Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 11
ARRET DU 01 DECEMBRE 2017
(n° , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 16/12341
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 22 novembre 2011 – Tribunal de Commerce de PARIS – RG 2010011092
Arrêt du 19 septembre 2014 – Cour d’appel de PARIS – RG 12/0435
Arrêt du 30 mars 2016 – Cour de Cassation de PARIS – RG n° X14-28.320
DEMANDEUR AU DÉFÉRÉ
SA BUDGET TELECOM
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Localité 1]
N° SIRET : 422 716 878 (Montpellier)
représentée par Me Sarra JOUGLA YGOUF, avocat postulant du barreau de PARIS, toque: C0875
assistée de Me Gilles BERTRAND, avocat plaidant du barreau de MONTPELLIER
DEFENDEUR AU DÉFÉRÉ
SAS VERIZON FRANCE
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Localité 2]
N° SIRET : 398 517 169 (Nanterre)
représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : K0111
assistée de Me Stéphane COULAUX, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : K0192
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 12 Octobre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Michèle LIS SCHAAL, présidente de la chambre, chargée du rapport
Mme Françoise BEL, présidente de chambre,
M. Gérard PICQUE, magistrat honoraire en charge de fonctions juridictionnelles,
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.
ARRÊT :
– contradictoire,
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Mme Michèle LIS SCHAAL, présidente et par Mme Saoussen HAKIRI, greffier présent lors du prononcé.
Faits et procédure
La société VERIZON FRANCE, opérateur de communications électroniques, a conclu le 18 février 2004 avec la société BUDGET TELECOM, également opérateur de communications électroniques, un contrat cadre pour la mise à dispositions de ses services de télécommunication.
Un avenant du 6 juin 2007 a permis à la société BUDGET TELECOM de proposer des services à valeur ajoutée (SVA) à ses clients. La facturation du service s’établissait comme suit : la société FRANCE TELECOM, opérateur de départ, encaissait le règlement global de l’utilisateur appelant le numéro SVA et rétrocédait une partie du montant perçu à la société VERIZON FRANCE. Cette dernière établissait chaque mois un récapitulatif des communications et des sommes qu’elle reversait à la société BUDGET TELECOM, laquelle lui adressait une facture correspondante.
La société VERIZON FRANCE a alors contesté deux factures envoyées par la société BUDGET TELECOM pour un montant total de 307.819,32 euros.
Par assignation délivrée le 19 janvier 2009 à la société VERIZON FRANCE, la société BUDGET TELECOM a saisi le Tribunal de commerce de Paris d’une demande visant à obtenir le paiement de cette somme.
Par jugement rendu le 22 novembre 2011, le Tribunal de commerce de Paris a :
– dit que la société BUDGET TELECOM était recevable en son action ;
– débouté la société BUDGET TELECOM de toutes ses demandes ;
– condamné la société BUDGET TELECOM au paiement de la somme de 3.000 euros à la société VERIZON FRANCE, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;
– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision ;
condamné la société BUDGET TELECOM aux entiers dépens.
Le Tribunal de commerce de Paris a constaté qu’en application des dispositions de l’article 6.4 de l’avenant du 6 juin 2007, la société VERIZON pouvait légitimement demander l’annulation de factures qui comprenaient des appels provenant de l’étranger. Les premiers juges ont en effet rappelé que les sommes perçues par la société FRANCE TELECOM ne donnaient lieu à un reversement en faveur de la société VERIZON qu’à l’exclusion des appels internationaux. Or ils ont décidé qu’une obligation de restitution ne pouvait exister que pour autant qu’une somme susceptible d’être reversée ait été payée.
La société BUDGET TELECOM a interjeté appel de ce jugement et dans un arrêt rendu le 19 septembre 2014, la Cour d’appel de Paris a :
– confirmé le jugement en ce qu’il a déclaré la société BUDGET TELECOM recevable en la forme ;
– réformé entièrement le jugement pour le surplus et statuant à nouveau ;
– condamné la société VERIZON FRANCE à payer à la société BUDGET TELECOM la somme de 301.819,43 euros TTC, majorés des intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2009 et capitalisation annuelle des intérêts à compter du 14 octobre 2011 dans les conditions de l’article 1154 du code civil ;
– débouté la société BUDGET TELECOM de sa demande de dommages et intérêts et les parties de leur demande respective au titre des frais irrépétibles ;
– condamné la société BUDGET TELECOM aux dépens de première instance et d’appel.
La Cour d’appel de Paris a constaté que les deux factures produites par la société BUDGET TELECOM ne concernaient que la somme totale de 301.819,43 euros TTC et non de 307.819,32 euros TTC. Elle a également constaté que la société VERIZON FRANCE n’avait contesté que la facture du 31 janvier 2008 correspondant au trafic téléphonique du mois de décembre 2007.
Elle a ensuite décidé que la société VERIZON FRANCE n’était pas fondée à prétendre que sa dette au titre du trafic téléphonique de décembre 2007 serait inférieure au montant de 276.690,41 euros TTC, somme qu’elle était elle-même chargée de calculer pour procéder au reversement en faveur de la société BUDGET TELECOM. Après avoir constaté que la société VERIZON FRANCE avait fait un paiement intermédiaire, la Cour d’appel de Paris a donc jugé que la créance de la société BUDGET TELECOM s’élevait à la somme de 230.307,37 euros TTC pour le trafic du mois de décembre 2007 et à la somme de 71.512,06 euros TTC pour le trafic du mois de janvier 2008, soit la somme totale de 301.819,43 euros TTC.
La Cour d’appel a en outre estimé qu’il n’était pas nécessaire d’analyser plus en avant les termes contractuels sur l’origine des appels téléphoniques puisque les factures avaient été établies conformément à la convention applicable, sans contestation véritable des parties.
La société VERIZON FRANCE s’est pourvue en cassation et dans un arrêt rendu le 30 mars 2016, la chambre commerciale de la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris le 19 septembre 2014, mais seulement en ce qu’il a condamné la société VERIZON FRANCE à payer à la société BUDGET TELECOM la somme de 230.307,37 euros au titre des sommes impayées pour le mois de décembre 2007.
La chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé que la Cour d’appel de Paris avait méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile en retenant que la société VERIZON FRANCE ne pouvait prétendre que sa dette au titre du trafic téléphonique de décembre 2007 pouvait être inférieure au montant qu’elle avait elle-même fixé, alors qu’elle n’avait pas répondu aux conclusions de la société VERIZON, qui soutenait qu’en application de l’article 6.4 alinéa 2 de l’avenant, elle était en droit de réviser à tout moment le reversement effectué en cas d’écart entre les sommes effectivement perçues et les sommes décomptées.
La société BUDGET TELECOM a régulièrement saisi la Cour d’appel de Paris par déclaration du 12 mai 2016.
Prétentions des parties
Par ses conclusions signifiées par RPVA le 02 février 2017, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, de leurs moyens et de leur argumentation, la société BUDGET TELECOM sollicite de la Cour de :
Vu les articles 1134, 1147 et suivant du code civil,
Vu les articles 15, 16 et 784 du code de procédure civile,
Vu les pièces produites au débat,
Réformer le jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 22 novembre 2011 en ce qu’il a débouté la société BUDGET TELECOM de sa demande de paiement de la somme de 230.307,37 euros TTC restant due au titre de la facture du 31 janvier 2008.
A titre principal,
constater le caractère infondé du refus de règlement de la facture du 31 janvier 2008,
condamner la société VERIZON FRANCE à payer à la société BUDGET TELECOM la somme de 230.307,37 euros correspondant aux sommes restant dues,
condamner la société VERIZON FRANCE à payer à la société BUDGET TELECOM les intérêts au taux légal sur ladite somme à compter de l’acte introductif d’instance et jusqu’à complet règlement,
A titre subsidiaire,
constater la responsabilité de la société VERIZON FRANCE,
condamner la société VERIZON FRANCE à payer à la société BUDGET TELECOM la somme de 230.307,37 euros à titre de dommages et intérêts,
condamner la société VERIZON FRANCE à payer à la société BUDGET TELECOM les intérêts au taux légal sur ladite somme à compter du présent acte introductif d’instance et jusqu’à complet règlement,
A titre infiniment subsidiaire,
condamner la société VERIZON FRANCE à payer à la société BUDGET TELECOM la somme de 152.450 euros à titre de dommages et intérêts,
condamner la société VERIZON FRANCE à payer à la société BUDGET TELECOM les intérêts au taux légal sur ladite somme à compter de l’acte introductif d’instance et jusqu’à complet règlement,
En tout état de cause,
ordonner la capitalisation des intérêts en application de l’article 1154 du code civil,
rejeter toute demande de la société VERIZON FRANCE,
condamner la société VERIZON FRANC à payer à la société BUDGET TELECOM la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
la condamner aux entiers dépens.
Sur le caractère étranger des appels litigieux,
La société BUDGET TELECOM soutient que, le 10 janvier 2008, la société VERIZON FRANCE lui a adressé une demande de facturation faisant mention d’appels nationaux et qu’elle ne peut donc plus prétendre que les appels litigieux seraient des appels en provenance de l’étranger. Elle affirme que les factures qu’elle a émises sur la demande de la société VERIZON FRANCE correspondent parfaitement au bon à facturer transmis par cette dernière fixant les communications à 2.358.144,7 minutes.
Elle assure que la société VERIZON FRANCE ne pouvait revenir sur son calcul ayant servi de base à la facturation qu’en cas de contestation par la société FRANCE TELECOM, laquelle n’est pas établie. Elle explique qu’en cas de contestation de la société FRANCE TELECOM, l’obligation de paiement de la société VERIZON FRANCE n’était en tout de cause suspendue que pendant 15 jours, durant lesquels les parties devaient trouver une solution.
Elle ajoute que la société VERIZON FRANCE conteste l’ensemble de la facture du 31 janvier 2008 et qu’il est tout bonnement impossible que tous les appels facturés proviennent de l’étranger. Elle explique que la société VERIZON FRANCE ne devait collecter que des appels provenant des boucles locales de la société FRANCE TELECOM, c’est à dire des appels nationaux. Elle rappelle ainsi que l’article 3.3 de l’avenant stipulait qu’ « à la date de signature du présent avenant, le service est accessible uniquement à partir de la boucle locale FRANCE TELECOM ».
Elle réfute la thèse de la société VERIZON FRANCE selon laquelle cette dernière serait obligée par l’ARCEP d’ouvrir le trafic depuis l’étranger. Elle explique que l’interdiction des discriminations dans l’accès aux services à valeur ajoutée n’empêche pas qu’un numéro SVA ne soit accessible qu’à partir d’une ligne abonné à un opérateur déterminé. Elle explique que le caractère non-discriminatoire de l’accès aux services à valeur ajoutée implique seulement que soit donner un accès, par l’exploitant du numéro, aux opérateurs de départ qui en font la demande. Or elle rappelle qu’elle n’a reçu aucune demande en ce sens. Elle ajoute que le règlement de l’ARCEP exclut, en tout état de cause, de son champ d’application les opérateurs étrangers.
Elle soutient en outre que la société VERIZON FRANCE ne produit aucun document justifiant le refus de la société FRANCE TELECOM d’effectuer les reversions en raison du caractère étranger des appels. Elle explique que la société VERIZON FRANCE ne fournit d’ailleurs aucun document susceptible d’établir un relevé quantitatif des appels en provenance de l’étranger qu’elle invoque.
Elle prétend enfin que la société VERIZON FRANCE avait les moyens de détecter les appels en provenance de l’étranger et de les bloquer.
Sur les clauses limitatives de responsabilité,
La société BUDGET TELECOM soutient que l’article 9.2 de l’avenant n’a vocation qu’à rendre impossible une mise en cause de la société FRANCE TELECOM, et par ricochet de la société VERIZON FRANCE, au titre de la prestation de facturation pour compte de tiers. Or elle rappelle que son action ne vise pas à rechercher la responsabilité de la société FRANCE TELECOM ou de la société VERIZON FRANCE au titre d’une mauvaise facturation. Elle explique qu’elle reproche seulement à cette dernière d’avoir collecter des appels en provenance de boucles locales autres que la boucle locale de la société FRANCE TELECOM.
Elle prétend de même que la société VERIZON FRANCE ne peut se prévaloir de l’article 10 de l’avenant qui limite les condamnations de cette dernière à la somme de 76.225 euros. Elle rappelle en effet que la société VERIZON FRANCE a manqué à son obligation essentielle de ne collecter que des appels émis à partir des boucles locales de la société FRANCE TELECOM. Elle estime que la société VERIZON FRANCE a ainsi commis une faute lourde qui doit rendre sans effet la clause limitative de responsabilité de l’article 10 de l’avenant.
Par ses conclusions signifiées par RPVA le 23 janvier 2017, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, de leurs moyens et de leur argumentation, la société VERIZON FRANCE sollicite de la Cour de :
Vu les articles 9, 699 et 700 du code de procédure civile,
Vu les articles 1134, 1147 et 1315 du code civil,
Vu les articles 32-1 et suivants, 44 et suivants du code des postes et des télécommunications électroniques,
Vu les directives 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques et n°2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009,
confirmer le jugement du 22 novembre 2011 en ce qu’il a débouté la société BUDGET TELECOM de l’intégralité des demandes, fins et prétentions et l’a condamnée au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
débouter la société BUDGET TELECOM de l’intégralité des demandes, fins et prétentions formées tant à titre principal que subsidiaire
Subsidiairement,
faire application des clauses exclusives et limitatives de responsabilité et limiter toute condamnation de a société VERIZON FRANCE à la somme de 76.225 euros après exclusion des pertes de revenu et des pertes de chance,
En toute hypothèse,
condamner la société BUDGET TELECOM au paiement de la somme supplémentaire de 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
condamner la société BUDGET TELECOM aux entiers dépens de première instance et d’appel par application de l’article 696 du code de procédure civile.
Sur le droit à contestation de la société VERIZON FRANCE,
La société VERIZON FRANCE soutient que les factures émises par la société BUDGET TELECOM ne sont établies que sur la base de données de trafic brutes, livrées instantanément par la société FRANCE TELECOM. Elle assure que ces données de trafic ne révèlent rien de l’origine des appels. Elle souligne l’existence d’un laps de temps entre l’acheminement des données vers la société BUDGET TELECOM et la facturation de l’appelant donnant lieu à une éventuel paiement de la société FRANCE TELECOM et donc à un reversement. Or, elle explique que les appels litigieux ont été livrés à la société FRANCE TELECOM par des opérateurs de boucles locales tiers si bien que cette dernière ne lui a finalement rien reversé. Elle affirme avoir donc immédiatement informé la société BUDGET TELECOM en lui demandant que soient constitués les avoirs correspondants.
Elle rappelle que si la société FRANCE TELECOM ne reçoit aucune somme alors ni l’opérateur de collecte ‘ elle-même ‘ ni la société BUDGET TELECOM ne peuvent percevoir de reversement. Elle prétend ainsi que la cause juridique et financière du droit à reversement de la société BUDGET TELECOM réside dans le paiement effectué par les utilisateurs finaux, d’abord à leur opérateur-départ, puis par ce dernier à l’opérateur de collecte. Elle ajoute que la rémunération perçue par chacun des maillons de la chaîne SVA provient d’une source unique : le prix effectivement payé par l’utilisateur.
La société VERIZON FRANCE soutient qu’elle pouvait corriger rétroactivement et à tout moment le reversement qui avait été effectué puisque l’origine de ce reversement était totalement hors de son contrôle et que la société FRANCE TELECOM ne se rendait compte des impayés qu’après un certain temps. Elle cite l’article 6.4 de l’avenant qui stipule que « en cas d’écart sur le montant effectivement perçu, VERIZON pourra corriger le reversement effectué et le déduire d’un reversement ultérieur ».
Sur l’absence de faute contractuelle de la société VERIZON FRANCE,
La société VERIZON FRANCE affirme qu’elle n’était nullement tenue d’interdire les appels en provenance de l’étranger. Elle explique qu’elle n’a pour mission contractuelle que d’acheminer les appels qui lui sont livrés par la société FRANCE TELECOM vers les équipements de la société BUDGET TELECOM. Elle soutient que les reversements ne font pas partie du service qu’elle fournit et qu’elle n’est donc pas soumis au respect des exigences posées par le contrat concernant lesdits reversements.
Elle prétend qu’elle était ainsi obligée d’acheminer tous les appels livrés par la société FRANCE TELECOM. Elle cite à ce propos une décision de l’ARCEP du 16 avril 2007 qui précise que « le rôle de l’opérateur de collecte est d’assurer que l’ensemble des boucles locales aient accès au service du fournisseur de services qui fait appel à lui ». Elle soutient donc qu’elle était soumise à un principe d’acheminement des appels sans considération de leur nature ou de leur origine. Elle explique que l’avenant ne contient aucune disposition indiquant que les appels ne devaient provenir que de la boucle locale de la société FRANCE TELECOM. Il explique que l’avenant lui imposait seulement de ne collecter les appels qu’auprès de la société FRANCE TELECOM.
Elle soutient qu’elle a informé la société BUDGET TELECOM dès le mois d’août 2007 que des opérateurs internationaux pourraient acheminer les appels à destination des numéros qu’elle lui mettait à disposition et que ces appels internationaux ne donneraient lieu à aucun reversement. Elle assure que la société BUDGET TELECOM n’a pas formulé de critique à l’encontre de cette situation avant le mois de janvier 2008.
Sur l’absence de responsabilité de la société VERIZON FRANCE,
La société VERIZON FRANCE soutient que le litige concerne uniquement la composante financière de l’opération de SVA à savoir le reversement. Or elle rappelle que l’article 9.2 de l’avenant prévoit que le client renoncera à tout recours à son encontre ou à l’encontre de la société FRANCE TELECOM au titre de la facturation et des reversements.
De même elle invoque l’article 10.1 de l’avenant qui limite sa responsabilité, en cas de violation des dispositions du contrat, à la somme de 76.225 euros.
SUR CE ;
Considérant que VERIZON a adressé le 10 janvier 2008 à BUDGET TELECOM , en application de l’article 6.4 de l’avenant du 6 juin 2007, un récapitulatif des appels à coûts partagés pour la période du 1er décembre 2007 au 31 décembre 2007 d’un montant de 231 346,50 euros pour servir de base à la facturation envoyée par BUDGET TELECOM,
que l’article 6.4 précise que les parties conviennent que le calcul de reversement par application de l’article 6.3 incombe à VERIZON qui utilise à cet effet ses outils, sur la base des données qu’elle a enregistrées et des sommes effectivement perçues de France Telecom,
qu’en conséquence, seules les sommes perçues par France Telecom peuvent faire l’objet d’un reversement à Budget Telecom, la notion de reversement impliquant qu’un versement initial ait été effectué ;
Considérant que le litige ne porte plus que sur le paiement de la somme de de 230.307,37 euros au titre des sommes impayées par VERIZON pour le mois de décembre 2007,
qu’en application de l’article 1315 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, c’est celui qui réclame le paiement d’une obligation qui doit la prouver,
que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les appliquent et doivent être exécutées de bonne foi,
qu’en l’espèce, la société VERIZON FRANCE conteste l’ensemble de la facture du 31 janvier 2008 au motif que les appels facturés proviennent de l’étranger et que la société FRANCE TELECOM aurait refusé d’effectuer les reversions en raison du caractère étranger des appels,
que la société VERIZON FRANCE soutient également qu’elle avait obligation d’ouvrir le trafic depuis l’étranger selon la réglementation de l’ARCEP,
que la société VERIZON ajoute qu’elle ne pouvait corriger rétroactivement et à tout moment le reversement qui avait été effectué puisque l’origine de ce reversement était totalement hors de son contrôle et que la société FRANCE TELECOM ne se rendait compte des impayés qu’après un certain temps, citant à l’appui de son argumentation l’article 6.4 de l’avenant qui stipule que « en cas d’écart sur le montant effectivement perçu, VERIZON pourra corriger le reversement effectué et le déduire d’un reversement ultérieur »,
qu’elle rappelle en outre que le litige concerne uniquement la composante financière de l’opération de SVA à savoir le reversement et qu’en application de l’article 9.2 de l’avenant le client renoncera à tout recours à son encontre ou à l’encontre de la société FRANCE TELECOM au titre de la facturation et des reversements,
que de même elle invoque l’article 10.1 de l’avenant qui limite sa responsabilité, en cas de violation des dispositions du contrat, à la somme de 76.225 euros ;
Considérant qu’il est établi que la société VERIZON a informé la société BUDGET TELECOM dès le 09 août 2007(par courrier recommandé avec accusé de réception), que des opérateurs internationaux pourraient acheminer les appels à destination des numéros qu’elle lui mettait à disposition et que ces appels internationaux ne donneraient lieu à aucun reversement dans les termes suivants : « il est possible que certains opérateurs internationaux acheminent les appels à destination des numéros mis à votre disposition par VERIZON. En application de l’avenant Shared cost entre votre société et VERIZON ( cf § 3.7, 6.3 et 6.4), ces appels d’origine internationale ne donneront lieu à aucun reversement à votre attention. En effet,conformément aux conditions en vigueur avec France Telecom (‘) France Télécom ne reverse à VERIZON aucun montant au titre de l’accès à ces services depuis l’étranger. »,
mais considérant que la société VERIZON a elle-même délivré à Budget Telecom le 10 janvier 2008 une facture d’un montant de 231 346, 50 euros pour la période de 1er décembre 2007 au 31 décembre 2007,
qu’elle refuse de payer cette facture au motif qu’elle est constituée uniquement d’appels provenant de l’étranger et produit pour le justifier un listing d’appels téléphoniques accompagnés de noms de pays, sans date et non circonstancié,
qu’elle ajoute qu’elle ne peut être tenue à reverser un montant qu’elle n’a pas perçue de France Telecom,
mais considérant qu’aucun élément n’est produit concernant le montant qu’aurait versé France Telecom à VERIZON concernant Budget Telecom sur cette période permettant d’établir un écart sur le montant effectivement perçu alors qu’il ne paraît pas vraisemblable qu’aucun appel provenant du territoire français n’ait été facturé par France Telecom,
qu’il n’est pas plus démontré de contestation de la part de France Telecom ou de justificatif de France Telecom justifiant du non versement au titre desdites communications,
qu’ainsi, l’article 6.4 qui stipule « En cas de contestation, de France Telecom sur le montant de la facture ou d’écart sur le montant effectivement perçu, VERIZON pourra corriger à tout moment le reversement effectué et le déduire d’un reversement ultérieur » ne peut trouver application ,
que faute de justifier de ces éléments, VERIZON ne peut légitimement refuser le reversement qu’elle a elle-même calculé et établi selon la convention applicable,
qu’elle ne peut pas se réfugier derrière son obligation d’ouvrir le trafic depuis l’étranger selon la réglementation de l’ARCEP alors qu’elle a bloqué les appels venant du Canada le 8 janvier 2008 dès que la société BUDGET TELECOM lui a signalé des anomalies ;
Considérant que la société VERIZON oppose en outre des clauses de limitation de responsabilité résultant des articles 9.2 et 10 du contrat,
qu’en l’espèce, l’article 9.2 ayant vocation à rendre impossible une action en responsabilité à l’encontre de France Telecom, ne peut être opposable,
que l’article 10.2 vise un préjudice indirect alors qu’il s’agit d’un préjudice direct dont BUDGET TELECOM se prévaut et d’une responsabilité contractuelle et non délictuelle pour l’article 10.2,
qu’en revanche l’article 10.1 qui stipule : « Si UUNET (VERIZON) devait être déclarée responsable des dommages directs causés du fait d’une violation des dispositions du présent Contrat, les conséquences financières de sa responsabilité éventuelle seront limitées à 76 225 euros pour chaque événement particulier ou série d’événements de même nature au cours des douze derniers mois », est opposable à la société BUDGET TELECOM s’agissant d’une inexécution du contrat par VERIZON et non d’une faute lourde équipollente au dol,
qu’en conséquence, il convient d’infirmer le jugement entrepris et de condamner la société VERIZON à payer à la société BUDGET TELECOM la somme de 76 225 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2009 date l’assignation devant le tribunal de commerce de Paris ;
Considérant qu’il y a lieu à ordonner la capitalisation des intérêts en application de l’article 1154 du code civil ;
Considérant que l’équité impose de condamner la société VERIZON à payer à BUDGET TELECOM la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS ;
La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
CONDAMNE la société VERIZON FRANCE à payer à la société BUDGET TELECOM la somme de 76 225 euros avec les intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2009 date l’assignation devant le tribunal de commerce de Paris ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts en application de l’article 1154 du code civil ;
CONDAMNE la société VERIZON FRANCE à payer à la société la société BUDGET TELECOM la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
LA CONDAMNE aux entiers dépens conformément à l’article 699 du code de procédure civil.
Le greffier Le président