’irrecevabilité sur ce point par M. [Y] [L],

– dit que le dépôt de la marque française verbale ‘SPRE’ n°4284783 le 04 juillet 2016 en classe 35,36 et 45, et de la marque française semi-figurative ‘SPRE’ n° 4284792 le 04 juillet 2016 en classe 35, 36 et 42 n’est pas frauduleux,

-débouté Monsieur [Y] [L] de ses demandes tendant à annuler le dépôt des marques française verbale ‘SPRE’ n°4284783 et semi-figurative ‘SPRE’ n° 4284792,

– dit que la SPRE est recevable, en tant que titulaire, à agir sur le terrain du droit des marques concernant la marque française verbale ‘SPRE’ n°4284783 déposée le 04 juillet 2016 en classe 35,36 et 45, et la marque française semi-figurative ‘SPRE’ n° 4284792 déposée le 04 juillet 2016 en classe 35, 36 et 42,

-dit qu’en reproduisant la marque verbale « SPRE » n° 4284792 et n° 4284783 sur le site Internet http://www. [L].com/ au travers de ses codes sources, M. [Y] [L] a commis des actes de contrefaçon à l’encontre de la SPRE,

– dit que la SPRE est recevable à agir à l’encontre de M. [Y] [L] s’agissant des

faits imputés sur les pages Facebook ‘SPRE’ et ‘Ne payez plus la SPRE’,

– dit qu’en reproduisant la marque semi-figurative n° 4284792 sur les pages Facebook ‘SPRE’ et ‘Ne payez plus la SPRE’ M. [Y] [L] a commis des actes de contrefaçon à l’encontre de la SPRE,

-débouté la SPRE de ses autres demandes au titre de la contrefaçon de marque,

-déclaré recevable la SPRE à agir sur le terrain du droit d’auteur,

– dit que le logo utilisé par la SPRE est protégeable au titre du droit d’auteur,

-débouté M. [Y] [L] de sa demande tendant à écarter des débats la pièce n°9 communiquée en demande,

– dit qu’en reproduisant le logo de la SPRE sur les pages Facebook ‘SPRE’ et ‘Ne payez plus la SPRE’, M. [Y] [L] a commis des actes de contrefaçon de ses droits d’auteur au détriment de la SPRE,

– dit que certains des propos tenus par M. [Y] [L] sur les activités de la SPRE sont constitutifs de faits de dénigrement,

-débouté la SPRE de ses demandes au titre de la concurrence déloyale concernant l’usage de son nom de domaine et de son nom commercial,

-condamné M. [Y] [L] à verser une somme de 8 000 euros à la SPRE en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, en qualité de titulaire des marques verbale et semi-figurative « SPRE » ;

-condamné M. [Y] [L] à verser une somme de 4 000 euros à la SPRE en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de droit d’auteur sur le logo « SPRE » sur lequel elle détient les droits ;

-débouté la SPRE de ses demandes de dommages et intérêts au titre de la concurrence déloyale et parasitaire;

-condamné M. [Y] [L] à verser à la SPRE une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice de désorganisation subi et de dénigrement,

– interdit à M. [Y] [L] de faire usage de la marque verbale SPRE n°4284792 dans les codes sources de son site internet http://www. [L].com/ et de faire usage de la marque semi-figurative SPRE n°4284792 sur tout support ou média et notamment sur son site internet et sur la page Facebook ‘ne payer plus la SPRE’, sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard et par support ou média passé un délai de 8 jours suivants la signification du présent jugement, l’astreinte courant sur un délai de 6 mois,

– interdit à M. [Y] [L] de faire usage du logo de la SPRE sur tout support ou média et notamment sur toutes pages Facebook administrées par lui, sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard et par support ou média passé un délai de 8 jours suivants la signification du présent jugement,

– enjoint à M. [Y] [L] de supprimer de son site Internet http://www. [L].com et de la page Facebook ‘Ne payez plus la SPRE’ les propos qualifiés de dénigrement à l’encontre de la SPRE sous astreinte provisoire de 150 euros par jour de retard dans un délai de 8 jours à compter de la signification du présent jugement,

-condamné M. [Y] [L] à publier un communiqué sur son site internet http://www. [L].com/, dans les termes suivants : « Par décision en date du 26 mars 2020, le tribunal judiciaire de Lille a condamné M. [Y] [L] pour des faits de contrefaçon et de dénigrement au préjudice de la SPRE’,

-débouté M. [Y] [L] de sa demande d’annulation des mesures d’interdictions prononcées par l’ordonnance de référé du 16 mars 2017,

-débouté M. [Y] [L] de ses demandes reconventionnelles de dommages et intérêts au titre de l’abus du droit d’agir en justice,

-condamné M. [Y] [L] à verser à la SPRE la somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

-condamné M. [Y] [L] au paiement des frais et dépens de l’instance, en ce compris les coûts des procès verbaux de constat pour une somme de 2 992,91 euros dont distraction au profit due la SELARL Altana ,

-ordonné l’exécution provisoire du jugement.

Par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel de ce siège le 17 juillet 2020, Monsieur [Y] [L] a interjeté appel de l’ordonnance du 7 février 2019 et du jugement du 26 mars 2020.

*

* *

Dans ses conclusions déposées au greffe le 4 novembre 2021, Monsieur [Y] [L] demande à la cour de :

« À titre principal et préliminaire :

Sur la nullité de l’assignation :

Infirmer partiellement le jugement du Tribunal Judiciaire de Lille du 15 mars 2020 sur ce point.

‘ Dire que l’assignation délivrée par la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE) à l’encontre de Monsieur [L] le 14 avril 2017 ne respecte pas les dispositions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse.

‘ Dire que l’action de la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE) est prescrite.

‘ Annuler ladite assignation dans sa totalité.

‘ Condamner la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE) à payer à M. [Y] [L] la somme de 150’000 euros en réparation du préjudice subi par l’engagement de cette procédure abusive et déloyale.

– Condamner la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE) aux dépens et à une somme de 30’000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

À titre subsidiaire :

‘ Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille le 24 mars 2020 en ce qu’il a condamné monsieur [Y] [L] au titre du dénigrement ;

‘ Dire que la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce n’est pas une entreprise industrielle et commerciale et que les appréciations portées par monsieur [Y] [L] ne concernent aucun produits, services ou prestations d’une entreprise industrielle ou commerciale.

‘ Dire que monsieur [Y] [L] n’a commis aucun fait de dénigrement au préjudice de la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce.

‘ Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille le 24 mars 2020 :

– en ce qu’il a dit que le dépôt de la marque française verbale « SPRE » n°4284783 le 04 juillet 2016 en classe 35,36 et 45, et de la marque française semi-figurative « SPRE » n° 4284792 le 04 juillet 2016 en classe 35, 36 et 42 n’était pas frauduleux

– en ce qu’il a dit la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce recevable à agir contre [Y] [L] sur le fondement de la marque française verbale « SPRE » n°4284783 déposée le 04 juillet 2016 en classe 35,36 et 45, et de la marque française semi-figurative « SPRE » n° 4284792 déposée le 04 juillet 2016 en classe 35, 36 et 42 ;

– en ce qu’il a dit qu’en reproduisant la marque verbale « SPRE » n° 4284792 et n° 4284783 sur le site Internet http://www. [L].com/ au travers de ses codes sources, M. [Y] [L] avait commis des actes de contrefaçon à l’encontre de la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE) ;

– en ce qu’il a dit que la Société pour la perception de la rémunération équitable de la

communication au public des phonogrammes du commerce était recevable à agir à l’encontre de M. [Y] [L] s’agissant des faits imputés sur les pages Facebook « SPRE » et « Ne payez plus la SPRE » ;

– en ce qu’il a dit qu’en reproduisant la marque semi-figurative n° 4284792 sur les pages Facebook « SPRE » et « Ne payez plus la SPRE », M. [Y] [L] a commis des actes de contrefaçon à l’encontre de la SPRE ;

– en ce qu’il a déclaré la Société pour la perception de la rémunération équitable de la

communication au public des phonogrammes du commerce recevable à agir sur le terrain du droit d’auteur ;

– en ce qu’il a dit qu’en reproduisant le logo de la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce sur les pages Facebook « SPRE » et « Ne payez plus la SPRE », M. [Y] [L] avait commis des actes de contrefaçon de ses droits d’auteur au détriment de la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (SPRE);

– en ce qu’il a condamné M. [Y] [L] à verser une somme de 8 000 euros à la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, en qualité de titulaire des marques verbale et semi-figurative « SPRE »

– en ce qu’il a condamné M. [Y] [L] à verser une somme de 4 000 euros à la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de droit d’auteur sur le logo « SPRE » sur lequel elle détient les droits ;

– en ce qu’il a condamné M. [Y] [L] à verser à la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice de désorganisation subi et de dénigrement ;

– en ce qu’il a interdit à M. [Y] [L] de faire usage de la marque verbale SPRE n°4284792 dans les codes sources de son site internet http://www. [L].com/ et de faire usage de la marque semi-figurative SPRE n°4284792 sur tout support ou média et notamment sur son site internet et sur la page Facebook « ne payer plus la SPRE », sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard et par support ou média passé un délai de 8 jours suivants la signification du présent jugement, l’astreinte courant sur un délai de 6 mois ;

– en ce qu’il a interdit à M. [Y] [L] de faire usage du logo de la SPRE sur tout support ou média et notamment sur toutes pages Facebook administrées par lui, sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard et par support ou média passé un délai de 8 jours suivants la signification du présent jugement ;

– en ce qu’il a enjoint à M. [Y] [L] de supprimer de son site Internet http://www. [L].com et de la page Facebook « Ne payez plus la SPRE » les propos qualifiés de dénigrement à l’encontre de la SPRE sous astreinte provisoire de 150 euros par jour de retard dans un délai de 8 jours à compter de la signification du présent jugement ;

– en ce qu’il a condamné M. [Y] [L] à publier un communiqué sur son site internet http://www. [L].com/, dans les termes suivants : « Par décision en date du 26 mars 2020, le Tribunal Judiciaire de Lille a condamné M. [Y] [L] pour des faits de contrefaçon et de dénigrement au préjudice de la SPRE » ;

– en ce qu’il a débouté M. [Y] [L] de sa demande d’annulation des mesures d’interdictions prononcées par l’ordonnance de référé du 16 mars 2017 ;

– en ce qu’il a condamné M. [Y] [L] à verser à la Société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce la somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– en ce qu’il a condamné M. [Y] [L] au paiement des frais et dépens de l’instance, en ce compris les coûts des procès-verbaux de constat pour une somme de 2 992,91 euros dont distraction au profit de la SELARL Altana ;

En tout état de cause :

– Débouter la SPRE de la totalité de ses demandes et notamment de celles formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions déposées au greffe le 26 octobre 2021, la société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce, ci-après la SPRE, demande à la cour de :

1. Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

-Dit que les propos suivants mentionnés dans les écritures de la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce ne sont pas diffamatoires :

À la page 14 de ses conclusions du 25 octobre 2019 « non content de véhiculer de tels propos sur son site internet, appelant ouvertement à cesser de régler des redevances à une société de gestion collective instituée par la loi, et donc à enfreindre la loi, Me [Y] [L] (.)»

A la page 68 de ses conclusions « Ainsi, malgré les très nombreuses occasions qu’il a eues de régulariser la situation, et de cesser de porter atteinte aux intérêts de la SPRE, Monsieur [Y] [L], continue de véhiculer des propos mensongers et dénigrants sur son site Internet et sur la page Facebook susmentionnée, outre la reproduction de la marque semi-figurative « SPRE ».

A la page 24 de ses conclusions « Monsieur [L] va même jusqu’à soutenir que tout décision de justice qui ne lui donne pas raison (et il n’en existe pas qui fassent droit à ses demandes) constitue un faux en écriture publique ».

À la page 26 de ses conclusions « Par un raisonnement qui ne permet que de constater qu’il a pleinement connaissance du caractère critiquable de ses propos, Monsieur [L] énonce lui-même que ses affirmations concernant la SPRE constitueraient « des faits portant atteinte à l’honneur et à la considération et constituent une diffamation publique (…) ». Ainsi, en qualifiant lui-même ses propos de diffamant, Monsieur [L] . »

À la page 54 de ses conclusions « Maître [Y] [L] fait ici la publicité de ses services en tant qu’avocat, de façon totalement trompeuse » . « En affirmant que les argumentaires qu’il aurait développés, « permettent de ne pas payer les sommes réclamées par la SPRE, il se rend coupable de publicité trompeuse au détriment de la SPRE ; en effet aucune décision judiciaire n’a été rendue donnant droits à ces prétendus argumentaires. »

À la page 55 de ses conclusions « Monsieur [L] va même jusqu’à alléguer que la SPRE serait passible de sanctions pénales de ce fait, au mépris des règles de prudence les plus élémentaires. »

À la page 69 de ses conclusions, « De plus Monsieur [L] a adopté, depuis le début de la procédure, une attitude dilatoire (l’assignation au fond dont la nullité est aujourd’hui demandée date pour mémoire du 14 avril 2017, soit il y a plus de deux) et il provoque tout type d’incident pour retarder l’issue de la procédure. »

– Débouté en conséquence M. [Y] [L] de sa demande de dommages et intérêts formulée sur ce point,

– Dit n’y avoir lieu à statuer sur la fin de recevoir tirée de la prescription prévue en matière de diffamation,

– Débouté M. [Y] [L] de sa demande de communication de pièces portant sur les documents prouvant l’existence des membres de la commission prévue à l’article 24 de la loi du 3 juillet 1985 (article L.214-4 du code de la propriété intellectuelle) et le fait que la commission ait pu valablement délibérer conformément aux dispositions de l’article 5 du décret n° 86-537 du 14 mars 1986 (article R.214-5 du code de la propriété intellectuelle),

– Rejeté l’exception de nullité de l’assignation délivrée par la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce tirée de son défaut de capacité à agir,

– Rejeté la fin de non-recevoir soulevée par M. [Y] [L] tirée du défaut d’intérêt et de qualité à agir de la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce,

– Constaté que la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce n’agit pas sur le fondement de la rémunération équitable,

– Dit en conséquence sans objet l’exception d’irrecevabilité sur ce point par M. [Y] [L],

– Dit que le dépôt de la marque française verbale « SPRE » n°4284783 le 04 juillet 2016 en classe 35,36 et 45, et de la marque française semi-figurative « SPRE » n° 4284792 le 04 juillet 2016 en classe 35, 36 et 42 n’est pas frauduleux,

– Débouté M. [Y] [L] de ses demandes tendant à annuler le dépôt des marques française verbale « SPRE » n°4284783 et semi-figurative « SPRE » n° 4284792,

– Dit que la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce est recevable, en tant que titulaire, à agir sur le terrain du droit des marques concernant la marque française verbale « SPRE » n°4284783 déposée le 04 juillet 2016 en classe 35,36 et 45, et la marque française semi-figurative « SPRE » n° 4284792 déposée le 04 juillet 2016 en classe 35, 36 et 42,

– Dit qu’en reproduisant la marque verbale « SPRE » n° 4284792 et n° 4284783 sur le site Internet http://www. [L].com/ au travers de ses codes sources, M. [Y] [L] a commis des actes de contrefaçon à l’encontre de la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce,

– Dit que la SPRE est recevable à agir à l’encontre de M. [Y] [L] s’agissant des faits imputés sur les pages Facebook « SPRE » et « Ne payez plus la SPRE »,

– Dit qu’en reproduisant la marque semi-figurative n°4284792 sur les pages Facebook « SPRE » et « Ne payez plus la SPRE » M. [Y] [L] a commis des actes de contrefaçon à l’encontre de la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce,

– Déclaré recevable la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce à agir sur le terrain du droit d’auteur,

– Dit que le logo utilisé par la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce est protégeable au titre du droit d’auteur,

– Débouté M. [Y] [L] de sa demande tendant à écarter des débats la pièce n°9 communiquée en demande,

– Dit qu’en reproduisant le logo de la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce sur les pages Facebook « SPRE » et « Ne payez plus la SPRE », M. [Y] [L] a commis des actes de contrefaçon de ses droits d’auteur au détriment de la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce,

– Dit que certains des propos tenus par M. [Y] [L] sur les activités de la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce sont constitutifs de faits de dénigrement,

– Interdit à M. [Y] [L] de faire usage de la marque verbale SPRE n°4284792 dans les codes sources de son site internet http://www. [L].com/ et de faire usage de la marque semi-figurative SPRE n°4284792 sur tout support ou média et notamment sur son site internet et sur la page Facebook « ne payer plus la SPRE », sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard et par support ou média passé un délai de 8 jours suivants la signification du présent jugement, l’astreinte courant sur un délai de 6 mois,

– Interdit à M. [Y] [L] de faire usage du logo de la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce sur tout support ou média et notamment sur toutes pages Facebook administrées par lui, sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard et par support ou média passé un délai de 8 jours suivants la signification du présent jugement,

– Enjoint à M. [Y] [L] de supprimer de son site Internet http://www. [L].com et de la page Facebook « Ne payez plus la SPRE » les propos qualifiés de dénigrement à l’encontre de la SPRE sous astreinte provisoire de 150 euros par jour de retard dans un délai de 8 jours à compter de la signification du présent jugement,

– Condamné M. [Y] [L] à publier un communiqué sur son site internet http://www. [L].com/, dans les termes suivants :

« Par décision en date du 26 mars 2020, le Tribunal Judiciaire de Lille a condamné M. [Y] [L] pour des faits de contrefaçon et de dénigrement au préjudice de la SPRE »,

– Débouté M. [Y] [L] de sa demande d’annulation des mesures d’interdictions prononcées par l’ordonnance de référé du 16 mars 2017,

– Débouté M. [Y] [L] de ses demandes reconventionnelles de dommages et intérêts au titre de l’abus du droit d’agir en justice,

– Condamné M. [Y] [L] à verser à la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce la somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamné M. [Y] [L] au paiement des frais et dépens de l’instance, en ce compris les coûts des procès-verbaux de constat pour une somme de 2.992,91 euros dont distraction au profit de la SELARL Altana,

– Ordonné l’exécution provisoire du présent jugement.

2. Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

2.1

– Dit que le Tribunal de grande instance de Lille n’est pas compétent pour statuer sur les demandes formulées par la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce s’agissant des faits la publicité trompeuse imputés à M. [Y] [L]

– Renvoyé la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce à mieux se pourvoir sur ce point ;

Et statuant à nouveau :

– Se déclarer compétent pour statuer sur les demandes formulées par la SPRE concernant les faits de publicité trompeuses commis par Monsieur [L] ;

– Juger que Monsieur [L] a commis des actes de publicité trompeuse, renforçant le caractère fautif des actes de dénigrement commis à l’égard de la SPRE.

2.2

– Dit que les propos suivants : » C’est au contraire la SPRE qui pourrait être pénalement poursuivie sur le fondement de la contrefaçon puisqu’elle prélève des sommes qu’elle ne redistribue que partiellement aux artistes et aux producteurs et une part minime de ces sommes va aux vrais producteurs et artistes pour lesquels cette rémunération a été créée, » mentionnés par la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce dans son assignation sont susceptible de constituer à la fois une diffamation et un dénigrement,

– Annulé en conséquence l’assignation délivrée par la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce contre M. [Y] [L] le 14 avril 2017 mais uniquement en ce qu’elle porte sur ces propos, sans avoir repris notamment l’ensemble des mentions requises par la loi du 29 juillet 1881,

Et statuant à nouveau :

– Juger que les propos suivants « C’est au contraire la SPRE qui pourrait être pénalement poursuivie sur le fondement de la contrefaçon puisqu’elle prélève des sommes qu’elle ne redistribue que partiellement aux artistes et aux producteurs et une part minime de ces sommes va aux vrais producteurs et artistes pour lesquels cette rémunération a été créée, » ne sont pas susceptibles de constituer une diffamation,

– Juger qu’il n’y a pas lieu à annulation, même partielle de l’assignation du 14 avril 2017, celle-ci n’étant pas soumise au régime de la loi du 29 juillet 1881,

– Juger que ces propos sont constitutifs d’actes de dénigrement.

2.3

– Débouté la Société Pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce de ses demandes de dommages et intérêts au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ;

Et statuant à nouveau :

– Dire et juger que l’utilisation faite de son nom commercial et de son nom de domaine sont constitutifs de faits de concurrence déloyale et parasitaire ;

– Condamner Me [Y] [L] à verser une somme de 25 000 euros (vingt cinq mille euros) à la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire ;

2.4

– Condamné M. [Y] [L] à verser une somme de 8 000 euros à la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, en qualité de titulaire des marques verbale et semi-figurative « SPRE » ;

– Condamné M. [Y] [L] à verser une somme de 4 000 euros à la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de droit d’auteur sur le logo « SPRE » sur lequel elle détient les droits ;

– Condamné M. [Y] [L] à verser à la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice de désorganisation subi et de dénigrement,

Et statuant à nouveau :

– Condamner Me [Y] [L] à verser une somme de 25 000 euros (vingt cinq mille euros) à la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, en qualité de titulaire des marques verbale et semi-figurative « SPRE » ;

– Condamner Me [Y] [L] à verser une somme de 15 000 euros (quinze mille euros) à la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce en réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon de droit d’auteur sur le logo « SPRE » sur lequel la demanderesse détient les droits ;

– Condamner Me [Y] [L] au paiement d’une somme de 15 000 euros (quinze mille euros) en réparation du préjudice de désorganisation subi par elle ;

– Condamner Me [Y] [L] au paiement d’une somme de 59 800 euros (cinquante neuf mille huit cent euros) à la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce en réparation du préjudice de dénigrement dont elle est victime ;

3. En tout état de cause :

3.1 Concernant l’ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Lille du 7 février 2019 :

Confirmer l’ordonnance du juge de la mise en état du 7 février 2019, en ce qu’elle a :

– Dit n’y avoir lieu, au stade de la mise en état à l’annulation de l’assignation délivrée par la SPRE à l’encontre de M. [L], s’agissant de seuls faits de dénigrement invoqués ne nécessitant pas de respecter le formalisme édicté par la loi du 29 juillet 1881.

– Débouté M. [Y] [L] de sa demande de nullité de l’assignation pour défaut de capacité à agir de la SPRE,

– Débouté M. [Y] [L] de sa demande dommages et intérêts,

– Débouté les parties de leurs demandes formulées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Renvoyé la présente affaire à l’audience de mise en état du 1er mars 2019 pour conclusion au fond à Maître Charbonnel,

– Réservé le paiement des dépens de la procédure d’incident.

3.2 Concernant la recevabilité de l’action de la SPRE sur le fondement de ses marques, enregistrées en classe 45

– Débouter Monsieur [L] sa demande relative à l’irrecevabilité de l’action de la SPRE sur le fondement de ses marques n°4284792 et n°4284783 en ce qu’elles ont été déposées en classe 45.

3.3 Concernant la publication d’un communiqué

– Condamner Me [Y] [L] à publier un communiqué sur la page d’accueil de son site internet http://www. [L].com/, sur toute page Facebook administrée par Me [Y] [L], ainsi que dans la revue LA LETTRE DE NODULA éditée par Me [Y] [L], dans les termes suivants :

« Par décision en date du –, la Cour d’appel de Douai a confirmé le jugement du 26 mars 2020 en ce qu’il a condamné Me [Y] [L] pour s’être livré à des actes de contrefaçon, de dénigrement et de publicité trompeuse au préjudice de la SPRE, notamment en appelant les établissements qui sont assujettis au paiement de la rémunération équitable à cesser de régler cette rémunération prévue par l’article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle ».

3.4 Concernant l’article 700 et les dépens en cause d’appel

– Condamner Me [Y] [L] à payer en cause d’appel à la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable la somme de 20 000 euros (vingt mille euros) sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner Me [Y] [L] aux entiers dépens, qui seront recouvrés par la SELARL Altana, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie expressément à leurs conclusions ci-dessus visées.

L’ordonnance de clôture a été prise le 13 décembre 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I – Sur l’étendue de l’appel

Monsieur [L] ne sollicite pas dans le dispositif de ses conclusions l’infirmation de l’ordonnance du juge de la mise en état du 7 février 2019 dont il a fait appel. Celle-ci sera dès lors confirmée.

Monsieur [L] ne sollicite pas dans le dispositif de ses conclusions l’infirmation des chefs du jugement du 26 mars 2020 suivants dont il a fait appel:

– dit que les propos mentionnés dans les écritures de la SPRE ne sont pas diffamatoires et débouter Monsieur [L] de sa demande de dommages et intérêt formulé sur ce point

-débouté M. [Y] [L] de sa demande de communication de pièces portant sur les documents prouvant l’existence des membres de la commission prévue à l’article 24 de la loi du 3 juillet 1985 (article L.214-4 du code de la propriété intellectuelle) et le fait que la commission ait pu valablement délibérer conformément aux dispositions de l’article 5 du décret n° 86-537 du 14 mars 1986 (Article R.214-5 du code de la propriété intellectuelle),

-rejeté l’exception de nullité de l’assignation délivrée par la SPRE tirée de son défaut de capacité à agir,

-rejeté la fin de non recevoir soulevée par M. [Y] [L] tirée du défaut d’intérêt et de qualité à agir de la SPRE,

-constaté que la SPRE n’agit pas sur le fondement de la rémunération équitable,

-dit en conséquence sans objet l’exception d’irrecevabilité sur ce point par M. [Y] [L],

-débouté M. [Y] [L] de sa demande tendant à écarter des débats la pièce n°9

communiquée en demande.

Ils seront donc confirmés.

Par ailleurs, si Monsieur [L] sollicite l’infirmation du jugement du 26 mars 2020 en ce qu’il a dit que le dépôt de la marque française verbale ‘SPRE’ n°4284783 le 04 juillet 2016 en classe 35,36 et 45, et de la marque française semi-figurative ‘SPRE’ n° 4284792 le 04 juillet 2016 en classe 35, 36 et 42 n’était pas frauduleux, il ne sollicite pas l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il l’a débouté de ses demandes tendant à annuler le dépôt des marques française verbale ‘SPRE’ n°4284783 et semi-figurative ‘SPRE’ n° 4284792, et ne forme aucune demande en annulation dans le dispositif de ses conclusions. Ces chefs de jugement seront dès lors confirmés.

Enfin, Monsieur [L] sollicite l’infirmation du jugement du 26 mars 2020 en ce qu’il a :

– dit que la SPRE est recevable, en tant que titulaire, à agir sur le terrain du droit des marques concernant la marque française verbale ‘SPRE’ n°4284783 déposée le 04 juillet 2016 en classe 35,36 et 45, et la marque française semi-figurative ‘SPRE’ n° 4284792 déposée le 04 juillet 2016 en classe 35, 36 et 42,

– dit que la SPRE est recevable à agir à l’encontre de M. [Y] [L] s’agissant des faits imputés sur les pages Facebook ‘SPRE’ et ‘Ne payez plus la SPRE’,

-déclaré recevable la SPRE à agir sur le terrain du droit d’auteur.

Néanmoins, il ne demande pas dans le dispositif de ses conclusions à ce que la SPRE soit déclarée irrecevable en ses demandes. Ces chefs de jugement seront dès lors confirmés.

De son côté, la SPRE n’a pas interjeté appel du chef du jugement l’ayant déboutée de sa demande au titre de sa demande de contrefaçon de sa marque semi figurative SPRE n° 4284792 par Monsieur [L] sur son site Internet et dans les codes sources.

Elle n’a également pas interjeté appel du chef de jugement l’ayant déboutée de ses demandes en contrefaçon au titre de la marque verbale SPRE, n° 4284783, au titre des pages Facebook.

II- Sur la nullité de l’assignation

Monsieur [L] sollicite l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il a annulé l’assignation délivrée par la SPRE à son encontre uniquement en ce qu’elle porte sur les propos suivants, sans avoir repris notamment l’ensemble des mentions requises par la loi du 29 juillet 1881 : ‘ C’est au contraire la SPRE qui pourrait être pénalement poursuivie sur le fondement de la contrefaçon puisqu’elle prélève des sommes qu’elle ne redistribue que partiellement aux artistes et aux producteurs et une part minime de ces sommes va aux vrais producteurs et artistes pour lesquels cette rémunération a été créée’ .

Il demande à la cour d’annuler l’assignation dans sa totalité estimant que, sous couvert de dénigrement, la SPRE lui reproche des faits devant être qualifiés de diffamation et que l’assignation ne respecte pas le formalisme édicté par la loi de 1881, à peine de nullité.

L’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 dispose que :

«La citation précisera et qualifiera le fait incriminé, elle indiquera le texte de loi applicable à la poursuite.

Si la citation est à la requête du plaignant, elle contiendra élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie et sera notifiée tant au prévenu qu’au ministère public.

Toutes ces formalités seront observées à peine de nullité de la poursuite. »

L’article 29 de la même loi précise que : « Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés.

Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait est une injure. »

Le dénigrement consiste dans la divulgation par une personne d’une information de nature à jeter le discrédit sur un produit commercialisé par une autre personne, à moins que l’information en cause ne se rapporte à un sujet d’intérêt général et repose sur une base factuelle suffisante, sous réserve qu’elle soit exprimée avec une certaine mesure.

En l’espèce, Monsieur [L] considère que les propos suivants qu’il a publiés et qui sont repris dans l’assignation délivrée par la SPRE relèvent d’une action en diffamation et non d’un acte de dénigrement :

« Au 8 janvier 2016, c’est plus de 2500 commerçants qui ont cessé de payer la SPRE sur le conseil de Maître [Y] [L]

Rémunération équitable

Discothèques – Commerces diffusant de la musique – radio – TV, vous pouvez obtenir le remboursement des sommes payées à la SPRE sur les cinq dernières années. (1)

Septembre 2015

Le cabinet [Y] [L] a développé depuis plusieurs années des argumentaires qui permettent de ne pas payer les sommes réclamées par la société pour la perception de la rémunération équitable de la communication au public des phonogrammes du commerce, se présentant sous le signe SPRE.

La réglementation relative à la rémunération équitable dont se prévaut la SPRE est critiquable tant sur le plan légal que réglementaire, et le fait de ne pas payer les sommes réclamées par cette société commerciale ne saurait en conséquence sérieusement fonder une quelconque condamnation au titre de la contrefaçon.

C’est au contraire la SPRE qui pourrait être pénalement poursuivie sur le fondement de la contrefaçon puisqu’elle prélève des sommes qu’elle ne redistribue que partiellement aux artistes et aux producteurs et une part minime de ces sommes va aux vrais producteurs et artistes pour lesquels cette rémunération a été créée.

Le cabinet [Y] [L] a diligenté en avril 2015 plusieurs actions devant le tribunal de grande instance de Paris qui devraient aboutir à l’annulation de l’ensemble de la réglementation invoquée par la SPRE à l’appui de ses demandes.

Seules les entreprises qui auront diligenté une action avant les décisions d’annulation pourront bénéficier d’un remboursement des sommes payées sur les cinq années précédant l’introduction de leur demande.

Le cabinet [Y] [L] propose un tarif forfaitaire en fonction de la nature des sommes récupérées avec un intéressement aux résultats complémentaires. Une convention formalise cet accord.

Ces argumentaires peuvent être utilisés par l’ensemble des utilisateurs de phonogrammes du commerce dans des lieux publics et concernent l’ensemble des décisions réglementaires invoquées par la société pour la perception de la rémunération équitable des phonogrammes du commerce (grande distribution’radio’TV’commerce’restaurant à ambiance musicale’discothèque).

[Y] [L] a publié en janvier 2010 un premier article indiquant qu’il était possible de ne pas payer la SPRE. Cet article est en ligne depuis cette date et n’a fait l’objet ni d’un droit de réponse, ni d’une quelconque action en diffamation.

La teneur de cet article n’a jamais été contestée.

(1) Attention toute action en justice comporte un aléa. L’avocat est tenu à une obligation de moyens et ne peut jamais garantir le succès d’une action qu’il intente pour son client. De surcroît, cette récupération des sommes payées par la SPRE n’est possible que si l’action est intentée avant la décision du conseil d’État qui devrait annuler l’ensemble de la réglementation. La SPRE n’est pas pressée de voir cette instance aboutir et fait traîner la procédure. Les premières décisions sont attendues pour le printemps 2016. »

« Nous disposons d’argumentaires permettant aux entreprises de ne pas payer ces redevances aux organismes français qui prétendent être en mesure de la percevoir (SPRE et COPIE France)

grâce à cette action, les artistes et producteurs pourront enfin percevoir la rémunération qui a été organisée à leur profit par la loi de 1985. »

Ces propos peuvent être qualifiés de dénigrement en ce qu’il ont pour but de dénigrer non pas la personne de la SPRE mais ses services de collecte. En effet, d’une part ils sous-entendent explicitement que la perception de la rémunération équitable telle qu’organisée par la SPRE ne se fait pas au profit des seules personnes qui devraient en bénéficier et, d’autre part, ils remettent en cause la validité de la réglementation servant de base à la perception de la rémunération équitable, en laissant clairement entendre que des décisions de justice vont être rendues afin de les annuler et qu’elle est contraire au droit positif.

S’agissant du paragraphe « C’est au contraire la SPRE qui pourrait être pénalement poursuivie sur le fondement de la contrefaçon puisqu’elle prélève des sommes qu’elle ne redistribue que partiellement aux artistes et aux producteurs et une part minime de ces sommes va aux vrais producteurs et artistes pour lesquels cette rémunération a été créée », il ne peut être lu isolément mais doit être mis en relation avec l’ensemble des faits reprochés à la SPRE, qui ne sont pas relatifs à sa personne elle-même mais à la façon dont cet organisme gère ses services et perçoit la redevance.

Ces propos doivent donc être qualifiés de dénigrement et non de diffamation.

Le jugement entrepris sera dès lors infirmé en ce qu’il a dit que ces propos étaient susceptibles de constituer à la fois une diffamation et un dénigrement et a annulé l’assignation délivrée par la SPRE en ce qu’elle portait sur ces propos.

Les propos reprochés à Monsieur [L] ne pouvant recevoir la qualification de diffamation, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription prévue en matière de diffamation.

L’exception de nullité de l’assignation ayant été rejetée, la demande de Monsieur [L] en dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par l’engagement de la procédure abusive et déloyale, consécutive à cette annulation, laquelle a par ailleurs été reprise dans le dispositif de ses conclusions sans toutefois être développée dans ses motifs, sera également rejetée. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

III- Sur l’exception d’incompétence soulevée par Monsieur [L] au profit du conseil de l’ordre du barreau de Paris

La SPRE sollicite l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il a dit que le tribunal de grande instance de Lille n’était pas compétent pour statuer sur les demandes s’agissant des faits de publicité trompeuse imputés à Monsieur [L] et l’a renvoyé à mieux se pourvoir sur ce point.

À cet égard, elle fait valoir que cette exception d’incompétence est irrecevable pour ne pas avoir été soulevée par Monsieur [L] avant toute défense au fond. Elle ajoute par ailleurs que ces faits ne relèvent pas de la compétence du conseil de l’ordre des avocats du barreau de Paris dans la mesure où elle-même n’agit pas en tant que client contre son avocat mais en tant que tiers, victime des agissements d’un professionnel du droit. Elle en conclut qu’il s’agit donc de statuer sur la responsabilité de Monsieur [L] dans le cadre des fautes civiles qu’il a commises, en appliquant les règles de droit commun.

En l’espèce, comme l’ont relevé les premiers juges, cette exception de procédure n’a pas été soulevée in limine litis avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir ou de devant le juge de la mise en état alors qu’un premier incident avait été tranché et donc sans respecter les articles 74 et 789 du code de procédure civile. Monsieur [L] est donc irrecevable à soulever cette exception d’incompétence devant le juge du fond.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

IV’ Sur les demandes de la SPRE formées au titre de la contrefaçon de marques

Comme il a été précédemment relevé, si Monsieur [L] invoque, dans le corps de ses conclusions, l’irrecevabilité des demandes concernant les pages Facebook ainsi que l’irrecevabilité des demandes fondées sur les marques et le logo SPRE, il ne reprend pas ces demandes dans le dispositif de ses conclusions, de sorte que la cour n’en est pas saisie.

Sur le fond, il soutient que les usages du terme SPRE en qualité d’enseigne, antérieurs au dépôt des marques, ne peuvent être poursuivis sur le terrain de la contrefaçon, que la SPRE ne justifie pas de la notification de sa demande d’enregistrement et que le dépôt du terme SPRE est frauduleux. Par ailleurs, il conteste avoir reproduit sur les pages Facebook la marque semi figurative n° 4284792 et avoir à ce titre commis des faits de contrefaçon. S’agissant du logo, il soulève l’absence d’originalité de ce dernier.

Si Monsieur [L] soulève l’absence de caractère distinctif du terme SPRE et sollicite l’annulation des marques pour les services de perception et de répartition de rémunération de la classe 36 dans le corps de ses conclusions, il ne forme toutefois pas une telle demande dans son dispositif, de sorte que la cour n’en est pas saisie.

Il résulte des dispositions de l’article L713-2 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version applicable au présent litige, que :

« Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire :

a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, même avec l’adjonction de mots tels que : « formule, façon, système, imitation, genre, méthode », ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement ;

b) La suppression ou la modification d’une marque régulièrement apposée. »

En l’espèce, la SPRE agit sur le fondement de :

‘la marque française verbale SPRE n° 4284783 déposée le 4 juillet 2016 dans les classe 35, 36 et 45

‘la marque semi figurative SPRE n° 4284792 déposée le 4 juillet 2016 dans les classe 35, 36 et 45.

– Sur les droits antérieurs revendiqués par Monsieur [L] sur le signe SPRE avant le dépôt de la marque

Il résulte des dispositions de l’article L713-6 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version applicable au présent litige, que :

« L’enregistrement d’une marque ne fait pas obstacle à l’utilisation du même signe ou d’un signe similaire comme :

a) Dénomination sociale, nom commercial ou enseigne, lorsque cette utilisation est soit antérieure à l’enregistrement, soit le fait d’un tiers de bonne foi employant son nom patronymique ;

[‘]

Toutefois, si cette utilisation porte atteinte à ses droits, le titulaire de l’enregistrement peut demander qu’elle soit limitée ou interdite. »

Monsieur [L] se prévaut de ces dispositions en expliquant qu’en ayant utilisé le terme SPRE dans le titre d’une page consacrée à la rémunération équitable depuis 2011 et dans les balises du site Internet contenant cette page depuis 2015, il justifie d’un usage de ces signes antérieur à la publication de la demande d’enregistrement des marques SPRE.

Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables au présent litige dans la mesure où Monsieur [L] n’a pas utilisé le terme SPRE en tant que dénomination sociale, nom commercial ou enseigne. Ce moyen sera dès lors rejeté.

– Sur le défaut de la notification de la demande d’enregistrement

Monsieur [L] soutient que dans la mesure où la SPRE ne lui a jamais notifié sa demande d’enregistrement et qu’il justifie de droits antérieurs, la SPRE n’est pas recevable à fonder des demandes à son encontre sur la base de son nom commercial, son signe ou son logo.

Il se prévaut des dispositions de l’article L 716-2 du code de la propriété intellectuelle aux termes duquel « les faits antérieurs à la publication de la demande d’enregistrement de la marque ne peuvent être considérés comme ayant porté atteinte aux droits qui y sont attachés. Cependant, pourront être constatés et poursuivis les faits postérieurs à la notification faite au présumé contrefacteur d’une copie de la demande d’enregistrement. Le tribunal saisi sursoit à statuer jusqu’à la publication de l’enregistrement. »

Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables dans la mesure où Monsieur [L] ne peut soutenir disposer de droits antérieurs à la SPRE dans l’utilisation de ces signes et où il n’est pas contesté pour les marques en cause que les demandes d’enregistrement ont été publiées. Le moyen sera donc également rejeté.

– Sur l’usage des marques de la SPRE sur le site Internet et dans les codes sources par Monsieur [L]

En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats que Monsieur [L] a utilisé, dans la balise titre de la page d’accueil de son site Internet, le terme SPRE en l’associant au nom de son cabinet d’avocat : le premier résultat qui apparaît lorsque l’on saisit « [Y] [L] » dans le moteur de recherche Google est « SPRE cabinet d’avocats [Y] [L] ». Cet usage implique d’utiliser le signe SPRE non comme une simple reprise d’un sigle mais bien comme une marque verbale à des fins de mots-clés pour diriger l’internaute vers le site du cabinet d’avocat de Monsieur [L].

Cet usage, par ailleurs non autorisé par la SPRE, s’est déroulé dans la vie des affaires, Monsieur [L] associant le signe SPRE au nom de son cabinet pour attirer d’éventuels consommateurs d’attention moyenne recherchant des informations sur ce thème vers son cabinet, et donc pour un usage identique aux services pour lesquels la marque est enregistrée, en l’espèce ceux de la classe 45 (services juridiques ; services d’élaboration de documents juridiques ; recherche légale), sans qu’il soit nécessaire de vérifier le risque de confusion s’agissant d’une reproduction à l’identique.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a considéré que par cet usage de la marque verbale SPRE, Monsieur [L] s’était rendu coupable de faits de contrefaçon.

-Sur l’usage des marques de la SPRE sur les pages Facebook créées pour promouvoir l’activité de Monsieur [L]

La première page Facebook, intitulée « SPRE Facebook logo », a fait l’objet d’un procès-verbal de constat réalisé le 22 juillet 2016. Il apparaît en page en-tête du site en pleine page la marque semi figurative déposée par la SPRE puis sur la page suivante la mention « un contentieux avec la SPRE ‘ N’hésitez pas à contacter notre cabinet spécialiste cabinet d’avocats [Y] [L] avocat d’affaires. En juin 2016, c’est plus de 2500 commerçants qui ont cessé de payer la SPRE sur le conseil de Monsieur [Y] [L]. (‘) Contactez-nous pour plus d’informations http: www. [L].com Article-SPRE- 2015htm ».

Le tribunal en a justement déduit que ces mentions permettaient d’attribuer à Monsieur [L] la création de cette page pour les besoins de son activité.

Sur cette page figure le signe semi figuratif de la SPRE n° 4284792 pour désigner les services juridiques proposés par le cabinet de Monsieur [L]. Ceux-ci sont identiques à ceux visés dans l’enregistrement de la marque en cause en classe 45 de sorte que le tribunal en a déduit à juste titre que par cet usage Monsieur [L] s’était rendu coupable de contrefaçon de la marque semi figurative de la SPRE. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

La seconde page Facebook, intitulée « Ne payez plus la SPRE », a fait l’objet d’un procès-verbal de constat établi le 22 septembre 2016. Monsieur [L] ne conteste pas en avoir été le co-administrateur.

Or, la marque semi figurative de la SPRE figure de manière visible à plusieurs reprises sur la même page dans l’optique manifeste de donner une apparence de page officielle rattachée à la SPRE afin de mieux critiquer son activité et le bien-fondé des redevances perçues et de promouvoir l’activité de Monsieur [L]. Monsieur [L] a donc reproduit la marque semi figurative dont la SPRE est titulaire pour promouvoir et désigner des services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement, en l’espèce ceux de la classe 45. Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu’il a dit qu’en reproduisant à plusieurs reprises sur cette page Facebook la marque semi figurative n° 4284792, Monsieur [L] avait commis des actes de contrefaçon à l’encontre de la SPRE.

V’Sur les demandes de la SPRE au titre de la contrefaçon de droits d’auteur

Il résulte des dispositions de l’article L113-1 du code de la propriété intellectuelle que « la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l »uvre est divulguée. »

Par ailleurs, l’article L122 -4 du même code dispose que « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droits ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque. »

Il appartient à celui qui revendique la protection au titre du droit d’auteur de démontrer l’originalité de l »uvre en cause, et donc d’apporter la preuve de l’existence d’un apport original.

L’originalité s’entend ainsi comme le reflet de la personnalité du créateur, l »uvre devant se distinguer du domaine public antérieur et porter la trace d’un effort personnel de création et de recherche esthétique dans la combinaison des éléments caractéristiques, ou encore présenter une physionomie propre et nouvelle.

Néanmoins, lorsque cette protection est contestée en défense, l’originalité d’une ‘uvre doit être explicitée par celui qui s’en prétend auteur, seul ce dernier étant à même d’identifier les éléments traduisant sa personnalité.

La SPRE soutient qu’en reproduisant à l’identique son logo sur les pages Facebook « SPRE » et « Ne payez plus la SPRE », Monsieur [L] a porté atteinte aux droits d’auteur dont elle est titulaire, conformément à la présomption légale de l’article L113 -1 du code de la propriété intellectuelle.

Monsieur [L] soulève l’absence d’originalité du logo de la SPRE en faisant valoir que ce dernier ne révèle pas l’empreinte de la personnalité de son auteur ou en tout cas un effort créatif suffisant pour être accessible à la protection par le droit d’auteur.

En l’espèce, la SPRE soutient que « l’originalité de ce logo est caractérisée notamment par la lettre ‘ e ‘ légèrement penchée, associée à deux demi-cercles entourant le ‘e’ utilisant le code Pantone 711, en dégradé de couleur rouge du foncé vers le clair.

L’auteur a en effet entendu mettre l’accent sur la lettre « e » de « équitable », comme étant une des valeurs fondamentales de la SPRE.

Ainsi, cette lettre est particulièrement mise en avant du fait du choix de couleur particulièrement tranchant et que les ondes représentées trouvent leur point de départ dans cette lettre.

L’impression ainsi conférée est celui du relief d’un signal d’émission dans les deux demi-cercles, figurant de façon originale les ondes sonores émises lors de la diffusion notamment d’un phonogramme.

L’auteur a également voulu que la lettre « e » et les ondes sonores qui partent de cette lettre soient légèrement coupées, pour symboliser « la part » prélevée sur la diffusion de musique, comme s’il s’agissait d’un camembert, symbole original de la mission affectée à la SPRE en vertu de la loi. » »

Dans ces conditions, le tribunal en a déduit à juste titre que le graphisme épuré, le choix de couleurs tranchantes mettant en avant la symbolique du signe et particulièrement du « e », associé au demi-cercle jouant sur une couleur rouge marquée, puis à deux demi-cercles figurant des ondes, constituaient une combinaison d’éléments originale et présentant un caractère esthétique et ornemental certain. Il en a conclu que ce logo apparaissait comme particulièrement créatif tant sur le plan visuel que symbolique et refléter ainsi la personnalité de son auteur qui avait réalisé autant de choix arbitraires pour procéder à sa conception et qu’il était de ce fait protégeable au titre du droit d’auteur.

Or, Monsieur [L] a reproduit intégralement ce logo original à plusieurs reprises sur les deux pages Facebook précitées. Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu’il l’a dit qu’il s’était rendu coupable de faits de contrefaçon de droit d’auteur au détriment de la SPRE.

VI’Sur les demandes de la SPRE au titre du dénigrement et de la publicité trompeuse

Même en l’absence d’une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l’une, d’une information de nature à jeter le discrédit sur les produits ou prestations de service de l’autre constitue un acte de dénigrement, à moins que l’information en cause ne se rapporte à un sujet d’intérêt général et repose sur une base factuelle suffisante, et sous réserve qu’elle soit exprimée avec une certaine mesure.

La base factuelle suffisante doit s’apprécier au regard de la gravité des allégations en cause.

La SPRE considère comme dénigrant les propos suivants :

« au 8 janvier 2016, c’est plus de 2500 commerçants qui ont cessé de payer la SPRE sur le conseil de Maître [Y] [L]. »

« Au 8 janvier 2017, c’est plus de 2600 commerçants qui ont cessé de payer la SPRE sur le conseil de Maître [Y] [L]. »

« Vous pouvez obtenir le remboursement des sommes payées à la SPRE sur les cinq dernières années. »

« C’est au contraire la SPRE qui pourrait être pénalement poursuivie sur le fondement de la contrefaçon puisqu’elle prélève des sommes qu’elle ne redistribue que partiellement aux artistes et aux producteurs et une part minime de ces sommes va aux vrais producteurs et artistes pour lesquels cette rémunération a été créée. »

« Une plainte a été déposée auprès du tribunal de grande instance de Paris contre la SPRE, ses associés, ses gérants, et les responsables du ministère de la culture auxquels il est reproché d’être associés au sein d’un certain nombre de structures qu’ils cogénèrent et cofinancent. Cette plainte vise notamment les délits de corruption et d’abus d’autorité [‘]. Cette plainte accuse également la SPRE du délit de contrefaçon en bande organisée prévu et réprimé par l’article L355-4 du code de la propriété intellectuelle. »

« La réglementation relative à la rémunération équitable dont se prévaut la SPRE est critiquable tant sur le plan légal que réglementaire, et le fait de ne pas payer les sommes réclamées par cette société commerciale ne saurait en conséquence sérieusement fonder une quelconque condamnation au titre de la contrefaçon. »

« Le cabinet [Y] [L] a diligenté en avril 2015 plusieurs actions devant le tribunal de grande instance de Paris qui devraient prochainement aboutir à l’annulation de l’ensemble de la réglementation invoquée par la SPRE à l’appui de ses demandes. »

« Nous disposons d’argumentaires permettant aux entreprises de ne pas payer ces redevances aux organismes français qui prétendent être en mesure de l’apercevoir ».

« Grâce à cette action, les artistes et producteurs pourront enfin percevoir la rémunération qui ait été organisée à leur profit par la loi de 1985. »

Monsieur [L] fait valoir que ces propos ne sauraient être qualifiés de dénigrants d’une part dans la mesure où, le dénigrement relevant de la concurrence déloyale, il faut que l’entreprise dénigrée soit une entreprise industrielle et commerciale, que la critique vise les produits les services ou les prestations de cette entreprise. Or, il soutient que la SPRE n’est pas concernée par le droit de la concurrence dans la mesure où, n’étant pas une entreprise, elle n’a pas de clientèle et s’adresse à des usagers. D’autre part, il fait valoir que les propos retenus par le tribunal comme dénigrants sont en réalité fondés, aucune décision de justice n’ayant contredit ses affirmations, et que les actes de la SPRE sont en réalité des voies de fait ou des abus de pouvoir et doivent être considérés comme des actes inexistants.

En l’espèce, la SPRE, société civile de gestion collective, fournit des services consistant dans la perception de la rémunération équitable au profit des artistes interprètes et producteurs de phonogrammes. Ce sont ces services qui sont directement visés par les propos de Monsieur [L].

Or, les actes de dénigrement ne sauraient se limiter à une entreprise industrielle et commerciale. Par ailleurs, l’existence d’une situation de concurrence directe et effective n’est pas une condition de l’action en dénigrement.

Ainsi, les propos de Monsieur [L], qui tendent à promouvoir son activité, ont pour but de dénigrer non pas la personne de la SPRE mais ses services de collecte. En effet, d’une part ils sous-entendent explicitement que la perception de la rémunération équitable telle qu’organisée par la SPRE ne se fait pas au profit des seules personnes qui devraient en bénéficier mais également, d’autre part, ils remettent en cause la validité de la réglementation servant de base à la perception de la rémunération équitable, en laissant clairement entendre que des décisions de justice vont être rendues afin de les annuler et qu’elle est contraire au droit positif.

Monsieur [L] ne justifie pas que ces propos reposent sur une base factuelle suffisante, aucune décision de justice ne lui ayant à ce jour donné raison. Ils sont donc constitutifs de propos dénigrants.

Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu’il a retenu que Monsieur [L] avait tenu sur son site Internet des propos dénigrants à l’encontre de la SPRE.

VII’sur les demandes de la SPRE au titre de la concurrence déloyale et parasitaire

L’action en concurrence déloyale peut s’exercer concurremment à l’action en contrefaçon, lorsque sont établis des actes ou des faits distincts de la contrefaçon. Elle se définit comme l’ensemble des agissements fautifs commis dans l’exercice d’une activité commerciale ou non, de nature à engager la responsabilité civile de son auteur, ces agissements devant tendre soit à attirer la clientèle, soit à la détourner d’un concurrent de manière fautive.

Le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer indûment profit de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.

La SPRE fait valoir que la reproduction de son nom commercial et de son nom de domaine par Monsieur [L] vise à tirer profit de la renommée de son nom commercial afin de promouvoir ses propres services cherchant à créer une confusion dans l’esprit du public en présentant l’apparence de pages officielles de ses services.

Toutefois, le tribunal a justement relevé qu’un individu averti et normalement avisé, à la lecture des annonces de la page d’accueil du site internet de Monsieur [L] et des dépêches Facebook litigieuses qui incitaient clairement à ne pas payer la rémunération réclamée par la SPRE, ne pourrait penser que ces services offerts par le cabinet d’avocat de Monsieur [L] étaient en réalité fournis par le site officiel de la SPRE. Au contraire, le contenu des pages internet ou Facebook démontre leur opposition et la critique à l’encontre des activités de la SPRE.

Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu’il a considéré qu’il ne pouvait être reproché à Monsieur [L] aucun fait de concurrence déloyale ou parasitaire au détriment de la SPRE et a débouté cette dernière de ses demandes à ce titre.

VIII’Sur le préjudice subi par la SPRE

La SPRE sollicite la somme de 25’000 euros au titre de la contrefaçon des marques verbale et semi figurative, 15’000 euros au titre de la contrefaçon du droit d’auteur, 15’000 euros au titre du préjudice de désorganisation et 59’800 euros au titre du dénigrement.

– au titre de la contrefaçon

Il résulte des dispositions de l’article L716-4-10 du code de la propriété intellectuelle, anciennement article L716-14, que :

« Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;

3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée. »

En l’espèce, Monsieur [L] a utilisé les marques verbales et semi figurative SPRE soit à titre de balise titre pour attirer les internautes cherchant des renseignements sur la SPRE vers son site en premier, soit en page d’accueil pour associer la marque semi figurative et le logo protégé au titre du droit d’auteur à ses propres activités.

C’est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu que ces faits avaient permis à Monsieur [L] de profiter de la renommée de la demanderesse, de ses marques et de son logo pour mettre en avant son activité en attirant des internautes à la recherche d’informations générales sur la SPRE vers son cabinet d’avocat tout en banalisant et ternissant l’image de marque de la SPRE.

Il a également relevé que les faits concernant le site Internet et les pages Facebook avaient perduré nonobstant les mesures ordonnées par le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris.

Au vu de ces éléments, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a évalué le préjudice subi par la SPRE à la somme de 8 000 euros s’agissant de la contrefaçon de marques et 4 000 euros s’agissant de la contrefaçon du droit d’auteur.

– au titre du dénigrement et de la désorganisation

Si les campagnes de dénigrement menées par Monsieur [L] ont causé à la SPRE un préjudice s’agissant de l’atteinte à son image, la SPRE ne justifie pas d’un préjudice résultant de la désorganisation de ses services, étant relevé que les frais engendrés dans le cadre des multiples instances en cours introduites par ce dernier au nom de ses clients ont vocation à être examinés dans chacun de ces contentieux particuliers comprenant ainsi les demandes en dommages et intérêts et frais irrépétibles y afférents.

L’absence de paiement de la rémunération équitable par 2 500 commerçants, comme le prétend Monsieur [L] sur son site, n’est par ailleurs pas établie.

Le préjudice d’atteinte à l’image sera évalué à la somme de 10’000 euros en raison de l’ampleur du dénigrement qu’elle a subi.

Le jugement entrepris sera dès lors infirmé en ce qu’il a condamné Monsieur [L] à payer à la SPRE la somme de 10’000 euros au titre du préjudice de désorganisation subi et de dénigrement.

Monsieur [L] sera condamné à payer à la SPRE la somme de 10’000 euros au titre du dénigrement et sera débouté de sa demande formée au titre du préjudice de désorganisation.

IX ‘Sur les demandes de la SPRE au titre des mesures d’interdiction et de publication

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qui concerne les mesures d’interdiction, Monsieur [L] ne justifiant pas de la cessation des atteintes.

La publication, justifiée par l’ampleur de l’atteinte, sera modifiée de la sorte :

« Par décision du 12 mai 2022, la cour d’appel de Douai a confirmé le jugement du tribunal judiciaire de Lille du 26 mars 2020 ayant condamné Monsieur [Y] [L] pour des faits de contrefaçon et de dénigrement au préjudice de la SPRE ».

X’ Sur la demande reconventionnelle de Monsieur [L] en annulation des mesures d’interdiction prononcées par l’ordonnance de référé du 16 mars 2017

Monsieur [L] demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a refusé d’annuler l’ensemble des mesures ordonnées par la juridiction de référé le 16 mars 2017 faute pour la SPRE d’avoir saisi le tribunal au fond dans le délai prescrit par les textes, l’assignation ayant été délivrée le 14 avril 2017 mais enrôlée le 31 mai 2017, soit, selon lui, hors délai.

Il résulte des dispositions de l’article L716-6 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version applicable au présent litige, que :

« Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l’encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon. La juridiction civile compétente peut également ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque les circonstances exigent que ces mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur. Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu’il est porté atteinte à ses droits ou qu’une telle atteinte est imminente.

La juridiction peut interdire la poursuite des actes argués de contrefaçon, la subordonner à la constitution de garanties destinées à assurer l’indemnisation éventuelle du demandeur ou ordonner la saisie ou la remise entre les mains d’un tiers des produits soupçonnés de porter atteinte aux droits conférés par le titre, pour empêcher leur introduction ou leur circulation dans les circuits commerciaux. Si le demandeur justifie de circonstances de nature à compromettre le recouvrement des dommages et intérêts, la juridiction peut ordonner la saisie conservatoire des biens mobiliers et immobiliers du prétendu contrefacteur, y compris le blocage de ses comptes bancaires et autres avoirs, conformément au droit commun. Pour déterminer les biens susceptibles de faire l’objet de la saisie, elle peut ordonner la communication des documents bancaires, financiers, comptables ou commerciaux ou l’accès aux informations pertinentes.

Elle peut également accorder au demandeur une provision lorsque l’existence de son préjudice n’est pas sérieusement contestable.

Saisie en référé ou sur requête, la juridiction peut subordonner l’exécution des mesures qu’elle ordonne à la constitution par le demandeur de garanties destinées à assurer l’indemnisation éventuelle du défendeur si l’action en contrefaçon est ultérieurement jugée non fondée ou les mesures annulées.

Lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte aux droits sont ordonnées avant l’engagement d’une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République. A défaut, sur demande du défendeur et sans que celui-ci ait à motiver sa demande, les mesures ordonnées sont annulées, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés. »

L’article R716-1 du même code ajoute que « le délai prévu au dernier alinéa de l’article L. 716-6 et imparti au demandeur pour se pourvoir au fond par la voie civile ou pénale, ou déposer une plainte auprès du procureur de la République, est de vingt jours ouvrables ou de trente et un jours civils si ce délai est plus long, à compter de la date de l’ordonnance. »

En l’espèce, la SPRE a assigné Monsieur [L] devant le tribunal de grande instance de Paris, se pourvoyant ainsi par la voie civile, par acte d’huissier du 14 avril 2017 alors que l’ordonnance de référé prononçant les mesures d’interdiction a été prise le 16 mars 2017.

C’est donc à juste titre que les premiers juges ont considéré que la SPRE justifiait s’être pourvue au fond par la voie civile dans le délai prévu à l’article précité. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

XI’Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qui concerne les dépens et les frais irrépétibles.

Monsieur [L], qui succombe en appel, sera condamnée aux dépens d’appel et à payer à la SPRE la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort ;

Confirme l’ordonnance d’incident du 7 février 2019 ;

Confirme le jugement du 26 mars 2020 sauf en ce qu’il a :

– dit que les propos suivants : ‘ C’est au contraire la SPRE qui pourrait être pénalement poursuivie sur le fondement de la contrefaçon puisqu’elle prélève des sommes qu’elle ne redistribue que partiellement aux artistes et aux producteurs et une part minime de ces sommes va aux vrais producteurs et artistes pour lesquels cette rémunération a été créée,’ mentionnés par la SPRE dans son assignation sont susceptible de constituer à la fois une diffamation et un dénigrement,

– annulé en conséquence l’assignation délivrée par la SPRE contre M. [Y] [L] le 14 avril 2017 mais uniquement en ce qu’elle porte sur ces propos, sans avoir repris notamment l’ensemble des mentions requises par la loi du 29 juillet 1881,

– dit que le tribunal de grande instance de Lille n’est pas compétent pour statuer sur les demandes formulées par la SPRE s’agissant des faits de publicité trompeuse imputée à Monsieur [L]

– renvoyé la SPRE à mieux se pourvoir sur ce point,

– condamné Monsieur [L] à payer à la SPRE la somme de 10’000 euros au titre du préjudice de désorganisation subi et de dénigrement.

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Déclare irrecevable l’exception soulevée par Monsieur [L] au titre de l’incompétence du tribunal de grande instance de Lille pour statuer sur les demandes formulées par la SPRE s’agissant des faits de publicité trompeuse imputés à Monsieur [L] ;

Déclare recevables les demandes formées par la SPRE au titre des faits de publicité trompeuse ;

Condamne Monsieur [Y] [L] à payer à la SPRE la somme de 10’000 euros au titre du préjudice subi par le dénigrement ;

Condamne Monsieur [Y] [L] à publier un communiqué sur son site Internet http ://www. [L].com/, dans les termes suivants :

« Par décision du 12 mai 2022, la cour d’appel de Douai a confirmé le jugement du tribunal judiciaire de Lille du 26 mars 2020 ayant condamné Monsieur [Y] [L] pour des faits de contrefaçon et de dénigrement au préjudice de la SPRE » ;

Déboute la SPRE de sa demande en dommages et intérêts au titre du préjudice de désorganisation ;

Condamne Monsieur [Y] [L] à payer à la SPRE la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel ;

Condamne Monsieur [Y] [L] aux dépens d’appel.

Le greffierLe président

Anaïs MillescampsCatherine Bolteau-Serre

 


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